Insouciance [PV: Esprit Soucieux] - end

Tout pesait sur l'ombre ces derniers jours. Les récentes morts avaient chambouler le clan et tous étaient plus ou moins touchés par ces dernières. A quelques exceptions près. Petit Feulement, par exemple, n'était qu'un enfant. Un bambin qui ne comprenait pas encore grand chose à ce qui pouvait bien se passer autour de lui ou même à ce qu'était la mort. Il ignorait pourquoi tant de mines graves parcouraient le camp et se contentait simplement de jouer avec la queue de sa mère durant les longues journées qui peuplaient sa courte vie. Son ignorance faisait de lui un chaton heureux malgré la mort de son père, le suicide d'Ancolie étant indirectement de sa faute et de son arrivée au monde catastrophique. Il n'en avait tout simplement pas conscience. Toutefois, cette ignorance ne l'empêchait pas de s'ennuyer affreusement. Il ne possédait pour l'instant pas d'amis et pas de fratrie. Alors les jours étaient longs, horriblement longs. Mais voilà, aujourd'hui il décida de profiter du sommeil de sa mère pour se glisser hors de la pouponnière. D'un pas maladroit et encore pataud le jeune mâle s'avançait dans l'enceinte du camp. Il ne s'était jamais vraiment écarté auparavant et tout lui paraissait immense. Les arbres, les tanières, le gibiers et les nombreux guerriers. Tout ce monde nouveau laissait de nombreux frissons d'excitation parcourir son corps, et loin d'avoir peur, bien qu'un peu impressioné, Petit Feulement s'avançait le torse bombé en direction de-....En direction d'où d'ailleurs? Il ne le savait pas vraiment.

Il y avait tant de nouvelles informations que le fils de l'ancien chef ne savait où regarder, quoi renifler et quel son écouter. Toutefois, un mouvement retint toute son attention. Un serpent sombre, se mouvant doucement et sournoisement sur le sol, lentement, mais surement. Une queue. La queue du guérisseur pour plus de précision, mais vous savez l'imagination des gosses n'a pas de limite. Le truc c'est que Feufeu n'avait aucune idée de qui était ce chat, ni de l'importance de son rang ou du fait qu'il était très certainement occupé à faire des choses bien plus importante que de s'occuper d'un chaton. Alors il se rapprocha du sol, plus qu'il ne l'était déjà en tout cas, et avança maladroitement vers son "adversaire." D'un coup, il déplia son petit corps et bondit sur sa "proie" en poussant un petit miaulement de rage. L'attrapant de ses antérieurs et la rouant de petits coups de ses postérieurs. Ah l'enfance, l'innocence.

HRP:

+:

Les remords, regrets et anxiété s'accumulent comme de gros nuages, un troupeau de moutons blafards, au dessus de ma tête, et je me traîne des casseroles à ne plus savoir quoi en faire. Plus d'amie croyante, plus de chef impie, couple oxymorique réuni dans la mort, de sa main et de celle de son apprenti, comble pour les guérisseurs que nous sommes, Naange et moi. L'âme en peine, le cœur en friche, je pars voir le nouveau chef, Étoile Maudite, savoir s'il s'est bien remis de notre longue marche jusqu'à nos Ancêtres - pour lui aussi les choses ont été difficiles, et même s'il a nommé ma salope de sœur à ses côtés, je le respecte, je sais que les Étoiles acquiescent.

Je sors devant mon antre, marque la pause, soupire. Tics nerveux attachés au corps, mes oreilles tressautent, ma queue se fait serpent de tissus, mes moustaches frétillent. Aujourd'hui ne sera pas une bonne journée, le jour a un sale goût. Comme pour confirmer mes dires, un vive douleur me traverse, je me redresse, et voit le rejeton de Serpentaire accroché à ma queue comme un ver à un fruit. Je la secoue, essaye de l'envoyer valser, mes babines découvrent des crocs luisant d'une bave épaisse.

Mais lâche putain, t'as de l'eau dans le cerveau kiddo ? Casse toi et retourne chez ta mère, merde !

La queue du grand mâle gris se tortilla soudainement et violemment. Le chaton lâcha prise et roula légèrement avant de se redresser aussitôt, prêt à bondir à nouveau avant d'apercevoir le visage agressif du guérisseur et d'entendre le son colérique de sa voix:

"Mais lâche putain, t'as de l'eau dans le cerveau kiddo ? Casse toi et retourne chez ta mère, merde !"

Le pelage du petit mâle sombre s'ébouriffa d'un coup, lui donnant un air plus ridiculement adorable que féroce...Mais l'idée de première était de le rendre plus imposant. Il cracha, à mi-chemin entre le jeu et la colère. Eh, oh, comment il lui avait parlé le gars? C'était méchant! Puis c'était pas comme s'il avait volé un truc sur la pile de gibier. Rah vraiment pas drôles ces grands.

"Ah c'est bon je voulais juste jouer!"

S'exclama t-il d'une voix plaintive avant de se redresser de toute sa hauteur...Si on peut appeler cela de cette manière.

"Quoi? J't'ai fais mal?"

Miaula t-il d'un ton arrogant, montrant qu'il insinuait clairement que le guérisseur était une lopette. Bordel, quel gamin insupportable quand il s'y mets. Y'avait que sa mère pour le calmer celui-là. Ou un bon coup de patte dans la gueule, au choix.

Mal ? Il est con ce petit, j'vais lui bouffer la queue on verra si ça fait du bien. Avec le poil en bataille et des plaintes dans la vie, elle est belle la descendance de Serpentaire, j'espère bien que du fond de sa Forêt Sombre il regrette d'avoir donné naissance à ce petit qui ne lui ressemble pas - et plus encore de l'avoir imposé à Fleur Noire. La pauvre n'avait pas besoin de ça, clairement pas, elle qui se noie déjà apathiquement dans ses souvenirs douloureux, toujours amoureuse d'un chat qui n'existe que dans ses souvenirs.

Je me radoucis. Ce n'est qu'un bébé, un autre piou-piou sur lequel veiller, pas un de ceux que j'aurai à charcuter, louées soient nos Étoiles. Je le regarde et je vois dans ses yeux la relève de l'Ombre et l’innocence des enfants, leur cruauté aussi, qu'on oublie bien vite, sa bêtise, peut-être son égarement. Plus de papa pour le petit, faudrait pas qu'il devienne pédé hein. C'est décidé, je vais le surveiller, comme Nuage du Fauve. Prendre soin de lui. Toujours garder un œil sur ses fesses.

Le Clan a besoin d'un sang pur.

Jouer ? Tu veux jouer à quoi, kiddo ?

+:

Le regard du guérisseur, dans un premier temps dur, se radoucis lorsqu'il demanda:

"Jouer ? Tu veux jouer à quoi, kiddo ?"

L'arrogance et la moquerie du chaton sembla soudainement s'envoler lorsque ses yeux ambrés brillèrent d'une lueur d'excitation et de joie. Sa fourrure, toute ébouriffée, tomba doucement sur son corps. Qu'il était content que Soucieux accepte de jouer avec lui!

"Oh je sais pas...On pourrait jouer à...Se battre! Ou bien à cache-cache! C'est bien cache-cache qu'est-ce que t'en dis?"

S'exclama t-il déjà presque tout tremblant d'excitation. C'était de sacré piles sur patte ses chatons, toujours pleins d'énergie, toujours à vouloir jouer, explorer, faire des bêtises. Et feufeu n'échappait pas à la règle, car même s'il aimait bien jouer le "gros dur" il restait tout de même un enfant. Les adultes sont si sérieux, si occupés, toujours à faire de trucs. C'était sympa d'en voir un qui voulait bien lui prêter un peu de son temps. De plus en jouant avec un grand, il se sentait comme un grand!


"Oh euh...C'est quoi ton nom déjà?"

Finit-il par demander en penchant légèrement la tête sur le coté.

Un jour j'apprendrais à ne pas être en retard:

+:

"Ok, un cache-cache si tu veux. C'est Esprit Soucieux mon nom, tu pourrais le retenir quand même."

Le petit mâle sauta de joie sur place. Il aimait beaucoup jouer à cache-cache. Il aimait beaucoup jouer en général, comme tout chatons de son âge.

"J'veux dire, sans moi tu serais pas né quoi."

Ah? l'agitation du gamin prit fin lorsqu'il fixa avec de grand yeux ronds et curieux le guérisseur plus âgé. Sans Esprit soucieux il ne serait pas né? Qu'est-ce que ça voulait dire ça? Maman lui avait dit que son papa c'était Etoile du Serpentaire, pas le mâle gris. En même temps l'enfant ne savait pas d'où venaient les chatons, ou encore comment on faisait pour en avoir. Tien, d'ailleurs c'était une bonne question. Est-ce que ça poussait comme les plantes? Souc' en connaissait un rayon sur les plantes! Peu-être qu'il savait? Mais ce serait une question pour plus tard. Une autre lui trottait déjà dans la tête.

"Hein? Mais c'est pas toi mon papa? Si?"

Demanda t-il de manière innocente, penchant à nouveau la tête sur le côté. Il examina de haut en bas et de long en large l'adulte...Ils ne se ressemblaient pas. Et puis si le guérisseur était son père il passerait plus de temps avec lui non? Il était vraiment confus le pauvre petit.

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"Non non, kiddo, moi je peux pas avoir de bébés, je suis le guérisseur. Je suis marié avec les Étoiles tu vois ? Et du coup j'aide les mamans à avoir leurs bébés, tu sais, il faut une maman, un papa, et le guérisseur pour veiller à ce que tout se passe bien. C'est pour ça que les homos peuvent pas avoir d'enfants, donc sont des parasites. Car sans enfants, le Clan ne grandit pas."

Les oreilles du petit mâle dodue se dressèrent, les paroles du guérisseur soulevèrent de nouvelles questions dans son esprit encore inconscient d'enfant. Il ne connaissait rien au monde qui l'entourait et avait soif d'apprendre, de comprendre. Une curiosité enfantine, juvénile.

"C'est quoi les momo? Les Homos?"

Parvint t-il à dire après un premier échec.

"Et comment la maman et le papa ils font des bébés?"

La petite boule de poil se fit silencieuse un instant, l'air de réfléchir de relever ses yeux emplis de confusions vers l'adulte.

"Et si il faut un papa et une maman, il est où mon papa?"

Le pauvre gamin n'avait jamais vu son père. Il ne connaissait que son nom, son rang. Parfois il lui arrivait de s'imaginer ce que c'était d'avoir un père mais il n'en avait en vérité aucune idée. Alors il avait vite fini par faire avec. Toutefois, il sentait bien qu'il manquait quelque chose à son portrait de famille et se demandait souvent pourquoi son père ne venait-il jamais lui rendre visite. Il avait entendu qu'Etoile du Serpentaire était mort. Mais ce terme lui était inconnu. Cela pouvait autant dire qu'il était rouge, bleu, grand, petit. Mort était à ses yeux un simple adjectif don le sens lui échappait.

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