No line on the horizon (avec Patte de Loutre) - end

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Nuage Gris commençait presque à s'y faire, à la vie d'apprenti. Passés les premiers contacts glacés avec son mentor et les autres apprentis, il était parvenu à se faire quelques repères. Nuage d'Hiver et les autres n'avaient eu aucun mal à se faire leur place dans le monde des grands. Il aimait toujours passer du temps avec eux, mais il se rendait compte que leur apprentissage les avait un peu changés. Surtout Hiver, d'ailleurs.

Sa meilleure amie était désormais devenue une apprentie toute sage, et bien moins joueuse qu'autrefois. De toute évidence, elle était très déterminée à devenir une guerrière au plus vite, et ça troublait pas mal Nuage Gris. Elle n'avait pas tellement aimé lorsque lui et Nuage du Renard étaient rentrés un soir d'une vadrouille hors des terres du Clan, et semblait désormais désapprouver la plupart de leurs plaisanteries.

Typiquement, ce matin-là, ils rattrapaient un peu trop longtemps le retard de sommeil qu'ils avaient pris en se couchant tard (course-poursuite sur la colline), et lorsque Belle-de-Nuit, énervée, vint tirer Nuage du Renard de leur tanière sans ménagement, l'apprenti blanc, à-demi-réveillé, se persuada que Nuage d'Hiver ne les aurait sûrement pas défendus.

Pff... soupira-t-il en se laissant rapidement emporter par le sommeil. Bientôt je suis sûr elle nous dénoncera et on va se faire punir à cause de ça... songeait-il, avec un brin de mauvaise foi.

Mais c'était une mauvaise idée, de se laisser bercer de la sorte. Parce que Patte de Loutre, en général, détestait que l'apprenti en vienne à manquer de ponctualité. Et ce matin-là, décidément, Nuage Gris se sentait très très fatigué... Si bien qu'à l'heure où il était censé être toiletté, avoir mangé et se trouver auprès de son mentor, cette fois-ci, il était encore à paresser dans la tanière des Apprentis.

Et encore, heureusement qu'il s'en rendit compte, car il ne fit attendre Patte de Loutre que cinq minutes ! Au prix, néanmoins, d'un nouvel entraînement le ventre vide et sans doute de moult regards désapprobateurs en direction de son pelage pas très propre.

" BOOON-*kof*-JOOOUR " s'exclama le gamin, en le rejoignant, haletant pour mieux lui faire remarquer qu'il avait couru pour ne pas le faire trop trop attendre. Chaque fois qu'il était en retard, il tentait une façon différente d'amadouer son mentor, mais jusqu'à présent, aucune n'avait jamais fonctionné.

■ Guérisseur

Cela fait maintenant 3 lunes que Nuage Gris est l’élève de Patte de Loutre. La situation ne s’est pas vraiment améliorée. Lors de leurs entraînements, l’apprenti n’était pas vraiment investi mais après tout, le guerrier n’en avait que faire. Il serait baptisé plus tard et ça sera tout. Ce côté là ne dérange pas le vétéran mais c’est tout autre chose qui l’agace. Depuis une lune, de nombreux guerriers sont venus le voir pour dénoncer le comportement de son élève : arrogant, n’exécute pas les ordres, sort la nuit, fait des bêtises. Le guerrier est plus que prêt à remonter les bretelles de son apprenti. Il l’attend à l’entrée du camp et ce n’est qu’avec cinq minutes de retard que le jeune apparaît, à peine réveillé :
« BOOON-*kof*-JOOOUR »
Ce retard devenait une habitude. Depuis le départ, l’apprenti n’a pas été à l’heure une seule fois. À chaque fois, le jeune essayait de faire passer la pilule d’une manière différente, aujourd’hui, il tentait de lui faire gober qu’il a dû courir pour être alors. La mine endormie de l’apprenti ne trompe pas le mentor. Agacé par ce constant manque de respect, Patte de Loutre sort du camp et lorsqu’il marche avec l’apprenti, il feule :
« Bon. J’ai eu écho par un bon nombre de guerriers que tu enchaines les conneries. Tu fais preuve d’arrogance et tu te moques de tout le monde en détournant tes corvées d’apprentis. Ramasser des litières ne plaît à personne, sache le, mais tout le monde passe par là. Donc je ne vois pas pourquoi Nuage Gris échapperait à cette coutume qui dure depuis des décennies. J’ai également surpris tes sorties nocturnes avec ton frère. C’est ter-mi-né. Au moins tu seras peut être à l’heure. »
Agacé et très remonté contre le jeune, Patte de Loutre espère qu’il va comprendre qu’il faut qu’il arrête ses bêtises car les conséquences risquent d’être très dramatiques :
« Je suis très déçu que mon élève s’investisse si peu dans son entraînement et qu’il passe son temps à faire de la merde. Tu as intérêt à te ressaisir car la prochaine fois c’est devant Étoile d’Or et le conseil que tu devras repentir tes bêtises. C’est le dernier avertissement. J’espère que j’ai été très clair avec toi. »
La tension est plus que palpable. Le vétéran est très énervé, la fourrure en bataille.

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Patte de Loutre ne dégageait, comme d'habitude, pas la plus grande des chaleurs, mais au moins, il ne s'énerva pas immédiatement. L'orage n'éclaterait, s'il éclatait, que plus loin. Sans un mot, et en s'efforçant de signifier une sorte de reconnaissance retenue par discrétion, il le suivit. Allait-il, cette fois, amadouer son mentor ?

Il ne tarda pas à interrompre leur marche pour se retourner vers lui. Aïe, c'était encore raté. La patte grise s'arrêta elle aussi, et son propriétaire regardait le bout de la queue de son mentor remuer de temps en temps tandis qu'il se préparait à lui passer un savon. C'était à la fois pour se distraire et ne pas avoir à affronter tout à fait de front cette tempête.

« Bon. J’ai eu écho par un bon nombre de guerriers que tu enchaines les conneries. Tu fais preuve d’arrogance et tu te moques de tout le monde en détournant tes corvées d’apprentis. Ramasser des litières ne plaît à personne, sache le, mais tout le monde passe par là. Donc je ne vois pas pourquoi Nuage Gris échapperait à cette coutume qui dure depuis des décennies. J’ai également surpris tes sorties nocturnes avec ton frère. C’est ter-mi-né. Au moins tu seras peut être à l’heure. »

Oooouh. Muet, l'apprenti constatait que son mentor était direct. Il ne tenait pas vraiment à lui répondre, ni à seulement lui faire part de son sentiment d'injustice et encore moins à essayer de nier quoi que ce soit. Non. Il n'avait rien à dire, il avait tout à fait accepté et intégré le fait que la parole était, et resterait, à celui à qui on la confiait.

Néanmoins...

Néanmoins, ça faisait mal, un peu. Il se demandait, il se demandait vraiment, comment il ferait jamais pour épater qui que ce soit, lui qui était petit, maigre, laid, inutile au possible, et dont on ne retenait jamais des aventures que certains détails, pas les meilleurs. Rien faire ? Se contenter d'attendre que son mentor découvre qu'il était et resterait nul en tout ? Jamais de la vie ! Son frère, et Nuage d'Hiver, et tout le monde, il en avait, des choses à leur dire, et à leur montrer. A faire, pour eux.

Mais il avait aussi un mentor à ne pas trop fâcher. Et le bon goût de baisser la tête sans chercher à faire d'histoire alors que Patte de Loutre reprenait, toujours furieux :

« Je suis très déçu que mon élève s’investisse si peu dans son entraînement et qu’il passe son temps à faire de la merde. Tu as intérêt à te ressaisir car la prochaine fois c’est devant Étoile d’Or et le conseil que tu devras repentir tes bêtises. C’est le dernier avertissement. J’espère que j’ai été très clair avec toi. »

Étoile d'Or. Le conseil. A quoi tout cela pouvait bien rimer ? On le condamnerait à changer la mousse jusqu'à la fin de ses jours ? A manger la mousse sale jusqu'à s'étouffer avec ? Il n'avait pas du tout envie de lui faire face, à ce conseil qui ne se serait sûrement jamais ému de voir son père souffrir tout seul, s'il avait seulement voulu le voir, mais il n'était pas non plus certain qu'une autre solution soit possible.

Il essaierait de repousser ça le plus possible. C'était à peu près ce qu'il pensait lorsqu'il répondit, en veillant à ne pas énerver d'avantage son mentor par de l'insolence :

« Oui, d'accord. »

Il avait une toute petite voix. C'était bizarre, au fond, de se dire qu'il était exactement le même que celui qui avait vu des monstres endormis ou tendu une embuscade à Nuage d’Émeraude avec son frère, peu de temps auparavant. Le même dont on disait qu'il ne se calmait jamais, qu'il ne respectait rien ni personne. Le même qui sans doute, le soir même, recommencerait.

Car Nuage Gris était un chat sensible, et avec la sensibilité venait toujours l'incohérence, une sorte de déni ou de lâcheté. Il refusait la logique et vivait avec pour seul horizon ceux des drôles de rôles artificiels qu'il essayait de cumuler dans sa vie pour s'émanciper de la réalité qu'il voulait fuir. Qui lui faisait peur. Plus peur que tout.

Il restait là, à ne rien dire, à échouer encore, à attendre que Patte de Loutre décide quelque chose. Se mettrait-il en colère contre cet apprenti hypocrite ? Préfèrerait-il oublier tout, l'entraîner comme si le monde se limitait à cet air soumis et vide ? Serait-il curieux ? Il osait à peine se les poser, ces questions, tant chaque réponse envisagée lui paraissait terrifiante.

■ Guérisseur

Les représailles et les menaces semblent atteindre l’apprenti qui finalement doit regretter ses choix. Le guerrier ne sait pas du tout quoi faire avec cet élève qui lui donne du fil à retordre. Leur entraînement de chasse se voit écourté par ces réprimandes : Patte de Loutre s’en serait plus que passé. Comprenant ce que son mentor lui reproche, Nuage Gris capitule et répond d’un ton perdu :
« Oui, d'accord. »
Agacé par la situation, le guerrier se met à marcher à proximité de la rivière mais ne s’y approche pas encore. Il fait signe à son apprenti de s’arrêter dans l’herbe grasse et humide et réfléchit quelques instants avant de lui expliquer en grondant :
« Ton baptême sera sans doute retardé à cause de tes conneries et de ton manque d’investissement. Bref. Reprenons un véritable entraînement de chasse. As-tu travaillé tes positions ?»
L’entraînement allait être long, les deux le savent. Ils ne s’entendront donc jamais. Du moins, Patte de Loutre veut simplement le former à être un guerrier et une fois l’apprenti prêt et mature, il pourra devenir guerrier à son tour pour former de prochains élèves. J’ignore ce que je vais faire de lui.

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Ils marchèrent un peu, dans un silence aussi glacial que les premiers vents d'hiver. Nuage Gris essayait déjà d'oublier, de penser à autre chose. De s'imaginer rentrer, au soir, et manger un peu. Ce qu'il avait faim ! Mais c'était sa faute. Et il était hors de question qu'il en dise le moindre mot à son mentor. Après tout, c'était sa faute, il était trop bête. Il aurait pu manger s'il avait assez réfléchi. Il réagit un peu tard lorsque son mentor s'arrêta mais fort heureusement ne heurta pas son flanc.

« Ton baptême sera sans doute retardé à cause de tes conneries et de ton manque d’investissement. Bref. Reprenons un véritable entraînement de chasse. As-tu travaillé tes positions ?
- Ou... » non... « Oui, un peu... ». Il regarda la réaction de son mentor avant de reprendre, plus précipitamment parce que c'était un mensonge un peu gros : « Enfin, c'était déjà pas mal la dernière fois ! ». Il se hâta de dévier le sujet de conversation avec son air le plus innocent. Pour ça il était assez habile : « Parce que ? Ici il y a du gibier ? Beaucoup ? »

Dans sa tête, il pria soudain que ce ne soit pas des positions de combat que son mentor lui ait parlé mais bien des positions de chasse. Le problème lorsqu'on n'écoutait les choses qu'à moitié, c'était qu'on s'affolait souvent inutilement.

■ Guérisseur

Patte de Loutre ne le cache à personne, il aurait clairement préféré un élève calme et bosseur plutôt que cette pile électrique toujours dissipée. Il s’assied face à son élève et attend la réponse bien qu’il la connaisse déjà. Après un court moment de réflexion, Nuage Gris reprend :
« Ou … Oui, un peu ... Enfin, c'était déjà pas mal la dernière fois ! Parce que ? Ici il y a du gibier ? Beaucoup ? »
Mensonge. Le mâle soupire, désespéré de voir son élève malhonnête. Il n’arrivera jamais à le rendre “correct” ; il ne respectera jamais rien et encore moins ses camarades. Patte de Loutre se lève et s’éloigne du rebord des chutes et invite son apprenti à en faire de même avant de dire :
« Très bien alors. Montre moi. »
Aucune indication. Le guerrier lui laisse le choix entre combat ou chasse, il espère également qu’il ne le décevra pas - ce qui est très loin d’être gagné.

HRP:

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Nuage Gris n'aimait pas vraiment ce rebord fracassant des Chutes. L'eau qui s'abattait faisait tellement de bruit qu'il avait l'impression de ne plus rien y entendre, alors même que l'endroit ne lui inspirait aucun sentiment de confiance, bien au contraire. Il avait l'impression qu'ici, tout était dangereux, du gouffre à l'eau vive en passant par les gros animaux qui de temps à autre profitaient sûrement du bruit pour étouffer leur approche meurtrière. Cette herbe grasse ne lui inspirait pas non plus confiance : elle semblait toujours mouillée, ce qui lui semblait encore assez mystérieux, et elle lui refroidissait abusivement les pattes et le corps. Il ne fut pas mécontent de voir Patte de Loutre se lever. Il songea que peut-être, ils partiraient ailleurs, faire quelque chose, il ignorait quoi. Il avait dû recevoir une consigne, mais il l'avait oubliée. Voilà pourquoi il jeta en direction de son mentor un regard très légèrement interrogateur. Il espérait ne pas le mettre en colère et le laisser éclaircir la situation.

Ce fut tout le contraire.

« Très bien alors. Montre moi.
- Rmlrmrl... » s'étrangla-t-il, décontenancé par cet ordre mystérieux mais n'osant pas poser de question énervante.

Parce qu'après tout, il n'y avait certainement aucune question bonne à poser, il était bel et bien censé comprendre ce qu'il devait montrer à son mentor, se souvenir de quelle position on lui avait parlé, être capable de la reproduire. S'il avait été un apprenti sérieux, il ne se serait jamais senti perdu comme en cet instant.

Il décida de faire preuve d'imagination. Un petit mélange de position de combat et de position de chasse, ça satisferait peut-être son mentor. Il y verrait ce qu'il cherche. Nuage Gris commença donc par la chasse. Il se fit moins encombrant, plus discret, plus agile aussi. Mais ça ne suffisait pas. Car tel qu'il était alors, il se doutait bien qu'il ne ferait jamais peur au moindre ennemi. Il décida donc d'entrouvrir sa gueule pour dévoiler ses crocs et de relever la tête pour se faire plus grand, ce qui était tout à fait en rupture avec la position de chasse. Le corps d'un chasseur et la tête d'un combattant, avec en moins le regard furieux et le pas souple.

Il n'y avait aucun monde où cette position lui serait utile un jour, mais le petit essayait quand même, en osant croire que son mentor trouverait là un peu au moins de ce qu'il recherchait.

■ Guérisseur

Patte de Loutre a conscience que son élève n’a pas travaillé. Son regard traduit déjà son doute quant à la posture à présenter. En réponse à l’ordre du professeur, le petit Nuage Gris finit par grommeler quelque chose d’incompréhensible :
« Rmlrmrl ... »
Le mentor s’assied face à son élève et le regarde. L’apprenti commence par une position de chasse qui pourrait être parfaite si sa queue ne traînait pas au sol et si son pas était plus léger. Cependant, l’élève semble changer d’avis et relève la tête tout en laissant apparaître ses petits crocs. À quoi joue-t-il ? Le guerrier ne comprendra sans doute jamais Nuage Gris qui était beaucoup trop dissipé à ses yeux. Après réflexion, le matou ne peut s’empêcher de rire face à la position de l’apprenti. Il reprend très vite son sérieux et se met à réprimander son élève :
« Ta position est pitoyable … Regarde toi. Franchement, tu ne ferais même pas peur à une souris. »
Il se lève et s’approche de lui. Il tape sur sa croupe, dans ses pattes pour qu’il s’abaisse et lui fait baisser la tête :
« Ça. C’est la base pour la chasse. J’aurai aimé que tu l’ai déjà compris après 4 entraînements. »
Il soupire et l’invite à se redresser. Il appuie sous son ventre pour lui faire arrondir le dos. Il lui fait replier légèrement ses pattes arrières et rabaisser la tête pour cacher son thorax :
« Et ça. C’est la base pour le combat. »
Il s’assied face à l’élève et l’invite à reproduire une nouvelle fois les deux positions qu’il lui a montré pour la vingtième fois en l’espace de quelques semaines.

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Invité

Lorsqu'il entendit rire Patte de Loutre, il voulut d'abord croire à un bon signe. Il songea que peut-être, son mentor avait compris ce qu'il avait essayé de faire et qu'il trouvait le stratagème amusant. Alors lui aussi, il osa lâcher deux ou trois petits éclats de rire en même temps que son mentor, qui devinrent rapidement nerveux puis qui s'étranglèrent lorsque Patte de Loutre se tut et se mit à le jauger d'une façon beaucoup plus sévère.

« Ta position est pitoyable … Regarde toi. Franchement, tu ne ferais même pas peur à une souris. » commentait le guerrier. Nuage Gris comprit qu'il était temps pour lui de relâcher un peu ses muscles et de se tenir d'une façon plus naturelle, tandis que le guerrier s'approchait de lui et lui indiquait, par des petits coups, ce qui n'allait pas.

« Ça. C’est la base pour la chasse. J’aurai aimé que tu l’ai déjà compris après 4 entraînements. »

Fini la gaieté chez Nuage Gris, il ne restait plus rien qu'une vague honte qu'il eut le bon goût de ne pas retenir. Je suis vraiment complètement débile. Pendant ce temps, le mentor lui montrait comment se positionner d'une façon à peu près intimidante, et il suivait ses consignes assez mécaniquement, parce qu'il avait finalement, même s'il ne s'en rendait pas compte, plutôt bien enregistré les deux positions qu'on lui avait enseignées. « Et ça. C’est la base pour le combat. » expliqua Patte de Loutre lorsqu'il eut fini de le déplacer pour la seconde fois.

Et maintenant il s'agirait de recommencer. Et de s'y prendre bien, cette fois-ci. Et d'alterner entre position de chasse et position de combat avec un maximum d'application et de réussite. Nuage Gris sentait bien que s'il se trompait encore après ça, il risquait de mettre son mentor tout à fait hors de lui, mais il se demandait aussi comment il ferait pour ne pas se tromper. Pour ne pas se mélanger les pinceaux. C'était impossible.

Ses yeux s'humidifièrent de larmes qui, fort heureusement, ne grossirent pas. Au moins ne chialerait-il pas vraiment devant son mentor. Rien ne l'agacerait plus, il en était convaincu. Et tandis que son visage restait tendu, concentré pour repousser les pleurs et pour continuer d'avoir l'air détaché, tout à fait maître de la situation, il changeait de position. Mais sa concentration, forcément, se retrouvait divisée, car il s'agissait pour lui au moins autant de faire la comédie que de réfléchir aux positions.

Il réussit ses deux premières alternances, mais très vite après, il commençait à se mélanger. A oublier de baisser les oreilles pour la position de chasse ou à laisser sa queue frôler le sol pour la position de combat. Son mentor lui indiquait souvent un truc, mais à chaque fois qu'il se corrigeait, il avait alors une patte ou un muscle à l'autre bout qui se retrouvait, à son tour dans la position. Et ce fut de pire en pire, si bien qu'en peu de temps, Nuage Gris n'arrivait plus du tout ni à se mettre en position de chasse, ni à se mettre en position intimidante. Et bien entendu, cela n'était pas pour plaire à son mentor.

" Je-je... Je suis désolé... " bafouillait le gamin, que sa propre incompétence horrifiait, mais qui était en même temps tout à fait incapable de réaliser que ça ne l'aidait pas de prendre un air lointain et détaché alors que ses yeux le grattaient tant il retenait ses larmes. " Je sais le f-faire, pourtant, m-m-mais j'-je... J'y arrive pas. C'est trop d-d-dur. "

Il baissait la tête, tout penaud, pour cacher une larme qui cette fois s'échappait tout à fait. Sa queue s'était mise à trembler, aussi l'avait-il enfouie en-dessous de son arrière train. Et il ne se releva que lorsqu'il fut sûr que ses yeux étaient assez secs pour le lui permettre sans risque. Il avait faim, et la perspective de ne sans doute rien avaler avant la tombée de la nuit n'arrangeait rien à toute cette frayeur qui l'habitait. Et son mentor, pendant ce temps, il en était persuadé, était en train de se mettre toujours plus en colère.

■ Guérisseur

L'apprenti rigole avec le mentor avant de comprendre que ce rire n'était que moquerie. Le professeur gueule sur son apprenti, lui montre une nouvelle fois les positions, ce qu'il faut faire et ne pas faire. La pression est trop forte pour l'apprenti, ses yeux se remplissent de larme mais il les retient. Il ne veut pas pleurer devant son mentor qui le jugeait toujours plus.

Il commence à reproduire les positions : une parfaite, deux, le mentor n'en croit pas ses yeux. Peut être avait-il enfin eu l'électrochoc tant attendu ? Non. Malheureusement, à partir de la troisième répétition, l'apprenti se mélange les pattes et tout devient du grand n'importe quoi. La patience du mentor a été largement dépassée. L'apprenti le sent car il s'excuse, en chouinant :
« Je-je ... Je suis désolé ... Je sais le f-faire, pourtant, m-m-mais j'-je ... J'y arrive pas. C'est trop d-d-dur.»
Le mentor est presque attendri par les pleurs de son élève mais il ne doit pas y céder. Après tout, voilà des lunes que les deux s'entraînent et l'apprenti à tout juste le niveau d'entraînement atteint à un peu moins d'une lune. Il faut vraiment qu'il se réveille. Le mentor soupire et regarde son apprenti en grondant :
« C'est fini pour aujourd'hui. Reviens me voir lorsque tu maîtrises parfaitement ces positions, pas avant. »
La limite a été dépassée, malheureusement. L'apprenti ne s'est pas investi et cette absence de respect dégoûte et répugne au plus haut point Patte de Loutre qui décide de mettre fin à l'entraînement.
« Je n'ai plus de temps à perdre, rentrons. »
Il invite son apprenti à le suivre en silence. Ils ne disent pas un mot sur le chemin du retour mais le mentor espère sincèrement que le jeune va très vite se réveiller.

HRP :

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» Cœur à vif || ft. Patte de Loutre - abandon
» Le temps perdu (Nuage du Renard, puis Patte de Loutre) - end
» Un ami de longue date - w/ Patte de Loutre -end
» Contrastes (avec Patte Venteuse) - end
» On recommence du début ! ○ Patte de Loutre - end