IT'S A BAD RITUAL, BUT IT CALMS ME DOWN || douces caresses feat. feulement - Abandon

Le félin se glissa à l'intérieur, enrobé dans l'ombre, il regarda à gauche, à droite, derrière. Personne. Les odeurs assaillirent son museau ; désagréables, douces, suantes, suaves, maladives... Musquée. Dans cet espace renfermé, les identités olfactives émanant des couchettes se mélangeaient en une orgie suffocante. Pourtant, l'une dominait aisément le reste. Comme attiré par le fumet alléchant d'une proie, il se laissa guider jusqu'à sa source, bien qu'il savait déjà parfaitement où elle se situait.

Ses pas se hâtèrent plus il était proche du nid. Il y frotta son visage, y mis les pattes et hésita à s'y vautrer. Les phéromones masculines exsudant de la mousse excitaient ses sens plus efficacement qu'aucun bouquet de cataire. Il s'y perdit, avec joie et jouissance ; le plaisir était instantané, si bien qu'il finit par abandonner toute retenue et se roula dans la couchette. Sa silhouette grâcieuse s'agitait en tout sens. Son cerveau stimulé lui fit perdre toute notion du temps qui passe, et ses muscles se retrouvèrent bientôt fatigués.

Douces Caresses se coucha sur le flanc, tête reposée sur la mousse. Inconsciemment, il rentrait et sortait ses griffes. Expression de son extasie qui cherchait désésperément à ne pas être contenue. Une tâche floue obstruait sa vision ; il recula la tête, l'observa... Une touffe de poils sombres. Il la saisit dans ses griffes. Ca ferait une bonne addition à sa collection... Les poils de Feulement étaient si beaux ; doux, épais, longs, parfois plus clairs parfois plus foncés... Vraiment, il n'y avait rien d'égal. Il pourrait rester ici pour l'éternité, beigné dans l'odeur de Feulement, à contempler son pelage... drapé sur sa carrure de chef et serpentant sur ses muscles tortueux... Oh, il se l'imaginait, c'est comme s'il le voyait en face de lui...

Il cligna des yeux. Attendez...

Il était vraiment en face de lui.

C'est suite à une longue journée éprouvante qu'il est délicieux de se glisser dans son lit. Feulement avait courut toute l'aube, n'avait eut le temps que de faire une courte sieste avant de devoir s'occuper de ses mille responsabilités. Ses muscles étaient endoloris par le froid et son corps ramollis par la fatigue. Dieu bénisse sont épaisse pelisse ou il serait fort probable que le grand félin soit frigorifié à cette heure-ci. Oh la journée était loin d'être terminé, la preuve, la tanière des guerriers était vide, mais la sienne touchait à sa fin pour sûr. Il avait passé la nuit à patrouiller et à organiser les escouades ainsi que les entraînements du lendemain. Le lieutenant avait pris le pli mais cela ne rendait pas la tâche moins fatiguante.

Il n'affectionnait pas particulièrement le fourré qui servait de chambre aux soldats, trop de monde, trop d'odeurs, trop de bruit, mais il appréciait se lover dans son nid avant que tout le monde s'y agglutine ou après que tout le monde se soit endormis. Son repos s'annonçait donc bon puisque la vie battait son plein au cœur du campement ne laissant pas l'ombre d'un chat sous le couvert des voûtes de ronces et de mauvaises herbes.

Enfin du moins, c'est ce qu'il aurait espéré.

Car telle ne fut pas sa surprise lorsque, étendu dans son lit, se trouvait la silhouette féminine de son ancien mentor. De doux ronronnements s'échappaient de sa gueule entre-ouverte alors que de ses pattes il pétrissait la mousse de son matelas comme un chaton cherchant le lait de sa mère. Il semblait pris d'une extasie que le mâle charcoal n'avait pu observer que dans la tanière d'Esprit Soucieux lorsqu'il donnait dans de rare cas quelques feuilles de cataire à un patient souffrant. Il jugea alors, inconscient de l'obsession du calico pour sa personne ou encore de la possibilité d'un tel attrait pour autrui, qu'il devait être sous l'influence de la plante. Douces Caresses était un guerrier qu'il avait toujours trouvé étrange de toute manière, cela ne l'étonnait pas tant que ça de lui. Il ne faisait pas vraiment partie du cercle fermé de félins auxquels il accordait sa confiance.

" Bouge. "

Miaula t-il de sa voix grave, maintenant rendu à côté de son ancien professeur, le toisant de sa hauteur.

" C'mon lit. "

Et il n'était pas particulièrement d'humeur à patienter, qu'il aille faire ses trucs de dégénéré plus loin.

" Bouge. "

Quoi! Que fais-t-il ici!

" C'mon lit. "

Ah, oui... Douces Caresses, dans son désir et sa surprise, avait oublié que les couchettes n'étaient pas considérées comme un bien commun, à son grand malheur. Les mots — enfin, les ordres du Lieutenant de l'Ombre sont clairs et concis, cependant au lieu de chasser le démon de son lit, ils ne firent que l'attiser. Le guerrier calico se mouva comme une poupée de bois désarticulée en se levant, ses muscles tressaillants rendant impossible un pas léger et grâcieux.

" Oh... je m'excuse, " lui dit-il d'un ton doucereux faussement désolé,
" je me suis trompé de nid... "

Bien que voir Feulement de si près le délecte, il est un peu agaçé, un peu insatisfait d'avoir été interrompu ; et surtout, pourquoi est-il là, à cette heure ? D'habitude, il aurait disposé d'encore plusieurs minutes, voire même d'heures avant que le magnifique grand et viril chat charcoal ne puisse le surprendre. Il va devoir revoir sa planification...

D'un pas étrange et lui ressemblant peu, don la saccade remplaçait la grâce habituelle, Douces Caresses se traîna hors de la litière de son amant imaginaire. Il n'y avait que sa démarche qui ne collait point au personnage puisque sa voix, elle, débordait toujours de sucre, de miel et de mille douceurs en tout genre. Le lieutenant loin d'être un bec sucré en aurait presque attrapé le diabète rien qu'en l'entendant parler.

" Oh... je m'excuse, "

Miaula t-il,

" je me suis trompé de nid... "

Le gros félin charcoal n'y prêtât pas plus d'attention que cela. De ses larges épaules il balaya la conversation dans un haussement négligé et un:

" Mph. "

Réprobateur.

Il vint déposer son corps au cœur du lit de mousse qui maintenant exhalait l'odeur de son ancien mentor. Il pris le temps de s'étirer, creusant huit petits sillons dans la terre meuble de ses impressionnantes griffes noirs avant de déposer son menton sur les pattes qui leur servaient de fourreau. Un regard de côté fut lancé au mâle calico, maintenant que la tanière n'abritait plus qu'eux deux la proximité de leurs nids lui sautait aux yeux. Il se serait bien décalé si les couchettes des autres ne cernaient pas la sienne. Clan des étoiles que c'était désagréable, cette proximité. Sa queue remua vivement de quelques coups avant de redevenir inerte, témoignant de son agacement.