(LUNAR POD) Could live, could die - end

ORDRE D'APPARITION :
1. Étoile de Pierre et Éos
Le PNJ qui court au camp prévenir Nuage des Ruisseaux
2. Nuage des Ruisseaux au moment de la mise bas
3. Les petits cailloux

La vie d'Aigue-Marine avait énormément changé depuis les douze dernières lunes. Elle avait quitté la tanière des apprentis pour celle des guerriers, ce qui avait été déjà en soi un changement énorme ; mais le plus impressionnant avait été celui qui s'était opéré en elle, tandis qu'elle souffrait du manque de reconnaissance de ses pairs et du manque de confiance en elle. Elle avait d'abord été victime de cette situation, puis, peu à peu, grâce à quelques belles rencontres et à une affirmation de soi, elle avait travaillé sur elle-même et avait peu à peu pris confiance en elle, se sentant de plus en plus légitime - dans son rôle de femelle, mais aussi de guerrière - et refusant d'être à nouveau considérée comme inférieure. Cela commençait par ne plus se croire inférieure elle-même.
Les lunes s'était enchaînées et les changements aussi. Le plus notoire datait de la lune passée : Étoile de Pierre, à l'époque encore appelé Lapis Lazuli, lui avait déclaré son amour, et après avoir vécu un temps cachés, ils pouvaient désormais couler des jours heureux, aucune menace ne pesant plus sur eux. Ni sur les petits qu'ils attendait ; car oui, Aigue-Marine était enceinte, et à quelques temps du terme, cela n'était plus une surprise pour personne, pas même pour ceux qui ne le savaient pas : le ventre rebondi de la femelle était une preuve évidente de son état.

Cela faisait quelques jours désormais qu'Aigue-Marine n'officiait plus en tant que lieutenante du Clan ; elle avait dû rejoindre la pouponnière et accepter son nouveau rang de reine, à contre-cœur : elle regrettait désormais les diverses activités qui ponctuaient ses journées avant qu'elle ne doive se résigner à se reposer nuit et jour dans la pouponnière.
Mais aujourd'hui, elle n'y avait plus tenu. Trop d'ennui, trop de temps passé à rien faire si ce n'est admirer son ventre bouger sous les coups de ses petits - qui allaient être des chatons très dynamiques, elle le sentait. Alors elle était allée supplier Étoile de Pierre pour qu'il accepter de l'amener se balader, ne serait-ce que quelques minutes, en-dehors du camp. Le meneur et futur père de famille avait d'abord rechigné, l'idée ne lui paraissant pas si raisonnable que cela ; mais après tout, une promenade au rythme lent - l'état d'Aigue-Marine l'empêchait de marcher vite - au sein des terres de la Rivière ne pouvait pas être dangereuse ! Alors, certainement tannée par les demandes incessantes de la guerrière au poil brun - qui, en plus, lui faisait les yeux doux et de douces promesses - il avait accepté.

Les deux félins se dirigeaient à présent vers la rivière, l'endroit favori d'Aigue-Marine parmi leur territoire. Ils entendaient le murmure de l'eau derrière les buissons, quelque peu entravé par le gel qui commençait à emprisonner la rivière. Rien qu'à entendre cette douce mélodie et à renifler l'odeur de la verdure, la future mère se sentait heureuse ; et, marchant aux côtés du futur père de ses chatons, elle se sentait épanouie et très chanceuse.
Malheureusement, une nouvelle odeur vint chatouiller leurs museaux à tous les deux, et Aigue-Marine sentit soudainement Étoile de Pierre se crisper. Il connaissait cette odeur : elle était celle d'un étrange groupe de félins venus de loin, croyant en une "Lune", lesquels étaient venus menacer Étoile de Pierre quelques jours auparavant. Aigue-Marine ne les avait pas rencontrés mais au comportement inquiet et protecteur d'Étoile de Pierre, elle sentit soudainement une angoisse profonde lui déchirer les entrailles.



Hors RPG:

La vie d'Aigue-Marine avait changé, c'était indéniable. Et celle d'Étoile de Pierre l'avait accompagné dans ces changements. D'abord simple guerrier du nom de Lapis Lazuli, il s'était rapproché de la femelle grâce à un renard. Il avait combattu lors de la bataille des Rochers du Soleil. S'était vu confier une apprentie, désormais devenue guerrière, dont il était incroyablement fier. Il s'en était occupé comme sa fille lorsque son père, l'ancien lieutenant, avait disparu sans laisser de traces. Puis il était devenu lieutenant à sa place, sous le règne d'Étoile du Corbeau. Il avait été marié à un chaton, et avait vécu un amour interdit avec la femelle qui était désormais enceinte de ses petits. Le Clan du Tonnerre avait attaqué et reprit les Rochers du Soleil, et l'ancien meneur avait rejoint le Clan des Étoiles, tué par ses blessures et son orgueil. Lapis Lazuli était devenu Étoile de Pierre, avec à ses côtés Aigue-Marine en tant que lieutenante. Mais la belle femelle avait été forcée de rejoindre la pouponnière. Et bien qu'il s'en voulait, la voyant s'ennuyer et vouloir bien vite rejoindre ses activités habituelles, le félin gris-bleu se voyait bien rassuré de la savoir là-bas, à l'abri du danger.

Cependant, deux lunes pouvaient être longues, alors quand sa chère et tendre était venue lui faire les yeux doux pour la supplier de sortir, il n'avait pas pu refuser sa demande bien longtemps. À condition qu'il l'accompagne. Au début, plein de questions s'étaient imposées à lui. Et si elle mettait bas lors de la balade? Si un renard arrivait? Si elle attrapait froid? Si elle se blessait en tombant? Mais il l'aimait, et lui faisait confiance. Alors il oublia bien vite tout ces traquas et s'en alla à ses côtés, marchant lentement pour s'adapter à son allure. Et puis, au final, lui aussi se complaisait bien de cette sortie tranquille. En quoi un peu de repos pouvait leur causer du tort? Cela faisait longtemps qu'ils n'avaient pas passé un peu de temps seuls à seuls, en dehors de ses obligations de chef.

Bientôt, néanmoins, ils n'étaient plus seuls. Et les poils d'Étoile de Pierre se dressèrent furieusement sur son échine. Tout lui revint en tête. « Famille pas très forte en ce moment, trop de bébés et de faibles. » Ils savaient. Les intrus savaient pour Aigue-Marine, sans qu'il ne sache comment. Une taupe, un traitre, un foutu traitre, une pourriture, une gangrène du Clan de la Rivière, une tique à arracher au plus vite. C'est tout ce qu'il voyait comme possibilité. Il refusait de croire aux histoires de lune.
Étoile de Pierre se crispa, lança un regard emplit de terreur à Aigue-Marine, et se plaça entre elle et les ennemis. Il avait neuf vies. Il pouvait mourir une fois, ce n'était pas grave. Mais elle, elle ne pouvait pas. Elle ne partirait pas avant lui, ça n'arriverait pas. Il empêcherait ça.
Ô, comme il s'en voulait. S'il n'était pas enragé par la présence des Lunar Pod, il en aurait pleuré. Pleuré pour sa bêtise, sa terrible erreur. Étoile du Corbeau avait raison. Un chat amoureux a des faiblesses. Il aurait du être impartial, ne pas céder face à son adorable visage, à sa voix magnifique et à tout l'amour qu'il portait pour elle. Seul face à la situation, il avait l'impression de pouvoir entendre rire Étoile du Corbeau derrière son dos, lui hurlant qu'il avait raison, et qu'il avait mérité tout ça.
Peut-être aurait-il raison, fini-t-il par se dire, tandis qu'il grognait d'un air menaçant face à l'ennemi.

Enffiiiiin de l'action. Krov avait accepté que j'aille faire un tour chez les poissons pour leur demander leur réponse. Éther était bien assez grande pour protéger notre abbesse... Et puis, en ce moment, chez nous, c'était l'effervescence. Tout le monde était surexcité à l'idée de bientôt connaître ces claniques. Tous se contenaient pour ne pas se blesser, et donc risquer de rater une bataille prochaine. Je me lèchai les babines. Ooh, j'espère qu'ils diront non. Surtout que les écureuils nous avaient dis oui à condition qu'on tape les poissons. Le monde est quand même bien fait.

C'est guillerette que je me dirigeai vers leurs terres. Et je les vis. J'avais de la chance, c'était une demoiselle et le charmant chef. Presque joviale, je m'approchai en trottinnant un sourire aux lèvres. Pour le moment je ne laissai pas transparaître mes intentions. Ils avaient peut être opté pour un oui qui sait. Mais vu la réaction du mâle et son instinct de protection, j'en doutais. Je miaulai alors, d'une voix bien trop joyeuse compte tenu des circonstances :

"Le temps imparti s'est écoulé. Notre abbesse Krov souhaite connaître votre réponse quant à notre proposition, en toute connaissance des conséquences suivant cette dernière."

Oh que j'avais hâte qu'ils disent non pour que je puisse m'amuser.

- Le temps imparti s'est écoulé, miaula la femelle. Notre abbesse Krov souhaite connaître votre réponse quant à notre proposition, en toute connaissance des conséquences suivant cette dernière.

Étoile de Pierre la toisa durement. Il avait peur, peur de leurs pouvoirs. Mais il ne devait pas le laisser transparaitre. Il n'en avait pas le droit. Aigue-Marine était là, derrière lui. Il n'avait pas le droit de la laisser voir qu'il avait peur pour elle.
Comment ces félins étaient-ils toujours en vie? Ils logeaient sur les terres des quatre Clans. Quatre Clans puissants prêts à tout pour défendre leurs territoires. À sa connaissance, aucun guerrier n'aurait laissé ces intrus se reposer tranquillement du mauvais côté de leur frontière. Alors pourquoi?

Pourquoi cette femelle se tenait-elle là, droite et fière, presque moqueuse, en parfaite santé, alors qu'elle était normalement en territoire hostile?

- Notre réponse reste la même, feula-t-il. Les étoiles sont notre seul guide. Nous n'avons pas besoin de solitaires miteux pour nous montrer la voie.

Solitaire miteux, vraiment? Il se posait sérieusement la question. D'où venaient ces chats et leurs connaissances? Avaient-ils réellement des pouvoirs? Pendant un instant, le félin regretta sa réponse. Il regretta de ne pas y avoir réfléchi plus sérieusement, comme Nuage de Pluie lui avait conseillé. Puis il feula, contre l'étrangère et contre lui-même. Il n'y avait pas à douter. Il n'y avait pas à penser. Ces intrus devaient partir. Ils étaient une écharde ancrée profondément dans la chair de la forêt qu'il fallait ôter.

Vous êtes-sûr hein? Comment expliquez-vous que l'on a pu atteindre les campements de chaque clan sans embrouilles? Comment a-t-on pu les trouver? Alors, vous croyez réellement que l'on aura du mal à ... oh tiens. Faire du mal à ... ça ?

La femelle montra Aigue-Marine du regard. Étoile de Pierre se tourna vers elle. Il pouvait la voir, si belle, si précieuse, si forte, mais aussi si fragile et démunie. Dans son état, en tant que Reine, elle ne pouvait rien faire. Elle était en danger. Si la messagère des Lunar Pod l'atteignait...
Elle ne l'atteindra pas.

Sans chercher à réfléchir, il se lança sur elle, toutes griffes dehors. Il n'aurait aucune pitié, pas cette fois. Même s'il détestait ça, il serait comme Étoile du Corbeau. Intransigeant, ne pensant qu'à ce qui l'importait. Il aurait du être ainsi dès le début. Il aurait du refuser à Aigue-Marine ce qu'elle voulait, qu'importait son beau sourire. Mais il était trop tard pour les regrets. Tout ce qu'il voulait, pour se rassurer, c'était sentir ses griffes se planter dans la chair de l'ennemi, la regarder s'enfuir, et regagner le Clan en sureté avec la jolie Reine.
Mais l'on ne peut pas toujours obtenir ce que l'on veut.

Il jeta un regard désespéré vers sa compagne. Comme c'est beau l'amour. Je ricanai, prête à encaisser son attaque. S'il croyait s'attaquer à une inexpérimentée, il allait être surpris. J'avais enduré la violence depuis ma tendre enfance. Et il était borgne, même s'il se déplaçait comme un voyant normal. J'avais fait le point sur ses faiblesses et ses atouts. Sa force. Il ne devait pas me toucher.

Il bondit vers moi, crocs en avant. Tellement prévisible. D'un bond souple, je m'écartai au dernier moment, et tout en agilité, lui balançai mes griffes acérées le long de son flanc. Et je bondis vers sa demoiselle, juste pour lui faire monter la pression. Tous mes sens étaient concentrés sur lui, mais je voulais faire monter la peur. Le désespoir. La détresse.
Je ne pus faire cependant que quelque pas. Le dicton devait être vrai; l'amour donne des ailes. Sa machoire se resserra sur mon dos. La douleur m'électrifia.

Et je souris. Cela faisait si longtemps que je n'avais pas ressenti cela. Un adversaire un minimum à ma taille. Enfin.

Et le combat s'engagea. Tout avait été prévu. Je devais emmener le fauve vers les buissons. Là se tenait une embuscade. Néamoins, il se révélait coriace et mon manque d'attention me valut un vilain coup à l'épaule. Je feulai, et lui sautai à la gorge. Je lui tournai autour, profitant de mon atout vitesse et agilité, et pour le fatiguer, le coco. Mes griffes étaient en extase. Elles tranchaient, coupaient, déchiraient. Et mes crocs ne tardèrent pas à s'enfoncer dans la chair. Le sang vint alors titiller mes papilles. Ce goût de métal réveillait d'autant plus mon instinct de tueuse. Et j'augmentai encore une fois la cadence de mes frappes.

Le meneur se battait avec toute sa hargne et sa rage. Jamais elle n'atteindrait Aigue-Marine, il ne laisserait pas cela arriver. Le combat qui se présentait à la reine n'avait rien d'un combat à la loyale. C'était une bataille acharnée, où les deux combattants n'en avait pas grand chose à faire de la vie de l'autre. C'est ainsi qu'elle devait se finir. Par la mort de l'un d'entre eux.

Étoile de Pierre ne réfléchissait pas. Il se contentait de frapper, mordre et griffer comme il le pouvait, opposant résistance à la femelle pour l'empêcher de passer. La tâche était moins facile qu'elle en avait l'air. L'ennemie était fine et agile. Elle saurait saisir l'instant pour se faufiler et rejoindre sa proie, si l'occasion se présentait.
Une proie. Oui, à ce moment là, Aigue-Marine n'était plus une lieutenante, ni plus une reine. Elle n'était plus qu'une proie convoitée, un trophée de valeur que l'un voulait garder, et dont l'autre voulait s'emparer. L'enjeu était grand. Bien plus grand qu'une vie à prendre. Plus qu'une guerrière, c'était une image importante du Clan de la Rivière. Le lieutenant d'un Clan représentait sa force et son équilibre. La toucher, c'était atteindre le Clan tout entier en plein coeur. Et les lieutenants, contrairement aux chefs, n'avaient pas neuf vies. Si on la lui prenait, il ne la retrouverait pas.

Cette idée lui traversa l'esprit comme un poignard en plein coeur. Elle nourrit sa haine, sa peur et son angoisse. Elle emporta avec elle la douleur.

Le pelage des deux combattants étaient tâchés de sang. Son sang, et le sang de son adversaire. Elle lui avait déchiré une oreille, fait perdre une griffe, arraché quelques lambeaux de peau et mordu à sang. Mais les blessures étaient moindres face à la fatigue. Malgré l'adrénaline, le stress, la difficulté à la maintenir pour l'empêcher d'atteindre Aigue-Marine, et son âge, il commençait à s'essouffler.

Dans un élan d'espoir, un coup de patte violent s'en alla atteindre la face d'Éos, toutes griffes dehors. Il put atteindre son oeil, et un soulagement et une satisfaction étrange vinrent l'atteindre quand il put sentir son globe oculaire se déchirer sous elles.

Il s'essouflait. Cela se sentait. Mon plan fonctionnait à merveille, et nous étions maintenant proche des buissons. Un rictus carnassier se dessina de nouveau sur mon visage. J'esquivais un coup venant de la droite, mais ne remarquai pas celui provenant de l'autre sens. Et là, une douleur atroce me foudroya, m'arrachant un hurlement. Et je peux vous dire que cela n'était pas arrivé depuis longtemps.
Je titubai et vomi du sang. Mon adversaire profita de mon état de faiblesse pour me lacérer les flancs. Je sentis des os craquer. Un voile rouge sang avait embrumé ma vue. Le con. Il m'avait arraché un putain d'oeil. Et là, je devins folle. Il m'avait rendu faible. A cause de lui, Krov n'allait plus vouloir de moi comme guide, étant borgne. Je lui ferais regretter.

Ma haine, ma rage. Si j'étais une folle avant, maintenant, tout bon sens, toute raison m'avait quitté. C'était un combat où au final chacun luttait pour sa vie. Mais je n'allais pas faire long feu, n'ayant pas de temps pour m'acclimater à la perte de ma vue du côté droit. Merde, qu'est-ce-que ça faisait mal. Et pourquoi l'embuscade tardait à se déclencher?

Enfin, délivrance. Mes camarades firent surface, arrachant un hoquet de surprise au mâle. Mon sang coulait, coulait coulait. Mais mon désir de vengeance était plus fort. C'était une affaire personnelle maintenant. Je contournai le combat, et m'approchai alors de la femelle. Le poil visqueux, je n'étais plus grise mais rouge. De mon sang du sang de l'étoile. Et bientôt du sien. Mon orbite dorénavant vide faisait un trou béant sur mon visage. Me battre ne relevait que de réflexes pour moi, et la soif de sang semblait m'offrir des forces surnaturelles. J'étais à moi-même une vision d'horreur. Mon oeil unique la regardait avec une lueur nouvelle. La Mort était mon alliée et j'allai bientôt lui envoyer une nouvelle arrivante. Et Étoile de Pierre allait tout voir. T O U T.

Tout s'était enchaîné à une telle vitesse. À peine quelques minutes auparavant, Étoile de Pierre et Aigue-Marine se promenaient paisiblement, amoureux, heureux, pleins d'espoir en l'avenir. Et maintenant, le meneur bleu-gris était aux prises d'un groupuscule de chats et la femelle qui était arrivée en premier s'approchait d'Aigue-Marine. Dangereusement. Dans son regard se lisait la mort, et surtout, un désir de vengeance que rien n'arrêterait. La raison avait quitté son corps, et Aigue-Marine regretta soudain d'avoir tant insisté pour qu'Étoile de Pierre lui permette de sortir du camp. Elle si fière du Clan de la Rivière, de ses guerriers, voilà qu'elle se retrouvait à trembler comme une feuille face à une femelle qui lui paraissait deux fois plus imposante et dangereuse que son corps ne le laissait présager.
C'est qu'elle avait pressenti. Elle avait senti que ça allait bientôt en être fini d'elle. Elle avait beau être une guerrière aguerrie, elle ne pourrait rien dans son état. Elle ne pouvait rien. On pouvait espérer que des renforts de la Rivière arrivent, alertés par l'odeur du sang ; mais, s'ils étaient en chemin, ils n'arriveraient pas à temps. Aigue-Marine le savait : c'était fini pour elle. Mais elle ne se battait pas que pour sa peau ; elle se battrait au moins pour que ses petits vivent.

Alors, dans un élan de désespoir autant que de courage, elle se dressa face à l'intruse au poil claire, le pelage hérissé, les griffes et les crocs sortis, et un long feulement, qu'elle ne s'était jamais connu, sortit de sa gorge. Elle essayait de paraître le plus imposant possible, mais à tout mouvement qu'elle faisait, elle sentait son gros ventre la ralentir ou l'empêcher de bouger en toute liberté. Elle sentait sa faiblesse ; comment l'autre, qui en plus la voyait, pouvait-elle ne pas en prendre avantage ?

Et le combat commença. Étonnamment, Aigue-Marine se défendit vaillamment. Aucun coup ne lui fut donné durant les premières minutes du combat. C'en était presque miraculeux, et un instant, elle se prit à reprendre espoir, à croire qu'elle allait s'en sortir, qu'ils allaient s'en sortir, que tout rentrerait dans l'ordre.
Mais, après ces quelques minutes, elle commença à s'affaisser, à se sentir moins souple, à fatiguer. Elle encaissait moins bien les coups, et n'avait plus de force pour réussir les siens. C'était le moment. Mais, si elle acceptait - durement - de mourir aujourd'hui, elle refusait catégoriquement que ce soit le cas de ses petits. Non. Les petits vivraient ; elle les laissait à Étoile de Pierre, elle avait confiance en lui. Et, depuis le Clan des Étoiles, elle les veillerait.