La Nouvelle Etoile de l'Ombre - END

De ce pas lourd caractéristique à sa personne, Étoile Feulante rentrait de son excursion un volatile en bouche. La journée battait son plein au cœur du camp de l'Ombre: ses guerriers discutaient, se chamaillaient et vaquaient dans ce trin-trin bourdonnant qui régissait leur quotidien.

La familière carrure tigré d'un gros matou pénétra le champ de vision du chef qui s'en allait déposer sa proie. C'était Orage d'Or qui venait au rapport. Il les préféraient concis et, bien heureusement pour le charcoal, il savait que son ami d'enfance n'était pas du genre à se perdre dans les détails.

Silencieusement il l'écouta, lançant un regard à la jolie pie bicolore que le soldat venait de lâcher à ses pattes et se questionnant quant à sa présence ici plutôt que sur le tas de gibier.

" ...On as rien trouvé d'importants. Puis, j'en ais profiter pour chasser juste après. "

Pas de nouvelles bonnes nouvelles.

" Tu veut ma pie ? "

Ah, voilà pourquoi donc. Pas vraiment habitué à ce qu'on lui offre de la nourriture il haussa des épaules avant de la ramener vers lui d'un coup las de ses griffes d'ébène. Il avait faim, tiens, et c'était par simple acquis qu'il n'avait pas entamé sa propre proie. Comble pour un chef, Etoile Feulante se foutait pas mal du code du guerrier mais lorsqu'on vous le grave dans le crâne autant que dans la chaire alors forcément, ça reste.
Autant pour parler que pour s'en débarrasser, l'ancien chuchoteur laissa tomber au sol son pigeon. La bête fut, à son tour, poussée vers l'interlocuteur du chasseur dans un échange équivalent accidentel. Orage d'Or pouvait prendre le geste comme une donation ou se contenter de ramener le vivre à la place qui lui était désignée, peu importait à la brute tant qu'il pouvait s'exclure plus rapidement de la foule.

" Tiens. "

Taciturne comme à son habitude. On ne le changeait plus.

Trop tôt pour s'enfuir, Orage d'Or prit la parole.

" Voilà, qui n'étais pas prévu... Mais, te voilà chef, la nouvelle étoile de l'Ombre... Je pense que c'est amplement mérité, tu as toujours sus te montrer fort. L'Ombre à besoin d'un chef tel que toi. Félicitation.. enfin, je crois...? "

Mérité ? Non. Il n'avait fait qu'obéir et se trouver au mauvais endroit au mauvais moment. Ce qu'il aurait mérité c'était une vie paisible, loin de toutes ces conneries sur les genoux d'un bipède logé auprès du feu. Depuis le haut de son promontoire il n'avait aucune foutre idée de ce qu'il faisait.

" Mh. "

Presque muet il finit par s'accroupir au-dessus de sa pie, là où il était. Le guerrier souhaitait lui parler, visiblement, donc autant manger sur place plutôt que de se faire poursuivre par son ancien camarade de pouponnière.

Il plongeât ses crocs dans la bête, écartant plumes et ailes pour atteindre la chaire tendre qu'il broya de ses molaires.

" En tout cas, c'est pas Etoile Dansante qui me manquera... Enfin, je peut savoir pourquoi tu as choisis ce guérisseur faible pour lieutenant ? T'aurais dut prendre Dents de Sabre, il est... humm.. plus efficace ? "

Il tiqua.

" Parle mieux d'mon père. "

CroNCH. Pivotant sa tête sur le côté il brisa un os fragile de son déjeuner avant d'en tirer la viande et de reprendre de son éternel ton las.

" Il sait toujours c'qu'il faut faire. "

Esprit Soucieux l'avait guidé, toutes ces années, et il était encore vivant droit sur ses pattes tremblantes contrairement à la moitié des chats qu'il avait connu au cours de sa vie. Le bourreau jugeait qu'il aurait fait une bien meilleure Étoile que lui, d'ailleurs.

" Ouais, si tu le dit... "

Ses crocs grattèrent le bréchet de sa proie, y décollant la fine viande blanche qui l'entourait, langue passant sur ses babines noires pour en chasser les plumes qui venaient s'y accrocher.

" L'assemblée avance à grand pas en tout cas, il me semble que c'est dans quelques lunes ? Je pourrais venir, si tu veut... Et puis, j'ai plus de gamins dans la pouponnière donc bon.. "

Il aurait voulut oublier la lune qui s'arrondissait chaque nuit au-dessus de leur tête, le temps leur accordait des températures douces et des portraits nocturnes radieux pourtant Étoile Feulante aurait préféré que les peintures étoilés se couvrent d'un drap nuageux. Le monde, l'inconnu, le grand peuple et les quatre chênes c'était très peu pour lui ... Quelle utilité, ils s'en tireraient probablement d'avantage à se confiner au creux de leurs territoires respectifs, loin des uns, loin des autres.

" S'tuv. "

Articula t-il à peine entre deux grosses bouchés du repas au-dessus duquel il était accroupis, coudes au corps.

Pensif maintenant qu'Orage d'Or avait mentionné le rassemblement prochain il se demandait ce qu'il pourrait bien y raconter, pas grand-chose de préférence. L'idée même d'élever sa voix rauque pour que tous l'entendent l'ennuyait déjà.

Job de merde.

" Ils vont encore parler pour ne rien dire à ct'assemblée. Tas qu'à les laisser causer et puis, si jamais ça part en vrille, je serais là pour te soutenir et casser quelques dents.
- Personne cassera les dents d'personne. "

Déclara t-il entre deux bouchées de volaille. Soyons clair, pas de guerre et si guerre il y avait alors l'Ombre s'en tiendrait à l'écart.

" Dit... Qu'est-ce que tu trouve à ce f... à Esprit Soucieux ? "

Chat de peu de mots Étoile Feulante ne trouvait pourtant aucun mal à s'exprimer lorsqu'il s'agissait de défendre son père. Il aurait put faire couler l'encre de sa loyauté sur des centaines de pages à son sujet, à en rebâtir la bibliothèque d'Alexandrie.

" On a les muscles, il a l'cerveau. Il sait toujours c'qu'il faut faire. "

Répéta-il dans un premier lieu.

" Tu l'traites de faible mais en attendant t'étais bien content quand il t'soignait. Il aurait put t'laisser te démerder s'il voulait à c'que j'sache. "

L'utilité et la force d'Esprit Soucieux n'était plus à prouver à ses yeux. Si son fils n'était pas des plus pieux il y avait pourtant bien qu'un chat qu'il considérait saint, le seul digne du clan des étoiles dont l'ancien guérisseur peignait tant la grandeur.

" T'as pas sauvé un quart des vies qu'il a sauvé. "

Vies don il se moquait d'un point de vue personnelle, mais quitte à débattre des services que le vieux lieutenant rendait à son clan autant y aller jusqu'au bout.