[Naissance] Le don de la vie - end

 
L'après-midi était belle. Elle sentait la chaleur sur sa fourrure grise tigrée, elle entendait le piaillement des oiseaux, les bavardages des membres de son clan, qui se trouvaient à l'extérieur. Une belle journée de la saison des feuilles nouvelles, de celles qui effaçait toute trace de la période des neiges. Elle ressentait la présence d'Araignée Tordue à ses côtés, allongée contre elle, avec sa tête contre son cou. Elle ronronnait. Elle se demandait s'ils étaient seuls ou si Accroche-Coeur était aussi présente. Sans doute dehors, pour laisser de la place aux deux amoureux. 

Voilà à quoi ressemblait la vie de Doux Alizé à présent. De la déduction pour nombre de choses. Elle se servait de ses quatre sens restants pour reconstituer une image qui pallierait le dernier. Ses proches étaient là pour l'aider dans cette tâche, en lui décrivant son environnement. Si lors des premiers jours, elle avait été complètement paniquée en comprenant qu'elle ne verrait jamais plus que ce noir permanent désormais, cela lui était passé. Bien sur, elle n'allait pas dire qu'elle était heureuse d'avoir perdu la vue, ou que cela ne la dérangeait quelque peu, mais cela ne l'avait pas brisé. Sans doute parce qu'elle s'était déjà effondrée, et surtout parce que ceux qu'elle aimait étaient présents pour elle, constamment. Et elle se sentait rassurée, soutenue, en leur présence. Elle avait appris à faire attention au moindre détail, à la moindre information que ses sens lui laissaient. Paradoxalement, on pourrait dire qu'elle n'avait jamais été aussi observatrice. 

Mais il y avait des craintes, et des regrets. Elle savait à présent que la communication avec Foehn Nocturne était plus compliquée, maintenant qu'elle avait perdu la parole. Mais les ronronnements, les frottements suffisaient à se transmettre leur affection mutuelle et Araignée Tordue, tout comme Nuage des Vents étaient la pour faire les messagers. Et les petits. Ses petits qu'elle attendait, qu'elle sentait bouger dans son ventre. Ses enfants, qu'elle ne verrait jamais. Ceux dont elle aura une image uniquement dans son imagination, reconstituée à partir des mots de son compagnon. Elle avait peur, peur de ne pas savoir s'y prendre, peur de ne pas être à la hauteur, peur de ne pas pouvoir leur donner tout ce qu'ils avaient besoin. Seraient-ils tristes, déçus, quand ils comprendront que leur maman n'était pas comme les autres? Qu'elle ne pouvait pas faire tous ce que les autres mères pouvaient? Quand ils comprendront qu'elle ne pourra jamais voir leur sourire, leurs pleurs, qu'elle ne pourra jamais se rendre compte de la vitesse à laquelle ils grandiront? 

Des dizaines de questions se posaient dans son esprit. Des craintes, des doutes. Mais elle savait qu'elle n'était pas seule. Qu'elle ne le serait jamais. Et aujourd'hui serait une nouvelle preuve de ce fait. 

Elle se raidit. Et la douleur la submergea. Une contraction l'a prit, plus féroce que les précédentes, et elle sut qu'il était l'heure. Qu'ils arrivaient. 

"Totor... Ils arrivent, je le sens. Ils sont là, ils arrivent!"
 

Je ronronnais, profitant de l’étreinte que j’avais avec Lili. Depuis qu’elle était revenue au camp, après sa fugue, j’ai été à ses côtés à chaque instant. Je voulais la soutenir, être avec elle, et lui montrer qu’elle n’était pas seule. Je ne pouvais pas imaginer cette belle Lili ne plus sourire. Elle était si radieuse… Je l’aimais vraiment. Je n’avais même pas de doute, je le savais à présent, parce que je ferais tout pour elle. Je la guiderais jusqu’au bout du monde s’il le fallait. Et maintenant qu’elle était aveugle… J’étais bien content de pouvoir l’aider à percevoir les choses. Mes yeux étaient les siens, il fallait bien que je les partage, sinon comment pourrait-elle voir nos bébés à venir ? Je fermais les yeux, profitant de la douce fourrure de ma compagne, ma tête plongée dans son cou pour sentir son odeur. Nous étions seuls dans la pouponnière, Accroche-Cœur, voyant notre besoin de proximité avait décidé d’aller prendre le soleil plus directement.

La saison des feuilles vertes approchait à grand pas, et je le sentais bien par la chaleur ambiante, les oiseaux chantants, le vent faisant bruisser les herbes douces de la lande. J’étais devenu un peu anxieux le jour où Lili m’avait annoncé qu’elle attendait nos chatons. Attention, j’étais très heureux de devenir papa, surtout avec la belle Lili comme maman, mais j’ai rapidement eu peur pour elle et nos petits. Depuis que les ordures du clan de l’ombre avaient attaqué en pleine nuit, j’avais du mal à me détendre. Je voulais juste protéger ma famille, alors j’étais toujours sur le qui-vive. Ce beau jour ensoleillé devait être le seul où je ne pensais plus à ce que cette vermine ombreuse avait fait à ma Lili. J’avais été très en colère ce jour là, je l’aurais réduit en chair à corbeau si je l’avais vu faire, malheureusement, j’étais aux prises d’un apprenti du clan traitre. Depuis cet incident, je n’avais quasiment pas quitté ma compagne. Je voulais toujours la faire sourire, je la guidais en lui parlant du monde, comment était le ciel aujourd’hui, comment les réparations du camp avançaient, comment allait nos camarades. Mais aujourd’hui, c’est une toute autre description que j’allais lui faire. Elle se raidit soudainement. Je levais la tête. Elle se contractait. Je posais mon regard sur elle, les oreilles droites, pointés en avant. Qu’est-ce qu’elle avait ?

« Totor... Ils arrivent, je le sens. Ils sont là, ils arrivent! »

Je la fixais, ressentant un mélange d’émotion. Ils arrivent ! Mes petits, on va pouvoir les voir ! Mais je me reprenais bien vite en me secouant la tête. Venteuse, je devais aller chercher sa sœur et Silence. Je me levais en vitesse et dis à ma douce Lili, la face joyeuse :

« Oh ! Je vais chercher Venvent et Silence, bouge pas je reviens vite ! »

Je la laissais et me mis à courir le plus vite possible en direction de la tanière des guérisseurs. C’était l’heure ! Enfin ! Je sautillais même tant j’étais heureux, comblé de bonheur. J’allais pouvoir apprendre à mes petits à sourire et être heureux, je jouerais avec eux, je les protègerais, je les défendrais et je les aimerais. Je me retenais même de pleurer de joie.

« VENVENT ! SILENCE ! Les petits arrivent ! Lili a des contractions, le travail commence ! Mes petits arrivent… »

Je sentais qu’ils bougeaient à l'intérieur de la tanière. Du regard, je cherchais également Foehn, qui par chance était dans le camp. Je fonçais vers elle et lui annonça la nouvelle

« Hé bouge-toi futur tata, tes neveux ou nièces ou même les deux arrivent ! »

Luny-Maman n’était pas très loin elle aussi.

« Toi aussi Luny ! Je sais que tu es contente aussi d’être tata ! »

J’appréciais beaucoup les deux sœurs de Lili, elles étaient gentilles et présente les unes pour les autres et ma propre sœur comptait beaucoup pour moi, même si elle était difficile à vivre parfois, je l’aimais beaucoup. Je me précipitais alors pour retourner auprès de ma compagne. J’essayais de rester proche d’elle pour la rassurer. Je lui léchais le front avec un doux ronron.

« Tout va bien ma Lili, j’ai prévenue ta sœur et Silence, ils arrivent. Tout va bien se passer, on aura les plus beaux et les plus gentils bébés du monde. »

J’irradiais de bonheur. Je devenais papa. Mes petits arrivaient, et j’allais bientôt pouvoir les voir, et les décrire à Lili. On pourra bientôt les élever ensemble. Comment ne pas être comblé avec des petites boules de poils venant au monde ?

La lande s'étendait à perte de vue. Je fermai les yeux, savourant un instant le souffle du vent, caressant mon pelage. Mes poils s'élevaient légèrement, comme portés doucement par cette brise chaleureuse. Diverses senteurs flottaient dans l'air. Certaines venaient chatouiller mes moustaches en les effleurant à peine, presque imperceptiblement. D'autres plus tenues, venaient même s'agglutiner comme si leur but étaient d'empêcher les autres d'être perçues.

Mais très vite, une bouffée d'angoisse me prit à la gorge. Peut-être une effluve un peu trop métallique rappelant celle du sang avait titillée mon inconscient. Dans tous les cas je sortis de ma rêverie en adoptant une mine soucieuse. Doux Alizé (je ronronnais toujours en pensant à ce nom, qui lui allait à ravir) était devenue aveugle depuis maintenant un moment, et nous essayions avec Araignée Tordue de nous relayer pour à la fois accomplir nos tâches de guerrier, passer du temps avec elle, et lui apporter encore plus de gibier. (et aider venteuse avec ses plantes, et faire les entraînements quotidiens, et gérer le stress d'une nouvelle attaque, des patrouilles supplémentaires, et, et, eeeeet... tout ça quoi) Cela n'était pas très facile, et nous n'étions pas encore au top. Mais j'étais confiante dans le fait que nous allions y arriver, et ce, malgré mon incapacité à parler.

C'était ainsi que j'étais partie chasser ce matin. Je tournai les talons, et retirai de la terre les quelques proies que j'avais laissée enterrée de ma chasse. Mon dernier aller-retour vers le camp. J'eus à peine le temps de poser mes prises sur la pile et de m'assoir pour remettre ma pelisse que je vis un éclair noir et blanc passer à toute vitesse à travers le camp. Je bondis sur mes pattes, oreilles en avant. Etait-ce pour aujourd'hui?

« Hé bouge-toi futur tata, tes neveux ou nièces ou même les deux arrivent ! »

Le mâle semblait irradier de bonheur. Je ronronnai également à l'annonce de cette nouvelle, mais ne pus m'empêcher de m'inquiéter. Parfois les mises bas étaient compliquées... Combien de reines en étaient mortes? Mais je ne voulais ni transmettre le stress qui montait compresser ma poitrine, ni gâcher la joie de mon beau frère. Alors, je m'élançai également vers la pouponnière, prenant une mine enjouée et sereine. Je passai la tête à l'intérieure de l'entrée, et guettai du regard l'approbation de Venteuse ou Silence pour pouvoir entrer à mon tour, non sans lancer à sourire à Reflet Lunaire qui avait été prévenue en même temps que moi.

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Le don de la vie.

La jeune guerrière blanche avait patrouillé la nuit, préférant ce moment et par chance, Cobra Royal avait accepter. Aussi, elle somnolait presque à présent, attendant que le jour tombe un peu plus pour partir chasser. Il fallait bien qu'elle fasse sa part si elle voulait éviter les remontrances. Sauf que voilà, alors qu'elle ouvrait un œil, percevant de l'agitation dans le clan, elle remarqua son frère qui détallait comme un lièvre vers l'antre de sa camarade et de leur aîné. Mais que diantre allait il faire chez les gué... La possibilité que l’état de Doux Alizé décroisse la frappa subitement et elle ouvrit son autre œil, subitement tendu. Le camp rester en sale état depuis l'attaque de l'Ombre et la blanche avait d'autant plus de mal à montrer une once de positivisme. Sauf que non, à voir la sourire radieux sur la face noir et blanche quand il fila vers Foehn, elle sut que s'était autre chose. Jusqu'à ce qu'il s'adresse à elle. tata. Alors ...

- Bha voyons.

Fut tout ce qu'elle parvint à dire alors qu'elle se levait, persuadés qu'il ne lui ficherait pas la paix si elle ne faisait pas au moins l'effort de se rendre devant la pouponnière. Quant à en franchir le pas. le doute apparu dans ses yeux en découvrant Nuage des Vents. Alors l'albinos, incertaine que sa présence soit véritablement importante, alla s'allonger devant la pouponnière, à l'ombre, usant de ses seules oreilles pour suivre le déroulement interne. Hors de question qu'elle y mette une patte aujourd'hui. Sa seule présence projetterait une ombre mortelle. Parce que les mises bas pouvait l'être et que les chatons ... Ils étaient insupportables !

HRP: