« kind heart fierce mind brave spirit. » | Etoile de Sable - abandon

Le blizzard qui s’était installé sur la terre si paisible des clans avait enfin décidé de s’en aller et de laisser les chats tranquille. La trêve que les chefs de clans avaient déclarée touchait donc à sa fin. Feuille de Cèdre s’était donc mit en route depuis quelques temps déjà. Il s’était mis en tête de vérifier les frontières, peut-être que le faire seul était une erreur, mais il avait choisi de le faire ainsi. Cette tâche lui avait prise une bonne partie de la matinée puisque le soleil était désormais à son zénith. Il prit rapidement le temps de rentrer au camp, peut-être pour se poser un peu également. Le borgne en profita pour avaler un morceau, son estomac qui était vide peu de temps avant avait commencé à se manifester. Une fois sa proie engloutie, il prit le temps d’aller enterrer les restes dans un coin de la lande, remerciant le Clan des Etoiles pour son repas.

Il était là, étalé au soleil depuis quelques minutes maintenant. Lorsqu’il se mit en quête de sa sœur. Etoile de Sable. Peut-être accepterait-elle de passer quelques temps en sa compagnie, bien qu’il n’ait pas spécialement de doutes là-dessus. Il ne mit pas longtemps avant de la trouver. Le guerrier à l’œil bleu s’approcha alors d’elle en trottinant, la saluant d’un signe de tête avant de prendre la parole.

« Tu serais partante pour une partie de chasse avec ton frère ? »

waize

Le blizzard a cessé. Enfin. Le Clan du Vent, aussi fort soit-il, va pouvoir souffler. Les Guerriers ont assez soufferts, leurs côtes sont suffisamment présentes. Le vent ne les emportera plus dans une brise un peu trop houleuse, dans un coup de rage un peu trop puissant. Ils ont tenu bon. Qui sait comment, qui sait par quel moyen. À voir l’état de la plupart, famélique comme jamais, rachitique comme aucun autre félin de la forêt, la peau et les os ne seraient qu’une bien faible expression. Disparu comme par enchantement, le sale temps avait pris son envol, comme un grand et puissant rapace, ne laissant derrière lui que les traces de son passage dévastateur. Salement amoché, mais toujours debout, toujours victorieux et avec la même conviction de vivre, le Clan du Vent se relèverait. Bientôt, le passage de ce mauvais temps ne serait plus qu’un mauvais souvenir, Étoile de Sable en faisait la promesse. Elle qui avait lutté aux côtés de tous ses camarades, elle dont le corps était certainement l’un des plus marqués, allait suivre de près les événements. Elle n’allait rien changer à la routine qu’elle avait imposée depuis qu’elle était à la tête du Clan. Toutes les patrouilles auraient toujours lieu, la chasse et la protection des terres comptaient tout autant à ses yeux. Voyant la faiblesse de ses camarades, et la sienne, fassent aux aléas du climat, elle avait pris la décision d’instaurer de nouvelles choses au sein de son groupe. Mettant un point d’honneur à trouver les meilleures solutions et les meilleurs compromis pour les siens, elle avait décidé d’instaurer des entraînements martiaux, une fois la condition de chacun revenu. En attendant, elle n’exigerait rien de plus que le redressement de chacun. L’effort de l’un ferait le bonheur et la gloire de tous. Seul, ils n’avaient aucune chance de se relever, ensemble, tout leur était permis.

Ne perdant pas la petite habitude matinale qu’elle avait depuis qu’elle était devenue Lieutenante du Clan, Étoile de Sable se leva avant même que le soleil n’apparaisse à l’horizon. Profitant du sommeil de ses camarades pour sortir un moment du Camp, elle se permit une petite évasion. S’aventurant, après quelques étirements qui furent accueillis les pattes ouvertes par ses muscles, dans la lande, elle s’arrêta à flanc de colline, laissant le vent s’engouffrer dans son poil court. Le nez rivé vers le ciel encore sombre, elle contemplait de son petit promontoire les étoiles qui y trouvaient leur place. Toison Argentée apprécié par de nombreux félins claniques dont la meneuse du Clan du Vent ne faisait exception, elle s’accorda de longues minutes de questionnement à propos des récents événements et du futur choix qu’elle devait faire. Le Clan du Vent était resté bien trop longtemps sans Lieutenant, depuis elle, il n’en avait connu aucun. Les lois d’antan, la tradition clanique, avait été brisée par la meneuse qui bien trop inquiète pour les siens, mettaient alors tout en œuvre pour redresser et faire perdurer le Clan. Si aucun des Guerriers n’avait bronché, maintenant que le calme était revenu, elle savait qu’elle allait devoir faire face aux questionnements un peu trop pénibles, à son goût, de certains. Étirant un léger sourire sur la commissure de ses babines, son cœur savait qui désigner pour la seconder. Elle voulait choisir un félin fort, un exemple pour les autres Guerriers, pas un de ceux qui oserait lui tenir tête. Un félin qu’elle connaissait et qui partageait ses convictions. Un rapide tri sur le volet avait été fait et un seul nom retenait toute son attention. Elle lui en parlerait, lui proposerait et s’il acceptait, elle ferait son annonce.


La matinée s’était déroulée sans accroc, aucune question ni aucune remarque impertinentes n’étaient venus faire vriller les tympans de la meneuse. Le soleil avait fini par lentement atteindre son zénith, de retour d’une partie de chasse en solitaire, Étoile de Sable était ravi de pouvoir ramener un lapin un peu plus épais que ceux que ses Guerriers et elle trouvaient bien trop difficilement durant le blizzard. Fini les proies rachitiques et la famine, fini les maux d’estomac, cruelles répercussions d’un estomac déjà bien vide. Abordée par un félin dont la voix lui était plus que familière, la meneuse laissa traîner un discret sourire qu’elle offrait à son interlocuteur privé. Un sourire dont certains ne voyaient même pas les prémices, mais qui était un privilège non négligé pour Feuille de Cèdre. Posant un regard à la fois dur et doux sur le félin, elle était plus que ravie de le voir. Cette proposition qu’il lui soufflait et qu’elle allait s’empresser d’accepter, serait un très bon début pour entamer le sujet dont elle voulait lui parler. Ne laissant rien paraître de ce qu’elle pensait, elle se contenta de hocher la tête et de répondre de la voix un poil plus douce qu’elle lui réservait, avant de l’inviter à la suivre dans la lande :

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Etoile de Sable ne tarda pas à sourire. Sourire aussi discret que rare, elle n’en offrait que rarement aux autres chats du Clan, Feuille de Cèdre était un petit privilégier de ce côté-là, en même temps, si le lien de sang ne les liait pas, ce serait autre chose. La femelle posa un regard comme elle seule en avait le secret sur son frère, il était content de pouvoir passer du temps avec elle. Avec ce maudit blizzard qui les avait tous affamés, il était temps d’en profiter pour rapporter un peu de nourriture, ils en avaient tous bien besoin. La femelle sable hocha la tête à la requête de son frère, ne tardant pas à lui répondre positivement.

« - Avec plaisir. Le Clan a bien besoin de se remplumer.
- C’est parti alors. »

Feuille de Cèdre prit donc la tête inconsciemment, Etoile de Sable le rattraperait certainement. Le borgne se dirigea alors vers les Hautes Landes, espérant trouver au moins un petit lapin. Ne voulant absolument pas rentrer bredouille avec la cheffe du clan à ses côtés, même si c’est sa sœur, il ne voulait absolument pas descendre dans son estime, pas alors qu’elle s’était donné tant de mal à le rendre guerrier tant de lunes auparavant. Arrivé sur place, il se tourna vers sa sœur avant de démarrer, peut-être avait-elle autre chose à lui dire.

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S’attardant pour attendre une réponse de la part de son frangin, Étoile de Sable finit par en avoir une. N’ayant certainement pas tenu compte de son invitation, Feuille de Cèdre se contenta de s’extirper de lui-même de son champ de vision. S’il avait été quelqu’un d’autre, elle l’aurait certainement traité d’effronté, si ce n’est plus. Elle ne l’aurait même pas suivi, le plantant littéralement là où lui avait planté. Coup pour coup, œil pour œil, dent pour dent. Pourtant, il y avait quelque chose de spécial qui liait ces deux-là. Au-delà de la simple fraternité contre laquelle aucun ne pouvait rien, ils avaient lié des liens indéfectibles et ô combien précieux pour la meneuse. Seul vrai félin avec lequel elle avait une relation autre que fonctionnelle et purement arbitraire au sein de ce Clan, elle ne comptait pas le perdre. Se levant pour lui emboîter le pas, elle le suivit un moment, sans broncher, comme pour ne pas le froisser. S’il ne s’agissait que de cela, elle aurait certainement piétiné cette pseudo estime comme elle l’avait de nombreuses fois fait durant son apprentissage, simplement pour le remettre à sa place, devant le fait accompli et pour lui montrer ô combien il pouvait faire mieux. Combien de fois lui avait-elle fait mordre la poussière simplement pour qu’il progresse encore davantage ? Heureusement, elle s’était butée à un mur plusieurs fois. C’est peut-être même ce qui avait sauvé ce félin que beaucoup prédestinaient à rejoindre les Anciens bien avant l’heure ou à se reconvertir en tant que Guérisseur, ce qu’Étoile de Sable s’était refusé, offusqué qu’on retire si rapidement les rêves à un jeune félin. Elle s’est battue à ses côtés. Elle l’avait aidé à se reconstruire, puis à se construire une identité plus forte encore que celle à laquelle il prétendait. Elle l’avait épaule autant qu’enfoncé. Elle avait fait en sorte qu’il devienne ce qu’il était aujourd’hui, un de ces Guerriers que l’on regarde généralement avec beaucoup de respect, du fait de leur handicap, sachant très bien que ce rang n’est pas donné. Il faut mériter sa place parmi les Guerriers. Encore plus lorsqu’il nous manque un œil.

Si elle tenu bon à trottiner à un faible rythme derrière Feuille de Cèdre jusqu’aux Hautes Landes, c’était parce qu’une idée lui trottait derrière la tête. D’ici de maigres jours, elle serait contrainte et forcée de nommer un Lieutenant pour l’épauler. Si l’idée de devoir trouver un partenaire digne de sa confiance pour l’aider dans l’organisation du Clan ne l’enchantait pas, c’était simplement parce qu’elle ne partageait pas les ambitions politiques de tout le monde. Loin de réserver un sort aussi amical aux étrangers et aux sangs-mêlés que certains félins, elle vouait une haine plutôt viscérales à ces derniers, tout comme elle pouvait haïr profondément tout félin nuisant à son propre Clan. Jugée trop sévère par certains, peut-être un peu trop dur, pas assez flexible, elle n’est pas du genre à faire ami-ami facilement et n’est généralement pas à même à dévoiler le fond de sa pensée, préférant servir un baratin déjà tout prêt à ceux qui poseraient éventuellement des questions inattendues. Elle le savait, d’ici peu de temps, elle devrait le nommer. Loin d’être le tyran que certains voient en elle, elle n’est pas à même de défier plus longtemps le Code du Guerrier et la volonté même du Clan des Étoiles. Revenant soudainement sur Terre alors qu’une brise violente vint percuter son flanc, Étoile de Sable reprend bien vite ses esprits, mettant un moment de côté ses pensées et remettant, une fois de plus, le choix de son Lieutenant à plus tard. Suivant toujours les foulées de Feuille de Cèdre, elle s’était quelque peu laissé distancer. Distance qu’elle rattrapa avec une aisance folle, s’arrêtant au moment où son frère en fit de même. Sachant parfaitement comment la suite allait se passer, elle ressue le coup d’œil attendu de Feuille de Cèdre, auquel elle répondit avant de repartir face au vent, en quête de quelques lapins qui rempliraient l’estomac maigrichon des félins du Clan du Vent :

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Etoile de Sable s’était arrêté quasiment en même temps que le roux. Elle lui jeta elle aussi un coup d’œil avant de repartir devant de plus belle. Le vétéran s’était relever pour la suivre. L’estomac de Feuille de Cèdre se fit légèrement entendre, l’eau lui montait à la gueule rien que d’imaginer les lapins qu’ils pourraient rapporter. Etoile de Sable l’avait sorti de ses pensées bien savoureuses pour prendre la parole.

« - T'attends quoi ?
- Toi. »

Un petit sourire amusé passa sur le visage du matou bicolore, s’il tâtait le terrain, il savait aussi qu’il pouvait s’en mordre les pattes par la suite. Sa sœur n’était pas la plus tendre avec lui, mais elle l’était quand même beaucoup plus qu’avec les autres membres du clan, il était privilégié et le savait. Feuille de Cèdre s'assit l'espace de quelques instants, inspectant la lande de son œil valide. Il ne vit intrus de là où il était, son nez ne lui apportait pas non plus d’odeur inconnue. Mais aucun lapin n’était encore sorti de sa cachette, ils allaient devoir les traquer pour les faire sortir, et s’épuiser un peu plus à la course. Le duo allait réussir. Rentrer bredouille n’était pas dans l’optique du roux, et savait très bien que ce n’était pas non plus la vision des choses de sa frangine. Il reporta son regard sur Etoile de Sable avant d’ouvrir la gueule une seconde fois.

« On fait comment cette fois, comme d’habitude ? »

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Si son frère pouvait avoir la sympathie de l’attendre, elle ne lui ferait pas ce cadeau. Filant contre le vent, elle laissa ses pattes prendre leur aise, s’étendant de toute leur longueur, puisant dans des ressources qu’elles ne semblaient même pas avoir pour atteindre une vitesse plus que raisonnable. Est-ce que le borgne parviendrait à rattraper la flèche lancée ? Il avait plutôt intérêt s’il souhaitait profiter des précieuses minutes qu’Étoile de Sable lui offrait. S’il avait répondu quoi que ce soit à la Guerrière, ses mots n’étaient pas arrivés jusqu’à ses oreilles couleurs sables. Si les mots avaient une certaine force dans la gueule de certains chats, le vent se chargeait parfois de les balayer avec une facilité déconcertante. Est-ce que le bicolore la talonnait ? La Meneuse sable n’en savait fichtrement rien. S’il le désirait réellement, il parviendrait à venir à bout de la distance qu’elle avait gracieusement créée entre eux. S’il était suffisamment réactif comme elle lui avait appris à être, il serait à ses côtés d’une minute à l’autre. À rester dans l’inactivité, ses devoirs risquaient de la rappeler au triple-galop et avec ces derniers, le choix déterminant qu’elle se devait de faire pour tout le Clan. Comme ci choisir un bon Lieutenant était à la portée de tous les Chefs, comme-ci les Guerriers de confiance courraient les rues et comme si la femelle élancée l’offrait à n’importe qui. Assommée de nouveau par un flot de pensée, une lueur de peur et d’appréhension apparu dans son regard, brouillant un instant sa vision, ralentissant chacun de ses pas. L’opportunité pour le roux et blanc de jouer des pieds et des mains et de la rattraper. Si son regard restait invisible de tous, fixé désespérément sur la lande déserte, elle remercia le Clan des Étoiles de faire en sorte qu’aucun chat ne la voit dans cet état. Elle qui était si sûre d’elle en temps normal, qui prenait toujours des décisions avec une simplicité déconcertante, se trouvait devant le premier réel obstacle qui se dressait devant elle. Elle le savait, les Guerriers dont le bec avait été cloué par le blizzard, ne tarderaient pas à s’élever. Plus que loyale envers le Code du Guerrier, la Meneuse se devait de faire ce choix qu’elle avait mis de côté depuis déjà bien trop longtemps. Qui était-elle pour défier les lois suprêmes ? Pour qui se prenait-elle à ainsi détenir le pouvoir dans ses seules pattes ? Au-dessus, des autres ? Probablement pas. Pourtant au fond d’elle sonnait une raison qui faisait son effet, prenant une place non-négligeable dans ses actes. Pourtant, elle avait pris le poids de deux félins sur ses seules épaules ce jour où elle était rentrée de la Pierre de Lune, son nouveau nom et son nouveau rang ancré dans l’histoire. Malheureusement, elle avait choisi de se concentrer sur la survie de son Clan en un épisode difficile plutôt que de s’affranchir d’une formalité qui semblait anodine à l’époque.


Revenant à elle, tombant des nues et perdant totalement le fil de sa pensée, Étoile de Sable retrouva le visage souriant et au combien précieux de son frangin. Venue ici pour profiter d’un moment avec lui, comme pour remplir le tas de gibier, la femelle couleur sable se contenta de hocher la tête en sa direction. Si par comme d’habitude, il parlait bien de la façon par laquelle ils rabattaient à l’unisson les lapins, les plus rapides, les prenant en étau et ne leur laissant aucune chance, s’il parlait de cette technique volée à je ne sais quel animal mystique afin de permettre un rendement maximum de l’œil unique qui lui restait, alors, la Chef songeait à la même chose. Si elle était à l’initiative de cet apprentissage, de cet ouvrage, elle ne pouvait que rendre grâce à Feuille de Cèdre de s’être battu pour le rang qu’il occupait aujourd’hui. S’il avait perdu un œil par inconscience et pure bêtise, il en avait payé le prix fort, le prix juste à vrai dire. Devant prouver plus qu’un autre son aptitude à devenir un Guerrier, devant résonner pour ajuster les quelques rudiments qu’il connaissait déjà, il avait su trouver en sa sœur l’aide que son mentor de l’époque n’avait pas su lui apporter. Si ce dernier avait été capable de débuter sa formation, il avait vite baissé les bras, abandonnant son novice à son triste sort, alors que ce dernier se morfondait dans son désespoir, déjà suffisamment puni par la vie. Etoile de Sable avait été l’une des seules à y croire. Plus têtu encore que le concerné lui-même, elle avait parfois été contrainte de le traîner de force sur la lande, ne serait-ce que pour qu’il se prouve à lui-même qu’il pouvait réussir. À présent, il avait fait ses preuves, conquit le cœur et le respect de bien des Guerriers au sein du Vent et d’autre Clans. Son histoire était devenue une sorte de mythe, de but à atteindre. Elle résumait à elle seul le pouvoir de la volonté et de l’acharnement face au travail. Et la meneuse du Clan du Vent pouvait se vanter d’y être pour quelque chose. Se déportant à gauche du bicolore, se rendant invisible pour ce dernier, Étoile de Sable frôla du bout de sa queue le flanc du Guerrier, lui signifiant ainsi qu’elle était à sa place, dorénavant, tout se ferait en silence.

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Feuille de Cèdre avait proposé leur technique de chasse habituelle. C’était Etoile de Sable qui était à l’origine de cette façon bien étrange aux yeux des autres de chasser. Elle avait voulu exploiter le potentiel du guerrier à l’œil unique. Et ça avait été un énorme succès. Le tas de gibier serait bien regarni s’ils revenaient tous les deux avec un lapin, c’était quelque chose qui risquait fortement d’arriver. Quelques images du passé ressurgirent dans l’esprit du matou, qu’est-ce qu’il avait été bête de vouloir affronter ce blaireau tout seul. Mais en même temps, il sait aussi que s’il ne l’avait pas fait, il ne serait pas la petite légende vivant qu’il est actuellement. Bon nombre de guerriers borgnes avaient fini dans la tanière des anciens avant l’heure, lui ne s’était relâché que quelques instants avant de se reprendre en main grâce à sa sœur, et il ne la remerciera jamais assez pour ça. Etoile de Sable était à présent sur sa gauche, il savait qu’elle était là, même s’il ne la voyait pas. Le travail allait commencer. Feuille de Cèdre parti alors à la recherche de quelques lapins avant de commencer sa course pour rabattre les lapins auprès de sa sœur. Le poil au vent, et l’eau à la bouche.

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À peine, sa queue se décolla-t-elle du flanc de son frangin que la symbiose se forma. Les deux n’avaient pas besoin de mots. Si les débuts de ces chasses en duo s’étaient bien souvent révélés chaotiques pour le Clan et pour les proies qu’ils perdaient à eux deux, ils avaient fini par développer la technique dont il userait aujourd’hui. Si elle avait demandé un effort des deux côtés. Si elle avait demandé à l’une de revoir sa façon de chasser et à l’autre d’en apprendre une nouvelle, faisant avec ce que les éléments lui avaient laissé, ils avaient, tout deux, réussi à surmonter cette différence, cette difficulté, pour finalement en faire une force. Lorsqu’ils chassaient ainsi, peu de proies résistaient. Les mots dont les Guerriers pouvaient user entre eux étaient devenus fluets et bien trop malvenus entre la sœur et le frère. S’il perdait quelque peu en discrétion de se balader ainsi côte à côte, il la regagnait en évitant les mots oiseux. Tout résidait en une parfaite coordination, une connaissance de l’un et de l’autre, de son rôle comme des potentielles erreurs possibles. S’ils avaient longtemps étaient regardés de travers par les autres Guerriers, avec cette façon peu conventionnelle d’amener de la nourriture à se jeter dans les pattes mêmes des félins, nombreux avaient finalement été ceux qui, bluffés par les résultats, avaient tenté de la reproduire. Une œillade discrète envers son frangin qui courrait à ses côtés et le meneur su qu’il allait partir. Et pour confirmer ses pressentiments empreints d’expérience, quelques courtes secondes après, le corps roux de son frangin s’éloigna du sien et de son champ de vision. La chasse commençait réellement ici. Le rouquin allait à la recherche de proie, de lapins. Son œil unique ne lui proférait pas davantage particulier, mais il n’était plus l’inconvénient qu’il avait longtemps été. Un sourire discret sur le visage de la femelle s’accorda à ses babines lorsqu’elle entrevit l’effluve discret d’un lapin. Son regard se fit brillant lorsqu’elle entrevit un éclair roux partir sur la piste.

Quelques longues secondes s’écoulèrent sans que la femelle n’eût un visuel sur son frangin. Et pourtant, elle ne s’en inquiéta pas un moment. Si elle ne le voyait pas, elle ressentait sa présence. Son odeur était partout et son esprit avec le sien. Elle savait ce qu’il faisait comme il savait parfaitement ce qu’elle attendait de lui. Puis, faisant leur apparition sur une ligne d’horizon, dans un nuage discret de poussière, une masse brune talonnée de prêt par Feuille de cèdre. Les yeux verts de la femelle dénotèrent rapidement la présence des proies. L’étau se resserrait alors qu’elle s’activa à emprunter la direction choisie par son frangin. Un malin sourire sur son visage fit son apparition, mais ne resta que quelques secondes. Quelques secondes qu’elle passa à remonter les plaines, pour se positionner convenablement pour une réception express. La masse fauve se divisa finalement en quelque trois corps, trois lapins qui se jetaient dans la gueule vide de la meneuse sans même s’en rendre compte. Feuille de Cèdre faisait son job, rabattait les proies, ne leur laissant pas une seule fois pensée à une ruse. Si elle s’était préparé à voir débouler rapidement les lapins, la meneuse fut néanmoins incapable de réceptionner les trois boules de nerfs. Deux sur trois finirent sous ses crocs, tandis que la troisième, effrayée, se retourna nette contre son premier assaillant. Finissant d’achever sa deuxième proie d’un coup de crocs, la meneuse reporta son regard sur son frangin dans la gueule duquel pendait mollement le dernier lagomorphe, celui qui avait bravé sa première peur pour tenter de s’en sortir. Souriant devant le succès de cette chasse, la femelle s’accorda quelques secondes pour reprendre son souffle et laisser son frère en faire de même avant de lui adresser la parole, dans sa voix perlait une fierté qu’elle ne cachait pas :

© waize