Δ I WILL KEEP THE POWER IN MY PAWS Δ [Pierre de Lune] - end

Δ I WILL KEEP THE POWER IN MY PAWS Δ

« A darkness approaches. A time is coming in the future where everything you care about will change. Until then, I'll be watching you ! »

ҨҨҨ

L’aube se levait à peine, accompagnée de ses couleurs chaudes, les couleurs du sang. Voilà une journée que le Clan de l’Ombre se retrouvait sans chef, une journée que le Balbuzard était mort. Une journée qu’il avait enclenché la machine, une journée qu’il était à présent au pouvoir. La veille, alors que le soleil se couchait, il avait discuté longuement avec sa sœur. La vilaine lui avait reproché ce qu’il avait fait, lui dire qu’il était un monstre. Mais elle ne lui avait rien appris, tout ce qu’elle lui avait dit, il le savait déjà.


Voilà une journée qu’il détenait le pouvoir entre ses pattes, pourtant le Serpentaire n’était pas encore le chef, officiellement. Il lui fallait perdre son Œil pour le remplacer par une Étoile. Le nom répugnant qu’était Étoile du Serpentaire pour lui le fit grimacer. Même si cela prouvait à tous les Clans qu’il était le nouveau maître. Il n’avait aucune estime pour le Clan des Étoiles. Les ancêtres étaient des chats morts, des chats trop faibles pour pouvoir survivre. Et puis, il savait que, lorsqu’il serait mort, il n’irait pas au Clan des Etoiles. Alors pourquoi écouter leurs baratins gnangnan ? Il n’était plus un chaton.


Il se leva, s’étira longuement. Il avait dormi dehors, au centre du camp pour veiller la défunte meneuse. Il n’avait pas ramené la dépouille au camp, prétextant qu’il ne pouvait pas aller la chercher, étant trop bas et coincé entre les rochers. En réalité, il avait laissé la meneuse se vider de son sang derrière un buisson. Était-elle toujours en vie ? Il en doutait. Mais Étoile du Balbuzard était pleine de surprise, cela ne l’étonnerait pas de la voir revenir du jour au lendemain. Sa nuit n’avait pas vraiment été douce, le sol moue de sa litière lui manquait. Le camp dormait encore, le chagrin amenait la fatigue. Mais il devait réclamer son dû à la Pierre de Lune. Et il n’allait pas y aller seul. Il fit une toilette rapide et se dirigea vers la tanière des Guerriers. Il ne dormirait plus jamais ici. Bientôt sa sœur prendrait sa place, dormirait sur la litière du centre, entouré des autres guerriers. Il se glissa d’ailleurs près d’elle et la réveilla, d’une douceur qui pourrait la surprendre. Bizarrement, il était plus tendre avec elle en ce moment. Se ramollissait-il ? Non. Il voulait juste qu’Éclat d’Obsidienne tombe au creux de sa patte rapidement.


« Réveille toi ma sœur, nous partons. »


Et il repartit aussi discrètement qu’il était venu. Il passa réveiller le guérisseur et le prévint qu’il devait préparer des fortifiants en vitesse. Ronce Sauvage se réveilla donc de mauvaise humeur, pour changer. Il ne lui restait plus que la tanière des Apprentis. Sans aucun scrupule, il marcha sur la queue de son apprenti et d’une petite femelle écaille. Nuage des Marais et Nuage de Vipère ne comprendrait sûrement pas ce qui se passe.


« On se lève les mômes. On part. »


Il s’installa près de l’entrée du camp, une petite pile de gibier près de lui et attendit que sa patrouille émerge des tanières. Bientôt il pourrait enfin devenir chef aux yeux de tous.

« On se lève les mômes. On part. »

Tout était parfait, un rêve remplit d'ennemis que Nuage des Marais affrontaient et terrassait littéralement, derrière lui, tout son Clan qui comptait sur lui. Il était le meilleur combattant et un des rares à avoir encore le courage de combattre, certains corps apparaissaient sur le sol, inondé d'une substance rouge sang poisseuse, mais il s'en fichait, son heure de gloire approchait. Elle approchait à grands pas, il ne restait d'un félin encore bout. Il effleurait de peu cette sensation. Enfin il allait être reconnu.

Du moins, c'est ce qui aurait dû se produire dans ce monde parallèle si en contre partie, dans le monde réel, un certain félin ne l'avait pas piétiné. Nuage des Marais se releva d'un bond, les yeux réduits à deux fentes, le regard assassin et oubliant que ses muscles étaient douloureux, endoloris et réfractèrent, il les força à se tendre à l'extrême, prêt à sauter à la gorge de celui qui venait de le réveiller de la sorte. C'est une toute autre chose qui se produisit. Le temps de se rendre compte devant qu'il se trouvait, le temps de se réveiller correctement et de laisser la haine de ce rêve déchu s'envoler. Reconnaissant immédiatement Œil du Serpentaire, le novice se détendit, mais son regard n'avait en rien changé. S'il n'avait pas été le prochain Chef du Clan, Nuage des Marais lui en aurait certainement fait baver. Le problème ? Il avait du respect pour son Chef, parce que dans sa tête, si un matou parvenait à ce rang, c'est qu'il le méritait d'une manière ou d'une autre et bientôt, les choses seraient fixées. En effet, la mort d'Étoile du Balbuzard ayant été annoncé et découverte la veille, le Lieutenant avait dû prendre la légère décision de partir dès le lendemain à la Pierre de Lune pour recevoir ses neufs vies et son nouveau nom, ce qui confirmerait sa place de leader au sein du Clan. Quel chat n'a jamais rêvé de devenir Chef d'une troupe de Guerrier ? Et puis, surtout Chef du meilleur Clan, le Clan de l'Ombre. Nuage des Marais ne passa pas une seule seconde à rêvasser, son Chef avait disparu depuis une demi-seconde et Nuage de Vipère s'agitait dans son coin. Malheureusement pour elle et heureusement pour toi, elle vous accompagnait dans ce voyage, puisque Éclat d'Obsidienne, sœur d'Œil du Serpentaire et mentor de cette dernière était de la partie. Le novice bien campé sur ses pattes, prit soin de dégourdir un peu ses muscles avant de sortir, non sans lancer un sourire peu conventionnel à la jeune femelle qui le suivrait certainement de peu. Elle devait elle aussi être impatiente de partir.

Une fois dehors, Nuage des Marais prit soin de s'accoutumer à la douce lumière de l'aube. Un sourire ornait son visage qui était à présent celui d'un chat bien éveillé, ayant laissé toute trace de sa mauvaise humeur du fait de son réveil brutal de côté, ou presque. Le jeune félin ne mit guère longtemps à repérer son mentor, s'étant installé près de l'entrée du Camp, comme si l'heure du départ avant sonné. Alors que Nuage des Marais ignora les grognements de son estomac, ses yeux trouvèrent la pile de gibier aux pattes du Chef. Salivant intérieurement, le félin repoussa cette idée de sa tête et s'approcha de son mentor d'un pas décidé, rapide et assuré. Il salua ce dernier d'un signe de la tête, bien peu appliqué et articulas d'une voix étonnamment calme, trahissant son attitude réelle et dévoilant sans vergogne son arrière pensée.

« Mes salutations Œil du Serpentaire. Merci pour ce réveil délicat, je saurais te rendre ce moment de douceur. »

Je n'arrêtais pas de me prendre des coups de pattes et de queues, coincée entre deux chats. Je n'arrivais presque plus à respirer. Nuage des Orties un apprenti un peu pataud ne cessait de me mettre des coups de pattes et de queues. J'essayai de le pousser, mais ça m'était impossible. Ma force de mouche et mon corps ridiculement petit ne pourrait pas pousser quiconque. J'aurais aimé être grande, avoir un beau poil et de la force. Mais non, il fallait que je naisse petite, avec un poil affreux incapable d'avoir de la force. Un petit papillon se fit voir au-dessus de ma tête. J'étais sur le dos et seul mes pattes étaient libres de l'emprise de mes chers voisins. Je lui mettais des coups dans l'espoir de l'attraper, comme un chaton. Je me sentais un peu niaise de faire ça mais bon, ça me détendait alors que voulez-vous. J'étais beaucoup plus épanouie depuis que j'étais chez les apprentis. Je me sentais bien, chez des gens matures, plus qu'à la Pouponnière. Je sentis une douleur horrible dans la queue. Je comprenais maintenant ce que mes camarades ressentaient le matin quand je passais. Je grommelai ne comprenant pas vraiment qui venait de m'écraser ma queue, mais il allait payer.

« On se lève les mômes. On part. » La voix grave me fit sursauter, je n'étais pas la seule, mes grommellements cessèrent de retentirent dans la tanière. Nuage d'Ortie se leva à l'appel de la faim et couru dans un nuage de poussière vers la pile de gibier. J'en profitai donc pour enfin respirer et ne plus mourir de chaud entre ces deux chats. Je me suis levée lentement, j'étais crispée. Je suis restée dans la même position toute la nuit, mes muscles me le faisait bien comprendre au réveil. Je fis ma toilette, bloquant tous les apprentis voulant circuler. Une fois ma toilette terminée, je sortis de la tanière saluant d'un signe de la tête poli le futur chef, ignorant totalement Nuage des Marais pour qui je ne montrais aucune pointe d'attention.

J'étais tellement impatiente d'aller à la Pierre de Lune. Pouvoir parler aux chats étoilés devait être une sensation géniale. Mon cœur se serra et ma mine s'assombrit. Et Crochet de Vipère ? J'espérai de tout cœur qu'elle chassait avec le Clan des Étoiles, mais inconsciemment je savais que non. C'était triste à dire, mais ma grand-mère n'avait pas sa place là-haut. Je ne savais pas où elle vadrouillait en ce moment même et cela me rendait malade. Et moi ? Aurais-je ma place au Clan des Étoiles ? Je n'en savais rien et c'était une des milles questions que je me posais tout le temps. J'aurais bien ma réponse un jour. C'est avec du recul maintenant que je me rends compte que ma grand-mère n'était pas une personne bien. Je me suis fait totalement influencée, mais elle avait malheureusement raison sur certains points et tout le monde l'admettait. Mes parents étaient des gens faibles. Incapables. Voilà un mot qui les décrivait si bien. Il suffit de voir ma mère pour s'en rendre compte. Mon père l'a lâchement abandonnée et honte à lui, mais elle ne s'en remet pas. C'est fini maintenant, c'est du passé, mais elle ne s'y fait vraiment pas. Le grand amour disait-elle. L'amour est un sentiment fictif, mais elle se persuade que non. Pauvre petite, si faible.

Nous attendions toujours la venue D’Éclat d'Obsidienne et je me dressais droite, prête à accueillir ma mentor.

Depuis sa petite discussion avec Œil du Serpentaire, Eclat d’Obsidienne avait le sommeil bien maigre et agité. Comme à la bonne vieille époque de la mort de son père où elle se retournait l’esprit dans tous les sens pour réfléchir à la conduite à adopter. À cette époque, la guerrière noire avait pensé que, son frère lieutenant, lorsqu’il serait chef, jamais il ne la choisirait pour la seconder, et qu’elle ne serait jamais à la tête du clan. En gros, son rêve de toujours ne se réaliserait jamais. Mais là ? Son frère avait fait un coup de théâtre dans les règles de l’art. Il lui avait proposé d’être sa lieutenante, maintenant qu’il s’était débarrassé d’Etoile du Balbuzard. C’était improbable. Elle, qui avait pleins de secrets sensibles à son sujet, pour être complice de ses magouilles ? Mais jamais de la vie. Il était soit complètement visionnaire, soit complètement stupide.
Comme Eclat d’Obsidienne savait que son frère était beaucoup plus intelligent que ce qu’il en avait l’air, elle se doutait bien qu’il avait une idée derrière la tête. Le jeu était à présent de savoir laquelle. C’était évident qu’il pensait à quelque chose, et qu’il ne faisait pas confiance à sa sœur : qui le ferait à sa place ? Ben déjà, à sa place, on aurait eu déjà au moins une once de bon sens, à ne pas tuer son père et son chef. Œil du Serpentaire était un félin vicié et à la morale douteuse et le voilà qui voulait avoir sa sœur près de lui pour gouverner. Comme on dit, « il faut être proche de ses amis, et encore plus de ses ennemis ». Mais la noiraude avait tout simplement aucune idée de la catégorie dans laquelle elle se trouvait.

Réveille toi ma sœur, nous partons.

La concernée sursauta comme si sa vie était sur le point de se jouer. Elle se dressa sur ses pattes en moins de deux, et mit un instant avant de comprendre que c’était Œil du Serpentaire qui venait de la réveiller, en lui parlant d’une voix beaucoup trop douce pour être honnête. Quand il tourna les talons pour retourner à la place centrale, un frisson parcourut tout le corps de la guerrière noire. Elle avait horreur de ça. Tant de tendresse venant de son frère était anormal. C'était on ne peut plus inquiétant.
Tirée violemment d’un sommeil agité, il lui fallut quelques instants supplémentaires avant de réaliser ce qu’il venait de dire. Ah oui. Le voyage à la Pierre de Lune. Elle avait oublié. Eclat d’Obsidienne se passa un coup de patte derrière l’oreille et sur le visage pour se redonner une contenance et cacher du mieux possible sa fatigue avant de se décider à sortir de la tanière : Œil du Serpentaire, Nuage des Marais et Nuage de Vipère son apprentie, l’y attendaient.
À présent parfaitement réveillée (mais pas nécessairement d’une humeur radieuse), Eclat d’Obsidienne se fraya un chemin jusqu’à eux, et zieuta la pile de proies qui était à côté de son frère. C’est vrai qu’un bon déjeuner ne serait pas de refus. Alors que la guerrière arrivait, le guérisseur amenait les herbes fortifiantes. Elle le salua et le remercia d’un signe de tête et vint s’installer auprès du reste de la patrouille en réprimant un bâillement. De sa voix énergique habituelle elle miaula :
-Bon les jeunes, on avale tout ça et on part. Le voyage est long quand on n’a pas l’habitude.

Elle-même n’avait fait le-dit voyage qu’une poignée de fois, mais comme elle avait de longues pattes, ça lui faisait moins loin. En revanche pour son apprentie qui était bien plus menue, ça risquait de ne pas être une partie de rigolade. Et oui, la femelle noire se bornait à penser que Nuage de Vipère était vraiment très petite, certainement à tord et elle en avait conscience. Mais quand elle la voyait, elle ne pouvait s’empêcher de se dire que même certains chatons étaient plus costauds. Elle espérait de tout son cœur que la chatte tricolore finirait par prendre du poids, du muscle et de la taille, sinon elle était mal barrée.
Sans attendre une quelconque réaction de ses camarades, Éclat d’Obsidienne attira vers elle l’une des proies et sa part de remèdes. Elle avala le tout en essayant de grimacer le moins possible au gout désagréable des plantes : ça, c’était bien une chose à laquelle elle ne s’habituerait jamais. Son petit repas terminé, elle se fit une toilette rapide et se dressa sur ses pattes, remarquant que les autres finissaient aussi. Ils étaient tous prêts à partir, et Éclat d’Obsidienne s’engouffra dans la sortie du camp aux côtés de son frère tout en se demandant ce que lui apporterait cette visite chez leurs ancêtres, et ce qu’elle pourrait bien y voir. Elle éprouvait cependant une certaine appréhension, qu’elle cacha subtilement derrière un visage de glace : elle ne devait pas le montrer devant les apprentis, et encore moins donner ce plaisir à Œil du Serpentaire.

Œil du Serpentaire patientait, le bout de sa queue battait le sol tandis qu’il observait l’entrée des tanières. Le vieux guérisseur apporta les herbes fortifiantes, que le lieutenant avala sur-le-champ, et s’assit un peu plus loin ne voulant sûrement pas se mêler au reste de la patrouille. Les branches de lierre qui masquaient l’entrée de la tanière des apprentis frétillèrent et Nuage des Marais émergea, suivit de Nuage de Vipère. Le mâle brun et blanc grommelait, le museau froncé. Il était visiblement de mauvaise humeur, pour changer. La novice écaille quant à elle semblait impatiente. Elle adressa un signe de tête respectueux au mâle charbon et prit une proie. Nuage des Marais s’approcha rapidement, tentant peut-être d’intimider son mentor.


« Mes salutations Œil du Serpentaire. Merci pour ce réveil délicat, je saurais te rendre ce moment de douceur. »


Ne prêtant guère attention à ce que lui disait son apprenti, il chassa le mâle d’un mouvement de patte pour reporter son attention sur sa sœur qui venait d’arriver. La femelle grise s’approcha et adressa un signe de tête au guérisseur, le remerciant d’avoir apporté les herbes.


« Bon les jeunes, on avale tout ça et on part. Le voyage est long quand on n’a pas l’habitude. »


Un sourire se dessina sur le visage d’Œil du Serpentaire. Il était quelque part fier de la réaction de sa sœur, digne d’une lieutenante. Elle prenait des initiatives que peu de guerriers feraient. Et elle osait dire qu’elle n’était pas prête pour devenir lieutenant. C’était surtout parce qu’elle ne voulait pas être le bras droit de son frère.

Alors que la patrouille finissait de se préparer, le chef se leva et s’ébroua.


« Allons-y. Nuage de Vipère, Nuage des Marais, diriger la patrouille jusqu’au Charnier. »


Il laissa les apprentis partir devant, suivit du guérisseur. Éclat d’Obsidienne et Œil du Serpentaire s’engouffrèrent dans le tunnel qui menait hors du camp sans un bruit.


La patrouille progressait, les apprentis la dirigeaient sans mal. La petite Nuage de Vipère commençait à connaître le territoire. Après ce qui s’était passé sur le Chemin du Tonnerre, où elle y aurait laissé la vie sans l’intervention de la jolie guerrière du Clan du Tonnerre, elle avait plutôt intérêt à améliorer son sens de l’orientation. Éclat d’Obsidienne observait son apprentie. Etait-elle fière ? Le charbonneux ne saurait dire, étant donné le masque de froideur que sa sœur avait revêtu.


« Le poste de lieutenant te va comme un gant n’est-ce pas ? »


Un ronronnement espiègle monta dans sa gorge et il adressa ce sourire dont il avait le secret. Il accéléra l’allure pour dépasser les novices, reprenant la tête de la patrouille. Le Charnier se dessinait devant eux, à partir de là, le chemin devenait sinueux. Rencontrerait-il Étoile du Balbuzard ?

Nuage des Marais fut suivi de très près par Nuage de Vipère qui ne prit, comme il se l'attendait, pas la peine de le saluer lui. Il n'en fut pas offusqué et se contenta d'ignorer également sa venue. Il ricana intérieurement lorsqu'il vit la femelle se plier à saluer son mentor. Il n'aimait pas être ignoré en temps normal. Non, il appréciait d'être au centre de l'attention, mais avec elle c'était différent. Il appréciait de jouer à ce petit jeu avec elle. Il en ressortait bien plus de plaisir d'un simple salut qu'il aurait même prit comme une insulte, venant d'elle. Nuage des Marais fut repoussé par son mentor, sans une once d'attention. Un sourire se dessina alors sur son visage, précédemment animé par une grimace tentant de masquer une colère due à ce réveil forcé. Au fond, il était tout de même content et fier que son mentor devienne Chef et qu'il ait décidé de l'emmener avec lui à la Pierre de Lune. S'il avait été démonstratif, il aurait certainement fait voler en éclat ce masque de mauvaise humeur et serait excité, au point de ne pas tenir une seule seconde en place. À la place de quoi, sa mine renfrognée trônait en maître, derrière un sérieux et un calme qui en aurait étonné plus d'un. Il s'assit sagement en attendant la venue d'Éclat d'Obsidienne qui devait se joindre à la patrouille. À peine convenablement installé, que le calme ambiant fut bouleversé par l'arrivée de la Guerrière, précédée de quelques secondes par la Guérisseuse qui vint déposer un tas d'herbes à l'odeur âcre devant chacun. Le matou brun tigré ne fit guère plus attention que cela à l'arrivée des deux, les saluant que très brièvement d'un signe de tête morne, sans conviction et sans réelle valeur à ses yeux.

« Bon les jeunes, on avale tout ça et on part. Le voyage est long quand on n’a pas l’habitude. »

Nuage des Marais lança un regard de défi à la Guerrière. Il était certain de pouvoir se passer de ces herbes. En plus de cela, elles n'étaient guère attirantes avec cette odeur coriace qui semblait aller de mise avec une amertume au goût. Que très peu attentif, Nuage des Marais, plongé dans ces songes à tenter d'imaginer un goût horrible à ces plantes vit la patte d'Éclat d'Obsidienne lui passer sous le nez et choisir une proie parmi celle qu'Œil du Serpentaire avait amassé à ses pattes. L'Apprenti ne souhaitant pas choisir en dernier sa proie se hâta de passer devant le museau de Nuage de Vipère, non sans un petit sourire aguicheur et de se saisir de la première venue. Ce n'était pas plus que cela pour le choix, mais simplement pour le geste. Avoir les devants était toujours une bonne chose. Un long sourire orna son visage alors qu'il donna la dernière proie à Nuage de Vipère, tentative de plus pour se rendre plus ou moins amical à ses yeux. Il n'attendait pas de remerciement de cette dernière et n'en aurait certainement pas. Il se saisit de quelques herbes également, il avait prit la décision de se plier, pour une fois aux recommandations. Il avala sa proie avec une rapidité déconcertante, savourant néanmoins chaque bouchée et lorsque vint le tour des herbes, il ne put s'empêcher de les trier du bout de la patte et de goûter celle qui semblait la meilleure. À peine fut-elle dans sa gueule qu'un goût prononcé et déplaisant au palet du matou se diffusa dans son intégralité. Retenant une grimace, il se contenta d'avaler et de pester. Le tigré prit alors la décision de reformer un tas, le plus compact possible et d'engloutir tout en une seule bouchée. Alors qu'il eut avalé sa proie et ses herbes, qu'il regrettait de n'avoir pas agi de manière inverse, du fait du goût persistant des végétaux, son mentor se leva et articula :

« Allons-y. Nuage de Vipère, Nuage des Marais, diriger la patrouille jusqu’au Charnier. »

Nuage des Marais remercia faussement son mentor devant une pareille opportunité. Il se tourna vers Nuage de Vipère, lui lança un regard emplit de défi et sans même prendre le temps de détendre ses muscles, il partit en tête de la patrouille, certainement talonné par l’Apprentie et un peu plus loin derrière, la Guérisseuse, Œil du Serpentaire et Éclat d’Obsidienne. Nuage des Marais qui avait prit de l’avance en partant ainsi, redescendit en rythme pour se positionner aux côtés de l’Apprentie écaille de tortue. Un léger sourire ornait son visage et fidèle à lui-même, il articula tout en maintenant le cap.

« Salutations Nuage de Vipère. Je suis enchanté de pouvoir faire ce voyage à tes côtés, on va pouvoir rêver ensemble à la Pierre de Lune. »

Au fond, ce voyage allait peut-être être une bonne occasion pour le matou tigré. Peut-être est-ce qu’il arriverait à se rapprocher de la femelle. Le plus important était le voyage en lui-même. Combien d’Apprenti rêvait de le faire aux côtés de son mentor et futur Chef ? Certainement beaucoup. Même s’il n’en montrait rien, Nuage des Marais était emplit d’une fierté sans nom. Il se laissa, sans qu’il n’y puisse rien faire d’ailleurs, dépassé par Œil du Serpentaire qui filait comme une flèche pour reprendre la main sur la patrouille alors que le Charnier se dessinait devant. Nuage des Marais accepta sans une once de regret de céder sa place et décida que le voyage qui commençait devait être gravé dans sa mémoire.

Je me dandinais sur place. Le stress prit la place de l'impatience. Stressée pourquoi ? Pour milles et une et raisons, quelle question. Mes pensées défilaient en un éclair, mais une même question revenait tout le temps, tout le temps. Qui va m'accueillir ? Je commençais vraiment à m'inquiéter pour mon sort et je n'avais qu'une peur : personne. Et si personne ne venait ? Et si le Clan des Étoiles me détestait ? Je balayais mes pensées d'un coup de queue. Je ne faisais qu'empirer les choses, je devais me calmer et respirer un bon coup. Je fermais les yeux et pris une grande inspiration. Une deuxième. Mon rythme cardiaque était rapide, mais il s'est vite stabilisé. Je les rouvris. Tout était passé en une fraction de secondes. J'essayais de me persuader que tout allait bien se passer et dans le fond il n'y aucune raison pour que cela se déroule mal non ?

La venue du guérisseur me sortit de mes pensées. Il posa devant chacun d'entre nous un tas d'herbes. Je vis ensuite Éclat d'Obsidienne arriver. Je les saluait d'un signe de la tête polie. Le fait que ma mentor soit avec nous me rassurait quelque peu et je ne saurais expliquer pourquoi.

« Bon les jeunes, on avale tout ça et on part. Le voyage est long quand on n'a pas l'habitude. »

Je me suis levée d'un geste un peu lent et je me suis dirigée tout en baillant vers les proies restantes aux pattes du futur chef. Nuage des Marais me passa devant les yeux, avec son sourire qui me donnait envie de le claquer, il prit l'avant dernière proie, il devait être content de lui je suppose, ça va lui faire sa journée. "Youpi, je n'ai pas eu la dernière proie ! ". Je me moquais intérieurement de lui. Je me suis juste contenté de lever les yeux au ciel. Le matou tigré me donna la dernière proie content de lui. Je lui arrachais des pattes et un soupir sortit de ma gorge. J'ai pris ma part d'herbe et les reniflait. Une odeur peu appétissante emplit mes narines. Une grimace de dégoût se dessina sur mon jeune visage.J'étais dépitée. Je devais manger ... ça ? Je repoussais un peu mes herbes, comme un enfant qui refusait son repas. Je procédais d'une manière logique, j'ai mangé la moitié de ma proie et j'ai laissé l'autre de côté. Organisation. Je goûtais du bout de la langue un peu d'herbe. C'était comme ce que je pensais, dégoûtant. Je me suis forcée à tout terminer jusqu'à la dernière feuille et j'ai ensuite repris mon petit repas, faisant légèrement passer le goût amer des plantes vertes. Je me léchais les babines dans l'espoir de trouver un ou deux morceaux de chair, mais rien. Un rauque grommellement sortit de ma gorge. Œil du Serpentaire se leva.

« Allons-y. Nuage de Vipère, Nuage des Marais, diriger la patrouille jusqu'au Charnier. »

Nuage des Marais me lança un regard de défis, dire que c'était moi la plus jeune de nous deux, on peinerait à y croire du point de vu intellectuel. Je m'avançais lentement, pour ne pas prendre jeu avec le matou et un sentiment de supériorité emplit mes pensées. Je me sentais supérieure au matou, moi j'ai passé l'âge de faire la course. Il était pitoyable et fatiguant, réellement fatiguant. Ce qui allait être encore plus fatiguant c'était le voyage. Selon les dires de certains camarades le voyage était long, d'autres disent que non. Que des avis mitigés et rien de bien fou sortait du lot. Je regardais droit devant moi, faisant guère attention au matou tigré positionné à mes côtés.

« Salutations Nuage de Vipère. Je suis enchanté de pouvoir faire ce voyage à tes côtés, on va pouvoir rêver ensemble à la Pierre de Lune. »

Œil du Serpentaire reprit la tête de la patrouille et je me contentais de lever les yeux au ciel fasse à la remarque de l'apprenti. Ce voyage allait décidément être long, très long.

HRP:

Après que toute la troupe ait avalé le mélange d’herbes, les quatre félins s’engouffrèrent dans le tunnel de l’entrée du camp. Œil du Serpentaire avait ordonné aux deux apprentis de guider la patrouille jusqu’au Charnier. Les deux adultes fermèrent alors la marche, au grand désespoir de la femelle. Elle sentait qu’à côté d’elle, son frère était en pleine extase, sans vraiment qu’elle sache pourquoi. Enfin, elle se doutait bien qu’il devait être heureux d’être finalement nommé chef, mais elle sentait qu’il y avait autre chose qui passait dans la tête du mâle. Et tout se confirma quand le matou miaula, interrompant l’observation que faisait Éclat d’Obsidienne de son apprentie :
Le poste de lieutenant te va comme un gant n’est-ce pas ?

Un léger ronronnement parvint aux oreilles de la féline. Elle roula ses yeux glacés au ciel, laissant son frère se contenter de lui-même juste à côté d’elle. La guerrière voyait dans le coin de son regard qu’il faisait l’un de ces sourires qui lui donnait l’envie de l’étriper. La noiraude conserva son air froid collé au visage et fit comme si elle n’avait pas entendu la remarque de son frère.
C’était pourtant là que se soulevait un désaccord entre les deux. Eclat d’Obsidienne n’avait jamais prétendu ne pas être taillée pour seconder un chef du clan de l’Ombre. Elle avait toujours prétendu ne pas éprouver le désir de seconder son imbécile de frère qui serait chef du clan de l’Ombre. Surtout en sachant qu’il avait usurpé son titre de la sorte. S’il l’avait obtenu d’une manière honnête, peut-être qu’elle aurait accepté de le seconder. Peut-être. Mais rien n’était encore sûre. De toute façon, cette réalité n’était qu’hypothétique, et Éclat d’Obsidienne refusait d’y penser : la réalité dans laquelle elle se trouvait était bien moins charmante, et en attendant, c’était le bazar dans lequel elle se trouvait. Magnifique.

Le groupe continua sa route et lorsqu’il arriva devant le Charnier, Œil du Serpentaire repassa devant. Ravie (mais ne devant pas le montrer), Éclat d’Obsidienne laissa son frère et son apprenti passer devant, et elle se rapprocha de sa propre élève. Elle avait l’air agacée, elle aussi, ce qui arracha un petit sourire à la guerrière. Non pas qu’elle se moquait d’elle, c’était surtout qu’elle constatait que les deux femelles du groupe étaient énervées contre les deux mâles du groupe. Une ultime preuve que les femelles, c’étaient les meilleures. Allez. Girl Power.
-Alors ? Tu te sens d’attaque pour finir le chemin ?

Les deux femelles marchèrent encore côte à côte quelques instants avant que Éclat d’Obsidienne ne miaule, étrangement d’humeur à converser :
-Je me souviens la première fois que je suis allée là-haut, j’étais bien plus vieille que toi. Je sais pas si c’est de la chance que tu y ailles aussi tôt dans ton apprentissage, étant donné que c’est quand même assez éprouvant !

Elle lui lança un petit coup d’œil, et la voix douce, elle finit :
-Mais c’est une super expérience, tu verras !








(Bonne année à vous les p'tits chats :3
Ma réponse est pas exceptionnelle, je savais pas comment faire avancer l'action, excusez-moi xD)