[avant la Canicule] Retour aux Sources | libre Rivière - abandon

Retour aux Sources. (40)


Trempée, fatiguée, perdue aussi, j'avançais vers l'inconnu qui connaissait pourtant mon passé et mon sang. Des terres moins visqueuses m'accueillir, un sol doux, nu d'épines de pin. Je tenais fermement Petite Lavande entre mes crocs, elle tremblait. Quelle épreuve pour elle aussi. Quitter ses soeurs, son monde, être valdinguée dans tous les sens pour finir tête la première sous l'eau étrangère de la rivière. Elle éternua, donc je pris le temps de m'arrêter pour lécher son épais poil, héritage de ses parents et de son grand père. Mais elle l'avait plus des Ombreux, gonflé d'eau, alors que le mien laissa le liquide glisser dessus. La petite avait voulu suivre sa mère, j'espérais qu'elle ne regrettera pas son choix, se sentant trop mise de côté dans ce clan qui ne lui semblait pas sien. Je ferais tout pour qu'elle s'y sente chez elle comme je voulais déjà m'y sentir comme chez moi. Plus qu'à l'Ombre en tout cas.

Il ne fallut pas longtemps pour qu'une patrouille nous tombe dessus. Je n'avais pas une carrure très discrète non plus. D'habitude, on se méfiait de moi, grande guerrière, potentiel danger. Mais là, j'étais venue avec mon statue de reine, chaton entre les pattes. Moins inquiets mais tout de même accablés de questions, je dus justifier à plusieurs reprises ma venue, et surtout je leur avais supplié de me mener à leur camp, pour demander à leur cheffe de me laisser les rejoindre. Regards interrogateurs, pourquoi une reine de l'Ombre voulait rejoindre la Rivière ? Mon pelage dégoulinant illustrait bien les efforts que j'étais prête à faire. Les autres chats étaient censés détester l'eau, donc si je mentais pour m'infiltrer, je devais être une très bonne espionne... Mais il n'étais rien de cela. Je voulais juste un foyer aimant.

Ce fut dans les murmures que je pénétrais dans le camp de la Rivière, quoi de plus étonnant ? Mais j'étais si concentrée sur mon but qu'ils me glissèrent dessus comme de l'eau. Puis, les remarques, j'y étais habituée. Quoique ils en avaient de moins acides dans le tas, plutôt enrobées de curiosité. Il y avait une chatte des pinèdes trempée dans leur camp ! Je croisai le regard de mon oncle récemment découvert. Tout son visage décrivit sa surprise. Je lui souris timidement et commençai mon montée dans l'antre d'Etoile d'Or. Sage malgré son jeune âge, elle écouta mon récit et mes idéaux. Je cru voir une chaleur naître dans ses yeux lorsque je me présentai en tant que fille de Nuage de Taupe, pour revendiquer ma place parmi les leurs. Cachée dans ma fourrure, seule chose familière pour mon enfant, je présentai aussi Petite Lavande, qui avait aussi droit à sa place, et je me défendis que j'étais prête à chasser et pécher pour nous - même pour ne pas gêner le clan dans un premier temps. Je savais nager, c'était dans mon instinct, dans mon sang. Ou alors je me l'étais auto-persuadée ? Bref, dans les faits, je ne coulais pas. Je dus moins débattre avec la meneuse que les patrouilleurs, car elle me sourit et m'invita à venir sur le Promontoire.

Mes oreilles bouillirent de gêne et d'excitation. C'était comme un deuxième baptême, mais un qui fit battre mon coeur très fort. La chef au pelage d'Or fit mon introduction en tant que nouvelle reine et guerrière de la Rivière, ainsi que Petite Lavande, chatonne des eaux. Descendance de Nuage de Taupe, petite martyre de la tribu des flots. Des larmes me montèrent aux yeux. Mais pas de tristesse comme quand j'ai du tourner le dos à ceux que j'avais aimé à l'Ombre, mais de bonheur de trouver une nouvelle famille. Entrecoupé de toux, j'entendis la voix d'Hibou Nocturne m'accueillant moi et ma fille. Parmi les guerriers bien nourris de la Rivière, il était comique, tout maigrichon qu'il était. Mais il était mon oncle, et je lui rendais déjà tout l'amour qu'il avait pour moi.

Je fus invitée à rejoindre la pouponnière, mais ma fille et moi étions toujours mouillées. Pas un problème dans ce camp, mais je trouvais que c'était la moindre des politesses de ne pas ravager le lieu des Reines. J'irais chercher mon nid moi - même aussi. J'étais assez redevable au clan pour l'instant. Et le temps que je m'asseye avec Petite Lavande, nous voici déjà rejoint par un chat.

" B-bienvenue Bouquet de Muguet ! Ça pour une surprise.. J'apprends que tu es la fille de ma soeur bien aimée, puis te voilà de retour à la maison, notre maison ! Je.. je suis si heureux.. "

Le mâle gris et noir laissa échapper des larmes qui me serrèrent le cœur. Voir quelqu'un dans un tel état juste en me voyant arriver, ça.. me mettait dans le même état !

" Oui, me voilà Tonton Hibou ! Qu'est - ce que j'en avait rêvé de ce moment ! D'être vue comme fille d'une des vôtres, et non comme une totale étrangère ! Bon, je sais que ma place n'est pas encore gagnée, mais je m'intégrerai avec toute ma volonté ! "

On rigola un peu, réflexe pour se détendre et laisser sortir toute la pression qu'on avait. Il toussa, j'abattis les oreilles en arrière, était - il malade ? Mes yeux reflétaient mon inquiétude nouvelle mais réelle pour le "nouveau" membre de ma famille, mais un couinement entre mes pattes me stoppèrent et attira notre attention. Hibou Nocturne s'éloigna de quelques pas. Que.. qu'avait fait ma fille de mal ? Il la montra de sa patte, inquiet aussi et curieux.

" Qui est - ce ? Enfin, Petite Lavande, ça j'ai retenu. Mais, pourquoi as - tu emmené un chaton avec toi ? "

Je ronronnai doucement. Je caressai la tête de ma petite protégée, geste plein d'amour.

" C'est ma fille, il parait qu'on a les mêmes motifs blancs ! "

Le pêcheur sursauta une nouvelle fois de surprise. Ah, oui, être mère à cet âge je sais... Il se pencha en avant, pour l'étudier et la scruter. Mal à l'aise, comme ma fille, je lui fis un peu sa toilette pour la et me rassurer. Son ronronnement me fit tourner une oreille vers lui.

" Elle a la même tâche que Taupe sur son oeil droit. " miaula - t - il avec une tendresse infinie.

Et me voilà transpercée d'allégresse et de reconnaissance. La preuve que nous étions de la même famille, cette tâche entourant notre oeil. Je souris, touchée et encore bouleversée de toute la journée, et repris la toilette de Petite Lavande pour ne pas me laisser aller.

" Merci... " soufflais - je.