Kill or be Killed PV. Feulement - abandon

Le Soleil. Il la toisait. De toute sa hauteur. De toute sa muette puissance. Cœur de Lionne aurait bien voulu lui rendre son regard. Mais quelle importance? Le duel était bien inéquitable. Que pouvait elle face à l'immuable?

La colère l'aveuglait, elle le savait, les rayons lui brûlaient la rétine.

Elle abaissa son regard doré sur la clairière tapissait d'aiguilles devant elle. L'après-midi tombait, la plupart des guerriers profitaient des timides premiers rayons pour se réchauffer. Entre les tâches qui troublaient sa vision, la guerrière aperçut que la réserve était au plus bas. Sans un bruit, elle s’éclipsa, tâtonnant du bout des pattes et de sa mémoire ce qui manquait à son champs de vision. Ils la menèrent au travers le territoire, ignorant ce que les autres sens repérait. De toute façon, tout était silencieux. Elle s'arrêta lorsque des ténèbres presque complète l'enveloppèrent, et au même instant un fumet l’assaillit. Musqué. Sévère. Son pelage s'hérissa. Au charnier, elle était. Là où tout bon citoyen venait y donner l'ordure.

Elle n'appréciait pas spécialement l'endroit. L'odeur de chair à corbeau qui pesait nonchalamment dans l'atmosphère humide gâchait le potentiel des nombreux obstacles et promontoires que le lieu proposait. Sa langue rugueuse passa sur ses babines et elle cligna plusieurs fois des paupières, essayant en vain d’acclimater sa vue. Mais il était toujours giboyeux. Elle abaissa son nez au niveau du sol. Puisqu'elle était là, autant y rapporter quelque chose: Tout ce qui était ici avait été abandonné, personne lui en voudrait d'y piocher quelque chose.

Presque aussitôt, la piste d'un animal blessé attira son intention: les traces de sang étaient fraîches. Cœur de Lionne eut un léger soupir pour l'animal, mais l'autre frémit. Il servirait mieux comme ornement du tas de gibier qu'ici à souffrir le martyr d'une infection. La chatte louvoya prudemment parmi les déchets, posant ses pattes dans le sillage de douleur qu'un petit animal avait laissé. Elle ne tarda pas à le repérer, gisant près d'une marre polluée. La guerrière fut étonnée de le voir. Il était plus grand qu'elle ne l'avait pensé. Maigre, le pelage hirsute, il n'avait même pas la force de sortir sa gueule pantelante de l'eau et sa respiration formait de gros bouillon à sa surface.

Le cœur se serra mais la Lionne vit un nouvel intérêt y naître. Sans même se presser, la guerrière avança vers la proie qui gémit à son approche. Elle s'arrêta après avoir contourné la marre. La plainte de l'animal enflant dans ses oreilles. Elle gronda en se rapprochant. Le rongeur agita la queue. Elle s’essaya juste à son côté.
Le rat cessa un instant son cri pour reprendre sa respiration... pour ne jamais la reprendre: des griffes l'attirèrent violemment dans la marre. Il se débattit autant que son corps infecté le pouvait, la surprise et le manque d'air le tenaillant, jusqu'à ce qu'il refasse surface, les griffes du chat toujours plantées sur sa tête et ne tournoie dans les airs. Il flotta instant, avant qu'un cri strident retentisse lorsqu'il percuta une canette qui roula au loin, le ramenant à son corps douloureux, crachant des gorgées infectes d'eau. Le chat fut aussitôt au dessus de lui. Ses griffes surtout, étaient déjà sur sa plaie béante et moussante de pue. L'animal hurla et se retourna pour mordre mais des crocs l'ouvrir de l'autre côté. Il se retourna, mais les griffes s'enfoncèrent dans la blessure qu'un congénère lui avait infligé. Il se retourna encore. Mais cette fois une masse très lourde s'abattit sur sur ses flancs en lui brisant les côtes. La douleur était sourde, sa conscience flanchait et il priait pour qu'elle sombre. Ça dura un moment, il aurait dit. Jusqu'à ce qu'il abandonne et lève son nez bien droit pour regarder en face le visage de son bourreau.

Il frissonna lorsque deux grands yeux presque noirs tellement les pupilles étaient dilatées le fixa, du sang -son sang- dégoulinant de son visage. L'expression était tirée, comme par la douleur. Le félin émit alors un hoquettement qui rappelait un rire autant qu'un pleur. Le rat hurla, c'était lui qui souffrait inutilement!

Une nouvelle odeur l'assaillit. Cœur de Lionne se dressa, le goût métallique du sang dans la bouche. Elle sentit Nuage Scintillant et eut soudain très chaud. D'un pas elle s'écarta loin du petit corps qui bougeait faiblement sous elle et déglutit difficilement.

hrpchaipaskoi:

Le battement d'un cœur s'emportant sous les crocs d'un prédateur. Il s'emballe, trébuche, lutte puis arrête abruptement sa course dans un ultime sursaut. Le jockey a quitté la selle de son crack pourtant ses jambes continuent de frapper le sol, il semble courir, fuir la mort qui l'a déjà attrapé. Ses muscles se raidissent soudainement et enfin voilà son corps qui se relâche, fondant entre les canines du chasseur.

Relevant la tête, une souris dans la gueule, Feulement s'assura que l'animal ne vivait plus. Il avait pris soin de lui accorder un trépas court. Il y avait de multiple raison à cela, la crainte qu'un affamé plus gros que lui soit aguiché par ses plaintes mais aussi un désir de ne pas faire souffrir autrui. La cruauté, bien que le lieutenant avait affligé moult souffrances, ne coulait pas dans ses veines.

Ses pas crissèrent contre le corps albe de neige tandis qu'il progressa au travers de la pinède, sa traque n'avait pas encore touchée à sa fin. Il rebrousserait chemin à la nuit tombée seulement et le soleil couchant accordait toujours à la forêt de l'Ombre de maigres rayons lumineux perçant de leur lance le voile de branches sombres.

Ce n'est qu'une centaine de mètres plus tard qu'un cri perçant fit abruptement pivoter une de ses oreilles déchiquetés. C'était un rongeur (décidément) qui hurlait de douleur. Cela n'avait rien de naturel, même au sein d'une forêt fort éloignée de la ville. Les animaux ne beuglent pas de terreur lorsqu'ils sont blessés au risque de s'attirer plus d'ennuis encore.

Le fils du Serpentaire ne put s'empêcher que d'avancer prudemment vers la source du vacarme. Le charnier s'ouvrait à lui toujours boueux malgré la couche de neige qui tentait tant bien que mal de dissimuler sa crasse. Il y avait devant lui une féline don il n'avait retenu le nom que lors de l'organisation de ses patrouilles. Lui qui avait tant de mal avec les titres trouvait un avantage à devoir s'occuper de tant de responsabilités ... A son grand damne.


Il y avait sous sa patte tacheté de bourbe et de sang une grosse bestiole au corps souillé de terre et de plaies. Certaines parties de son enveloppe charnelle pointaient dans des angles que le grand guerrier n'aurait pu imaginé, ses petits flancs peinaient à se dresser et ses yeux luisaient d'une peine et d'une douleur que Feulement n'avait que bien trop vu au cours de sa courte existence. Elle le maintenait sous l'immondice puis le relâchait, jouant de son malheur comme certains corbeaux le font avec de petits reptiles.

Non seulement la féline s'amusait de la détresse d'un rat mais en plus elle l'avait rendu immangeable. En temps de disette il ne leur manquait plus que ça.

De son pas lourd l'impressionnant mâle charcoal s'approcha. Lorsque Cœur de Lionne commença à pivoter la tête il s'était déjà placé près d'elle, dans son dos. L'une de ses grosses pattes, énormes griffes d'ébène sorties, s'abattit sur le flanc brisé de l'animal, éjectant d'une ultime pression la vie hors de son corps. Le geste fut sec, rapide et brutal, son regard ambré plongé dans celui de l'écaille de tortue. Il ne l'avait pas quitté dé lors qu'il fut en capacité de le soutenir, achevant ainsi la victime sans un coup d'œil.

Son expres​sion(toujours neutre) demeurait ainsi mais un certain dégoût pouvait tout de même se lire dans ses traits. Qu'il pouvait mépriser le sadisme et découvrir une peste de plus au sein de son clan n'était jamais quelque chose de très agréable bien qu'anodin, hélas.

" On joue pas avec la bouffe. "

Gronda t-il légèrement, phrase courte et directe fidèle à lui-même.