Whatever walked there, walked alone || Cœur de Puma

Rumeurs, rumeurs, rumeurs...

Quel fléau.

C'est un renard pour certains, de simples solitaires pour d'autres, les vétérans traumatisés parlent des Lunar Pods, il a entendu deux apprentis parler de fantômes vengeurs... et même une attaque surprise du Clan de la Rivière !
Cœur de Puma est ravi d'y être envoyé pour démentir toutes ces bêtises.
Un peu moins ravi d'avoir Source de Secrets pour binôme.

Il n'est pas d'une nature rancunière, mais le vétéran n'apprécie pas qu'on lui donne des leçons. Encore moins à vingt lunes. Encore moins sur ses petits. Encore moins sur Étoile de Suie.
M'enfin. Quoiqu'ils en pendant, Coup de Foudre et sa fille font parti du Clan. S'ils n'en veulent pas, il n'ont qu'à déguerpir, mais en attendant le matou brun-roux les traitera comme il traite ses camarades. Avec respect et dignité. Et s'ils agissent comme des solitaires au sein du Clan, et s'ils décident un jour de le trahir, Cœur de Puma sera resté un fier guerrier. Une lumière en plus pour la Toison Argentée. Et c'est tout ce qui compte.

En chemin vers les Rochers du Soleil, le binôme n'échange aucun mot. L'ambiance est tendue et peut paraître froide, mais ce n'est pas un courroux contenu pourtant qui garde le mâle dans le silence. D'abord, il est concentré. Et puis après, il n'a rien de plus à dire à Source de Secrets. Et quand cette dernière tente une approche sur la météo et le beau temps... ils sont déjà sur les lieux et ce n'est plus le moment de noyer leur gêne dans le bruit des banalités.

Ils s'affairent tout deux, museau en l'air ou par terre. Cœur de Puma, et malgré son expérience, ne fait pas parti des traqueurs hors-pair du Clan. Un odorat tout ce qu'il y a de plus banal, et puis son âge qui entame doucement mais sûrement ses sens... ça n'aide pas. L'odeur est facile à trouver. C'est simple; elle est partout sur les lieux. Mais ce n'est pas suffisant. Il faut l'identifier.

Sa base de données lui assure qu'il ne s'agit en rien d'une proie : rien de musqué, ni de faisandé. Ça ne pourrait guère être un chat non plus... mais on ne sait jamais -il sait que les solitaires ont parfois une drôle de d'odeur. Maintenant... maintenant il ne peut s'empêcher de vouloir reconnaître du renard. Ces maudites bêtes. C'est un de ces rouquins-là qui lui a pris Tornade Vive mais... Mais non, ce n'est pas ça. Pourtant, ça y ressemble. Il ne reconnaît pas.

« Il y a... Ce n’est pas normal. Il y a quelque chose qui cloche. »

C'est évident...
Mais il n'est pas assez remonté pour donner à la jeune féline le regard méprisant auquel on pourrait s'attendre. A la place, il lui répond simplement : « Ce n'est pas du renard. Mais ça y ressemble. »

Mais la bicolore n'en démord pas; son aîné la voit plongée dans ses pensées. Elle réfléchit. Elle a une piste. Il la regarde un instant, dans l'attente. Ses yeux finissent par fouiller les alentours : peu importe ce que c'est, si ce truc sent presque le renard, c'est que ça doit être dangereux également. Soudain, son binôme se raidit.

« Il faut qu’on s’en aille. »

Elle est terrorisée -et ça n'aide pas le mâle brun-roux à se rassurer.
Mais à peine la féline a-t-elle prononcé ses mots que le binôme perçoit du mouvement. Ils ont été repéré. Ils sont à découvert, sur les rochers. Quelques bonds, et ils sont au pied d'arbres, quelques foulées et ils se retrouvent dans la rivière.

Cœur de Puma se raidit à son tour, ses radars corporels s'affolent. Les oreilles s'agitent, identifient la provenance du bruit, alors que ses yeux cherchent le visuel de leur créateur. Alors que les griffes crissent et claquent la surface dure de la roche, le matou crie :

« Grimpe !! »

Lui-même se propulse vers les arbres, les griffes déjà de sortie. Lorsqu'il atteint son objectif -un arbre sur lequel s'abriter-, le vétéran lance un regard en direction de sa position initiale, à la recherche de sa camarade. Mais la bête qu'il fuit est déjà trop près, et alors il bondit sans viser correctement le tronc. Cœur de Puma se réceptionne avec maladresse sur le tronc, contracte tous ses muscles pour ne pas perdre prise : s'il tombe, il n'aura pas le temps de remonter.
Mais il tient bon, et libère un feulement de rage en se tractant plus haut. Il sent le souffle chaud de la bête sur sa queue, et entend le claquement sourd des crocs juste en dessous de son bassin. Il monte jusqu'à une branche suffisamment haute, non sans un regard terrifié vers la bête.

Un chien.

A bout de souffle, il hurle depuis sa branche :

« Source de Secrets, tout va bien ?! »

Ses yeux inquiets ne quittent pourtant pas le cabot, qui s'excite en contrebas et vocifère sans doute toutes les insultes du vocabulaire canin sans qu'il n'en saisisse aucun.

Le dé:

Le cabot de pousser des jappements excités et des aboiements frustrés au pied de son tilleul. Ses griffes fermement enfoncées dans l'écorce de l'arbre, le mâle au museau balafré peine à quitter la bête des yeux. Aidé de sa queue pour s'équilibrer, et fort de ses années d'expérience à sauter comme il vient de le faire vers la hauteur des branches, Cœur de Puma tient bon. Mais il ne peut cacher ni sa peur, ni son inquiétude pour sa camarade. Cette dernière lui répond rapidement, mais son cri se perd presque dans le brouhaha que débite le cabot. Il entend sa réponse, mais ne la comprend pas, et n'est guère aidé pour la repérer.

Il lui faut un certain moment avant d'enfin distinguer la silhouette de la jeune guerrière, elle aussi perchée mais sur un tronc bien plus fin. A son pied, aucun chien. Il est soulagé. La bicolore lui crie : « J’ai peut-être une idée... »

Il serre la mâchoire, ses yeux de nouveau bloqués vers la gueule fournie en crocs de leur prédateur. Peut-être une idée ? Il leur faut plus qu'un peut-être, là.
La vérité est qu'ils ont un grand nombre d'options. Mais elles sont toutes affreusement risquées, non seulement pour eux, mais aussi pour leurs camarades de Clan voire leurs voisins de la Rivière. Cœur de Puma tente de penser, mais les aboiements intempestifs du chien ne lui permettent pas de se concentrer convenablement.

« mais je vais avoir besoin de votre aide... et de votre confiance. »

Cette fois, il ne retient pas ses yeux de rouler vers le ciel. Confiance, confiance... Un bien grand mot qu'elle n'a guère honoré jusque là. Mais ce n'est même pas ça qui l'agace.
Ils partagent tout ce que des inconnus ne partagent pas. Foyer, nourriture, territoire, traditions... Mais elle n'est pas sa camarade, hein ? Mais il faut lui faire confiance. Ils sont quoi, des voisins qui se rendent des sourires faux-culs ?! Il pensait que ces relations étaient réservées aux pêcheurs de l'autre berge.

La confiance pour ses camarades leur est innée. Ils naissent littéralement avec. Et alors, elle se développe ou s'amenuise au fur et à mesure des paroles, et surtout des actes.
Oui, il avait été blessé par la façon dont elle et son père lui ont caché leur visite avec Petit Rossignol. Pire, les mots qu'ils ont employé à son égard l'ont inquiété. Et leur évidente absence de remords l'a agacé.
Quant au discours de Coup de Foudre sur le Clan et l'approbation silencieuse de sa fille, ça l'a déçu.

Mais ils sont des membres à part entière du Clan du Tonnerre. Quoi qu'en disent les autres, quoi qu'en pensent les guerriers orgueilleux et les anciens aigris. Et même eux. Ils ne restent pas dans le Clan pour rien, si ?
Source de Secrets, contrairement à son père n'a pas péché. Aussi loin qu'il peut s'en souvenir, la bicolore n'a jamais enfreint le Code, n'a jamais renié les Étoiles, n'a jamais embarrassé son Clan et a toujours agi en sa faveur. Il ne comprend pas la haine et la méfiance qu'on accorde à ces petits "maudits". Maudits au nom de quoi, et de qui ? Le Clan des Étoiles leur a permis de vivre. Ils sont tous en bonne santé, ils chassent pour le Clan, ils défendent ses frontières, ils participent aux tâches quotidiennes. Ils ne sont pas moins méritants.

C'est comme ça qu'il le pense, et il va falloir que Source des Secrets l'accepte. Tout le monde n'est pas radical.

« Explique-moi ce que je dois faire. » miaule-t-il assez haut pour que ses mots ne se perdent pas dans les jappements du clebs.