Sous la surface ◊ LP ◊ ft Beille -end

La journée était douce, l'eau et les feuillages, mais aussi le soleil se reflétant sur les Rochers du Soleil, parant le paysage de couleurs pastelles, formant un cocon autour des deux guerrières; à les voir rire ainsi, on aurait pu penser que rien de grave n'était jamais arrivé, qu'elles chassaient comme deux amies heureuses de se retrouver, pour amener à leur famille réunie et au complet une proie toute fraîche pour le dîner, ou quelques-unes à partager. Aucune catastrophe... Juste du bonheur, le murmure de l'onde et la caresse du vent sur leurs fourrures. Un regard de saphirs et des prunelles de jade, chacune trouvant en elle la force de se relever, pour ses proches, pour son Clan. Il fallait les nourrir, en prendre soin, et croire, encore et encore, que les beaux jours reviendraient, qu'ils pourraient montrer à Petit Blaireau comment chasser, pêcher, se battre, en souriant, en ronronnant, comme avant, quand les cris espiègles qui emplissaient la pouponnière faisaient écho aux râleries de certains adultes. C'était ce genre de pensées qui permettait à Museau Bleu de garder la tête haute, vers le ciel, malgré le fardeau de tristesse qu'elle avait sur les épaules et qui lui paraissait aussi lourd que la charge d'Atlas, qui lui, portait le monde. Et ce genre de moments, dans leur royaume d'eau et de joie, qui la rendait heureuse, Jolie Abeille débusquant bientôt une souris et bondissant pour l'achever, revenant la poser auprès du corbeau de la princesse de sable et d'écume, toutes deux amusées. Ce fut la cadette qui miaula, malicieuse:

« Et bien, dire que nous devions pêcher! »

Son aînée eut un sourire, et haussa les épaules; quelque part, tant qu'elles avaient des proies à ramener et pouvaient s'amuser, quelle importance ? Un frémissement, là où Jolie Abeille venait de trouver une proie, l'alerta, elle bondit en avant: une fraction de seconde trop tard. Une souris s'enfuit à toute allure, loin des griffes qui l'avaient manquée de peu, et Museau Bleu, un peu désolée, revint près de sa nouvelle amie et confidente d'un jour pour souffler, pleine d'autodérision:

« J'aurais peut-être été meilleure ! »

Ses yeux pétillaient d'espièglerie quand elle suggéra à nouveau, d'une voix innocente, se plaçant pour bondir sur la plus jeune:

« Mais si tu y tiens tant, tu peux prendre un bain, tu sais ! »

Elle la taquinait, bien sûr; elle aimait simplement entendre la jolie bicolore rire, plutôt que pleurer. Alors, pourquoi pas jouer ?

Museau Bleu eut un sourire avant d'hausser les épaules. Après tout, qu'importe, tant qu'elles remplissaient leur devoir de guerrière et apportaient de la nourriture pour tous. Un nouveau frémissement se fit entendre, désignant la présence d'une compère à la souris que Jolie Abeille venait d'attraper. Celle-ci eut plus de chance, réussissant à s'enfuir grâce à une seconde de trop que lui avait laissé sa prédatrice.

« J'aurais peut-être été meilleure ! »

Elles avaient toutes les deux échouer une fois. Mais qu'importe, cette chasse n'était pas là dans une urgence de gibier, comme il y en avait dans la redoutée saison des feuilles mortes, où celui-ci se faisait très rare. Et encore, ils étaient surement le clan le moins touché. A part quand la rivière gelait. Non, ce moment de traque n'était pas là pour ça. Il était là pour penser à autre chose, et pour la bicolore, se persuader qu'elle était toujours utile, malgré qu'elle n'ait rien pu faire pour ses frères et sœurs.

La femelle aux yeux émeraudes se mit en position comme si elle allait sauter sur sa benjamine. Elle enchaîna par des mots pleins d'espiègleries, invitant au jeu.

« Mais si tu y tiens tant, tu peux prendre un bain, tu sais ! »

Jolie Abeille sourit, et eut envie de céder à cette tentation. Celle du jeu comme elle en avait tant fait avec Nuage des Ruisseaux lorsqu'ils étaient petits. Le temps où ils se fichaient de tout, où elle l'emmenait dans toutes ces aventures, où il la suivait partout. Le temps où il suffisait d'un regard pour qu'on lui pardonne ses innocentes bêtises. Et si sa bouille n'attendrissait pas, il y avait toujours les explications du futur apprenti-guérisseur pour les sortir de là.

Elle céda.

Imitant sa vis à vis, on aurait dit un mentor et son apprenti en pleine leçon. Ou deux chatons jouant.

"Très bien! Mais j'y vais, tu m'accompagnes!"

Retourner en enfance pouvait être si bénéfique dans ce monde trop adulte.

HRP:

Quand Museau Bleu vit sa cadette l'imiter, elle ne put retenir un sourire; au bord de la rivière, deux silhouettes de guerrières tapies ainsi, prêtes à bondir, semblaient recréer une de ces scènes féeriques d'un passé lointain qui, dans les moments sombres, se rappelait à elles; une scène de combat de chatons, quand elle s'appelait encore Patte Bleue et tapait avec plaisir, du bout des coussinets, ses frères de portée, juste pour jouer - ils prétendaient qu'elle était Étoile Bleue, triomphant dans un grand combat, et ensuite, échangeaient les rôles, dans un tourbillon de fourrures, de feuilles, de pétales et de sable, un mélange de cris, de feulements, de fous rires... Ça semblait si loin ! L'époque où, comme Jolie Abeille à son tour, toute petite, elle avait fait des moues attendrissantes pour éviter les problèmes. Quelle insouciance elles avaient, alors, ces deux princesses de l'eau ! Une scène d'apprentissage, mentor et apprentie, qui se superposait aux apprentissages de Nuage Bleu, et aux sages paroles du guerrier qui s'était assuré qu'elle soit une des meilleures du Clan, l'aidant à prouver ce qu'elle valait, à elle-même et aux autres - elle lui devait tellement. Le printemps refleurira. Ils avaient plongé, chassé, nagé, pêché, s'étaient entraînés, d'innombrables fois. Le printemps refleurira. Une scène qui rappelait aussi les moments avec Étoile du Corbeau, quand ils étaient novices, à se battre pour se perfectionner, en une jolie amitié. Et puis les choses s'étaient compliquées...

La fille de la rivière revint à la réalité, prunelles jade scintillantes de malice, sourire sur son visage au nez bleuté, pelisse de sable et d'écume, en entendant la réponse de sa nouvelle amie, qui, un moment hors du temps, s'était laissée convaincre de se débarrasser des soucis, juste une seconde, juste le temps d'une baignade... La vétérane riait doucement, à présent.

« Très bien! Mais j'y vais, tu m'accompagnes! »
« À toi l'honneur ! » s'amusa-t-elle.

Elle bondit sur la plus jeune, les faisant rouler toutes deux au sol dans l'intention évidente de pousser Jolie Abeille dans le ruisseau, et le chant murmuré de l'onde, avec en contrepoint le grondement lointain des chutes qui paraient d'une robe d'écume l'eau cristalline du bassin en contrebas des cascades, se mêla aux rires d'une guerrière de la rivière. Une guerrière... Et son amie. Elles jouaient, là, sur la rive. Et puis...

Une gerbe d'éclaboussures perlées.
Le bruit des corps qui fendent la surface.
Puis le silence. Apaisant. Sincère.
Tout s'était arrêté...
Les bruits du monde, les pensées.
Juste un moment, pour se consoler.
Juste un petit royaume, où se réfugier.

« À toi l'honneur ! »

Sourire espiègle et yeux pétillants était l'écriture qui racontait l'amusement sur le visage de Jolie Abeille. Museau Bleu bondit sur elle, et elle n'eut pas le temps de réagir pour l'esquiver. Elles roulèrent toutes les deux au sol, en direction de la rivière.
Pas en mordant, en se griffant, comme lors d'une bataille.
Pas parce qu'elles se haïssaient.
Pas parce qu'on leur avait ordonné, au nom de leur devoir de guerrière.
Pas pour conquérir ou chasser des pseudos ennemis.
Non. On n'entendait point de feulement, de hurlements de souffrance ou de rage. On ne voyait point de goutte de sang tâchait les douces fourrures et l'herbe où perlait la rosée.
Juste des éclats de rire, comme ceux échangés entre deux chatons, entre deux amies. Avec aucun objectif précis. Il s'agissait d'un geste né dans la spontanéité comme seuls les enfants savaient si bien faire. Juste pour s'amuser. Ensemble. Partager un bon moment car la vie était déjà assez dure pour qu'on se laisse morfondre, pour qu'on s'interdise tout et rien.

Elles tombèrent toutes les deux dans l'eau, brisant le calme du ruisseau. Brisant l'eau limpide de la surface, ce miroir renvoyant leur reflet. Elles passèrent de l'autre côté, dans un autre milieu, ou elles se sentaient plus soutenues. Où elles avaient le choix de couler, de se laisser emporter ou de battre des pattes, vers la surface, de lutter, pour vivre. Pour ceux qu'elles aimaient, pour découvrir le monde. Et le choix était évident, instinctif. Il était celui qu'elle avait appris dès son apprentissage, celui où elle n'hésitait pas une seconde. Peut-être était-ce le seul.

Des mouvements, revenir vers le haut, pour reprendre son souffle. Et une grande respiration. C'était là qu'elle se sentait le mieux. Entre deux milieux, un où tout était fluide, son monde naturel, et un autre où chaque geste était ressenti, où l'on savait pourquoi on le faisait.

"Ça tu vas me le payer!"

Un nouveau rire aux éclats. Et elle s'accrocha à la fourrure de Museau Bleue, comme elle s'était accrochée à ses paroles remplies d'espoir auparavant. Elle mettait tout son poids, dans l'objectif de la couler. Car elle savait très bien qu'elle remonterait.

Elles jouaient comme deux chatons. Elles avaient brisé cette paroi si fine. Celle qui cachait les sentiments derrière l'apparence. Celle qui séparait l'eau et l'air.

Elles avaient vu ce qu'il se passait sous la surface.

Soudain, dans les pensées de Museau Bleu, tout était calme: le tourbillon de l'eau, les mille courants de la rivière chassaient ceux de ses soucis, et l'atmosphère, différente, atténuait les cris, les coups de griffes, les pleurs, les hurlements, les gémissements et les tambours de guerre qui faisaient rage à la surface. Dans le torrent, tout n'était plus que liquide, et la princesse de la rivière se laissa volontiers entraîner par les vagues et l'écume, comme les grains de sable qui dansaient, entre les roches, tout au fond du ruisseau. Elle laissa la peine, la détresse, l'angoisse la quitter. Elle laissa la paix et la mélodie de ces mouvements aquatiques lui emplir le cœur, apaiser ses tourments, ses brûlures et ses doutes. Elle se laissa mener dans la danse, heureuse et amusée, attendant que ses poumons lui crient de revenir à la surface pour pousser de toutes ses forces sur ses pattes, le cœur battant à tout rompre mais l'esprit plus paisible. Revenir à la surface, revenir à ceux qu'elle aimait, à ses rêves et à tout un monde à découvrir. Revenir avec dans l'âme des trésors d'espoir, cristalline apparition qui les rassurait tant. À ses côtés, Jolie Abeille, elle aussi, inspirait l'air avec une énergie nouvelle, toutes deux trouvant l'équilibre entre leurs deux mondes. Eau et air, terre et ciel. Deux rires qui s'unissaient. Et la voix de sa cadette.

« Ça tu vas me le payer! »

Elles avaient l'air de deux enfants, comme cela ! Et Museau Bleu, en sentant la silhouette de Jolie Abeille se coller à la sienne, ses pattes appuyer sur ses épaules comme pour la noyer, avait quasiment l'impression de jouer avec une sœur, une fille... Une amie.
Des rires aux éclats. Encore. Toujours. À l'unisson.
Sans hésiter, la vétérane se laissa couler, et bascula la tête vers le fond de la rivière pour projeter sa cadette devant elle en un coup d'épaule puis de pattes amusé, se relevant ensuite et étirant le cou pour inspirer une nouvelle goulée d'air. Quelle étrange sensation que celle de perdre quelqu'un et de retrouver une nouvelle personne... Sa famille s'était encore un peu agrandie, composée de ses proches et de ses amis, et la féline aux prunelles de jade avait hâte de la voir entièrement réunie. Mais pour l'instant, elles étaient deux, et elles jouaient.
Au-delà des apparences. Au-delà des faux semblants.
Sous la surface.

« Seulement si tu parviens à m'attraper avant ! »

Et d'un coup de patte puissant, la guerrière prit la fuite, en riant.

Museau Bleu se laissa faire, et entra entièrement dans les eaux de la rivière. Il était évident que si elle avait opposé une résistance, sa force dépassant celle -presque inexistante- de Jolie Abeille, elle n'aurait pas coulé. Ce mouvement n'était là que pour en faciliter un autre, à l'avantage de l’aînée, cette fois-ci. Dans une contre-attaque, elle projeta sa benjamine devant elle, à l'aide d'un coup d'épaule renforcé par un autre des pattes. Ensuite, la plus âgée reprit une nouvelle goulée d'air, avant de rire de nouveau, prenant la fuite en s'élançant.

« Seulement si tu parviens à m'attraper avant ! »

Le rire était un son plaisant, mais d'autres se démarquaient et étaient plus beaux aux yeux de la bicolore. Ceux des membres de sa famille, évidemment. Mais celui de Museau Bleu était de plus en plus agréable à ses oreilles, et elle aimait l'entendre. Il était communicatif et invitait son interlocuteur à la rejoindre dans sa danse d'amusement et de joie éphémère. Certains disaient, que le rire était inutile, comme toutes les marques de sentiments. Le sourire, le rictus, les pleurs. D'autres allaient plus loin, trouvant dans les émotions des boulets accrochés à leurs pattes qui les empêchaient d'obtenir ce qu'il voulait. Que les émotions les rendaient imparfaits. C'était peut-être le cas. Mais l'imperfection n'était-elle pas le propre de l'humanité? Jolie Abeille tenait à ses sourires, ses rires même si les larmes étaient là pour la contrepartie. Car rien n'était blanc ou noir. Mais vivre par l'unique voix de la raison serait peut-être plus simple mais apprécierait-on autant cette vie?

Le féline aux yeux bleus s'élança à la suite de Museau Bleu, battant des pattes comme un poisson utilisait ses nageoires. Elle fendit l'eau et dans un certain effort, réussit à se trouver au même niveau que son aînée. Dans une autre idée purement enfantine, elle ouvrit la bouche, recueillant le liquide translucide avant de le recracher sur la belle aux pupilles émeraudes. Elle réussit à se mettre face à elle, avant de lâcher une nouvelle phrase digne des petits, toujours en riant.

"Je t'ai eu!"

Tout en nageant pour s'éloigner, rieuse et malicieuse, Museau Bleu écoutait sa cadette et amie, laissant fleurir en elles les roses de la joie et les iris du bonheur qui s'exprimaient en rires, entre elles, dans ce royaume d'eau aux nuances pastelles; les puissants de ce monde pouvaient bien se forger mille couronnes dorées, porter des capes de velours brodées aux mille couleurs moirées, se parer de pierreries, d'or et d'argent, aussi, ils pouvaient bien régner sur des pays entiers - tout cela, avait, pour la jolie guerrière, princesse de la rivière, un goût de pauvreté. Les plus grands trésors des rois ne remplaceraient pas cette magie qu'il y avait, dans les moments comme celui-là: le sourire de Jolie Abeille, soleil après la pluie et sublime arc-en-ciel, valait bien toutes les richesses matérielles... C'était ça, sa merveille. Alors elle savourait l'instant, sans se poser de questions, juste un peu; elles auraient le temps pour les soucis - elles voulaient seulement un bref moment d'amusement dans cette vie. Et pour Museau Bleu, voir la plus jeune, ses prunelles de saphir brillantes de malice, valait toutes les perles, toutes les pièces et tous les royaumes du monde. Ensemble, elles tresseraient en couronnes les fleurs de rêves, orneraient leurs fourrures de perles de pluie irisées de tous les espoirs, et se pareraient de sourires sincères, car les émotions formaient souvent la plus belle des parures. Elles vivraient, simplement, et ça... Ça n'avait pas de prix.

Hier n’existe plus , demain ne viendra peut-être jamais.
Il n’y a que le miracle du moment présent, savoure-le. C’est un cadeau! ~Marie Stilkind

Derrière elle, la princesse de la rivière, silhouette à la pelisse de sable et d'écume pouvait entendre la féline d'ombre et de lumière, qui, agile comme une carpe, s'approchait doucement, quoique avec effort. Il y avait quelque chose de poétique dans ces deux flèches jumelles unies par les tourments, âmes en parallèles et cœurs révélés, fendant les flots avec effort pour trouver leur bonheur en jouant, comme des enfants; elles avaient pu se confier un peu, et affronteraient les tristesses de ce monde ensemble, après tout - car Museau Bleu serait là pour la jeune guerrière, maintenant et toujours. Quoique... À l'instant précis où cette pensée traversa son esprit, Jolie Abeille lui crachait sur la pelisse une magnifique gerbe d'eau, espiègle et joyeuse. Désormais face à son amie, la plus petite s'écria:

« Je t'ai eue! »

Et elle rit. Rire merveille.
Museau Bleu avec elle.

Sans signes avant-coureurs, la vétérane plongea néanmoins, fendant la surface sans la moindre difficulté, et ses yeux vert jade s'illuminèrent d'une lueur douce mais amusée, tandis qu'elle se faufilait, sans un remous, sans un bruit, sous le corps plus svelte de son amie; la plus grande, la plus massive, l'aînée des deux riveuses avait donc un net avantage de poids autant que de force, et quand ses mâchoires se refermèrent délicatement sur une patte de son amie, elle sut qu'elle n'aurait aucun mal à la traîner. Elle ne lui laissa pas une seconde pour réagir: deux coups de pattes puissants la menèrent vers le fond, et elle plongea, entraînant avec elle sa camarade de jeu. Quand elle la relâcha, quelques secondes plus tard, elle riait - elles riaient. Et quand l'autre émergea, elle miaula simplement, taquine:

« Maintenant, t'as une raison de recracher de l'eau ! »

Ses yeux pétillants indiquaient la malice, et plus que tout, invitaient à la contre attaque.
Ce moment était certes éphémère, mais... Ils pouvaient bien la faire durer encore un peu.
Ensemble.

Le bonheur est la seule chose qui se double si on le partage.

Après avoir reçue la gerbe d'eau au visage, Museau Bleu rejoignit sa cadette dans cette explosion d'amusement qu'elles montraient à la face du monde. Sans prévenir, l’aînée plonge sous l'eau, sous le regard interloquée de Jolie Abeille. Que préparait-elle maintenant? Une nouvelle farce, pour continuer dans la lancée qu'elles avaient débuté? Elle se dit qu'il serait de bon ton de la rejoindre dans cet autre milieu pour éviter la surprise, mais trop tard.

Elle se sentit tirer vers le bas, emportée par une force plus grande que la sienne dont la propriétaire était évidemment son amie -et confidente. Elle ouvrit les yeux, et elle vit la forme floue à travers le voile transparent. Elle fut rapidement libérée, et en deux trois coups de pattes, elle réapparut à la surface, à peine quelques secondes plus tard.

« Maintenant, t'as une raison de recracher de l'eau ! »

En effet, comme en réponse à ce qu'elle avait dit, Jolie Abeille recracha l'eau qui s'était retrouvée enfermée dans sa gorge lorsqu'elle l'avait emporté au fond de celle-ci. Elle se retourna vers Museau Bleu, pour voir deux yeux l'observaient avec malice. La narguant, lui demandant de prouver qu'elle pouvait mieux faire.

Cependant, il fallait bien le dire, la bicolore était à court d'idées. L'effet de surprise serait compliqué à utiliser dans cette situation, et elle n'avait aucune chance en attaquant de face.

Elle réfléchissait comme s'il s'agissait d'un combat réel. Alors qu'il ne s'agissait que d'un jeu.
L'envie de gagner était présente mais pas comparable à celle des batailles. Ce n'était pas cette rage féroce, celle que l'on possédait quand on savait les conséquences d'un échec. Que celui-ci pouvait signifier une fin, une issue fatale.
Là, non.
Il n'y avait pas d'enjeu, juste celui de s'amuser.
C'était l'envie des chatons, celle qui faisait bouder quand on avait perdu.

Il suffisait juste de relancer la partir. Qu'importe si le jeu était le même ou non.

"Tu voulais faire une course toute à l'heure? Et si on remettait ça?"

S'élançant, et envoyant de l'eau à l'aide de ses pattes sur l’aînée au passage, elle prit de l'avance. Avant de plonger sous l'eau, pour plus de rapidité, elle énonça le but, sachant très bien qu'elle avait crée dès le début un désavantage.

"La première au niveau du gros rocher a gagné!"

HRP: