De l'acide sur une plaie [PV Pénombre & Bec] - end

J’errais, le cœur lourd aux abords de mon ancien territoire. Ma famille vivait là… Mais ils devaient me croire morte ou traitresse. J’avais rencontré il y a quelques jours de cela Soleil, qui m’avait aidé. Elle m’avait proposé une nouvelle famille loin de la guerre. Je n’en pouvais plus de me battre. Je ne voulais plus lutter. Je cherchais toujours mes bébés, espérant les trouver dans un coin, m’appelant. Est-ce qu’ils se souvenaient de moi ? Cela faisait bien plusieurs semaines que nous avions été séparés et… J’avais si peur que tout ce que je leur ai appris soit parti en fumée à cause de la vie de chat domestique. Mes pauvres petits, ils étaient si loin de moi… J’avais l’impression de ne plus rien avoir. Il n’y avait plus rien qui me raccrochait à la vie. Sauf ce petit espoir que représentait Soleil. Ma vie avait été brisée à cause des bipèdes. Ils avaient tout anéanti. La perte de Maman a été un gros choc, mais avec mes frères et sœurs, je pouvais la supporter. Là, je n’avais plus rien. J’avais la sensation de n’être qu’une âme vide, sans rien. C’était le néant. Je faisais toujours des cauchemars la nuit, voyant mes bébés emportés par des griffes horriblement tranchantes. Je voulais seulement hurler ma peine, monter au sommet d’un arbre et crier toute ma colère, ma tristesse. Parce que la vérité, c’est que jamais je m’en remettrais. Comment oublier la perte de ses enfants ? Comment… Comment je pouvais seulement faire comme s’ils n’avaient jamais existé ? C’était impossible.

Je marchais, l’esprit torturé et le regard vide, à proximité de la frontière du clan du Tonnerre. J’aurais aimé croiser Graine de Tournesol pour lui parler de ses petits. Je m’imaginais revenir dans la forêt, accompagnée de mes deux boules de poils et les présenter à leur papa. Je les imaginais, curieux et heureux de voir un guerrier. J’imaginais Graine de Tournesol fier de voir deux chatons qui étaient de lui. Oh nous n’aurions jamais formé un couple, je n’étais pas amoureuse de lui, mais je pense qu’il aurait pu être un bon père. Mais si je le voyais maintenant, comment lui dire que je n’avais pas été capable de les protéger des bipèdes ? J’en tremblais.

«… onter vers les Rochers du Soleil et cherch- »

Cette fois, je levai la tête et guettais d’où venait cette voix. Vu l’odeur c’était des membres du clan du Tonnerre. Comment allaient-ils réagir en ma présence ? Allaient-ils me chasser pour traitrise ? Mais alors que les bruits de pas se faisaient plus présent, je pu apercevoir deux matous. L’un était roux tigré tandis que l’autre était brun. Mes yeux s’agrandissaient. C’était… C’était mon petit frère ! Nuage de Gland ! Et ce devait être Nuage de Bec à côté. Je n’en revenais pas. Les larmes me montaient aux yeux tant j’étais heureuse de retrouver cette bouille rousse. Sans laisser le temps s’écouler plus longtemps, je fonçais vers lui, les yeux brillants. Je me pressais contre lui, appréciant l’odeur boisé sur son pelage. Je pouvais même encore sentir l’odeur de Maman sur lui. Oh mon petit frère, mon tout petit frère. Je n’arrivais pas à prononcer un mot. Tout le vide de mon esprit était à présent chamboulé. Je pleurais toutes les larmes de mon corps, la tête enfuie dans son doux pelage. Je n’arrivais plus à bouger, je restais contre mon frère. Mon pelage était tout ébouriffé tant j’étais contente de le voir. C’était bien la meilleure chose qui m’était arrivé depuis des lunes et des lunes. Je ronronnais si fort qu’on aurait cru un chaton content de boire de lait de sa mère.

Je restais alors silencieuse, plongée dans le pelage de mon frère. C’était le meilleur réconfort que je pouvais avoir. Même si mes petits disparu me restaient à l’esprit.

De l'acide sur une plaie. (30)


J'avais survécu ! Cela sonne un peu comme si j'étais impressionné de cette nouvelle, mais j'en étais surtout ravi. Je m'étais toujours cru protégé de tous les dangers au sein du clan, mais que faire quand le temps se déchaînait contre nous ? On avait eu faim, on avait eu chaud, on avait perdu des camarades... Parfois une pointe de culpabilité venait que je pensais à ces deux trois proies que je m'étais gardées à la place de les ramener aux plus faibles du clan mais... Regardez moi ! Je faisais partie des plus faibles du clan avec ma taille et ma gueule. Enfin, cette pensée suffisait à refouler cette petite voix qui m'accusait un peu. J'étais vivant, et c'était bien. Et je devais vivre pour ce qui était parti, pour Regard de Braise.

Je réveillais donc ce matin avec la joie de sentir autre chose que de la chaleur écrasante sur mon pelage. Le climat s'adoucissait et les chats pouvaient enfin réussir à dormir convenablement. L'énergie était de retour, les proies aussi. Donc le parfait moment pour remplir la pile de gibier avant que la saison des neiges arrive. Un chat des bois ne pouvait jamais se reposer s'il voulait assurer sa survie. Ce fut donc sans hésitation que je me portai volontaire à la sortie de chasse avec Tête de Chêne. En plus, le jeune guerrier était toujours léger et joyeux dans ces discussions. Ça aussi, c'était rafraîchissant après quatre lunes de plaintes incessantes. Il s'extasie sur la forêt qui reprenait vie, et je fis de même.

" Et ç'a fait aus's'i fortement plaisir. Une belle balade dans' un bel endroit avec une belle compagnie ! " ronronnais - je. Car je pouvais nier que la fratrie de Chêne n'avait pas trop à se plaindre niveau physique. Entre Belle Châtaigne, Tête de Chêne, Tempête de Suie..

Je reniflai donc les environs, motivé à trouver une proie. On trottina à travers le territoire sans trop se fatiguer, chose que l'on ne pouvait plus se permettre les dernières lunes. Cela était tellement enivrant que l'on arrivait à la frontière avec les nids de Bipède. J'abaissai mes oreilles. Eux aussi sortaient plus dorénavant que les températures avaient baissés. Il allait falloir faire attention à ne pas en croiser un. Donc quand le mâle roux proposa de descendre vers la rivière, je ne refusai pas. Mais je n'eus le temps de rien dire car un craquement attira notre attention. J'ouvris la bouche pour déceler l'odeur. Ça.. sentait le Bipède. Mais pas un Bipède, quelqu'un qui venait des Bipèdes. Un domestique ? Il ne devrait pas être trop farouche ouf, on pourrait juste le repousser gentiment hors de la frontière et..

Le chat nous bondit dessus !

Je feulai de surprise, m'arquai par réflexe et tout mes poils se levèrent. Il était farouche, il était farouche ! Et il s'en était pris à Tête de Chêne et ...

Quand mon pouls se calma un peu et que je fis la mise au point sur celui -ou plutôt celle- qui était plongée dans la fourrure du jeune guerrier, je miaulai, la gorge encore nouée de la peur et de la surprise de la voir ici.

"C-curieus'e Pénombre ? "

Elle était en vie, elle était revenue ??

Les deux guerriers étaient surpris. Pourtant je n’entendais presque pas leurs paroles. Ils avaient prononcé mon nom je crois. C’était un soulagement d’être enfin reconnu par les siens. Mon petit frère recula, et je pu voir son regard. Il était choqué et ne comprenait pas. En même temps, je lui avais littéralement sauté dessus. Qu’est-ce qu’il était devenu beau et fort ! Mon petit frère ne l’était plus tant que ça. Mon cœur battait si fort qu’on aurait pu le voir à travers ma poitrine. Il y avait bien longtemps que je n’avais pas ressenti une telle joie. Ma famille.

« Curieuse Pénombre... »

Les yeux encore brillant, je lui affichais un immense sourire en hochant la tête. Il m’avait reconnu. Mon tout petit petit frère. Il plongea à son tour son museau dans mon long pelage. Je fermais les yeux. C’était un réconfort immense de le sentir contre moi. J’aimais infiniment ma famille et il faisait parti des derniers encore présent. Je ne savais pas si mes bébés vivaient encore… Je respirais son odeur, il sentait encore Maman.

« Curieuse Pénombre... C'est vraiment toi... C-... Comment ? »

Je lui léchais le haut du crâne. Je devais lui raconter.

« J’ai été enlevé petit frère. Les bipèdes m’ont enlevé. »

J’attendais un peu pour lui annoncer la nouvelle plus tragique encore.