Still your friend | LP -end

Je n'avais pas besoin d'essayer de lui parler pour comprendre que Douce Orchidée m'évitait. Je ne savais pas exactement ce que la lieutenante me reprochait, mais là encore, pas besoin de beaucoup réfléchir. La patrouille avec Matin Embrasé, aucun de nous trois ne l'avait bien vécue... Peut-être qu'elle s'était sentie abandonnée face à mon oncle ? J'avais pourtant choisi son côté, et j'avais essayé d'empêcher Matin Embrasé de continuer sur sa lancée au début de la patrouille. Mais comme Douce Orchidée avait fait la moitié du chemin à une bonne vingtaine de longueurs de queue devant nous... Elle ne l'avait peut-être pas remarqué. De toute façon, c'était plus ou moins impossible d'arrêter l'autre guerrier roux une fois qu'il était lancé.

Je trouvais que c'était dommage qu'elle m'en veuille. C'était la première à qui j'avais su parler et exprimer un peu plus d'émotion... Mais que lorsqu'on était seul. Notre première partie de chasse, gâchée par un blaireau, nous avait rapprochés. Et j'en étais content, parce que je me sentais mieux avec elle qu'avec la plupart des autres membres du Clan. Un peu plus proche peut-être. Mais maintenant... Je n'étais pas sûr de moi. Parce que maintenant, ce serait à moi de faire le premier pas si je voulais rétablir le contact ; et ce n'est décidément pas chose facile pour moi. Parce qu'aller lui parler, c'était lui montrer que je tiens à elle plus qu'à d'autres. C'était lui montrer que j'étais plus vulnérable que je n'en avais l'air. Cela dit, peut-être que pour une fois, je pourrais faire une exception...

Je sortis de la tanière des guerriers au moment même où le soleil se levait. Je regardai dans cette direction : même à travers tous les arbres de la forêt, c'était toujours un joli spectacle de lumières. Aujourd'hui serait une belle journée, semblait-il... Bonne nouvelle, étant donnés les jours de pluie que nous avions endurés depuis quelques temps. Je marchai à travers le camp, à la recherche de la lieutenante, maintenant convaincu qu'il fallait que je fasse quelque chose. Je la trouvai dans le camp, apparemment pas occupée. C'était ma chance ! Je m'approchai, guettant une réaction de sa part, et lui dis de manière assez neutre mais un peu timide - comme si j'avais peur de la déranger :

"Bonjour Douce Orchidée ! Tu es occupée ce matin ? Je me disais qu'on pourrait peut-être aller chasser - la dernière fois, ça avait bien marché."

Je me retins de dire quoi que ce soit à propos de cette fameuse patrouille qui nous avait divisé. Si elle en parlait, je lui expliquerai pourquoi j'avais agi comme je l'ai fait, mais sinon, mieux valait éviter le sujet. Je ne suis pas sûr qu'en discutait servirait vraiment à quoi que ce soit, honnêtement. Matin Embrasé et elle ne pouvaient pas s'entendre, voilà tout. Je ne voulais pas avoir à choisir un côté - on dit que le Clan passe avant tout, mais la famille était relativement importante aussi, donc entre mon oncle et la lieutenante, je ne pouvais pas être toujours du côté de l'un et détester l'autre. C'était impossible. Peut-être qu'elle le comprendrait, si je l'expliquais adroitement. Je préfèrerais ne pas avoir à le faire...

Elle se sentait si faible. Depuis déjà quelques jours, Douce Orchidée n'avait plus le moral à rien. Elle avait beau chasser, faire en sorte que ses journées soient toujours bien remplies pour ne pas laisser place à l'ennui. Elle avait beau faire tout et n'importe quoi, elle s'ennuyait. Elle l'impression de ne plus être à sa place, de l'avoir perdu et de devoir bataille pour la retrouver. C'était depuis qu'elle était passée lieutenante, elle avait l'impression de descendre les échelons, de reculer, de ne cesser de tomber. A chaque fois qu'elle gravissait une marche, elle retombait de deux. C'est comme si ses quelques efforts ne servaient à rien. Etre lieutenant n'avait rien de tout repos, c'était ce qui lui plaisait avant tout, mais être lieutenant, de seconder Aigue Marine et d'être une femelle, là était la difficulté. Cela ne plaisait pas à tout le monde. Au début, elle se fichait pas mal des avis des autres, voulant d'abord tout faire pour rendre fier son chef. Mais maintenant, la donne avait changé. A chaque fois qu'un mâle faisait une reflexion sur les femelles et leurs rangs, elle ne pouvait s'empêcher de prendre ça pour elle, de s'énerver à la moindre parole. Elle était devenue cafardeuse, coléreuse, mauvaise. Sa vie avait changé du tout au tout en devenant lieutenante, au début c'était le rêve pour elle, maintenant elle sombrait petit à petit dans le cauchemar. Tout a démarré lors de la bataille contre les chats de la lune et le clan du Tonnerre.

Elle avait perdu Petit Quartz, s'était fait rabaisser par Matin Embrasé qui l'avait énormément agacé par son comportement, et puis au final, l'amitié quelle avait liée avec Brasier Glacial n'était que poussière. Celui-ci n'avait ni prit la défense de son oncle, ni prit la défense de la lieutenante. A quoi bon se faire des amis et essayer d'être gentille avec eux, si c'est pour qu'ensuite il vous laisse vous démerder face aux emmerdes ? Douce Orchidée comprenait bien que choisir entre la famille et les 'amis' n'était pas simple, voire impossible, mais quand bien même si elle avait été à sa place, elle aurait dit quelque chose pour apaiser la situation. Elle n'avait pas mené cette patrouille, elle l'avait subi. Elle se demandait vraiment si elle était vraiment l'amie du guerrier roux, ou alors elle n'était qu'une simple connaissance pour lui ? Ils avaient fui ensemble face à un blaireau, réalisé une très belle chasse en ramenant cinq proies, et puis elle s'était inquiétée pour son épaule, mais à quoi faire tout ça ? A quoi s'inquiéter pour quelqu'un qui n'en vaut peut-être pas la peine ? Les mâles sont-ils tous ainsi ? Sont-ils si mauvais avec les femelles ? Les yeux verts de la lieutenante étaient devenus vitreux, ses pensées et son état d'esprit reflétaient son état. Elle n'avait plus le moral, parlait peu, elle ne sentait plus à l'aise dans son corps, dans son clan.

Douce Orchidée repoussa le maigre poisson qu'elle avait pris sur la pile de gibier. Elle n'avait pas faim, et même si son ventre criait famine en réalité, son cœur lui hurlait de douleur face à la situation. Elle n'avait personne sur qui se reposer, personne à qui parler, elle n'avait plus de famille et parlait à peine à ses amis, enfin, sont-ils réellement ses amis ? Maintenant, elle pouvait juste compter Museau Bleu, mais même si elle était la parfaite amie, elle préférait rester seule. Seule avec son poisson, qui lui donna la nausée. Elle tourna la tête, et c'est à ce moment qu'elle le vit en train de s'avancer vers elle. Au fond, la jeune lieutenante aurait voulu paraître plus présentable, mais qu'importe, elle aurait préféré fuir le plus loin possible. Elle aurait pu être contente de le revoir, lui sauter dessus pour lui dire à quoi point elle était désolée de ne pas être revenue lui parler après cette horrible patrouille, mais sa fierté et son amertume envers son oncle étaient bien trop fort. Elle resta là, sans dire un mot, le visage neutre, comme figé.

« Bonjour Douce Orchidée ! Tu es occupée ce matin ? Je me disais qu'on pourrait peut-être aller chasser - la dernière fois, ça avait bien marché. »

Son ton neutre n'avait pas changé, mais elle percevait une pointe de timidité dans sa voix. Depuis quand on est timide lorsqu'on va voir une amie ? Cette idée lui fit terriblement mal au cœur. La lieutenante se releva, son pelage était en légèrement en bataille, ses pauvres yeux creusés par la fatigue. Non elle n'était pas occupée, ou alors vouloir faire payer certaines personnes mentalement pouvait être considérée comme une occupation ? Au moins, il n'avait pas oublié la partie de chasse qu'ils avaient partagée.

« Bonjour, Brasier Glacial. » dit-elle lentement, d'une voix neutre qui ne trahissait rien. «  Non. Je ne fais rien ce matin. Allons chasser, alors. »

Je n'ai plus envie de rien faire se retint-elle d'ajouter. Elle avait du mal à regarder le guerrier en face, se sentant terriblement vulnérable.

Maintenant que je m'étais approché d'elle, je pouvais la voir plus clairement et essayer de déchiffrer ses expressions. Mais je ne pus rien lire sur ce visage de marbre, d'une neutralité digne de la mienne. Voir la lieutenante de si près m'horrifia : son épais pelage complètement négligé, ses yeux vides de toute envie ou intention... Sa fatigue, tant physique que mentale, était évidente vue de près. Et dire que je n'avais rien vu... Comment était-ce possible ? C'était pourtant simple : on s'était évité l'un l'autre trop longtemps. Je devais faire quelque chose : à mes yeux, Douce Orchidée était encore mon amie, même si elle n'était pas du même avis. Vu son état une partie de chasse n'était sans doute pas la bonne idée, mais je pouvais peut-être m'en servir comme prétexte pour la faire sortir du camp, si elle acceptait. En tout cas, elle en avait besoin. Loin de moi l'idée de savoir ce qui était bon pour elle, mais ce serait plus simple de lui parler une fois hors d'ici.

Je ne suis pas le guerrier le plus expressif, je le sais bien. C'est par choix que je ne montre rien. Mais parfois, je regrette de ne pas m'ouvrir un peu plus aux autres. Aujourd'hui était un de ces moments : peut-être que si je m'étais montré plus expressif avec Douce Orchidée, elle ne serait pas dans cet état aujourd'hui. Je pouvais - non, je devais essayer de faire quelque chose. Inutile de s'en vouloir pour ce qui a eu lieu pendant la patrouille.

"Bonjour, Brasier Glacial. Non. Je ne fais rien ce matin. Allons chasser, alors."

Elle me répondit lentement, d'une voix aussi maîtrisée que son expression. Si elle croyait pouvoir me repousser ainsi, elle se trompait : déjà, c'est moi qui suis le plus neutre et silencieux d'habitude, et de deux, j'avais décidé de l'aider comme je pouvais à se remettre, et je ne la lâcherais pas avant d'atteindre mon objectif. Le Clan vivait de sales moments, dans la peur et l'incertitude. Nous avions besoin de meneurs solides. Je ne pouvais rien faire pour le moral d'Étoile de Pierre, car je n'étais pas du tout assez proche de lui. Mais je pouvais au moins m'assurer que la lieutenante redevienne elle-même. C'était la bonne chose à faire pour le Clan, mais surtout, c'était ce qu'un vrai ami ferait. Il était temps pour moi de prouver ma valeur. Pas aux yeux du Clan de la Rivière, mais à ceux de Douce Orchidée en particulier. Je lui répondis, montrant un peu plus d'enthousiasme :

"Bien ! Je pensais aller à la prairie cette fois-ci, si ça te va bien sûr... La colline et la rivière sont un peu occupés par quelques apprentis et leurs mentors, et je préfèrerais qu'on ne soit pas dérangés à la chasse."

Je me dirigeai hors du Clan, marchant au pas de Douce Orchidée. Je ne commettrais pas la même erreur que pendant la patrouille : si je la laissais partir vers l'avant seule, elle continuerait de ressasser je ne sais quelles pensées. Il ne fallait pas garder le silence non plus. Et cette fois, ce serait à moi d'initier la discussion. On avait un peu de temps avant d'atteindre la prairie, mais je comptais prendre autant de temps que nécessaire. J'avais déjà décidé que la chasse n'était pas la priorité : la priorité, rien qu'aujourd'hui, c'était elle.

"Ça fait un bout de temps qu'on a pas discuté ! J'avoue que j'ai pas osé après cette fichue patrouille : je me disais que tu m'en voulais - et tu m'en veux peut-être encore - mais j'ai pris mon courage à deux pattes pour venir te parler."

Peut-être qu'elle apprécierait ma franchise, après cette longue périodes de silence. En tout cas je l'espérais. Si jamais elle le prenait mal, tant pis : je continuerai d'essayer de lui parler. Je ne pouvais la laisser se faire du mal comme ça, et rester à regarder sans rien faire. Plus maintenant.

Elle aurait pu faire l'enfoirée et se mettre dans la peau d'une vraie vicieuse, en lui posant ici et maintenant devant tout le clan des questions sur leur amitié, ou encore le rabaisser pour lui montrer à quel point elle avait été blessée par cette patrouille. Blessée par lui. Mais elle n'en avait pas la force, ni le courage d'ailleurs. Même si elle n'arrivait pas à comprendre pourquoi il était resté sans rien faire, elle n'arrivait pas à voir en lui quelqu'un qui n'en a rien à faire de ses amis, elle ne voulait pas. Elle l'appréciait, c'était évident. Finalement, le problème aurait pu se régler ici et maintenant, mais sa fierté était bien trop forte et elle souhaitait comprendre le pourquoi du comment. Elle voulait réellement savoir si elle était son amie, après tout, peut-être que ce n'était finalement pas le cas ? Il avait peut-être été dégoûté par le comportement de la lieutenante face à son oncle lors de la patrouille, elle qui n'avait guère apprécié les remarques de Matin Embrasé et qui avait finit par s'emporter. Peut-être qu'en laissant Matin Embrasé la traiter de tout et de n'importe quoi, peut-être qu'en ne disant et répliquant rien, la patrouille se serait déroulé autrement ? Peut-être que si elle n'avait pas été lieutenante, elle n'aurait pas pris la peine de déplacer Petit Quartz hors du camp ? Peut-être qu'elle n'aurait pas été hurler sur Nuage de Merle pour défendre son chef ? Peut-être que tout aurait été plus simple si elle n'avait pas été lieutenante, si elle n'avait pas ouvert sa grande bouche, si elle n'avait pas fait ceci et cela. Elle était la source de problèmes, elle en était persuadée. Elle n'était pas quelqu'un de bien. Ni pour le clan, ni pour personne.

« Bien ! Je pensais aller à la prairie cette fois-ci, si ça te va bien sûr... La colline et la rivière sont un peu occupés par quelques apprentis et leurs mentors, et je préfèrerais qu'on ne soit pas dérangés à la chasse. »

Qu'importe pour elle, colline ou rivière, tant qu'elle sortait de ce camp qui la faisait suffoquer. Elle ne s'y sentait plus à l'aise. Et elle avait beau sortir du camp pour chasser, elle restait toute seule. Délaissé. Brasier Glacial se dirigea vers la sortie, Douce Orchidée à ses trousses. Sa queue trainait par terre, et ses yeux fixaient toujours le sol. Elle n'avait pas envie de croiser le regard des autres, comme si maintenant elle pensait que tout le monde allait la juger. Sur sa nature, son genre, son poste.

« Ça fait un bout de temps qu'on a pas discuté ! J'avoue que j'ai pas osé après cette fichue patrouille : je me disais que tu m'en voulais - et tu m'en veux peut-être encore - mais j'ai pris mon courage à deux pattes pour venir te parler . »

Elle avait cessé de compter les jours qui avaient passé depuis cette patrouille. Elle n'y croyait plus vraiment. Elle lui en voulait, c'était indéniable, elle lui en voulait énormément et encore aujourd'hui le fait de le revoir et de l'entendre lui parler avec autant de 'familiarité' lui avait fait comme un pincement au cœur. Evidemment que c'était courageux de sa part de venir lui parler, lui qui d'habitude est toujours froid ou distant avec les autres, et cela lui avait fait plaisir mais elle ne souhaitait pas le montrer. Elle voulait prendre sa place. Pour une fois elle allait endosser le costume de celle qui parle peu, celle qui reste froide. Elle voulait absolument lui montrer tout le mal qu'elle endurait depuis ces quelques jours, toute cette tristesse qui lui serrait le cœur, et toute cette haine qui neutralisait ses sentiments. Douce Orchidée ne savait même plus quoi dire. D'habitude elle aurait imméditamment souris face à ces paroles, mais là elle ne cessait de marcher en silence, contemplant le sol comme source de réponses. Par où allait-elle bien pouvoir commencer ?

« ça fait longtemps. Trop longtemps pour des amis, je pense. Mais.. » elle se sentait faible, incapable de dire sa phrase sans faire de pause. « Est-ce que nous sommes amis ? »

Son cœur se serra devant cette simple question. Peut-être que la définition qu'elle se faisait d'un ami n'était pas la même que la sienne. Elle en attendait peut-être trop des personnes qu'elle côtoyait ? C'était vraiment elle le problème, alors. En demandait-elle trop ?

« Que Matin Embrasé me fasse des réflexions est une chose. Mais nous sommes censés nous aider, entre amis ? C'est le fait que tu n'aies pas réagi qui m'as blessé. Je ne te demande pas de choisir entre la famille et moi, il aurait été évident que tu choisisses la famille, mais si j'avais été à ta place. » Si triste à dire «  J'aurais réagi. »

Elle ne voulait pas le blesser, mais voulait lui dire juste ce qu'elle avait sur le cœur. Lui qui avait tant souffert durant cette nuit là, il pouvait bien se libérer de ses chaines ? Ne serait-ce qu'un instant. La lieutenante finit par stopper le pas.

« Mais lorsque je te vois venir vers moi en connaissant un minimum ton caractère, je n'arrive pas à me dire que tu n'es pas mon ami. » Un sourire en coin se dessina sur son visage, qui immédiatement disparut, et les larmes finirent par couler toutes seules. « C'est moi le problème. Je n'arrive à rien, je fais tout de travers et maintenant je me rends malade, mais tout est de ma faute. Je suis un problème, je suis mon problème. »

Elle était fatiguée.
Laisse couler une larme et apaise ton âme.

Je pensais qu'après avoir réussi à faire sortir Douce Orchidée du camp et à lui parler, j'aurais fait le plus dur. J'étais bien loin de la vérité... Je n'obtins presque aucune réaction de la lieutenante, et voir son visage si crispé, si triste me faisait de la peine. Je me préparai à recevoir toutes les critiques du monde lorsqu'elle inspira pour ensuite parler :

"Ça fait longtemps. Trop longtemps pour des amis, je pense. Mais..." Sa voix était bien faible par rapport à la Douce Orchidée que je croyais connaître. Où était-elle passée, cette fière lieutenante dont le Clan avait tant besoin ? Elle ne semblait même pas sûre de ce qu'elle s'apprêtait à dire.

"...Sommes-nous vraiment amis ?

Je m'étais préparé à recevoir ce genre de phrase, mais le mal qu'elle me fit ne fut pas réduit, bien au contraire. Je savais bien ce qui la poussait à se poser cette question, et je m'en voulais. Je m'en voulais de ne pas lui avoir donné de preuves de mon amitié et de ma confiance, alors qu'aujourd'hui elle semblait en avoir tant besoin. J'avais peut-être une chance de me rattraper, de regagner son estime, mais pour l'instant, je devrais l'écouter d'une oreille attentive.

"Que Matin Embrasé me fasse des réflexions est une chose. Mais nous sommes censés nous aider, entre amis ? C'est le fait que tu n'aies pas réagi qui m'as blessé. Je ne te demande pas de choisir entre la famille et moi, il aurait été évident que tu choisisses la famille, mais si j'avais été à ta place... J'aurais réagi."

Évidemment que c'était ça qu'elle me reprochait. Je me retins de lui dire que j'avais réagi, mais qu'elle ne l'avait juste pas remarqué : ça n'arrangerait la situation en rien. Au contraire, Douce Orchidée pourrait tout à fait le prendre comme une critique, et ce n'était pas le moment. Je ne pouvais, je ne devais que l'écouter, pendant qu'elle disait tout ce qu'elle avait sur le cœur. Rien que ça, ça lui ferait peut-être du bien, qui sait ?

"Mais lorsque je te vois venir vers moi en connaissant un minimum ton caractère, je n'arrive pas à me dire que tu n'es pas mon ami. C'est moi le problème. Je n'arrive à rien, je fais tout de travers et maintenant je me rends malade, mais tout est de ma faute. Je suis un problème, je suis mon problème."

Et voilà qu'elle se donne la faute, à présent. Je me sentais vraiment mal de lui avoir infligé ça, bien que je ne sois pas le seul responsable. Cependant, je n'étais pas capable de l'exprimer. Je ne l'ai jamais été, et ça ne risque pas de changer du jour au lendemain... et voilà que ma lieutenante pleurait librement devant moi. Je m'étais préparé à tout types de réactions de sa part, mais pas à ça... Réfléchis, dis quelque chose, vite ! Elle avait besoin de soutien, mais je n'étais pas sûr d'être capable de lui en apporter assez. Je m'approchai un peu de Douce Orchidée sans vraiment y penser, et lui dis de la voix la plus douce possible :

"Le problème, ce n'est pas toi. S'il y a vraiment un problème, alors ça vient de Matin Embrasé, ou de moi. Pas de toi... "

Je pris quelques instants pour réfléchir à mes prochaines paroles, puis continuai, toujours aussi doucement :

"En fait, je pense qu'il n'y a pas de problème. Parce que je suis ton ami, que tu le veuilles ou non. Et je refuse que tu te fasses autant de mal. En fait, quand je suis venu te voir pour aller chasser, et que j'ai vu dans quel état tu étais, j'ai décidé que la chasse avait bien peu d'importance par rapport à toi. Tout ce que je voulais, c'était sortir du camp pour qu'on puisse parler en paix, dans l'espoir que tu irais mieux après."

Je m'arrêtai quelques instants, la regardant dans ses yeux encore humides, mouillés par ses larmes.

"Quant à cette patrouille... J'ai essayé d'arrêter mon oncle, mais ce n'est pas chose facile. J'aurais peut-être dû me placer plus clairement de ton côté, car les femelles ont leur place dans ce Clan et que tu mérites entièrement ton poste. Donc oui, ce sont des excuses de ma part, en quelque sorte. Je ne m'attends pas à ce que tu les acceptes si facilement - mais ça ne veut pas dire que je ne suis pas ton ami."

Je me demandais bien comment j'avais pu en dire autant... C'était sans doute pour le mieux. Rares étaient les jours où je m'exprimais autant. Ce n'était sans doute pas le meilleur moyen de prouver à Douce Orchidée que j'étais bien de son côté, mais c'était si rare de ma part... J'espérais simplement qu'elle comprendrait à quel point je faisais un effort, malgré son état actuel.

Elle se sentait clairement pitoyable sur le coup, mais à force de vouloir rester fière en permanence, à force de vouloir se montrer toujours forte, il fallait bien que cela sorte à un moment ou à un autre. Elle ne pouvait pas supporter une journée de plus sans libérer toute cette souffrance, cette haine et cette énorme peine qu'elle avait sur le cœur. Beaucoup auraient ri de sa situation, de la voir aussi faible ou alors beaucoup n'auraient rien compris à son désarroi, mais pour elle, il était bien présent. Elle avait voulu se débrouiller toute seule comme une grande, montrer aux autres ainsi qu'à elle même qu'elle était capable de surmonter beaucoup d'épreuves en même temps, puis tout rentrerait dans l'ordre. Elle s'était trompée, et pas qu'un peu, elle venait de se casser violemment la figure devant toutes ces épreuves, et rien n'était rentré dans l'ordre, la situation était pire. En voulait faire la maligne, elle avait tous perdue, et voilà qu'elle se mettait à pleurer devant celui qu'elle pensait être son ami. Vraiment, elle se sentait misérable à renifler comme un vulnérable chaton.

« Le problème, ce n'est pas toi. S'il y a vraiment un problème, alors ça vient de Matin Embrasé, ou de moi. Pas de toi... »

Sa voix était douce, c'était bizarre venant de lui, mais forcément vu la situation ce n'était pas désagréable. Elle n'aurait surement pas apprécié se faire hurler dessus. Malgré cette phrase pleine de bons sentiments, elle s'efforçait de penser le contraire. Si elle avait réellement fermé sa bouche lors de la patrouille, tout aurait été différent, et les deux 'amis' ne seraient pas là à parler de leurs relations à cause de leur éloignement. Elle était vraiment trop bête, toujours à vouloir briser le silence, toujours à vouloir parler, toujours à vouloir donner son avis et toujours à vouloir s'énerver ou chouiner quand quelque chose ne va pas, voilà le problème ! Elle n'arrivait pas à s'enlever cette idée de la tête, c'était trop limpide, trop vrai pour elle. Le problème venait vraiment d'elle, et ce n'était pas cette première phrase qui allait l'en dissuader.

« En fait, je pense qu'il n'y a pas de problème. Parce que je suis ton ami, que tu le veuilles ou non. Et je refuse que tu te fasses autant de mal. En fait, quand je suis venu te voir pour aller chasser, et que j'ai vu dans quel état tu étais, j'ai décidé que la chasse avait bien peu d'importance par rapport à toi. Tout ce que je voulais, c'était sortir du camp pour qu'on puisse parler en paix, dans l'espoir que tu irais mieux après. »

Alors c'était vraiment vrai, elle avait de l'importance pour lui ? Ainsi, chacun avait de l'importance pour l'autre, là était une définition de l'amitié pour elle. A cet instant, elle se sentit rassurée, et les larmes avaient enfin cessées de couler. Ses yeux verts avaient légèrement gonflés, mais au moins elle n'avait plus l'air d'un petit chaton. Si Brasier Glacial l'avait emmené en ''chasse'' pour qu'ensuite, elle puisse aller mieux après, il allait surement être déçu. Douce Orchidée n'irait pas bien après, c'était une certitude. Même si la patrouille avait affecté à 75% son moral, il restait les petits 25%. Ces 25% regroupaient la disparition de Petit Quartz, l'état de son chef ainsi que la bataille du clan de la Rivière qui avaient fortement affecté l'humeur de Douce Orchidée. Mais évidemment, c'était à cause de cette patrouille en majorité que son état s'est aggravé. Même si Brasier Glacial arriverait à la faire sourire à la fin de cette sortie, il resterait toujours ces 25% à régler. Seul le temps pouvait y faire quelque chose.

« Quant à cette patrouille... J'ai essayé d'arrêter mon oncle, mais ce n'est pas chose facile. J'aurais peut-être dû me placer plus clairement de ton côté, car les femelles ont leur place dans ce Clan et que tu mérites entièrement ton poste. Donc oui, ce sont des excuses de ma part, en quelque sorte. Je ne m'attends pas à ce que tu les acceptes si facilement - mais ça ne veut pas dire que je ne suis pas ton ami. »

Elle, elle aurait bien voulu l'arrêter, son oncle. Mais vu la tête à claque, ce n'était en effet pas une chose facile. La lieutenante grimaça en repensant à toutes les paroles qu'il lui avait dit. Elle ne savait pas vraiment si elle méritait son poste ou quoi, mais ce qu'elle savait, c'est que oui, les femelles ont leur place dans ce clan. C'était évident, mais surement pas pour tous le monde, néanmoins elle était contente d'apprendre que Brasier Glacial n'était pas du tout un ancien partisan d'Etoile du Corbeau. A la fin de tous son discours, elle était assez décontenancée, surprise d'avoir entendu toutes choses venant du guerrier le moins bavard du clan. Elle n'aurait jamais pensé en entendre autant, dans le sens positif.

« Non, vraiment, si je n'aurais pas dit certaines choses ou si je ne m'étais pas énervée durant la patrouille, les choses auraient été différentes. » C'était évident pour elle. «  Tu ne serais pas là à prendre de ton temps pour me sortir du camp. On aurait continué à se voir, faire nos patrouilles, nos parties de chasse, on se serait pas éloignés. Et ça c'est ma faute...  »
Parce qu'elle ne savait pas rester calme devant une situation, prendre sur elle et ne rien dire pour ne pas que la situation n'empire.

« Mais je suis rassurée d'être ton amie. J'avais peur de ne pas l'être lors de cette patrouille. »

Elle en avait tellement peu que la moindre parcelle d'amitié lui était chère à son cœur.

J'en avais dit beaucoup. Beaucoup plus que d'ordinaire. Mais les circonstances me forçaient un peu la main, et lui dire tout ça me semblait plus que nécessaire. Il était évident que tout n'allait pas bien pour elle - on pourrait même dire, franchement, qu'à part la nomination récente de deux apprentis, tout allait mal. Cependant, comme toujours selon moi, ça ne voulait pas dire qu'il fallait se laisser faire, déprimer et tout voir en couleurs sombres. Avec un peu d'efforts, peut-être que j'arriverais à communiquer ça à Douce Orchidée. Ça nécessiterait peut-être que je parle de moi-même et de mon propre état d'esprit pour lui expliquer ; je n'aime pas ça, mais si je devais le faire pour qu'elle aille un peu mieux, alors je le ferai. C'était mon lieutenant, mon amie, je me devais de faire le maximum pour garantir son bien-être (ou plutôt son non mal-être, si ça fait encore un minimum de sens).

"Non, vraiment, si je n'aurais pas dit certaines choses ou si je ne m'étais pas énervée durant la patrouille, les choses auraient été différentes."

Oh oui, c'était une certitude. J'aurais par ailleurs largement préféré qu'elle ne tienne pas compte des remarques de Matin Embrasé - d'une part ça ne servait à rien car il ne changerait pas d'état d'esprit aussi facilement, et d'autre part ça les avait rendus tous les deux bien malheureux. Avec l'état actuel de Douce Orchidée pour preuve. Mais en tout cas ses paroles me montraient bien qu'elle ressassait encore ce qui aurait pu se passer si elle s'était comportée différemment. Ça non plus, ça ne servait à rien. Le passé est tel qu'il est, inutile de vouloir le changer. Il faut faire au mieux avec - j'avais déjà un peu fait passer ce message lors de notre première partie de chasse. C'était assez étrange, car sur ce point j'avais l'impression d'être plus... sage ? Ou plus mature ? Bref, plus je ne sais quoi que Douce Orchidée, alors que j'étais de loin le plus jeune de nous deux. Ce n'est pas un reproche, mais je trouvais ça un peu perturbant.

"Tu ne serais pas là à prendre de ton temps pour me sortir du camp. On aurait continué à se voir, faire nos patrouilles, nos parties de chasse, on se serait pas éloignés. Et ça c'est ma faute.."

Encore une fois, ça ne sert à rien d'imaginer ce qui aurait pu se passer dans telle ou telle situation. Bien sûr que ça aurait pu mieux se passer. Mais d'un autre côté ça aurait très bien pu être bien pire que ça ne l'a été. Ils auraient pu finir par se battre.

Évidemment j'ai l'air bien sage à donner des leçons comme ça. Mais qui sait ce que je ferais si jamais à mon tour, je regrettais un de mes actes ? L'avenir me le dira - vivre sans faire d'erreurs me semble impossible de toute façon. J'essaierai alors de me souvenir de ma propre leçon

"Mais je suis rassurée d'être ton amie. J'avais peur de ne pas l'être lors de cette patrouille."

"Je m'estime heureux que tu me considères encore comme tel ! Après un tel froid, je m'attendais à ce que tu ne veuilles plus me parler pour encore bien des lunes. J'aurais été déçu, tu sais. Je n'ai pas beaucoup de contact avec les autres chats du Clan, mais je crois bien que j'apprécie ta compagnie."

Je m'assis tranquillement en face d'elle, espérant que ma dernière phrase lui ferait un peu plaisir. Ce n'était pas rien venant de moi, et j'espérais simplement qu'elle s'en rendrait compte. J'attendis patiemment sa réaction, prêt à lui accorder tout le temps dont elle aurait besoin aujourd'hui.

Cela faisait trop longtemps qu'elle n'avait pas été rassurée par quelqu'un. Longtemps qu'elle n'avait plus entendu de petits mots gentils qui donnaient tout de suite ce courage d'aller de l'avant, de remonter la pente. Douce Orchidée n'en avait pas une immense à remonter, mais même le fait de se retrouver au pied du mur l'avait changé du tout au tout. Au final, tout ce qui lui manquait c'était d'entendre qu'elle avait un ami, une personne sur qui compter et sur qui s'appuyer en cas de soucis, et ça changeait la donne. Elle ne demandait pas à avoir une dizaine d'amis, et rien que d'avoir ce guerrier en face d'elle, cela lui faisait déjà tellement plaisir qu'elle se sentait comme revigorée.

« Je m'estime heureux que tu me considères encore comme tel ! Après un tel froid, je m'attendais à ce que tu ne veuilles plus me parler pour encore bien des lunes. J'aurais été déçu, tu sais. Je n'ai pas beaucoup de contact avec les autres chats du Clan, mais je crois bien que j'apprécie ta compagnie. »

Douce Orchidée laissa échapper un petit ronronnement, signe de sa bonne humeur retrouvée. Cela lui faisait drôlement plaisir d'entendre que le guerrier roux appréciait sa compagnie tandis qu'il avait plus de mal avec celle des autres membres du clan. Elle savait bien que la parole et l'amitié n'étaient pas le point fort du guerrier, alors du coup c'était comme si elle marquait le point pour l'avoir fait dire ce que jamais il n'aurait dit à d'autres. En y réfléchissant bien, elle aussi aurait été bien déçue de perdre un début d'amitié comme celle-ci. Pour le moment, il n'y avait qu'avec lui qu'elle avait coursé un blaireau lors de leur première discussion.

« C'est moi qui devrais m'estimer heureuse! C'est bien toi qui est venu vers moi, et je ne peux pas rêver mieux comme ami. » miaula-t-elle avec un sourire bien dessiné sur son visage.  « Et puis moi aussi j'aurais été déçue, il n'y a qu'avec toi que , lors de notre première rencontre, nous avons fait la course avec un blaireau, et puis en y réfléchissant bien c'est avec toi que j'ai dû sortir le plus du camp. »

Il y avait à peine cinq minutes, la guerrière pleurait à cause de son comportement et voilà qu'elle souriait déjà. Finalement, il en fallait peu pour qu'elle retrouve le sourire, de simples paroles pourtant pleines de bon sentiments avaient été la solution.

« A un moment ou un autre je pense que j'aurais laissé ma fierté de côté et je serais revenue te parler, mais je suis bien contente que tout cela soit terminé. »

Je fus surpris - agréablement ! - de l'entendre ronronner. Manifestement Douce Orchidée pouvait changer d'humeur très rapidement... Pour cette fois, c'était pour le mieux, et j'en étais content. Sans doute ne pourrais-je pas résoudre la totalité de ses problèmes, mais si elle rentrait au camp de meilleure humeur, alors j'aurais rempli mon rôle. Mon rôle d'ami. Et honnêtement, j'aurais été déçu de perdre le lien que l'on avait commencé à développer. Je commençais à me dire que ça me ferait peut-être du bien, finalement, de pouvoir parler ouvertement à quelqu'un. En général, parler de ce que je ressens me met mal à l'aise, donc j'évite naturellement de le faire. Peut-être que... peut-être que je saurais lui faire assez confiance pour partager ça avec elle, un jour. Je l'espère. On ne peut pas prévoir comment ces choses vont évoluer.

"C'est moi qui devrais m'estimer heureuse! C'est bien toi qui est venu vers moi, et je ne peux pas rêver mieux comme ami. Et puis moi aussi j'aurais été déçue, il n'y a qu'avec toi que , lors de notre première rencontre, nous avons fait la course avec un blaireau, et puis en y réfléchissant bien c'est avec toi que j'ai dû sortir le plus du camp."

C'était à son tour de me réchauffer le cœur. Son sourire suffisait amplement... Pendant un moment, c'était presque suffisant pour oublier tous les problèmes, tous les conflits qui pesaient sur l'ambiance du camp. Presque. En tout cas c'était assez pour se sentir prêt à les affronter, et à remporter la victoire face à n'importe quoi, n'importe qui. Reprenant mes esprits, je faillis lui répondre que je pouvais dire la même chose. Que d'habitude je chassais en solitaire, et qu'il n'y avait qu'avec elle que je chassais en équipe. Et aussi qu'évidemment, c'était avec elle que nous nous étions débarrassés d'un blaireau... En travaillant en équipe. Puis de toute façon, c'était bien la seule fois de ma vie que je tombais sur un blaireau, alors survivre à une telle rencontre, ça créait forcément des liens. Mais je n'eus pas le temps de lui dire tout ça, et je ne sais pas si j'aurais osé. J'en avais déjà dit beaucoup, et c'était à Douce Orchidée d'en faire autant, maintenant.

"À un moment ou un autre je pense que j'aurais laissé ma fierté de côté et je serais revenue te parler, mais je suis bien contente que tout cela soit terminé."

En regardant toujours son visage souriant pendant qu'elle parlait, je me trouvai à en faire de même, lui renvoyant un des sourires les plus éclatants que j'avais sans doute jamais faits. J'étais heureux de retrouver la Douce Orchidée que j'avais commencé à connaître il y a quelque temps de cela, et encore plus heureux de la voir enfin retrouver le sourire après si longtemps. En réalité ça ne faisait pas si longtemps, mais pour moi, ça avait semblé être une éternité.

"Honnêtement... Je n'aurais pas dû attendre si longtemps, non plus. Surtout avec tout ce qui se passe en ce moment... Étoile de Pierre n'est pas au mieux non plus. Alors on a besoin de toi pour le Clan, plus que jamais. Et je veux que tu saches que je serai là si tu en as besoin, comme aujourd'hui. Promis !" lui répondis-je avec enthousiasme. En ce moment, on avait besoin de garder une bonne mentalité, une bonne ambiance dans le camp. Une mentalité de vainqueur, une ambiance de victoire. Peut-être que je commençais à comprendre Matin Embrasé sur ce point - le Clan avait besoin de bonne humeur. Je n'étais pas d'accord sur la méthode, mais sur le principe, c'était tout comme. Il fallait que tout le monde croie en notre victoire. Puisque la bataille, elle arriverait, j'en étais convaincu. Et si je ne pouvais pas faire passer le message moi-même, Douce Orchidée le pourrait - et elle aurait tout mon soutien.

Au fur et à mesure que la conversation continuait, les larmes qu'avaient laissé couler Douce Orchidée avaient maintenant laissé place à un grand sourire, malgré ses yeux verts encore rougis par cette grande tristesse qu'elle venait de déverser. Finalement, sourire lui allait beaucoup mieux. Et c'est avec une énorme surprise qu'elle vit se dessiner un sourire sur le visage de son ami. C'était la première fois qu'elle le voyait sourire, après plusieurs conversations et sorties ensemble, il fallait que ce soit maintenant. A cet instant, elle sentit une bouffée d'affection l'envahir, ce n'était peut-être pas grand chose pour certains de voir Brasier Glacial sourire, mais pour elle cela représentait beaucoup. Et elle en était très contente.

« Honnêtement... Je n'aurais pas dû attendre si longtemps, non plus. Surtout avec tout ce qui se passe en ce moment... Étoile de Pierre n'est pas au mieux non plus. Alors on a besoin de toi pour le Clan, plus que jamais. Et je veux que tu saches que je serai là si tu en as besoin, comme aujourd'hui. Promis ! »

Au moins, le plus important pour elle maintenant c'était de pouvoir enfin lui reparler comme avant, avec en bonus le sourire qu'il venait de lui rendre. Mais après qu'il ait parlé d'Etoile de Pierre, le moral baissa de nouveau d'un cran. Etoile de Pierre n'allait pas bien, c'était indéniable, et c'est lui le clan de la Rivière se perdait à petit feu. Qu'allait-il arriver sur de nouveaux chatons disparaissent, si une nouvelle bataille fait rage, si encore une fois le clan de la rivière se fait prendre de surprise ? La lieutenante n'en savait rien, elle espérait simplement le rétablissement de son chef au plus profond d'elle-même. Il était le noyau du clan, l'élement le plus important, et si le chef est faible, le clan l'est tout autant, avec ou sans lieutenant. Douce Orchidée se sentit tout de même rassurée de savoir qu'elle pouvait compter sur Brasier Glacial. Elle en avait vraiment besoin. Besoin de lui. Besoin du peu d'amis qu'elle possédait encore. Besoin du soutien de son clan.

« Ce n'est pas grave ! »dit-elle d'une voix plus douce, avant de repenser au moment de faiblesse qu'elle venait qui la mit de nouveau mal à l'aise. « Un peu désolée pour tout ce que tu viens de voir, ta lieutenante n'est pas si forte que ça vois-tu. Mais même si je ne suis pas la plus forte, moi aussi je serais là pour toi, peu importe le moment ! » miaula-t-il cette fois avec plus d'entrain, toujours le sourire aux babines et les moustaches frémissantes. Le clan avait besoin d'elle, et elle aussi avait besoin de son clan. Quoi qu'il advienne, elle devait se montrer forte malgré les événements. Elle avait encore du travail pour y parvenir, mais elle ne doit pas laisser tomber si facilement.