Vivre, tout simplement ~ Feat Rusty & Perce-Neige -end

Contre Perce-Neige, je dormais paisiblement. Mes doutes s'apaisaient peu à peu. J'apprenais des choses sur la vie tous les jours. Comme une renaissance. Mon enfance avait été un bûcher continuel, où la souffrance était mon quotidien, mon seul repère. Maintenant, j'étais libre, j'étais protégé. Mes sommeils étaient calmes, reposants. Une douce quieté m'envahissait peu à peu. Et un étrange sentiment naissait : le bonheur.
Il faisait battre mon cœur plus fort. Il remplissait mes yeux d'étoiles, à chaque fois qu'elle parlait. Je me sentais à nouveau léger. Rien ne pouvait nous arriver.

Le soleil vint titiller mes pupilles, vulnérable à sa forte lumière malgré mes paupières. J'entrouvris un œil. Ma mâchoire s'agrandit en un long bâillement. Je m'étirais de tout mon long, et lâchai un ronronnement timide.

"Bonjour perce-neeige"

Un sourire s'étira sur mon visage.

"on va faire quoi aujourd'huiiiiii?"

Rien ne pressait... c'est pourquoi je me blottis contre son pelage, et fermai à nouveau les yeux. Je me sentais bien.

Spoiler:

Perce-Neige avait cherché à attraper une mouche, sans succès, depuis le petit matin. Impossible de dormir avec cette saleté qui lui tournait autour, elle avait donc décidé qu'elle remplacerait ces heures de sommeil par de bonnes siestes à l'ombre durant l'après-midi. De toute manière, elle forcerait sans doute Déchet à se reposer - son activité de jeune apprenti la fatiguait parfois, elle qui ne s'était jamais occupée à plein temps d'un petit. Lui ne semblait pas dérangé par le bruit, et dormait toujours contre son flanc.

Elle posa alors un regard inquiet sur Déchet. Il fallait qu'elle trouve quelqu'un pour lui apprendre à chasser, elle-même était trop mauvaise pour cela. Mais elle n'avait personne en qui elle avait confiance, à part ce tout petit chat noir … La femelle sourit en le sentant s'éveiller et la saluer.

« On va faire quoi aujourd'huiiiiii ? »

Son cœur se serra de tendresse en l'observant. Comment avait-on pu faire du mal à un être si précieux, si doux, si empathique ? Il était né sous une mauvaise Etoile … Enfin, si l'on pouvait encore parler d'Etoiles.

« Je ne sais pas … Il faudrait vraiment t'apprendre à chasser des proies et à te défendre, mais je ne connais encore personne qui pourrait t'enseigner. »

Elle lui lécha le front, avant d'ajouter joyeusement :

« Mais nous trouverons ! Il suffit de chercher. Il y a plein de félins très aimables ici, nous te trouverons un professeur. »

L'écaille essayait plus de se convaincre elle-même que Déchet, elle savait qu'il se fiait la plupart du temps complètement à ce qu'elle disait - ce qui n'avait pas été une bonne chose lors de ses précédentes relations avec des enfants.

« Mais toi, Déchet, tu aurais voulu faire quelque chose aujourd'hui ? »

Son tendre regard m'emplit d'allégresse, et je me mis à émettre un doux ronron

« Je ne sais pas … Il faudrait vraiment t'apprendre à chasser des proies et à te défendre, mais je ne connais encore personne qui pourrait t'enseigner. »

Je remuai les oreilles, un peu gêné. La dernière fois que j'étais allé chercher à manger, cela s'était soldé par un mort. Mais ça, je ne l'avais pas dit à Perce-Neige et je le garderais pour moi à jamais. De toute façon, il l'avait mérité... Ce n'était que grâce à sa mort que j'avais pu m'enfuir et retrouver la douce Perce-Neige.

« Mais nous trouverons ! Il suffit de chercher. Il y a plein de félins très aimables ici, nous te trouverons un professeur. »

Je tiquai sur le mot aimable, et fis la moue. Aimable, aimable, y'avait mieux quand même... enfin, maintenant que je n'avais plus l'odeur des Lunar Pods sur moi... peut-être me regardera-t-on différemment? Comme le véritable moi? Est-ce-que les autres seront capables de me voir comme Perce-Neige me voyait?

« Mais toi, Déchet, tu aurais voulu faire quelque chose aujourd'hui ? »

Perce-Neige l'étonna encore une fois. Le trouble dut se lire sur son visage, pour laisser place, ensuite, à un bonheur pur. Une joie sincère, vide de toutes perversions. J'étais là, vivant, et on me demandait MON avis! Je me levai d'un bond léger.

"Se promener! "

Et j'étais déjà dehors, l'air radieux, à regarder de tous les côtés, enfin serein et apaisé...

« Se promener ! »

Si elle n’était pas le perce-neige qu’elle avait espéré, Déchet était un fragile coquelicot, le premier à fleurir après la guerre, et cela était tout aussi bien. Elle restait attachée au bien-être d’autrui, c’était sans doute ce qui l’animait le plus positivement en ce moment. Ce qui était dommage, c’était de ne s’en rendre compte qu’aujourd’hui …

« D’accord, allons nous promener. Je peux t’emmener voir … »

Elle réfléchit un instant, avant de prononcer des promesses qu’elle ne pourrait tenir, puis compléta :

« Un jour je te montrerai des pierres si hautes que tu n’en croiras pas tes yeux, forêts avec mille arbres dont on ne voit pas la cime, des landes si grandes qu'on ne voit que de l'herbe à l'horizon ! Je te le promets, tu verras le monde au-delà des collines et des marais. »

Elle abattit ensuite une patte affectueuse sur le crâne du bambin, avant d’ajouter avec un sourire goguenard :

« Mais les chats de la forêt sont encore trop en colère, nous allons commencer par explorer la ville, ce sera notre territoire, on le connaîtra sur le bout des griffes. »

Elle espérait tout de même qu'un jour, il serait prêt à tout lui raconter sur cette mystérieuse bataille des Clans contre les Lunar Pod … Elle n'avait pas voulu le brusquer ou éveiller ses soupçons depuis leurs retrouvailles, mais son cœur était toujours empli de doutes à propos de sa famille.

« D’accord, allons nous promener. Je peux t’emmener voir … Un jour je te montrerai des pierres si hautes que tu n’en croiras pas tes yeux, forêts avec mille arbres dont on ne voit pas la cime, des landes si grandes qu'on ne voit que de l'herbe à l'horizon ! Je te le promets, tu verras le monde au-delà des collines et des marais. »

Les engrenages de mon imagination se mirent aussitôt en route, afin de créer ce décor de rêve, ce paysage paradisiaque. Il me suffisait de fermer les yeux, et aussitôt j'étais transporté dans ce nouveau monde. A chaque fois que la douce Perce-Neige me parlait de quelque chose, c'était comme si une toute nouvelle porte s'ouvrait, alors qu'elle m'avait toujours été cachée ou verrouillée. C'était tellement satisfaisant. J'étais là haut, sur cette crête, devant ces immenses pierres si haute que je me sentais petit, tout petit, dans ce monde immense, gorgé de mystères en tout genre. L'herbe à perte de vue, tel un manteau vert sur les collines à la longueur extensible.

« Mais les chats de la forêt sont encore trop en colère, nous allons commencer par explorer la ville, ce sera notre territoire, on le connaîtra sur le bout des griffes. »

J'hochai vivement la tête. Cette idée me paraissait merveilleuse. Un territoire rien qu'à nous deux! A nous deux, tous seuls. Notre chez-nous...
Tout plein d'effluves s'élevaient dans l'air. J'étais totalement incapable de les distinguer les unes des autres. Je trouvais cela passionnant. Chaque petit détail, peut être insignifiant pour d'autres, me paraissait révolutionnaire. Il pouvait s'agir aussi bien de nuances sur une fleur, que nos reflets dans une flaque d'eau.

Au loin, je distinguais les formes d'un matou qui se dirigeait vers nous. Par instinct, je me plaçai derrière Perce-Neige. Elle me protégeait, je le savais.

Spoiler:

Il ne se dirigeait pas vraiment vers eux, per say, plutôt dans la direction générale où ils se trouvaient. Il faut dire que depuis l'offre de Trash, et depuis la courte semaine où des chats avaient élu domicile chez lui pour mettre bas à ses adorables neveu et nièce, Rusty n'avait plus le temps de se lamenter sur son sort et la disparition de ses proches - son humain, Sugaar, ou même Madame Fée qu'il n'avait pas du tout visité depuis...

Il était retombé dans son cycle d'entraînement/promenade/repérage autour et l'exercice lui avait bien aéré l'esprit. Aussi en croisant la chatte et son chaton il n'eut aucune pensée pour la chatte calico du Coin des Landes ou de ses griffes qui lui avaient enflammé le poitrail. Bien que l'air fatigué, il s'efforça de sourire et courba poliment la tête en dressant haute sa queue sur sa croupe, même si elle s'affaissait.

— « Bonjour!   À voir le petit se cacher derrière sa mère - ou du moins il lui semblait... - Rusty eut un léger mouvement de recul, préférant leur laisser son espace. Il secoua sa tête, nettement plus vocal avec le corps qu'avec la voix depuis qu'il avait appris à Petit Cri à s'exprimer à l'aide de charades.  Vous n'avez pas l'air de venir du coin. »

Il pencha la tête pour regarder le plus petit et tenter de lui sourire mais il craignait l'effaroucher davantage, alors il se redressa. En regardant par-dessus son épaule, il se permit un coup d'oeil sur la chaussée longeant le trottoir où il marchait pour s'assurer qu'aucune voiture ne se dirigeait dans leur direction.

— « Soyez prudents dans les parages, c'est l'heure où les "monstres" circulent, ici. »

Merci Fira!

Déchet paraissait survolté, plantant son nez dans l'air à tout-va, ses yeux sautant d'un endroit à l'autre sans s'arrêter. Perce-Neige souffla d'amusement, rien qu'en l'observant elle était fatiguée ! Mais il lui donnait une nouvelle vision du monde, plus belle et bien plus ouverte qu'avant … Cependant, leur projet d'exploration fut rapidement avorté, la cause étant un félin étranger qui se dirigeait vers eux. Malgré ses paroles rassurantes quelques instants plus tôt, l'anxiété de Perce-Neige était bien palpable, et elle ne savait pas s'ils allaient se retrouver face à un ami ou un ennemi.

« Bonjour! Vous n'avez pas l'air de venir du coin. »

L'écaille resta en arrière et apprécia le geste de recul de l'inconnu. Elle avait eu pour habitude de fuir les étrangers par peur ou de les éviter par dégoût, autrefois. Désormais, tout nouveau félin rencontré pouvait constituer un potentiel appui en cas de pépin. Elle devait faire ça pour Déchet. Elle devait lui trouver d'autres félins bienveillants pour veiller sur lui, et ne laisser filer aucune occasion.

« Soyez prudents dans les parages, c'est l'heure où les "monstres" circulent, ici. »

Piquée au vif par le conseil et l'idée qu'elle ait pu mettre le petit Lunar Pod en danger, elle invita Déchet à s'écarter de la chaussée d'un geste un peu brusque. Elle leva ensuite un regard méfiant vers le félin, en restant à une distance prudente :

« Si, nous sommes du coin, d'un peu plus loin. J'emmenais mon … fils s'amuser un peu dans les environs. Vous, vous êtes d'ici ? Monsieur … ? »

Elle avait réagi si vite à son conseil que Rusty dut relever l'autre patte et l'approcher de son poitrail dans un geste de "bonté divine" stupéfait, retournant vite sa tête vers les deux autres. La mère du petit ne bougea pas de sa position et fixa son regard sur lui, faisant se tordre le sourire de l'abyssin. A-... avait-il quelque chose sur la truffe? Il croisa les yeux pour s'assurer que ce n'était pas le cas.

— « Si, nous sommes du coin, d'un peu plus loin.
— « Oh!

Rusty détourna vite les yeux de sur son nez pour reprendre le contact visuel avec son interlocutrice - c'était la moindre des choses!

— J'emmenais mon … elle hésita, fils s'amuser un peu dans les environs. Vous, vous êtes d'ici ? Monsieur … ?
— Ahha, autant pour moi ! s'exclama l'abyssin sans n'en faire plus de cas. Je m'appelle Rusty, je passe tout les jours ici et je ne vous ai jamais vu, c'est pour ça. »

Il roula un petit ronron au fond de sa gorge en se penchant, tâchant d'accrocher le regard du chaton (pas si petit que ça...) et le rassurer d'un sourire chaleureux comme l'été. Il voyait bien ses cicatrices sur son visage et il en eut pitié, se voyant dans ses yeux craintifs. Il se disait que le chaton de cette dame avait plutôt souffert d'une attaque, exactement comme lui - une épaule guérie des cicatrices des griffes d'argent, et l'autre, jusqu'au poitrail, bien visibles de celles de Tache d'If la lieutenante du Clan du Vent.

Il se redressa pour offrir cette même chaleur à la mère.

— « Ravi de vous rencontrer! ♫

Merci Fira!

Le félin s'arrêta à notre hauteur pour nous saluer. Je restais timidement en retrait, toujours caché derrière Perce-Neige, intimidé.

— « Bonjour! Vous n'avez pas l'air de venir du coin. »

Je le fixai de mes petits yeux interloqués. Il esquissa un léger mouvement de recul, gardant ainsi ses distances avec nous, et indiquant par la même occasion son pacifisme. Je me détendis alors davantage, et écoutai les adultes discuter avec une attention accrue. Une simple discussion comme celle-ci me remplissait d'émerveillement. Discuter sans craindre de se faire taper dessus, juste comme ça, avec un stricte inconnu... Cette perspective m'apparaissait extraordinaire.

« Soyez prudents dans les parages, c'est l'heure où les "monstres" circulent, ici. »

Les montres? Je n'avais aucune idée de ce qu'ils étaient, mais cela inquiéta ma perce-neige qui me mit aussitôt sur le côté, brusquement. Je sentais qu'il y avait eu une montée d'angoisse en elle. Alors, comme pour la rassurer et lui montrer que tout allait bien, je me collai à elle avec un très léger ronronnement.

« Si, nous sommes du coin, d'un peu plus loin. J'emmenais mon … fils s'amuser un peu dans les environs. Vous, vous êtes d'ici ? Monsieur … ? »

Fils? Je levai des yeux surpris vers Perce-Neige, toujours concentrée sur notre interlocuteur. Qu'était-ce donc une mère à la Perce-Neige? La mienne avait été affreuse, c'est pourquoi le terme m'apparaissait hautement péjoratif. Mais si c'était Perce-Neige qui l'employait... alors c'était qu'il y avait du bon côté dans ce qu'était une mère!

— Ahha, autant pour moi ! je m'appelle Rusty, je passe tout les jours ici et je ne vous ai jamais vu, c'est pour ça. »

Je lui fis un sourire timide. En même temps on ne vient pas vraiment d'ici...J'ignorais pourquoi Perce-Neige mentait à ce sujet, mais elle devait avoir ses raisons...

— « Ravi de vous rencontrer! ♫

Je répondis à son ton joyeux par un doux ronron.

" Et moi je m'appelle... Je m'appelle heu..."

Je levai un regard interrogatif vers Perce-Neige. Devais-je l'informer de mon véritable nom? Ce nom si péjoratif?
J'abandonnai l'idée en secouant la tête, puis reportai mon attention sur Rusty pour lancer d'un ton enjoué:

"Est-ce-que tu as des amis?"

L'amitié... voilà un mot que j'avais désormais toujours à la bouche, que j'appréciais tout particulièrement, en tant que sujet qui me tenait à coeur...

« Ahha, autant pour moi ! Je m'appelle Rusty, je passe tout les jours ici et je ne vous ai jamais vu, c'est pour ça. »

Le museau de Perce-Neige eut un petit sursaut nerveux. Au lieu de les rendre anonymes, elle avait rendues saillantes les incohérences de son discours. Elle n'était pas encore très douée pour le mensonge, et cela lui apparut d'autant plus fâcheux que Rusty aurait pu être autrement plus méfiant que ce qu'il ne semblait être en ce moment. Elle lança un nouveau regard contrarié au solitaire, alors qu'il semblait vouloir attirer l'attention de Déchet.

« Ravi de vous rencontrer! ♫
- Et moi je m'appelle... Je m'appelle heu... »

Perce-Neige s'empêcha de tourner vivement la tête vers le petit d'un air réprobateur. Il était un ancien Lunar Pod, si quiconque parvenait à l'identifier, il risquait sa vie.

« Est-ce-que tu as des amis ? »

L'écaille lâcha un discret soupir et se détendit. Elle décida de s'engager un peu plus dans la conversation, histoire de montrer à Déchet qu'ils allaient réussir à se faire des amis - tout en conservant un fond de méfiance.

« Excusez la question un peu cocasse, mon petit n'arrivait pas à se lier d'amitié avec d'autres félins jusqu'à très récemment, alors il essaie d'en trouver beaucoup d'autres maintenant. Vous connaissez beaucoup de félins en ville, Rusty ? Car nous cherchons quelqu'un qui pourrait lui apprendre à chasser mieux qu'avec moi - je ne suis pas très bonne chasseuse, voyez-vous ! »