Call It Luck, I'll Pretend It's Talent - end

Call It Luck, I'll Pretend It's Talent

PV WAFFLE

Le tigré sembla peut-être rapetissé lorsqu'elle s'avance vers lui, aussi sombre qu'une nuit sans lune, mais lorsqu'elle ouvrit la gueule pour le provoquer, il prit mouche aux insultes. Feulant, battant de la queue, il s'agita, comme outré par de telles accusations. Étoile de Suie avait vu semblable performance chez les guerriers adverses, dont la culpabilité était presque aussi présente que s'ils avaient une queue de souris dépassant de la gueule. Mais chez le gamin, l'outrage semblait réel, comme si elle avait réellement offensé son orgueil en l'accusant ainsi d'un tel méfait. Comme s'il ne commettait pas déjà une grave faute en venant sur leur territoire.

─ Je ne te permets pas, je ne vole pas de gibier ! J'ai tout ce qu'il faut chez moi !

Ah, oui, certes, celui-là venait d'un repère de bipèdes, dorloté par ses deux-pattes, pas d'un trou perdu dans la forêt en quête de nourriture. Peut-être qu'il avait raison alors, qu'il n'avait jamais chassé. Il ne savait probablement pas comment, de toute façon. Il devait bien en avoir la musculature, il n'avait pas l'air trop chochotte, mais d'où aurait-il pu apprendre des techniques de chasse ou de combat, logé dans son petit paradis. Et pourtant, ça ne l'empêcha pas de braver toute logique et de brandir ses griffes vers elle, comme s'il avait la moindre chance à lui défoncer la gueule, lui, ce blanc-bec, encore attaché aux tétines de sa mère.

Il s'élança vers elle, croyant peut-être que c'était à coup de crocs qu'il allait défendre son honneur. Mais Étoile de Suie était prête d'une vie passée dans les batailles, et l'honneur ne fut malheureusement pas défendu. Elle esquiva le coup, les crocs ratant de peu son oreille, mais n'y laissant aucune trace. Si elle n'avait auparavant pas encore été décidée quant au sort du matou, elle ne voyait à présent plus que sa défaite assurée. Aucune autre issue ne serait tolérable, certainement pas pour une féline de son gabarit. Profitant du déséquilibre de son adversaire, elle plongea vers lui (bon, à sa vitesse légendaire, ce n'était pas très rapide) et emprisonna son corps entre ses deux pattes musclées, griffes bien sorties, pour ensuite le balancer au sol. Essoufflée d'une telle démonstration, elle atterrit lourdement, avertissant aussitôt l'étranger de ne point réitérer sa bêtise.

─ Fais pas l'idiot, gamin.

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PV WAFFLE

Sa démonstration de force lui laissa le souffle un peu court, et un certain inconfort dans le ventre. La vie qui commençait à peine à s'y former devait probablement en être la cause. Ces petits avortons n'avaient pas aimés se faire secouer dans tous les sens. Tant pis pour eux, elle n'allait certainement pas se priver de donner une bonne leçon à ce chat qui se croyait tout permis. Et comme il semblait choqué, qu'elle parvienne comme ça non seulement à s'en saisir, mais en plus à le balancer au sol comme s'il était une pauvre souris. Ou, bon, un arbre qui se fendait en deux; parce qu'il fallait quand même lui reconnaître une certaine stature, à ce chat domestique. L'attaque lui avait tout de même demandé un effort plus grand qu'elle ne s'y était attendu, vu les muscles de Waffle. Elle fut donc et surprise, et irritée, de le voir se relever si rapidement. Il grimaçait de douleur, mais l'ego semblait plus fort que le coup. Et déjà, il la cherchait à nouveau.

─ Non ! Pas tant que tu te seras pas excusée de m'avoir insulté de voleur !
─ Mais t'es complètement timbré toi.

Elle grogna, les crocs dévoilés, commençant à se mettre réellement en colère. S’aplatir au sol et filer la queue entre les jambes, c'était trop pour ce chaton princier? Il se remettait déjà en position d'attaque, ou plutôt de défense, puisqu'il avait au moins la brillance de ne pas essayer de lui sauter à la gorge. Mais la leçon n'était pas encore apprise, et le sang d'Étoile de Suie s'échauffait à l'idée que ce morveux lui demande des excuses à elle, pour avoir envahi le territoire depuis quelques lunes déjà. Alors elle chargea, avec toute la finesse d'un taureau, se précipitant vers le tigré pour lui rentrer son épaule dans le poitrail.

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PV WAFFLE

Alors qu'elle débutait sa charge, il se mit en garde, mais plutôt que d'encaisser le coup comme un réel combattant, il s'esquiva, s'évadant sur le côté et la laissant continuer son chemin. Emportée par son élan, la grosse femelle se rattrapa tant bien que mal et avait prévu de poursuivre sa course pendant plusieurs enjambées, lorsque le coup l'atteignit. Surprise par la riposte, surtout que le premier coup du mâle avait été lamentablement échoué, Étoile de Suie vacilla sous l'impact. Un grondement lui échappa, mais la douleur ne fut pas aussi cuisante qu'elle s'y attendait; les griffes du gamin étaient rentrées. Lorsqu'elle fut parvenue à se stabiliser, beaucoup de pas et trébuchements plus loin, la grosse femelle se questionna sur la raison. Croyait-il vraiment qu'elle n'était pas apte à encaisser le coup? Avait-il un esprit trop noble pour tenter de la faire saigner? ... Ou, peut-être, plutôt, qu'il avait perdu ses griffes aux mains des bipèdes, comme certains de ces domestiques qu'elle avait déjà croisés. Un rictus se forma sur ses babines. Quel déshonneur, si vraiment il lui manquait son arme principale.

─ Toujours pas décidée à retirer ton insulte ?
Il l'irritait, à se croire en son bon droit.
─ Toujours pas décidé à reconnaître ta petitesse?

Son ton mêlait l'acide aux mièvreries. S'il voulait régler la question à coups de griffes, elle n'allait certainement pas s'en priver. Peut-être l'avait-il maladroitement juger, peut-être recelait-il de plus de force qu'elle ne l'avait d'abord cru. Mais ce n'était qu'un chat errant, qu'un piètre domestique, qui n'avait aucun droit d'aller et venir à sa guise sur leur territoire. Si la leçon devait passer par le sang, Étoile de Suie n'allait pas s'y opposer. Il l'avait assez cherché pour qu'elle s'excuse sa violence. Et pourtant... Elle réitéra à nouveau son avertissement, reconnaissant peut-être que ce n'était qu'un jeune chat ignare, qui ne méritait peut-être pas d'être sauvagement blessé. Ou alors, se rappelant de son propre état, de sa grossesse, de blessures encore douloureuses d'une précédente bataille. Dans tous les cas, elle lui donna une dernière chance de fuir:

─ Retournes chez toi gamin, avant que tu sois plus capable de t'y rendre.