(Lunar Pod) Crapaud baveux (avec Petit Feulement) - end

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La patte gelée restait levée, exposée à l'air ambiant et frisquet de cette pouponnière de fin d'automne, tandis qu'un chaton noir claquait la joue de son légitime propriétaire. Cela souffla un peu le chaton crème, qui n'était pas encore vraiment habitué à se battre pour de vrai, mais ça le réchauffa aussi d'une certaine façon : une cuisante sensation à mi-chemin entre la honte et la colère envahissait son petit corps.
"Connait ta place le crapaud baveux! Tu m'respecte, sinon j't'arrache les moustaches!"

La patte sombre du petit prince était toujours à portée, la patte claire du petit crapaud était toujours levée... Elle s'abattit sèchement. Du moins, c'était l'intention. Mais Patte Gelée n'avait pas du tout l'habitude de donner des coups avec force. Du coup, en réalité, c'était plutôt comme s'il déposait simplement sa patte sur celle du prince, et appuyait un peu pour prolonger le contact.

Le contraste de chaleur était saisissant. Il était sûr que l'effet de surprise était avec lui.

" Suis Patte Gelée ! Sus au méchant ! " s'exclama-t-il, en imitant, assez mal, un guerrier qui feulait des menaces terribles.

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La patte du petit chaton crème se déposa presque sur la sienne, gelée. Petit Feulement recula d'un pas, surpris de la sensation froide si inopinée.

"Suis Patte Gelée ! Sus au méchant !"

Il portait bien son nom le morveux. Plus outré encore de ne pas voir le plus jeune s'aplatir sur son chemin et s'excuser d'avoir dérangé monsieur le prince, le gros chaton sombre cracha à nouveau, les oreilles plaquées sur le crâne. Il fit un bon en avant et bouscula d'un coup d'épaule son camarade de tanière avant d'abattre violemment ses grosses pattes sur son corps dodue d'enfant de lait.

"T'es pathétique! Patte Inutile c'est comme ça que tu devrais t'appeler!"

Il prit un malin plaisir à le maintenir à terre et à se dresser bien haut au-dessus de lui. Sa queue imita le reste de son corps, seul son regard ambré se dirigeait vers ses pattes, vers sa victime. Il se sentait comme un roi, un guerrier victorieux, bien qu'il n'y est pas de quoi être fier à martyriser plus petit que soit.

"Moi, j'suis Petit Feulement, retiens mon nom et craint le car j'suis le guerrier le plus féroce de ce clan!"

Miaula t-il alors fièrement, bombant le torse. Il était aussi sûr de lui qu'un redoutable fauve.

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Le prince cracha. C'était tellement interdit et impardonnable pour le frileux de se tenir comme lui qu'il resta hébété, sur le coup. Devait-il vraiment suivre cet exemple, pour être aussi grand et fort que Feuille de Houx, son frère et guerrier de référence ? Le chaton était tout confus. Feuille de Houx crachait-il sur ses ennemis, lui aussi ? Ces veines délibérations empêchèrent le petiot de songer à esquiver le coup du prince.

" T'es pathétique! Patte Inutile c'est comme ça que tu devrais t'appeler ! " lança le noiraud, venimeux.

Pathétique ? Ca voulait dire quoi ? Visiblement, c'était très différent de "trop fort" ou de "génial". Patte Gelée choisit d'intégrer ce mot à son répertoire de mots à ne répéter sous aucun prétexte devant sa mère. Et de prendre un air fâché, tandis que l'autre morbac se mettait sur lui, la queue levée.

" Moi, j'suis Petit Feulement, retiens mon nom et craint le car j'suis le guerrier le plus féroce de ce clan ! "

"Feulement", c'était trop long. Patte Gelée préférait "Feufeu". Il songeait à se retourner, pour étaler le vainqueur de cette confrontation de marmots par terre, mais lorsqu'il commença à mettre un peu de force dans ses pattes, une voix familière survint. Une voix qui lui fit aussitôt prendre conscience qu'il avait envie de retourner dormir contre sa mère, mais qui exprimait pourtant le plus glacé des reproches :

" Patte Gelée, c'est bon, t'as perdu le jeu, alors tiens-toi bien et ne t'obstines pas. T'as vu comme t'es sale ?
- Mais... Mais... Il m'embête ! Et il crache et il dit des gros mots ! " pleurnicha le petit, qui trouvait que tout cela était bien injuste.

Sa mère n'aimait pas qu'il lui réponde sur ce ton, il le savait très bien. Il se força à se taire, et à ne pas réciter à voix haute les dix milliards d'arguments extrêmement irréfutables que générait sa petit tête en cet instant. Se dégageant doucement des pattes de Feufeu, il lui demanda pardon de son ton le plus scolaire, mais continuait de regarder sa mère. Dès qu'elle fit un signe d'assentiment, il trottina jusqu'à elle, oubliant peu à peu ce qui venait de se produire.

" Tu comprends, Petit Feulement ? Il est encore petit et c'est une vraie tête de mule, mais je ne m'inquiète pas trop. Ils sont bien entourés, lui et son frère ! ", dit-elle pendant ce temps, en regardant le chaton noiraud par-dessus son dos. Cela rendait Patte Gelée un peu jaloux, mais ce n'était pas le moment de l'avouer. Il eut droit à une toilette de sa mère, qui nettoya le pelage qu'il avait maculé de bave et de terre, et c'était si agréable qu'il ne put retenir un léger ronronnement. Que sa mère désapprouvait, mais n'avait pas envie de combattre, pas pour l'instant.

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◊ Meneur

" Patte Gelée, c'est bon, t'as perdu le jeu, alors tiens-toi bien et ne t'obstines pas. T'as vu comme t'es sale ?
- Mais... Mais... Il m'embête ! Et il crache et il dit des gros mots ! "

L es oreilles de Petit Feulement se tournèrent vers l'origine du son, suivi de sa tête. Ses yeux se posèrent alors sur la forme féline de Chant des Coquelicots. C'était la mère de Patte Gelée, il la reconnaissait et il était bien content qu'elle réprime sa victime, il se sentait encore plus fier, encore plus puissant, encore plus royal. Il finit par se décaler, laissant le plus jeune s'échapper de son emprise pour rejoindre sa mère. C'est ça! Qu'il aille courir dans les pattes de sa maman!

"Tu comprends, Petit Feulement ? Il est encore petit et c'est une vraie tête de mule, mais je ne m'inquiète pas trop. Ils sont bien entourés, lui et son frère !"

Le gros chaton sombre se déplaça vers la chatte et son enfant, miaulant d'un air hautain:

" Ouais, bah il devrait apprendre à respecter ses aînés. "

Et c'était lui qui prononçait ces mots. Lui qui n'avait que très peu de respect pour les adultes, à l’exception de sa mère bien évidemment.

" Surtout quand on est faible. "

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Enfin blotti contre sa mère, Patte Gelée s'irritait de sentir que Léléo n'était pas le seul à se rapprocher d'eux. C'était le chaton à Nono, qui voulait encore l'embêter ?

" Ouais, bah il devrait apprendre à respecter ses aînés.
- Patte Gelée ? T'entends les bons conseils que te donne Petit Feulement ? Profites-en, crois-moi, tous les chatons ne sont pas aussi sages, à son âge ! " rétorqua Chant des Coquelicots avant de commencer sa toilette, toute contente. Patte Gelée était raide comme un piquet, à cause de l'énervement qu'il ressentait alors. Pourquoi sa mère ne pouvait pas simplement s'occuper de lui et laisser tranquilles les autres chatons ?

Son manque évident de bonne foi agaça Chant des Coquelicots, qui lui donna un coup de patte sec sur le dos, pour le corriger. Il comprit qu'il fallait qu'il se tienne bien, et essaya de se convaincre qu'après tout, ce n'était pas désagréable, qu'elle le nettoie en lui offrant son flanc chaud et douillet.

" Surtout quand on est faible. " entendit ensuite le petit, ce qui hérissa ses poils qui n'étaient pas encore léchés.

Il reçut un autre coup, plus sévère, sur l'épaule. Incroyable. A croire que Chant des Coquelicots n'avait même pas entendu que Feufeu venait de l'insulter. Ou qu'elle n'avait pas l'intention de le défendre. Patte Gelée retint encore une fois ses larmes. Il n'avait plus le droit, à son âge, de pleurer devant sa maman.

" Petit Feulement, n'oublie pas de passer le bonjour à ta maman ! " lança finalement la reine d'un ton joyeux. Alors qu'elle aurait pu directement s'adresser à Fleur Noire, qui rejoignait précisément la pouponnière. Et puis les reines, dans cette pouponnière, elles passaient bien vingt heures par jour ensemble... Alors si elles n'avaient pas le temps de se dire bonjour entre elles...

Spoiler:

◊ Meneur

"Patte Gelée ? T'entends les bons conseils que te donne Petit Feulement ? Profites-en, crois-moi, tous les chatons ne sont pas aussi sages, à son âge !"

Petit Feulement posa un regard victorieux sur Patte Gelée lorsque ce dernier se fit corriger par sa mère. Il prenait un malin plaisir à se qu'on lui jette des fleurs, être sous les feux des projecteurs. Sa queue bien droite s'ondulait légèrement tandis qu'il prenait une posture toujours plus fière.

"Petit Feulement, n'oublie pas de passer le bonjour à ta maman !"

L'enfant dodu tourna la tête lorsqu'il sentit l'odeur de sa mère pénétrer la tanière. Le chaton sombre ne prit même pas le temps de répondre à Chant des Coquelicots avant de trotter vers Fleur Noire et de la saluer en se frottant à sa patte. Il lança un dernier regard arrogant au chaton crème et se dirigea dans son coin avec la reine. Petit Feulement se pressa contre son ventre chaud et se roula en boule en ronronnant faiblement, prêt à faire une petite sieste, qu'il jugeait, bien méritée.

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