La visite de trop [PV Queue de Babouin] - end

Tonton était un idiot, à bien y réfléchir.

La première fois qu'il s'était retrouvé dans le marais, il s'était frotté à l'hostilité non contenue de Branche Pâle.

La deuxième fois, malgré son agréable rencontre avec Petite Grenouille, il avait bien senti que sa présence gênait le matou adulte (Babouin? Quelque chose comme ça?) qui les avait rejoint, et qu'il n'avait pu partir sans bobos seulement parce qu'il avait bien voulu quitter les lieux sagement.

Les fois suivantes... Bon, il n'avait croisé personne d'autre que Grenouille. Mais chaque mention de patrouilles ou d'autres membres du clan de l'Ombre dans la gueule de sa jeune amie lui rappelait quelque chose qu'il aurait du comprendre dès le premier jour où il avait posé un coussinet dans ces maudis marais.

Tu n'as rien à faire là, Tonton. Tu vas finir par tomber sur un os, Tonton.

Mais il était idiot.

Et aujourd'hui encore, il se retrouvait à longer les marais, espérant repérer le pelage fauve de Nuage de Grenouille parmi les sapins. Ça faisait longtemps, qu'ils n'avaient pas eu l'occasion de parler, et il avait hâte d'en entendre plus sur le quotidien si étrange de la jeune chatte des clans...

Je rêve. Le gros chat de l'autre fois, il est revenu. Tranquille pépouze, dans le marais. Comme si il avait le droit. Je devrais lui sauter dessus direct et lui dégommer sa vieille face, mais je suis tellement surpris de le voir aussi effronté que je viens vers lui.

- Rassures moi, t'es juste perdu là. Ca excuserait rien, mais au moins ça m'aiderait à comprendre. Parce que là, de le voir chez moi, comme ça l'air de rien, ça m'énerve franchement. Les frontières, tu connais?

Peut-être que c'est les autres qui ont raison. Ils sont bêtes, les chats domestiques, ils comprennent décidément rien. Le marquage de frontière du marais c'est pas compliqué, on vient de le refaire. J'étais dans la patrouille du matin alors je le sais. Sa truffe elle est bouchée c'est pas possible autrement. Ca sent le clan de l'Ombre partout partout.

- T'as pas remarqué que j'avais pissé là, je dis et je montre un arbre derrière nous de la patte. là, je montre le gros buisson qui borde la frontière. là? une grosse branche par terre.

Je continue à désigner la frontière, qui sent 100% nos marquages. Je me dis que l'autre, il doit se sentir drôlement con maintenant.

Mauvaise pioche.

Faute de Grenouille, il se retrouvait à nouveau face à face au gros chat au poil en bataille de l'autre fois. Si Tonton se souvenait bien, son nom c'était... Queue de Babouin. Il était ce que Grenouille appelait un guerrier. Soit un chat adulte et passablement en pétard du clan de l'Ombre.

Pas du genre à se laisser démonter, même quand il était en tord, Tonton se contenta de soutenir le regard courroucé de son interlocuteur, le laissant même énumérer les... Endroits sur lesquels il avait pissé (?), avant d'oser une interruption:

"Je vois." Sec. Un peu trop, pour un chat qui savait très bien qu'il n'avait rien à faire ici. "Je m'excuse, je ne voulais pas franchir votre frontière."

Ça, c'était un mensonge. Tonton avait beau jouer les ignorants, il avait finit par comprendre bien des choses, sur les clans, depuis qu'il tournait en rond dans leurs territoires. Et, les frontières, il savait dès le premier jour que c'était un sujet sensible. Ça restait absurde, pour lui, mais il avait saisit l'essentiel. Et il savait bien que ce Babouin ne le laisserait pas partir aussi facilement. Pas après Branche Pâle, pas après l'avoir gracieusement épargné la dernière fois.

Mais en plus d'être idiot, Tonton était entêté. Il n'était pas venu pour voler des proies ou envahir le territoire de l'Ombre. Il voulait voir Grenouille parce qu'il s'ennuyait à mourir. Parce qu'il avait envie de savoir ce qu'elle faisait de beau, ces derniers temps. Et, quelque part, parce qu'il considérait que ces règles et ces frontières, ça ne le regardait pas.

Et vas y, paies toi ma tête. Le gars il croit que j'ai pas compris qu'il me menait en bateau (le truc que les bipèdes ils amènent sur la rivière quand ça leur prend). Parce qu'il me l'a déjà dit en fait, qu'il faisait que passer et qu'il était perdu. La dernière fois déjà il faisait son innocent. Et la dernière fois je l'ai cru, mais là? Non non non.

- Babouin est pas tombé du dernier arbre. On me l'a fait pas à moi.

Je m'avance pour me coller limite contre son nez parce que là, je veux vraiment montrer que je rigole plus. Le laisser partir l'autre fois parce qu'il avait aidé Petite Grenouille je dis pas. Le laisser retrouver son chemin, d'accord. Mais de l'entendre me ressortir tout ça, des lunes et des lunes plus tard, niet.

- Maintenant tu me dis pourquoi ta vieille fourrure est toujours chez nous. Et ta même excuse pourrie de l'autre fois, tu oublies.

On apprend pas à Babouin à faire la grimace.

L'autre chat n'était pas très coopératif. Ni très... Cohérent. Tonton arriva quand même à saisir l'essentiel - ça ne prenait pas. Si les mots de Queue de Babouin et ses choix assez spéciaux de pronoms étaient un peu confus, il n'y avait pas besoin d'être un génie pour comprendre qu'il était furieux. Le poil gonflé, il était venu lui coller sa truffe dans le visage. Tonton se retint de gronder.

Il était en tord, d'accord. Mais il n'aimait pas tellement cette invasion de son espace personnel.

"Encore une fois. Entrer chez vous n'était pas mon intention, je venais voir-"

Une pause. Il valait mieux ne pas mentionner Nuage de Grenouille. Tonton en savait suffisamment sur les clans maintenant pour comprendre que d'avouer au guerrier en colère qu'il voyait de temps en temps la jeune apprentie aurait des conséquences désastreuses. Ça risquait non seulement de le mettre encore plus en rogne, mais aussi et surtout, d'attirer des ennuis à Grenouille. Et ça, il s'y refusait. Pas question de trainer la petite dans cette histoire, pas quand c'était lui et lui seul qui était assez stupide pour revenir trainer ici sans y avoir été invité.

"Un ami. Et je me suis perdu."

Pas forcément crédible, comme excuse. Est-ce que l'autre allait vraiment gober ça? Il trainait ses puces dans le coin depuis tellement longtemps, tout laissait à croire qu'il saurait se repérer, maintenant... Et c'était le cas. Mais bon...

Entre idiots, on peut peut-être s'entendre...

Il se paye encore plus ma tête j'ai l'impression. Et je savais pas, et je suis perdu, et en fait je viens voir un ami... C'est dingue. Moi qui avait été super sympa la dernière fois, en le laissant partir comme ça. C'était une fleur, que je lui avais fait et il la piétine. Ma fleur. J'avais fait ça pour pas chagriner la Petite Grenouille en plus. Trop bon trop con.

Que ce chat des rues se permette de se moquer de moi, de prétendre qu'il a le droit de trainer ses puces chez nous... En ce moment la chasse est dure en plus, on a pas que ça à faire de gérer les idiots perdus à la frontière.

Je vois rouge.

- T'as pas d'ami ici. Maintenant tu pars.

Ça aurait pu être un ultimatum, que je lui laisse le temps de prendre ses clics et ses clacs. Peut-être même qu'il l'aurait fait. Mais je résiste pas, et je lui décroche un gros coup de patte en plein dans sa face.

Ça t'apprendra.

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'Attaque - Clan' :

Et dire que Tonton pensait être un bon juge de la nature des chats... Il avait plus ou moins mit ce Babouin dans la case "Bon type, à ne pas trop chercher, mais qui sait se montrer juste" après leur première rencontre. Rien à voir avec les excités de la frontière qui polluaient ces territoires.

Mais en se prenant une bonne baffe de la part du matou, Tonton se dit que ce jugement avait été peut-être un peu hâtif. Qu'au fond, il ne connaissait rien de ce chat. Qu'il l'avait bien cherché, sa claque, finalement.

Tonton n'aimait pas spécialement se battre. Seulement voilà, on ne survivait pas aux poubelles en s'écrasant devant les costauds. En tremblant et en repartant la queue entre les jambes après un coup bien placé sur la truffe. Tonton ne recula pas d'un poil, remuant juste un peu la tête, le museau froncé par l'impact.

"Ok."

Il n'avait même pas envie de continuer. Il était en tord, il n'avait rien à gagner à escalader cette situation. Mais que ce soit de la fierté mal placée, ou juste une sorte de colère qui bouillonnait en lui depuis un moment et qui ne demandait qu'à sortir...

Tonton se redressa de toute sa hauteur et frappa à son tour le gros chat.

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'Attaque - Clan' :

Ah bah voilà j'avais bien raison. Si il contre attaque c'est qu'il est en tord. Sinon il serait parti sans demander son reste, qui serait assez con pour surenchérir pour rien comme ça? Peut-être qu'il a bien des copains dans le coin qu'il cherche à protéger. Ou peut-être qu'il est suicidaire et qu'il voit pas que je vais complétement l'exploser lui et sa petite tronche de chat domestique.

Après faut pas trop faire le mariole non plus. C'est même pas vraiment un chat domestique je crois, et il est pas maigrichon le minet, je dois quand même le prendre un minimum au sérieux. La honte totale si il me bats. Si l'autre casse-couilles du Tonnerre apprend ça, ma vie sociale est foutue, tout le monde saura.

Alors j'encaisse DIGNEMENT son coup de patte, et je lui en donne un en retour. Mais un vingt fois plus fort au moins. Et je me contente pas juste de ma patte en fait, je me jette sur lui de tout mon poids. Et ouais il est gros, mais moi aussi, et on roule quand même bien au sol parce que l'impact est là.

- Tu fais pas le poids, dégage.

Je suis sur lui toujours alors il peut pas vraiment obéir mais c'est pour l'effet de style que je dis ça.