(halloween) Saumon fumé et baby carrots - end

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Ce matin, je m'étais réveillé avec une énergie folle, et la détermination de faire une superbe cueillette. D'un pas véloce, je parcourais tout le territoire de l'ombre, glanant ici de la digitale, rare et mortelle, là de l'aloe vera, frais et adoucissant. Je virevolte parmi les fourrés, saute allégrement le chemin du Tonnerre, sans m'en rendre compte. Peu à peu, le paysage change, je n'y prête pas attention. Soudain, mes pattes se mouillent, je pousse un petit cri et recule. J'ai les coussinets dans l'eau, dans la rivière, dans la putain de flotte, et merde merde merde je suis chez ces petites lavettes de bouffeurs de poiscaille.

Merde. Mais je suis con. Pourquoi je panique, j'ai le droit d'être là.

Je respire, je suis tranquille, je m'essuie les pattes sur de la mousse. Tranquille. Je vais partir, j'ai déjà pas mal d'herbes. Tant mieux si je croise pas une de ces faces de tanche.

L'air se rafraîchissait, les nuits s'allongeaient et devenaient de plus en plus froides, si bien que c'est lové entre Nuage de Truite et Nuage de Brochet que Nuage de Saumon se réveilla, dans la matinée. Ayant raté de peu le départ de la patrouille de chasse, l'animal au pelage à dominante sable se dit que le Clan n'aurait jamais trop de gibiers pour passer l'hiver et se décida donc à partir seul en chasse. Le souvenir glacial du Blizzard qui avait sévi l'année passée suffisait d'ailleurs à motiver le vieux novice. L'animal haut-sur-patte s'interdit d'aller pêcher, car il se savait déjà bon pêcheur et il était désormais nécessaire au félin bicolore de s'améliorer en chasse terrestre pour espérer réussir son évaluation. Il ne tarderait plus à recevoir le nom et le titre de guerrier, enfin.

Il rata une première souris et ce qui ressemblait de loin à un campagnol avant de se rabattre sur une grive qui venait de faire bruisser la végétation. Le volatile moucheté, se croyant à l'abri du danger, avait osé se poser à même le sol pour trifouiller la terre et sûrement débusquer quelques insectes avant que le froid de l'hiver ne les tue tous. C'était sans compter sur Nuage de Saumon qui avait rapidement adopté la position du chasseur, quelques mètres plus loin. Frôlant le sol, bandant ses muscles, l'animal haut-sur-patte préparait une attaque surprenante, dissimulé derrière les hautes herbes de la Prairie. Puis, bondissant à l'aide de ses longues pattes, il écrasa l'oiseau à terre sans réfléchir et l'acheva d'un coup de crocs bien placé. Lorsqu'il constata sa réussite, l'apprenti-guerrier ronronna comme pour se donner du courage.

Mais il entendit, non-loin, un gémissement étrange. Curieux, le mâle au regard bleu se dirigea vers la source du bruit, conservant la grive dans sa gueule. Il ne lui fallut pas longtemps avant de distinguer une silhouette familière au bord de la rivière. Comme il reconnut le guérisseur du Clan de l'Ombre, le novice au menton blanc ne chercha pas à être discret et déboula sans crainte de la dense végétation, rejoignant l'adulte gris au bord de l'eau. Il dut lâcher sa prise à plumes avant de pouvoir miauler. Et alors qu'il s'apprêtait à héler l'autre matou, il se souvint que le nom du guérisseur lui était inconnu.

« Hé ! » Il trotta vers le félin couture de cicatrices. « Bonjour. Vous souvenez-vous de moi, guérisseur ? »

Étrangement, l'apprenti-guerrier ne songea pas une seule seconde qu'il pouvait s'agir d'un félin malintentionné. Après tout, même les guérisseurs les plus mal-aimables oeuvraient pour le bien, et étaient les premiers enfants du Clan des Étoiles, non ?

HRP:

Les pattes encore dans la mousse, je souffle, calme mon palpitant. Vert moussu, bleu rivière, marron boueux, le paysage est bien monotone dans ce coin de Cerfblanc. J'expire, j'ai le droit d'être là. Des craquements attirent mon attention, je me retourne et vois un petit chat sable, la bouffe farcie de plumes, arriver entre les broussailles. Son nom m'échappe, Nuage de... Nuage de Buse ? Non, ça doit pas être ça. Sa gueule me dit bien quelque chose, je l'ai vu, oui, oui ! Le blizzard ! C'est ça !

Nuage de Truc ! Aux Quatre Chênes ! On dirait que cette fois t'as attrapé autre chose qu'un rhume, aha.

Un peu nerveux encore, et fâché contre moi-même d'avoir traversé la frontière sans m'en rendre compte, je tapote le sol d'un pas saccadé, imprimant profondément mon empreinte dans le terrain assez meuble.

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« Nuage de Truc ! Aux Quatre Chênes ! On dirait que cette fois t'as attrapé autre chose qu'un rhume, aha. » s'exclama alors le guérisseur en retour.

Nuage de Saumon baissa légèrement la tête, comme s'il encaissait avec difficulté la lourdeur des blagues de l'Ombreux. Un sourire gêné se dessina sur sa gueule, alors qu'il posait ses deux orbes bleus sur le corps peu musculeux de son homologue, lequel tapotait nerveusement la vase de la rivière où il se mouillait le bout des pattes. Un petit moment silencieux s'installa entre les deux étrangers avant qu'inconfortable, le novice sable se décide à prendre la parole afin d'amoindrir le malaise sous-jacent.

« Vous veniez à la quête de plantes, alors ?! Peut-être que je peux vous aider ? » proposa le jeune mâle d'un ton empli de bonne volonté.

HRP:

« Tu t'y connais en plantes, peut-être ? »

Les grandes oreilles du matou sable frémirent devant le ton du guérisseur adverse. Nuage de Saumon en avait presque oublié le don du mâle couturé de cicatrices à être désagréable. Mais depuis leur dernière rencontre, le matou au menton blanc avait pris en assurance -pas beaucoup, mais c'était toujours ça de pris- aussi ne releva-t-il pas l'incivilité de son homologue gris, qui sembla se rattraper quelques secondes plus tard :

« Bon, tu serais reconnaitre du basilic ? Vert, odorant, les dernières pousses doivent encore se trouver.
- ... Non ? Tout est vert. »

Ses oreilles tombèrent, aussi vite que son entrain passé. Trouver une plante verte qui sent, voilà bien toute la difficulté de la mission dont il s'était lui-même rendu volontaire. La tête baissée, les yeux balayant désespérément l'horizon, le novice aux longues pattes ne cherchait même pas le fameux basilic, déjà résigné devant la difficulté de l'exercice. Mais puisque l'autre chat semblait avoir mis son piquant naturel de côté pour accepter son aide, il ne pouvait pas réellement se reposer sur ses lauriers sans avoir mauvaise conscience par la suite. Ainsi, l'animal bicolore se décida à fouiller les alentours, bousculant avec délicatesse le moindre végétal vert, et autant vous dire qu'il n'y en avait pas qu'une petite dizaine. Mais alors qu'il se concentrait sur la couleur du basilic, il en avait oublié l'odeur jusqu'à ce qu'elle vient lui chatouiller la truffe. Stimulé par la senteur de la plante, Nuage de Saumon redoubla d'effort et se mit à pister le végétal comme il pistait parfois le gibier, jusqu'à tomber nez à nez avec un lot de feuilles ovales d'un vert chatoyant et qui libérait la fameuse odeur.

« Hé ! Je crois que j'ai trouvé ton barilis, basilis, enfin peu importe comme ça s'appelle... » héla-t-il alors en direction du guérisseur.