Je veux attraper un oiseau ! | Bouquet de Muguet

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Attirée par la lumière orangée qui filtrait à travers l’armature de la pouponnière, Petit Etourneau était sortie discrètement.
L’aube baignait doucement le camp endormi – presque endormi : quelques guerriers s’éloignaient pour se répartir la première patrouille de la journée. Ils se déplaçaient sans bruit, avec une grâce attentive, sans faire craquer une feuille. La petite chatte s’était enfilée dans une ornière en prenant soin de ne pas attirer leur attention, sa fourrure brune rapidement trempée par la rosée qui perlait dans l’herbe. Dès qu’ils avaient disparu hors de vue, elle était sortie de sa cachette pour s’ébrouer et se diriger vers une souche volumineuse environnée de graminées, près de l’orée du camp, qu’elle avait repérée quelques jours avant.
Parfaite pour commencer mon entraînement à l’escalade !

Vue de près, la souche était grande. Vraiment grande. L'enthousiasme de la chatonne diminua d'un petit cran mais elle n'en planta pas moins ses griffes dans l'écorce, arc-boutée, déterminée.
Je ne reculerai pas !
C'était le moment d'essayer. Sans apprenti ou chaton plus vieux qu'elle dans les parages pour se moquer si elle échouait à grimper. Le sol sous elle était moelleux, recouvert d'une plaque de mousse riche qui étouffait l'herbe : elle ne se ferait pas mal en cas de chute.
Elle tâcha de se tracter par les pattes avant... Et ses petites griffes lâchèrent, des morceaux d'écorce molle encore coincés entre ses coussinets. Elle se reçut en avant, la tête butant contre la souche. Ridicule ! Elle se secoua et se remit d'aplomb, agacée. C'était un problème de prise : elle avait mal estimé l'état du bois humide qui commençait à pourrir. Essayant de nouveau, sur une paroi moins douteuse, elle put assurer son accroche et poussa sur ses pattes arrière.
Ah - Ahah !
Elle était à la verticale ! Plaquée à mi-souche, tendue de tout son corps, elle sentait à peine sa propre queue battre à droite et à gauche sous elle. Quelque chose la poussa à préparer immédiatement la seconde impulsion, à répartir l'effort entre ses quatre membres : rester là plus longtemps la mènerait à trop réfléchir, à regarder en bas, et à prendre peur.
Les oreilles plaquées par la concentration, elle entreprit une série de mouvements. Extension d'une patte avant. D'une patte arrière. Traction. Autre mouvement. Traction. Respiration... Traction. Le bord supérieur de la souche affleurait à ses griffes. Ce n'était pas si haut, en fin de compte...
Un ultime mouvement. Un élan... Balancement de hanches dans le vide... Aouch ! Elle se reçut sur le ventre, une écharde mal placée griffant au passage l'intérieur tendre de sa patte arrière. Remise d'aplomb, Petit Etourneau entreprit tout de suite de se lécher avec application : pas d'éraflure perceptible.
Relevant la tête, elle fut aussitôt prise d'un léger vertige qui se dissipa en quelques secondes, le temps qu'elle prenne la mesure de sa nouvelle hauteur. L'herbe en contrebas avait l'air si différente lorsqu'elle n'était pas au niveau de ses épaules ! L'air semblait plus léger, plus frais. Les yeux écarquillés, la petite grimpeuse promena son regard sur le nouveau panorama qui s'offrait à elle - quelques arbres, des cailloux, un corbeau - et vit comme la lumière orange qui léchait les formes commençait à s'estomper... Un corbeau ?!

Il était là, de dos, visiblement inconscient de sa présence.
Comme il était gros ! Noir, lisse, d'apparence très dense, ses pattes rocailleuses crochetées dans la mousse du sol. Il devait faire la même taille que Petit Etourneau, voire être un peu plus gros. Que diront Petit Rat ou Petit Pêcheur si je l'attrape ? On en parlerait pendant des lunes ! La proie était trop extraordinaire pour être ratée... Oui, mais la chasse, c'était difficile. C'était pour ça qu'il fallait attendre d'être apprenti pour en faire. Mais il est si près ! L'oiseau fit quelques pas en avant, s'éloignant. Il ne se pressait pas - peut-être n'était pas encore repérée.
C'est alors que la chatonne ressentit un chatouillis au niveau du museau. Elle l'ignora quelques secondes mais il ne fit que s'intensifier. Elle se ramassa par réflexe comme pour étouffer le son, par un réflexe illogique... Et ça ne rata pas.
Tschi !
L'éternuement, si ténu soit-il, suffit à faire bondir l'oiseau et à provoquer son envol. Maussade, Petit Etourneau renifla. Fichues graminées.
Elle sentit alors une présence derrière elle. Prise au dépourvu, elle se retourna brutalement et ses pattes arrière ripèrent sur le bord de la souche. Elle ne tomba pas, mais de justesse.
Le soleil levant lui faisait face, derrière une fourrure blanche et grise qu'elle connaissait bien.

"Ah... Euh... Bon-bonjour Maman ! "

JE VEUX ATTRAPER UN OISEAU - LUNE 27 - AGE 66 L.


La pouponnière devenait fort étroite dernièrement. Il fallait dire que mes six chatons faisaient en moyenne la moitié de ma taille -Petit Rat et Patte Nocturne étant les extrêmes de cette moyenne-. Les pauvres petits prenaient des tournantes pour dormir dans mon giron, sauf pour un ou deux qui se sentiraient déjà plus indépendants. Normalement, Pelage de Crème aurait pu me remplacer dans la garde des chatons mais quand on voyait comment ils se collaient à moi, nous avions décidé que je resterais jusqu'à leur apprentissage. Puis, si certaines reines aspiraient à vite reprendre leur vie de guerrière, j'aimais trop m'occuper de mes petits bouts, je le ferai jusqu'au bout de leur enfance, et plus tard s'ils avaient encore besoin de moi.

Si j'étais en train de rêver de prendre soin de mes chatons pendant des lunes encore, il y en avait une qui avait décidé de déjà partir vivre sa propre aventure. Quand nous dormions, je me couchai toujours en sorte d'être dos à l'ouverture de la pouponnière. Comme ça, je ne gênais pas mes petits si je devais sortir la nuit et surtout, je me situais entre eux et la sortie, donc ça devait les dissuader d'essayer de m'enjamber pour sortir. Mais j'avais droit à une petite maligne qui avait trouvé une brèche dans notre antre bien tressée. Ce n'était pas une bonne nouvelle. Non pas que je voulais empêcher les tout jeunes de sortir, mais plutôt empêcher de potentiels dangers de rentrer. Au clan de l'Ombre, on a bien eu un vent de panique quand un rat avait forcé une faille dans la pouponnière. Certes, je ne pense pas qu'un poisson ferait cela dans notre clan, mais je me méfias des furets, rats d'eau, et tout autre mammifères aux dents acérées.

Je sorti donc doucement de la pouponnière, sans déranger les rêves de mes cinq autres enfants, plissant des yeux quand je fus accueillie par la lumière orangée du matin. Je m'étirais pour me réveiller et glissai mon regard le long du camp pour trouver la pelisse brune de Petit Etourneau. Cherchant au niveau du sol, je fus surprise de la voir en haut de la souche qui formait l'entrée de notre camp. Je l'observais un peu, déjà contente de voir qu'elle n'avait pas voulu sortir hors du camp. Elle semblait fière d'être là-haut. Je devais avouer que j'étais également contente de voir sa débrouillardise, me rappelant quelques souvenirs de jeunesse moi-même. Mais quand un corbeau s'approcha, je gonflai ma fourrure instinctivement. Ces oiseaux pouvaient crever l'oeil d'un chat, voir faire pire ! Il était plus gros que ma fille et ce détail ne me plaisait pas du tout. Je fis des pas rapides, silencieux, juste pour le cueillir s'il décidait de se retourner et s'en prendre à Petit Etourneau, qui elle était bien décidée à chasser cette oiseau trop gros pour elle. Mais les Etoiles ont du voir mon inquiétude et ont chatouiller la truffe de ma petite qui éternua, faisant fuir le corbeau. Je m'arrêtai nette, à moitié figée dans ma position de traque. J'étais toute proche de la souche et la chatonne senti ma présence, la faisant sursauter. Mes muscles se re-tendirent au cas où elle serait tombée mais cela n'arriva pas. Elle me salua maladroitement, comme coupable d'être sortie dans mon dos. Un sourire en coin naquit sur mon museau.

" Bonjour Petit Etourneau, tu t'es réveillée tôt pour nous chasser le petit déjeuner de ce que je vois ? "

Comme j'étais désormais bien repérée, je pouvais m'autoriser de grands mouvements. Je me ramassai fort sur moi-même avant de me déplier dans un saut qui me faisait gracieusement atterrir sur la souche près de ma fille. J'humais l'air frais et humide du matin, savourant la mousse de l'arbre raboté sous mes pattes.

" Je préférerai que tu commences par des animaux plus petits, par contre.. " miaulais-je dans un souffle, mi inquiète, mi taquine.

[HRP : juste un détail mais Muguet est blanche et noire c: ]

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