la veillée / ft. nuage d'aigle et museau pâle - abandon

Caresse du Vent

une fin et un début de l'histoire
une page arraché de sa poitrine
seul dans le froid gelé
laissé mort parmi les vivants

La terre s'était ouverte en deux et les montagnes avaient germés. Les fleurs qui en étaient sorties, indéniablement, étaient sans contradiction les plus belles, il pouvait se l'assurer. Est-ce que les eaux pollués de la rivière venaient de lui ? Ses larmes salées couraient couramment le long de ses joues, et peut-être en avait-il échappé une ou deux dans le sein des torrents.. Le ciel trop grand le visait avec lenteur; s'il tirait, s'en était finit de lui. Ne tire pas, s'il te plaît, monsieur le ciel; il est encore trop jeune pour commencer le combat des rancœurs. en cœur. cœur. Museau Bleu… Elle lui glissait entre les pattes comme une eau cristalline, s'enlevant du désir brûlant de garder son âme archaïque entre ses griffes serrées. Trop tard. Elle était déjà partie et lui était seul. Il n'avait pas été capable de la garder dans un petit pot serré; elle avait elle. Lui avait lui.

Revient vite, s'il te plaît. pourquoi te soutires-tu à moi comme ça ? Je pourrais être ton arme de prédilection, une fleur de poirier, un petit cahier. Suffit d'un peu d'imagination, non ? Je ne vais exister que pour toi, papillon. Alors n'existe que pour moi. Que ton cœur s'accorde au mien, que les eaux des lacs s'ouvrent devant notre puissance pour nous laisser passer. Je vais être ton moise. Ton visage me hante, comme les petits points blancs qui dansent devant mes yeux après avoir observé le soleil. Je crois que, maintenant, tu te laisses aller sur quelqu'un d'autre. Je n'ai plus ma muse. Ce n'est pas grave, je ne t'en veux pas. Je t'attendrai, après tout. Prend bien soin de toi, j'essayerai de mon bord avec mes pensées tourbillonnes. Le soleil est tombé entre mes membres. Je te l'offrirai la prochaine fois qu'on se verra, agenouillé devant ton regard. En attendant, je respire des ténèbres. Compte jusqu'à trois. Un. Deux. Trois.

c'est bon, je suis prêt.

Dans l'air frigorifiant de la matinée, le nouvellement guerrier sortait enfin de ses pensées engourdissantes; bien vivant maintenant, il respira avec lenteur l'atmosphère gelée, faisant passer une grosse goulée piquante entre ses poumons douloureux. Cette nuit avait passé comme une étoile filante, en vitesse mais gravée à tout jamais dans son organe vitale; pressé au côté de sa camarade de combat, faisant le tri de ses songes, il avait passé à travers la voie lacté, un âme mais deux êtres. Son pelage mélangé à celui de la femelle brune, sa queue reposant avec douceur sur celle de Nuage d'Aigle, il posa avec lenteur sa tête sur ses pattes, la tournant légèrement pour regarder son amie. La cicatrice sur son flanc commençait à paraitre mieux, mais avait l'air encore douloureuse; dans tout les cas, elle l'était au matou beige et sable. Il se sentait coupable de la marque qui scindait la belle demoiselle, le choc de la découvrir comme cela en revenant dépassant bien lui de sa rencontre fortuite avec le mâle étrange. Depuis, il prenait bien soin de rester le plus de temps avec elle, lui apportant sa nourriture, la faisant rire et dormant à ses côtés dans la tanière. Ce fut donc pour cette raison qu'il lui décocha un grand sourire, ayant hâte qu'un guerrier se présente à eux pour qu'ils puissent, ensemble, dormir en rond et se réchauffer ensemble.

Le temps semblait bien long depuis qu'il était passé guerrier, même si cela faisait un moment. Ne plus avoir d'entrainement avec Cobra Royal, voir de moins en moins sa mère, le guerrier albinos se sentait bien seul face à sa difficulté à faire des choix seul. Et se confier à une personne autre que son entourage ou son ancien mentor était encore plus difficile pour quelqu'un qui avait énormément de mal avec les relations. Heureusement, le guerrier n'allait pas rester encore bien longtemps en tête à tête avec ses questionnements. Le soleil se levait à l'horizon, et aujourd'hui il avait la tache de sonner la fin de la veillée aux deux nouveaux apprentis passés guerriers. Il se souvenait encore de la veillée qu'il avait partagé avec Nid de Mousse, et du plaisir qu'il avait prouvé lorsqu'un guerrier était venu pour leur annoncer la fin de leur veillée. Cette fois c'était à lui de le faire, en espérant que les deux nouveaux guerriers éprouvent la même joie que lui-même avait éprouvé lors de sa veillée. Museau Pâle se leva en silence, lissa son pelage avant de sortir en douce de la tanière des guerriers dans laquelle une grande majorité dormait encore. Seule la patrouille de l'aube devait être en plein travail.

Le silence régnait sur le camp. Le guerrier blanc se dirigea vers l'entrée du camp, tandis qu'il entendait un gros bruit briser le silence. Lorsqu'il arriva sur place, un des deux guerriers était à terre tandis que l'autre le regardait. Était-il arrivé au mauvais moment ? Qu'importe, il se dressa devant ses deux nouveaux collèges pour sonner la fin de leur veillée.

« Bien, votre veillée est terminée. Félicitation à vous deux. »

Caresse du Vent, étendu en silence à côté de sa compagnonne et amie, la regardait sans émettre le moindre son. Un amalgame d'inquiétude, d'angoisse et de tristesse se glissait sur son faciès concentré, voyant bien que la femelle agile souffrait à chaque mouvement qu'elle esquissait sous la lune brillante. Toute la soirée avait été ponctuée de ses grimaces douloureuse et, bien qu'il savait qu'elle n'aimait pas cela, le mâle ne pouvait s'empêcher de sentir une pointe de culpabilité grandir dans son cœur malade. Si seulement il avait su commencer mieux la protéger, comment passer par-dessus cet énorme guerrier qui l'avait plaqué au sol dans la bagarre… Ou même, si seulement il avait su les noms des plantes qui auraient aidé la femelle à se remettre sur pattes ! Néanmoins, il n'était qu'un guerrier et la seule guérison qu'il pouvait offrir à la femelle était son encouragement et ses sourires délicats. Peu à donner, mais il espérait qu'elle allait un peu mieux à cause de ses petits gestes…

- Caresse du Vent ? chuchota-t-elle soudainement.

Curieux, le mâle remua son oreille droite, penchant sa tête vers ce côté en la regardant se déplacer vers lui. Avec une douce pression, elle avait passé sa queue sur son épaule et, pour qu'elle lui ait parlé de cette sorte, cela devait bien être important. Elle n'avait pas l'habitude de briser les règles, non ? Son propre membre vint donc doucement frôler le flanc intact d'Aigle Vif, comme pour lui répondre - mais toujours en silence - qu'il l'écoutait bien.

- Dit est-ce que tu veux que on soit ensemble après tout…

Un long silence glissa entre le duo étalé sur le sol, l'un le brisant pour couiner un petit gémissement de douleur, l'autre le gardant précieusement en écarquillant ses yeux ambrés. Ensemble.. Comme ensemble dans la tanière et ensemble amis pour la vie, ou ensemble.. Ensemble comme un.. Un couple ? Venait-elle en ce moment de lui avouer s-son amour ?! Caresse du Vent écarquilla légèrement ses yeux, se demandant s'il rêvait après une nuit passée à combattre le sommeil qui l'avait hanté. Il devait avoir mal entendu, clan des étoiles ! Il avait toujours considérée cette féline comme une compagnonne, une confidente, une amie, même une meilleure amie ! Mais comme quelqu'un qui pouvait notablement l'intéresser ?

- Bien, votre veillée est terminée. Félicitation à vous deux.

Le mâle sauta avec puissance sur ses pattes, comme s'il venait de se faire prendre en plein vif d'une idiotie. Le bout de ses oreilles encore brûlants de la révélation de la blessée, il envoya un long regard à celui qui les avait interpellés, reconnaissant - une chance ! la voix du matou un peu plus vieux que le duo de nouveau combattant. Museau Pâle les regardait d'un drôle d'air, posant tour à tour son regard sur les deux au sol; ce fut un signal pour l'autre garçon, écarquillant grand ses yeux en lui faisant un signal que seul deux amis pouvaient comprendre. Car, effectivement, le blanc qui semblait un peu froid aux abords était un des meilleurs amis du sablé, les deux se connaissant depuis plusieurs lunes maintenant. Il pouvait même considérer l'albinos comme un frère qu'il n'avait jamais vraiment eu, en fait… Et quand il passait ses journées, chaton, avec sa petite sœur, la vue du plus vieux aux yeux rouges était la bienvenue. Il s'empressa donc de glisser d'un air un peu faux;

- Merci, Museau Pâle ! Tu nous a réservé des nids ?

Puis, se tournant vers Aigle Vif, il lui adressa un regard contenant un millier de points d'interrogations qui dansaient fiévreusement dans ses iris. Il se pencha avec douceur vers elle puis, lui chuchotant dans l'espoir qu'elle seule entende, lui glissa;

- Euuuh.. Ensemble, tu veux dire.. Comme un, il toussa doucement, un couple ?

Museau Pâle crut déceler une espèce de gêne chez les deux nouveaux guerriers, puisqu'à peine arrivé, un gros blanc s'installa entre les trois chats. Visiblement, il aurait dû les laisser ensembles encore un moment. Mais qu'importe, le guerrier albinos avait d'autres choses à faire. Et au moins il avait sonné la fin de la terrible nuit pour eux. Ils devaient être fatigués comme lui l'avait été autre fois.

« Merci, Museau Pâle ! Tu nous a réservé des nids ? 
- Oui, c'est fait ! »dit-il en direction de son ami après avoir baillé.

Après ça, son ami sablé se tourna vers la femelle qui essayait de se relever avec peine. Museau Pâle hésita un instant avant de l'aider mais finalement elle se mit toute seule sur patte après un instant.

« Merci de nous libéré Museau Pâle. »

Le guerrier albinos acquiesça de la tête comme pour dire ''de rien'' mais dire un mot. Ensuite, son ami sablé se rapprocha de la femelle et lui miaula quelque chose à l'oreille que Museau Pâle ne put entendre. A cet instant il se sentait vraiment comme un cheveu sur la soupe qui n'avait rien à faire ici. Il se racla la gorge comme pour signaler une nouvelle fois sa présence. C'était un peu gênant. Finalement, il se dit qu'une visite de leurs nids était peut-être une bonne idée ? C'était certainement la chose dont il rêvait le plus à cet instant. Dormir paisiblement.

« Heu.. Bien... Vous voulez voir vos nids ? Je suppose que vous êtes fatigués, Hm.. ? »

|C'est si nul je m'excuse de ma non-motivation |

Une étrange ambiance régnait entre les trois quadrupèdes, l'état seulement interrompu par des bâillements et des toussotements étranges -- qui sortaient d'ailleurs de sa propre gueule. Tous semblaient attendre un évènement en particulier, mais le trio n'avait certainement pas le même but en tête; Caresse du Vent, lui, avait un si gros stress dans le corps qu'il aurait pu éclater d'angoisse à tout moment. Ses yeux perdus dans ceux de sa meilleure amie, le bout de sa queue tressautant au fil des secondes qui s'enchainaient, il ne pouvait plus supporter toute cette pression et failli détourner les yeux. Crotte de souris, et si elle lui dis-...

- Mais non cervelle de moineau, comme de bons amis !

Ouf. Le nouvellement nommé guerrier, sentant comme un poids se libérer de son être, exécuta un rire un peu forcé en passant avec douceur sa queue sur le flanc intact de son amie. Elle semblait légèrement troublée, mais le mâle préféra mettre toute cette confusion sur la blessure qui la marquait; c'était lui qui avait mal interprété sa phrase, n'est-ce pas ? Ils avaient toujours été amis et… N'avait jamais ressenti plus que ce sentiment envers la brune, et elle venait aussi de le confirmer ! Il devait arrêter de s'inquiéter.

- Heu.. Bien... Vous voulez voir vos nids ? Je suppose que vous êtes fatigués, Hm.. ?
- Ouais, avec plaisir ! Répondit-il un peu trop vite et brusquement.

Puis il lança un regard inquiet vers Aigle Vif, le visage de celle-ci scindé en deux dans un air de souffrance horrible. Clan des étoiles ! Il trottina vers elle pour l'aider à se déplacer, anxieux et oubliant tout de suite leur ancienne discussion gênante; avait-elle trop mal pour bouger ? Sa blessure empirait-elle au fil des secondes ?

- Hep, Museau Pâle, t'as un peu de connaissance sur les plantes et tout ça? On ne savait jamais. Elle a vraiment l'air d'avoir mal.. Tu veux aller voir le guérisseur, Aigle ? Souffla-t-il doucement.

« Ouais, avec plaisir ! »

Museau Pâle souffla, sauvé par son ami. Il allait pouvoir faire autre chose que d'embarrasser les deux guerriers, et visiblement surtout la femelle. Et au moins comme ça, la discussion allait prendre fin plus rapidement que prévu. Les deux nouveaux guerriers étant fatigués, ils allaient certainement vouloir se reposer tandis que l'albinos allait pouvoir vaquer à ses occupations habituelles. Il n'avait pas l'habitude de parler avec les autres, et il était un peu gêné face aux nouveaux. Et il déteste être gêné, et surtout qu'on le voit. Mais visiblement, il y avait un autre problème à régler.. la femelle n'avait pas l'air en bon état, toujours à terre et le visage crispé par la douleur, mais qu'avait-elle ? Caresse du Vent se dépêcha de lui venir en aider, tandis que l'albinos se rapprocha doucement de la femelle.

« Hep, Museau Pâle, t'as un peu de connaissance sur les plantes et tout ça? » Museau Pâle bégaya sans sortir un mot, bien sûr que non il n'en avait pas. « Elle a vraiment l'air d'avoir mal.. Tu veux aller voir le guérisseur, Aigle ? 
- N-non je ne m'y connais pas. » finit-il par dire, les yeux écarquillés en attendant la réponse de la femelle qui semblait vraiment ne plus pouvoir résister à la douleur.

Aigle Vif tenta de se lever, le regard suppliant, finit par se tenir sur trois pattes avant de glisser, se retrouvant de nouveau par terre. Museau Pâle voulait l'aider mais il n'y connaissait rien en plantes ni en médical, c'était le job du guérisseur. Et là il fallait vraiment faire quelque chose. La pauvre n'allait plus pouvoir tenir comme ça, elle allait finir par se fatiguer.

« Crotte de Renard ! »

Et finalement elle se mit à pleurer, ce que Museau Pâle avait beaucoup de mal à regarder. Voir quelqu'un pleurer, il n'aimait pas ça. Et même s'il ne connaissait pas la femelle autant qu'il connaissait Caresse du Vent, Museau Pâle devait faire quelque chose pour lui venir en aider.

« Je suis désolé.... »

L'albinos réprima un grognement, avant de se décider à agir. Il n'allait pas attendre de la voir ramper pour l'amener chez le guérisseur. Et d'ailleurs le guerrier se demanda pourquoi elle n'était pas déjà chez le guérisseur plutôt que de continuer à avoir mal et de veiller toute la nuit. Certes la tradition était importante, mais la santé l'était tout autant.

« Bon allez ça suffit. » dit-il en secouant la tête. « On ne va pas attendre que tu souffres encore et encore pour t'y emmener, ça ne sert à rien de rester là à tenter de te lever. Caresse du vent et moi on va t'emmener chez le guérisseur. » miaula-t-il le regard instant dirigé vers Aigle Vif, tandis qu'il attendit la réponse de son ami.

Comme un début de domino qui débarquait, la douce femelle vacilla doucement dans l'espace, lâchant un regard désespéré vers les deux mâles avant de s'écrouler. Tout simplement. Pouf. La réaction de son meilleur ami ne fut pas aussi rapide qu'il l'aurait espéré, trop choqué pour esquisser même un petit mouvement, mais son cerveau finit par redémarrer: il fallait agir, et vite. Une foulée, deux, et il posa son épaule contre celle d'Aigle Vif, l'empêchant de s'étaler encore plus --- Crotte de Renard ! ---, poussant doucement pour un peu la soulever du sol rêche. Clan des étoiles, qu'allait-il faire s'il apprenait qu'elle n'allait plus jamais être capable de marcher ? Tout aurait été de sa faute, non ? Son regard était rempli de questionnements attristés et son cœur qui battait, trop fort pour ne pas s'en préoccuper, tentait de percer les pleurs déchirants de son amie étincelante. Quelqu'un devait les aider...

- Je suis désolé....

Caresse du Vent posa avec douceur son museau sur le corps tremblant de la nouvelle guerrière, lui transmettant son support sans même ouvrir le flot de ses paroles inquiètes. Parfois, même les mots ne suffisaient pas à réconforter quelqu'un… Et ça, il ne l'avait que trop bien compris -- trop de fois, trop de douleur, trop de pensées.

- Bon allez ça suffit. On ne va pas attendre que tu souffres encore et encore pour t'y emmener, ça ne sert à rien de rester là à tenter de te lever. Caresse du vent et moi on va t'emmener chez le guérisseur.

Pour appuyer les paroles de Museau Pâle, le mâle aida la douce à se relever, hochant fortement la tête pour se redonner un peu de contenance. Effectivement, le mâle avait raison; ils n'allaient pas attendre qu'elle souffre encore plus, surtout que les portes de Silence d'Hiver était habituellement toujours ouvertes.

- Il a raison, Aigle. On ne peut pas attendre qu'il t'arrive encore quelque chose.. C'est mieux de t'y amener tout de suite. Et puis, après… On pourra allez dormir dans notre tanière, comme de vrais guerriers !

iiiih: