Un ciel rosé et gris ~ libre

Le ciel était beau ce matin. Rosé et gris, le soleil éparpillait sa lumière sur les nuages de pluie. Une tasse de chocolat chaud à la main, accoudé à ma fenêtre je regardais l’extérieur. La vie continuait, le monde bougeait si vite que je ne le voyais même pas formuler son tour de magie. Ma vie, elle, s’était ralenti au moment où Lukas s’en est allé. Il n’avait laissé derrière lui que son odeur et ses livres. J’avais encore quelques-unes de ses affaires chez moi. Je ressentais cette boule d’émotions dans mon corps qui ne demandait qu’à sortir, mais rien. Je n’évacuais rien du tout. Je voulais hurler, descendre et paraître fou. Mais non. Je restais de marbre. Un mur. Lukas avait disparu, me laissant seul ici, à regarder le ciel du matin sans avoir fermé l'oeil de la nuit. Néo se glissa entre mes pieds, se frottant à mes jambes. Ce petit chaton ressentait-il ce que je m’efforçais à cacher ? J’avais abandonné la Lune Rousse. Ils étaient mauvais et je n’étais plus un suiveur en quête d’économie, j’étais devenu ce cœur joyeux, à la recherche de l’affection dont il était drogué. Il tomba de haut, lorsqu’il n’y eu plus rien. Pendant un temps, même les sourires et la joie de Kitty ne me réconfortait plus. Je ne pleurais pas, je restais là et je regardais. Je montrais mon masque, c’était un mur entier qui recouvrait ma personne. Mais ce matin-là, le ciel rose et gris, le petit chat ronronnant à mes côtés… je m'effondrai. Lâchant ma tasse, elle se brisa, éparpillant quelques gouttes qu’il restait dedans. Néo dans un cracha parti en courant. Et moi, je tombai. J’avais l’impression que cette chute serait infinie. Qu’elle continuerait encore et encore… Je n’avais pas fais de malaise, j’étais juste lâché. Les mains sur les yeux, je m’exprimais enfin. Après des mois et des mois, je montrais enfin ma peine. Mon cœur se serrait, et mon visage était devenu un fleuve. Je ne pensais plus. Je ne voyais plus. Dehors, les rayons chauds du soleil commencèrent à se poser sur moi. Je n’en voulais pas bien sûr, je ne voulais que l’ombre pour cacher ce torrent qui se déversait de mes yeux. Je ne disais rien. Tout était silencieux. Je me recroquevillais de plus en plus, tant mon corps et mon cœur n’étaient que douleur. Il s’en est allé. Il est parti sans rien me dire, il s’est enfui, il est parti sans même me prévenir. Je voulais hurler, taper sol, faire semblant d’être fou. Mais rien. Je ne faisais que pleurer, devenant plus petit encore. La douleur me broyait l'estomac. La douleur me déchirait le cœur. J’avais l’impression de n’être plus rien de vivant. Plus rien de bon.

Pour moi c’était des heures, mais en réalité ce n’était que des minutes. Mes pleures étaient devenus lent. Je sentais le souffle de Néo sur mon visage. J’enlevais mes mains de mes yeux un instant. La lumière m’éblouit tant je n’y étais plus habitué. Ma vue était encore brouillée et flou. Je ne voyais plus, mais le chat oui. Je ne voyais plus son regard. Mais j’entendis son miaulement. Il me léchait le front vigoureusement, tout en miaulant. Je me relevai en douceur, pris un mouchoir pour me moucher et essuyer mes larmes. Le petit chat me regardait avec des yeux immenses. Je lui adressai un sourire malheureux. Il grimpa sur mes jambes pour être plus proche de mon visage encore. Il miaula une dernière fois avant de se frotter à moi. Il ronronnait si fort que je n’entendais plus mes reniflements. D’une main encore humide, je caressais la tête de l’animal. Il se leva rapidement sur ses pattes arrière pour se frotter contre ma barbe. Mon sourire devient plus doux, plus heureux, mes larmes étaient sèches.

« Petit Néo… tu dois être le chat le plus merveilleux du monde. J’ai de la chance de t’avoir. »

Et pour réponse, le chat roucoula, posa ses pattes avant sur mon épaule, comme pour me faire un câlin. Je pris l’animal dans mes bras, soulagé de cette étreinte. Je tournai ensuite légèrement la tête vers la fenêtre. Le ciel était jaune et gris cette fois. Un rayon de lumière entrait dans mon appartement et nous éclairait mon chat et moi. J’y voyais à présent un espoir nouveau, j’y voyais un lieu où je voulais vivre, j’y voyais un lieu où je n’avais plus à me morfondre, où je pouvais vivre ma vie au jour le jour et être heureux. J’y voyais un renouveau. J’y voyais un espoir. Je regardais de nouveau mon chat, les yeux pleins d’affection. Voilà des semaines et des mois que la peine m’avait écrasé le cœur et en ce simple instant, avec ce petit être, tout était revenu. Je me relevais en douceur, gardant le matou dans mes bras. Je le posai sur son arbre à chat. En allant dans la cuisine, j’attrapai une pelle et une balayette, je ramassai les bouts de verres. Je les jetai. Je pris mon manteau, je mis mes chaussures, et je me jetai dans le monde extérieur. J’avais décidé de me montrer, j’avais décidé de sortir le jour, là où les gens rient et sourient. Et non le soir, là où les gens se cachent et se meurent.