Pour qui [S]ont Ces {S}erpentS ? { PV Cocci }

Un feulement, bref mais agressif. Les serpents s'étaient trop rapprochés au goût du solitaire bicolore qui leur avait craché dessus avec colère. Après cela l’intrus recula et fixa d'un air pensif les pierres où plusieurs corps écailleux étaient dressés les crochets dévoilés et le venin perlant. Ses yeux de deux teintes différentes parcoururent l'étendue des Rochers aux Serpents mais n'en trouvant pas la fin, revinrent en arrière, par le côté même où s'était aventurée Nuage de la Coccinelle. Le mâle indiqua l'endroit d'un signe de tête pour montrer son idée à l'apprentie avant de la formuler. N'étant pas idiote toute de même la rouquine le fixa et attendit qu'il formule son idée à haute voix, soulagée que l'air perdu ai quitté le visage aux fins traits de l’inconnu pour laisser place à une concentration et une détermination de feu.
Le temps leur manquait et les précieuses secondes s'envolaient, telles des oiseaux que l'on libère de leur cage.

« Par ici, ça devrait le faire. Faut juste grimper là dessus. J'y vais et je t'aide en cas d'embrouille, ok ?»

Jetant un regard en biais à la petite apprentie le solitaire s'élança. Il semblait sûr de lui, bondissant - ou ne devrais - je pas plutôt dire volant ? - de roc en roc, ses pattes ne touchant les rocs que le temps d'un clignement de paupière. Les reptiles crachèrent, sans doute pris au dépourvu par ce manège soudain, ce qui eut pour effet de crisper encore un peu plus la femelle. Elle clôt les yeux, priant pour que son heure n'ai pas encore sonné. Elle regrettait déjà d'être sortie comme une ignorante de l'enceinte protectrice de son camp, là au moins il n'y avait pas d'étranges bêtes furieuses et mortellement venimeuses. Si elle y passait, la novice n'aurait plus le loisir de s'évader dans le labyrinthite de son imagination pour rêver d'une vie meilleure, ni de sentir de vent plein de promesses caresser sa fourrure, ni ... Ni rien d'autre. Elle aurait juste le loisir de mourir. Oui, mourir tout simplement, mais dans d'atroces et horribles souffrances. Alors non elle n'avait pas vraiment envie de rester là, plantée comme un arbre, à attendre la mort qui lui tendait ouvertement ses squelettiques et sombres bras, brulant de l'emporter dans l'Au Delà.

« Va y. »

Juste un instant, rien qu'une seconde le souffle lui manqua et la panique la saisit. Tout avait semblé si simple, pour lui. Trois petits bonds et s'était fait. Trois petits tours et il était tiré d'affaire, lui. Tellement simple, tellement enfantin cela paraissait, bien camouflé. Le jeu était fourbe. La difficulté s'était cachée des yeux des deux chats et pourtant l'apprentie la sentait, s'en était presque palpable. Elle était là, Nuage de la Coccinelle en avait pleinement conscience. Planquée, en embuscade, attendant tranquillement que l'ignorant, qui ne se doutera de rien jusqu'au tout dernier moment, tombe dans ses griffes acérées.
Elle le fit sans vraiment en avoir conscience. Soute doute était - ce son instinct qui avait agit de lui même, sentant que l'esprit de la petite reine rousse perdait pied. Oui, effectivement ; un, deux, trois et puis s'en vont. Trois petits bond et s'en était fini.
Alors, oui alors, seulement une fois que les quatre pattes, tremblantes, de la femelle furent posée sur le sol, meuble, de l'orée de la forêt. Seulement à cet instant elle put respirer librement et son cœur se remit à battre, à un rythme raisonnable. Nuage de la Coccinelle réalisa alors à quel point la vie était merveilleuse et méritait pleinement d'être vécue, elle se rendit compte combien elle tenait aux gens qui l'entouraient ; même si certains auraient très bien vécut sans la présence de la petite femelle au camp. Chose magnifique, unique que la vie, n'est - il pas ?

« Merci. »

Reconnaissante. Elle l'était ô combien.
Son ton tremblait quelque peu mais elle se fichait d'avoir l'air faible, peu lui importait. Ses pattes cédèrent sous la fatigue, le soulagement, et la peur mêlées. Sa truffe rose fit une agréable rencontre avec le sol, mélange de sable et de terre fraîche, et la petite inspira avec délectation les parfums boisés. Les chuintements lui parvenaient encore mais plus sourd et éloignés qu’auparavant.
Qu'importe. Les cœurs des deux félins battaient encore et peu importait le reste, non ?

« De rien. »

Les mots semblaient simples, presque bêtes et pourtant il n'en était rien. Aux oreilles de la novice ces deux petits bouts de rien du tout sonnaient parfaitement bien comme s'il avait été prévu, depuis le début, que les choses se dérouleraient ainsi. Un silence avait précédé les paroles de l'étranger, ce qui avait permit à la petite femelle de laisser le temps à son esprit de remettre pied sur terre.

« Peut être qu'on peut se présenter, maintenant. Moi c'est Karneval, et toi ? »

Le ton du mâle bicolore était plutôt amical mais pourquoi ... Pourquoi ces questions ? Oui, il l’avait sauvé et puis après ? Elle ne savait rien de lui … Rien du tout. Peut – être le solitaire était dangereux pour son Clan, qui sait ? Et qui ne sait pas … Sa reconnaissance était toujours là, bien sûr, mais son devoir devait passer avant tout ; la jeune chatte devait le chasser, ou au moins lui demander de partir poliment, à la limite. Si elle ne faisait rien elle passerait très sûrement pour une traitresse et bien que son jeune âge puisse quelque peut l’excuser, la rouquine connaissait les règles et savait qu’on ne plaisantait pas avec. Elle entendait déjà les railleries de ses camarades de Clan et frissonna à cette pensée. Mais que pouvait – elle bien faire, en fin de compte … Le matou qui lui faisait face était largement plus grande que la petit chatte et malgré sa fine carrure on pouvait deviner les muscles qui jouaient sous son pelage. Si la rencontre, bien que partie sur le bon pied, venait à mal tourner Nuage de la Coccinelle n’en sortirait pas triomphante. Non. Il fallait le jouer à la ruse, à l’habilitée.
Alors, avec la fierté qui lui restait et ses esprits revenus, l’apprentie se redressa et sans même prendre le temps de débarrasser son pelage de la poussière toisa d’un regard si se voulait assuré l’intrus, car on pouvait lui donner ce nom désormais.

« Je m’appelle Nuage de la Coccinelle, apprentie du Clan du Tonnerre. Et je suis dans le regret de t’annoncer que tu te trouves sur nos terres … Et qu’il va te falloir les quitter, au plus vite. »

Avait – elle peur ? Oh oui. Mais elle n’en montrait pas le moindre symptôme, bombant la poitrine pour diminuer sa petitesse, les poils hérissés pour camoufler sa gêne. Elle avait parlé sur un ton neutre mais lourd de menaces, toute amitié oubliée. La minette n’avait rien contre lui au fond mais elle n’avait pas le choix.
Elle n’avait jamais le choix.

« Désolé ... »

Soupir.
C'était parti tout seul, elle n'avait pas fait attention. Ses paroles précédentes l'avaient auto écœurée. Elle n'était pas du genre méchante, et n'aimait pas parler aussi durement aux autres même à ceux qu'elle ne connaissait aucunement. La novice lui lança un regard désolé mais sa résolution de le faire quitter le territoire du Tonnerre, maintenant que tout danger était écarté, n'avait pas changé. Malgré elle.