Histoire de Coussinets ▬ Nuage de Corbeau. -end

À force de chahuter toute la journée, Patte d’Alpaga a les coussinets bien amochés. Il ne fait que se plaindre de la douleur à sa sœur. Celle-ci en a eu plus que marre et a décidé d’en parler à leur maman. Le chaton est légèrement déçu que sa sœur n’est pas gardé cela pour elle car ça lui aurait évité un aller retour à la tanière du guérisseur.

Paniqué à l’idée d’être soigné, le frisé va totalement à reculons dans cette sombre tanière qui n’inspire pas vraiment confiance. Tremblant, il avance et franchit le rideau de lichen apeuré par ce qu’il va suivre. Une silhouette noire est tout juste discernable dans l’ombre de la tanière, il balbutie alors :

« - Je … Je … Patte d’Alpaga ! Maman m’envoie … à cause de mes coussinets. »

Paniqué, le petit n’en dit pas plus espérant que son interlocuteur le mette très vite à l’aise.

La gêne de Patte d’Alpaga semble surprendre l’apprenti guérisseur qui se contente de détourner le regard avec un sourire. Il reprend vite un air plus sérieux. Nuage de Corbeau ne laisse pas le temps à Patte d’Alpaga de s’habituer et s’avance vers lui, regardant d’un œil inquiet ses coussinets. Le chaton qui a l’habitude de paniquer très vite voit son souffle s’accélérer et tente de se calmer alors que l’apprenti lui demande :

« - Tu t'es fait mal aux coussinets ? Comment tu t'es fait ça ?»

Il inspire. Il expire. Chaque nouvelle expérience sans sa sœur lui fait toujours une telle sensation. Lorsqu’il n’est pas avec elle, il se sent perdu, hésitant. Tout le monde commence à le comprendre et cela inquiète grandement ses parents qui se demandent s’il arrivera à être un bon guerrier. Patte d’Alpaga veut le leur montrer mais c’est plus fort que lui : seul, il est perdu.

« - Je me rappelle plus … Je dirai que c’est en jouant avec ma sœur Petite Orque … ou peut être en faisant des glissades sur la glace avec ma sœur toujours … »

Patte d’Alpaga n’est qu’un chaton, il a encore bien du temps pour grandir. Il vit avec sa famille, au chaud dans la pouponnière. Il avait bien le temps d’apprendre à s’exprimer, d’apprendre à vivre sans sa sœur ou encore pour mûrir.

Le travail d’un apprenti guérisseur n’est pas d’écouter la vie de ses patients. Il se contente de les soigner et de les suivre tout au long de leur convalescence en cas de blessures graves. Les réponses confuses du chaton agace l’apprenti et Patte d’Alpaga s’en rend compte, il se referme encore plus lorsque l’apprenti se tourne vers ses remèdes.

Le chaton voit que l’apprenti hésite, cela est sans doute lié aux doutes de l’origine de la blessure. Nuage de Corbeau se retourne avec une feuille aux bords arrondis qui a l’air bien douce. Le chaton se montre méfiant lorsqu’il vient frotter l’herbe sur son coussinet. Patte d’Alpaga lâche un couinement de surprise puis sert les dents, décidé à faire comme les grands. L’apprenti finit par se reculer et lui explique :

« - Ça ne va pas suffire mais... As-tu encore mal ou ça va mieux ? »

Le bouclé marche un petit peu, boitillant légèrement. Il secoue sa patte et souris bêtement à l’apprenti avant de lui dire :

« - Merci ! J’ai encore mal mais c’est bien plus supportable. Ma sœur va être fier de moi. J’ai presque pas pleuré ! Sinon … C’est bien d’être apprenti ?»

Patte d’Alpaga est métamorphosé. Il a suffit d’un échange avec l’apprenti pour qu’il se libère totalement.

La peur du chaton disparaît petit à petit. L’apprenti le met en confiance et est très rassurant avec lui. Contrairement à ce qu’il pensait, Patte d’Alpaga passe un très bon moment en compagnie de l’apprenti-guérisseur. La question du petit fait relever la tête à Nuage de Corbeau qui lui répond finalement :

« - Eh bien... Ouai, c'est cool. Enfin, je ne sais pas trop ce que ça fait d'être apprenti-guerrier mais je suis sûr que ça sera super. Et je suis sûr que tu seras un super guerrier ! Tu sais quand tu deviendras apprenti ? »

Le petit n’avait pas vraiment réfléchis avant de parler. En effet, Nuage de Corbeau est un apprenti guérisseur et pas un apprenti guerrier, il ne pourra donc pas répondre aux questions curieuses du futur guerrier.

« - C’est très gentil de dire tout ça, je suis sûr que Petite Orque sera meilleure que moi ! C’est la plus forte. Je dois devenir apprenti dans … 3 lunes ! J’ai tellement hâte ! Merci de t'être occupé de moi, je vais retourner près de ma famille ! »

Il ronronne et attend avec impatience son baptême, comme tous les chatons à vrai dire. Il n’est pas bien différent des autres, finalement. Il s'éclipse après son remerciement et trottine vers la pouponnière en remarquant que sa patte ne lui fait plus mal.