(lp) Tais-toi et subis ||feat Picolo END

Je me recroquevillai dans un coin, les yeux écarquillés par l'appréhension. Mon souffle était court, j'avais couru couru couru pour ne pas tomber entre leurs griffes. C'était une petite troupe de gros dur, qui se les jouaient caïds. Ils jouaient sacrément bien d'ailleurs... Ils m'avaient appelé pour tester sur moi leurs nouvelles techniques. J'avais fui. L'un d'eux m'avait aperçu. Et m'avais coursé.
Je tremblai. Il faisait froid. J'avais sommeil. J'avais faim. Je ne connaissais pas les nouveaux lieux. On ne faisait que se déplacer, trop de nouvelles odeurs, de changements. Tout le monde était surexcité. Les traces ne partaient plus.

Un bruit attira mon attention, derrière moi. Je me figeai, et me retournai lentement... Ce n'était pas les petits. Mais un chat bien plus gros, qui me regardait avec une lueur mauvaise. Je m'aplatis au sol, comme si je pouvais faire corps avec la terre. Comme si cela allait me protéger du mal environnant...

" Toi, là ! Tu fais du bruit. Tu m'as réveillé. "

J'écarquillais les yeux et m'aplatis encore plus dans le sol. Nonnonnonnonnon pas lui. Je l'avais reconnu, il s'appelait Picolo... Grand mastodonte... qui était connu pour son agressivité. Je reculai d'un pas. Et une voix grave et puissante résonna :

" T'AS ENTENDU ?! TU M'AS RÉVEILLÉ ! "

L'adrénaline remonta immédiatement dans mes veines. Mon coeur fit un bond. La terreur remontait. Mon souffle se faisait court, mes yeux semblaient sortir de leurs orbites tant il m'effrayait. Il me fallait partir d'ici et vite. Je regardai vivement, à droite, à gauche. Aucune sortie. La seule possible était de retourner en arrière, mais j'entendais au loin les apprentis qui me voulaient du mal... J'enfonçai ma tête dans le sol, les pattes sur mes oreilles et fermai les yeux. Je murmurai la voix éteinte par le stress :

"je...je vous... demande pardon monsieur..."

J'entrouvris un oeil... et vis à ma grande surprise une brèche... Si j'arrivai à l'atteindre, lui ne passerait pas.
Sans perdre un instant, je bondis dans sa direction. Fuir, fuir le plus loin possible...

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Je sentis sa lourde patte se poser sur l'une des miennes. Je retins un gémissement, et me tournai vers lui, apeuré.

" Mais "monsieur" s'en fout de tes excuses, ça va pas l'aider à se rendormir ! Par contre tu crois quand même pas que je vais te laisser filer comme ça ! Moi quand je dors c'est hors de question qu'un gamin me dérange en se chiant dessus. TU COMPRENDS ? "

J'hochai la tête vivement, d'un air complètement soumis et honteux. Mais il me secouait, violement, dans tous les sens. J'avais l'impression que ma tête allait se déchirer de mes épaules, allait rouler sur le sol.

" Si ça se trouve tu voulais devenir un guerrier hein ? Tu voulais lâchement me tuer dans mon sommeil ! "

Je gémis et fis non de la tête. Comme si moi, j'allais faire ce genre de chose! Je ne ferais même pas de mal à une mouche... Je détestai ça.

" Y'en a eu beaucoup des sales faibles comme toi qu'ont essayé."

Faible... oui c'est ce que j'étais. Mais là où il se trompait était me comparer à ceux qui essayait. Ceux-là avaient eu peut être l'espoir de progresser. Moi je ne l'avais pas. Je savais quelle était ma condition. Je ne cherchais pas à en sortir. Un faible était né faible, et le restera toute sa vie. C'est ce qu'on m'avait appris. Il était inutile de lutter contre sa hierarchie. La seule chose possible, c'est éviter les coups. Comme les lâches que les faibles sont.

"J'peux t'dire qu'y z'auraient mieux fait d'rester téter leur mère ! "

Mère... Quel drôle d'idée comme si on avait eu le choix. Je me figeai totalement en entendant ce moment, pris d'une intense vague de tristesse. Ma mère, elle ne m'aimait pas. Pas plus que mon père par ailleurs. Mon père s'en foutait de moi... Je ne me souvenais même pas du nom de mon père. Juste de ses yeux. De grands yeux...

Les yeux de Picolo étaient grands ouverts sur moi.
Des yeux..
Deux yeux comme les siens.

Hein? Picolo? C'était lui?

Je baissai la tête. Et me réfugiai dans ce mutisme profond qui me caractérisait. Qu'il frappe, jusqu'à m'évanouir. J'étais parti.

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" Allez, va téter. T'y diras de venir me voir, si elle veut des petits costauds ! "

La grosse blague. Des petits costauds, il m'avait vu? Pourquoi faisais-je ainsi parti des faibles alors que lui semblait faire parti des forts... Était-il réellement fort? Un fort ne se devait-il pas d'engendrer des forts? Ou alors, j'étais réellement une erreur. Cela devait être ça. Sa voix résonna de nouveau. Un rire gras s'éleva. J'entendis des ricanements non loin de là. Les autres petiots devaient se languir de cette scène. Je ne bougeai plus. Peut-être finira-t-il par se désintéresser de moi, si je restais ainsi statique. Parfois, c'était le cas... Les forts n'aimaient pas s'amuser avec des jouets inanimés. Ils préféraient la résistance, cet espoir qui faisait vivre. Moi, j'avais compris qu'il n'y avait aucun espoir pour moi. Aucun chemin de tracé, aucun avenir. Je n'aurais pas de place dans le ciel, aux côtés de la puissante lune, si je mourrais.

Son rire trahissait l'instabilité du personnage qui me faisait face. La violence semblait couler dans ses veines. Peut-être était-ce parce que mon géniteur était la personnification de la violence que moi, je n'en avais pas une once. Cependant, la réalité m’apparaissait autrement. Je n'étais pas digne d'elle. Je n'étais pas digne de tenir tête à Picolo, je n'étais pas digne d'appartenir à la tribu. Je ne servais qu'à permettre aux forts de se défouler. Pour qu'ils préservent leur intégrité mentale, et devienne encore plus fort...

Recroquevillé au sol, je ne pipai mot. Regard fixé sur un point. Parfaitement immobile.

Spoiler:

"T'es con, p'tit machin. Tu penses que la Lune elle a besoin de petits cons ? De sales faibles tous lâches ? "

Je vole, comme les oiseaux dans le ciel. Ces moineaux, ces pies, ces mésanges. Libres comme l'air. Je suis loin. Je sens l'air sur mon visage. Le souffle chaud du vent sur mes plumes. J'ai presque envie de roucouler.

BAM

Il faut croire que les oiseaux se prennent des arbres parfois... Le sang coule, coule, coule... Le choc semble avoir fait de ce fleuve tranquille normalement dans son lit, un véritable torrent qui se déverse en dehors. J'ai mal. Je pleure. Mes ailes sont surement cassées. Je ne peux plus voler.

" Putain tu m'énerves. "

Retour à la réalité. Je cligne des yeux, difficilement. Je suis explosé par terre. Finalement, je ne saigne pas tant que ça. Mais le coup fait mal. Ma tête tourne. J'ai l'impression que je vais tourner de l'oeil. Je murmure :

"désolé..."

Désolé d'être venu au monde. Désolé de ne pas être parmi les forts. Désolé de t'avoir dérangé. Je me lève péniblement, tête baissée. Frappe-moi si ça te fait plaisir... J'y survivrais, comme je l'ai toujours fait. Cela fera juste... mal. La douleur, au final, c'est la sensation que je connais le mieux. Elle m'est familière, presque intime. C'est mon amie d'enfance, qui m'accompagne tous les jours. Je ne peux l'éviter.

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