Uh uh — Tonton - end

— Non, Tonton c'est mon premier nom.

Petite Grenouille était impressionnée. Ça voulait dire qu’il était né guerrier ?! Pas besoin de rester coincé à s’ennuyer dans la pouponnière, pas d’apprentissage… il avait été libre comme l’air dès la naissance, capable de se battre et de tout faire ? Tonton était définitivement encore plus cool que ce qu’elle imaginait ! Elle s’apprêtait à lui demander son secret, les raisons qui lui avaient permis d’être aussi grand et fort comme ça sans des lunes d’entraînement, mais il compléta sa phrase avant qu’elle ne puisse intervenir.

— Et je ne suis pas un... Guerrier. Juste un chat de passage, je cherche mon chemin.

L’excitation de Petite Grenouille retomba, remplacée par une confusion et une curiosité qui se lisait sans mal sur son visage. Quand il lui avait dit qu’il n’était pas un guerrier, elle s’était attendue à ce qu’il ajoute qu’il était un guérisseur, ou même un ancien… mais c’était « juste un chat de passage » qui cherchait son chemin. Elle pencha sa tête sur le côté dans sa réflexion, se demandant c’était quoi exactement, un chat de passage. Si c’était un rôle spécial dans les autres Clans, ou alors…

— Est-ce que tu fais... Partie d'un clan ? Toi et ton ami perdu ?

La petite se mit à hocher la tête, tout sourire.

— Ouais ! Le Clan de l’Ombre, même qu’on est les plus forts de la forêt !! Et toi, il s’appelle comment ton Clan de la ville ?

Petite Grenouille se mit à réfléchir, repensant à l’hésitation de Tonton avant de parler des guerriers, et des Clans… comme si c’était quelque chose qu’il ne connaissait pas. Sa bouche forma un « o » tout étonné lorsqu’elle réalisa qu’en fait, le monde n’était peut-être pas composé de Clans disséminés un peu partout, composés d’un chef, de son lieutenant, du guérisseur, des guerriers et de leurs apprentis. Elle ne savait pas vraiment comment c’était possible, surtout quand tout le monde lui avait dit que survivre à l’extérieur quand on était petit était inenvisagable, mais…

— Tu viens d’aucun Clan ?

Découvrir que survivre seul hors du camp était possible lui redonnait de l’espoir pour Petit Croc, et prouvait à tous les adultes qu’ils avaient tort : il pouvait être encore vivant.

Spoiler:

Petite Grenouille avait ce défaut — qu’on lui reprochait bien souvent — d’être trop vive. Elle ne s’arrêtait jamais, même pas pour écouter les autres, fonçait tête baissée là où ses envies la portaient. Mais la disparition de Petit Croc l’avait changée. Elle l’avait fait mûrir, même contre son gré. Pour enquêter, pour écouter au mieux les conversations des adultes, elle avait du s’adapter, apprendre à être patiente, à écouter, à observer. Mais surtout, elle avait découvert ce qu’était la vraie tristesse, celle qu’elle n’avait jamais ressenti auparavant.
Celle qu’elle voyait désormais dans les yeux de Tonton. Ses oreilles tombèrent, comme par compassion.
Ce n’était pas ses enfants qui étaient perdus. C’était lui même.

Elle ouvrit la gueule pour lui proposer toutes les solutions qui lui venaient en tête. Des solutions bien naïves de chaton évidemment : il pouvait rejoindre son Clan le temps de les trouver, ou elle pourrait l’aider, plus tard, à retrouver son chemin… mais un craquement de feuilles morte l’interrompit avant même qu’elle n’eut l’occasion de commencer. Sans grande difficulté, elle reconnu Queue de Babouin, le guerrier à qui Petit Croc parlait parfois. Sa queue se mit à battre nerveusement, anticipant une bêtise. Ses méninges, de leur côté, tournaient à vive allure pour trouver une solution.

— T'es qui toi? Tu fais quoi sur notre territoire, et avec un de nos chatons?

Petite Grenouille fut d’abord surprise : pourquoi réprimandait-il Tonton alors que c’était elle qui était sortie ? Puis les pièces du puzzle s’assemblèrent d’un seul coup. Mais bien sûr ! Ils ne l’avaient pas vue sortir, puisqu’elle avait fait attention. À peine est-elle réalisé ce léger détail qu’elle bondit jusqu’à Queue de Babouin. Il fallait qu’elle trouve une histoire qui lui permettrait tant à elle qu’à Tonton de s’épargner les problèmes.

— EUUH, en fait il m’a sauvée ! s’exclama-t-elle.

Voilà. Maintenant il fallait qu’elle compose avec ça. Réfléchis Grenouille, Réfléchis. Elle décida de s’inspirer des nombreuses histoires qu’elle avait entendu récemment, tout droit sorties de la bouche des adultes en pleine spéculation sur le mystère de la disparition de son ami. C’était dur d’y repenser, mais au moins, ça lui était utile.

— Un gros oiseau, un hibou je crois ! Il m’a trainé jusqu’ici et puis, eh bah Tonton il l’a fait fuir !! Comme ça, GROAAAR !!

Gonflant son pelage, elle tenta sa plus belle imitation de ce qu’elle imaginait être un chat faisant fuir un gros rapace. Dans sa tête, elle se trouvait menaçante et incroyablement cool. Dans les faits, c’était peut-être différent.

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