Première Étape ▬ Nuage de Bourgeon. - abandon

Contrairement à ce que l’on peut penser et malgré son âge plutôt avancé, Raton Laveur n’a pas eu énormément d’apprentis à charge. La veille, Nuage de Bourgeon lui a été confié. Le guerrier est bien heureux de se charger de l’entraînement de l’ancien Petit Gland qui l’a énormément amusé lors de ses nombreuses visites à la pouponnière. Pour faire comme tous les bons mentors, Raton Laveur se lève assez tôt et se dirige vers la tanière des apprentis pour inviter son nouvel élève à faire le tour du territoire :

« - Nuage de Bourgeon ? Il est l’heure de commencer ton entraînement, je t’attends à l’entrée du camp. Essayes de ne pas trop tarder ! »

Doux et prévenant, comme à son habitude, Raton Laveur sort sans un bruit et attend le nouvel apprenti au lieu de rendez-vous, espérant qu’il ne se fera pas vraiment attendre. Au pire, le masqué est plutôt patient et l’énerver est bien compliqué.

Le guerrier gris est persuadé qu’il ne va pas attendre Nuage de Bourgeon très longtemps. Son excitation de la veille a motivé son mentor qui n’a qu’une hâte : le voir enfin sorti du camp. Raton Laveur a à peine le temps de se placer à l’entrée du camp que son élève débarque, la queue hérissée, la fourrure en bataille, la tête tout juste sortie de la litière et beugle :

« - Je suis prêt, m'sieur, j'ai même pas mangé tellement j'suis prêt ! On va faire quoi ? Se battre ? Chasser ? Visiter ? Se battre ?! »

La joie de vivre du chaton fait chaud au cœur du guerrier. Il est bien content de l’avoir eu comme élève : il allait enfin pouvoir occuper ses journées avec quelqu’un qui a besoin de lui. Heureux au maximum, le guerrier réfléchit à ce qu’ils pourront bien faire. Un premier entraînement est généralement un tour de territoire. Le masqué ne va pas faire dans l’originalité et il répond simplement en ronronnant :

« - Nous allons faire le tour du territoire. Et vu que tu n’as pas mangé - et s’il est pas trop tard - nous chasserons un peu ! Avec un peu de chance … Tu attraperas ta première proie ! »

Nourrissant volontairement l’excitation du chaton, Raton Laveur l’invite à le suivre et à se calmer légèrement. Ils sortent du camp et le guerrier marche d’un pas léger pour ne pas essouffler l’apprenti rapidement, histoire qu’il tienne toute la journée. Rapidement, ils arrivent au Grand Sycomore qui se situe très près du camp. Le guerrier s’arrête et intime à son apprenti d’en faire de même.

« - Le Grand Sycomore. Cet arbre a des milliers de lunes. Il a toujours été là depuis la création du Clan du Tonnerre. On s’y entraîne à l’escalade et les guérisseurs y trouvent de nombreux remèdes. Fais attention à tes pattes, n’écrasent pas des fleurs qui pourraient être des remèdes. »

Le guerrier prend un grand plaisir à transmettre son savoir. Tant qu’il peut le faire, il le fera.

L’émerveillement du chaton rend le mentor heureux. Il préfère mille fois ça à un apprenti qui tire la gueule et n’éprouve aucun plaisir lors de ses entraînements. Cependant, l’excitation du chaton devra être canalisée lors des parties de chasse ou de combat. Dans cet entraînement, elle ne dérange pas.

« - On peut grimper là-haut ?! Mais c'est super haut ! Et si ... Et si on tombe ... ? »

Les oreilles plaquées contre sa tête, l’apprenti déglutit imaginant sans doute une chute du haut de cet arbre. Un frisson lui échappe. Le guerrier s’approche de lui pour le rassurer et lui dit d’un ton très doux et protecteur :

« - Nous apprendrons plus tard à grimper à un arbre. Personne ne monte au sommet de cet arbre, c’est suicidaire. Une chute d’une telle hauteur serait fatale à n’importe lequel des guerriers du clan. »

Finalement, le guerrier ne se montre pas vraiment rassurant. Ne voulant pas s’attarder devant cet arbre qui ne sert - à vrai dire - pas à grand chose, le guerrier décide de reprendre la route d’un pas plutôt lent pour ne pas fatiguer le tout jeune apprenti. Non loin d’où se trouvent les deux voyageurs se trouve les Rochers aux Serpents. L’endroit est dangereux alors, durant la marche, le guerrier met en garde son élève :

« - Nous nous rendons aux Rochers aux Serpents. Cet endroit est très dangereux. Reste près de moi et tape fort des pattes pour faire fuir à maximum les vipères qui te tuent en une morsure. »

En silence et en tapant des pattes, les deux arrivent finalement aux rochers. Le pouls du guerrier s'accélère lorsqu’il repense à la mauvaise surprise qu’il a eu avec Nuage Roux. Espérons que ça ne soit pas le cas aujourd’hui.

Nuage de Bourgeon semble avoir flairé l’anxiété de son mentor. Le petit ne dit rien mais son regard suffit à le trahir. Ce qui est avantageux pour son professeur c’est qu’il saura très vite déceler le mensonge chez son élève, cependant, cela risque de lui porter préjudice lors d’un combat. Il devra apprendre à masquer ses émotions. L’apprenti regarde à droite puis à gauche, cherchant sans doute un ou deux serpent.

« - Ça ressemble à quoi un serpent ? C'est gros ? C'est poilu ? Plumeux ? Il parait qu'ils mangent les chatons désobéissent à leur mère. »

Le mentor ne peut s’empêcher de rire face à la dernière phrase de son élève. Il ronronne. Il a encore tellement de choses à apprendre. L’innocence du chaton amuse le vétéran. Ce n’est pas de la moquerie, bien au contraire, Raton Laveur fait tout pour veiller au bien être de Nuage de Bourgeon :

« - Un serpent ? C’est très long, fin. Ça rampe et ça n’a pas de pattes comme nous. Ils n’ont pas de fourrure et sont recouverts d’écailles. »

Dit comme ça, l’élève ne risque de pas comprendre. Pour mieux décrire la forme du reptile, Raton Laveur sort une griffe et dessine la silhouette de la bête dans le sable avant de reprendre :

« - Ils ont une langue fourchue. Elle est coupé en deux. Regarde ... »

Une nouvelle fois, il se remet à dessiner. Cette fois-ci, c’est la typique langue en V qui est présente sur le sable. Ne voulant pas s’éterniser dans ce lieu qui peut se montrer très dangereux, le matou invite son élève à reprendre la route.

L’apprenti ne semble pas paniqué à l’idée qu’un serpent déboule à n’importe quel moment. Après tout, le dessin du guerrier n’est pas forcément totalement représentatif. Le guerrier s’étire face à son élève qui réplique :

« - Oui mais moi c'est bon, j'ai été obéissant avec maman, elles me mangeront pas ! »

Le professeur ronronne, plus qu’amusé par ce tout-jeune apprenti. L’élève s’étend montré très patient jusqu’à présent commence à montrer les premiers signes de hâte. Il demande alors au guerrier :

« - Monsieur Raton-Laveur ? Comment on sait qu'on n'est pas arrivé chez un autre Clan ? »

Très détendu jusqu’à présent, le mâle se crispe légèrement en arrivant à côté du Chemin du Tonnerre. L’odeur nauséabonde remplit les narines du guerrier et il finit par les froncer. Le guerrier montre du bout de la queue la surface noire et l’autre côté, par delà l’asphalte.

« - On y est. Tu vois, de l’autre côté de ce chemin immonde, c’est le territoire du Clan de l’Ombre. Tu ne dois jamais franchir cette surface noire, compris ? »

Son ton - jusqu’à présent très doux et prévenant - est bien plus sévère. Il veut faire comprendre à Nuage de Bourgeon que certaines choses ne doivent pas être faite. Il sait que la tentation est grande, il ne faut jamais que l’apprenti franchisse cette surface seul au risque d’y mourir.