Transi par le froid (flashback) - avec Nuage de la Loutre - end

Les nuits semblaient de plus en plus fraîches aux yeux de Nuage de Lézard. Et pour cause, le nid de mousse trônant à ses côtés était vide, froid, dénué de toute vie. Nuage de Rossignol n'était plus, elle ne reviendrait pas dormir auprès de lui, ils ne se réchaufferaient pas mutuellement durant les forts épisodes de pluies.
Il ne pouvait désormais que compter sur ses souvenirs, ses propres capacités et son mental ; à s'imaginer la brune roupillant à ses côtés, rêvant de ses chasses à venir avec son mentor, patientant pour le lendemain.

Mais la réalité était tellement difficile, puisqu'elle n'avait plus ce qu'on appelait demain. Et quelque part, c'était difficile pour son frère de lui dire au revoir, car en gardant ce nid vide à côté de lui, il se persuadait qu'elle reviendrait tôt ou tard, n'hésitant nullement à se mettre des œillères pour rêver encore un peu.

Pourtant, s'accrocher désespérément à cette réalité alternative ne lui faisait en rien du bien. La pluie ravageant l'entièreté du camp, l'apprenti de Phoque Rouge était transi de froid, tremblotant par intervalles avec les yeux mi-clos. Dans l'espoir que peut-être... Cela passerait, non sans jeter un coup d'œil nostalgique au quatuor de sœurs qui dormaient paisiblement au fin fond de la tanière. Regrettant amèrement cette sensation de chaleur et d'amour.

Perdu dans ses pensées quant aux quatre sœurs qui dormaient paisiblement ensemble, il fut presque pris de court lorsque Nuage de la Loutre se mit à bouger. Qui plus est à avancer dans sa direction.
Paniqué, il simula. Fit genre de dormir, avec des paupières tremblotantes tellement l'effort de " faire-semblant " était compliqué. Heureusement pour lui, l'obscurité et la bonne âme de son amie fit qu'elle ne remarqua rien, le questionnant quant à son état de sommeil.

Il eut à peine le temps d'ouvrir un œil, avant qu'un coup de langue amical ne s'abatte sur son crâne. Maintenant surpris, il fixa sa camarade tout en restant sans voix. Il l'avait, certes, toujours connue très tactile après avoir passé le cap de sa timidité, mais après tant de temps à rester seul : cela le déroutait invraisemblablement.

Surtout qu'elle finit par lui faire une proposition inédite, mais qui pourtant lui réchauffait le cœur. Hélas, peut-être par fierté, ou un trop-plein de sentiments : il sembla décliner celle-ci. « C'est gentil... » lâcha-t-il d'une petite voix, empreinte de fatigue, avant de continuer sur sa lancée : « ... Mais ne t'inquiète pas pour moi. » puis il lui sourit, comme pour la rassurer et qu'elle s'en aille se rendormir paisiblement auprès de ses sœurs qui étaient en vies.

Nuage de Lézard s'attendait à ce que la femelle s'en aille après avoir décliné sa généreuse offre. Il s'apprêtait même à fermer les yeux, comme pour simuler un paisible sommeil et pourtant... La féline semblait voir clair dans son jeu. Pour ne pas le froisser, elle joua avec les mots et fit par ailleurs sa forte tête en décidant tout de même de rester.

Finalement, elle alla jusqu'à s'imposer en prenant place aux côtés de son camarade, mêlant sa fourrure brune à la pelisse grisâtre du novice. Or, il ne la rejeta pas. Parce qu'elle avait raison quelque part, mais pas que. Ça le réconfortait de ne plus être seul, de sentir une présence réconfortante et non plus un vide froid... Surtout en cette saison. Nuage de la Loutre put donc essaiment l'entendre soupirer de soulagement, avant de fermer les yeux, serein, tout en restant éveillé.

Il écouta alors l'apprentie et ses questionnements qui lui arrachèrent un petit rire discret, afin de ne pas éveiller le reste de la tanière. « Ce serait bizarre non ? Ça voudrait dire qu'il serait comme l'eau... Sans couleurs. Ce serait triste quand même. » miaula-t-il, confiant par là que c'était triste pour lui, mais aussi pour les chasseurs qui ne pourraient jamais l'attraper.

A ce rire, Nuage de la Loutre eut le cœur battant la chamade ce que Nuage de Lézard ne remarqua point. A vrai dire, il pensa naturellement que ce fut un ronronnement, alors il ne s'inquiéta pas plus que ça, écoutant encore et toujours son amie plaisanter.

Or, cette fois-ci ce fut au tour de Nuage Hirsute : l'apprenti-guérisseur du clan, connu pour sa gentillesse et son bon caractère. Nuage de Lézard n'était pas tellement de son avis, pensant qu'il resterait malgré lui quelqu'un de ronchon. Au point où il redoutait sa succession au poste de soigneur, mais aussi sa vieillesse. Se l'imaginant déjà en vieux mâle remballant les apprentis pour une épine dans le coussinet. « Si tu veux mon avis, c'est pas demain la veille qu'on le verra être adorable avec le reste du clan. » plaisanta-t-il légèrement avant de se raviser : « Quoique... ». Puis il jeta un coup d'œil à sa camarade, qui attendait sûrement un potin. Ce qu'il n'avait pas. « Imagine si on arrive à bien lisser son poil, en devenant Nuage Lisse : il sera peut-être très agréable à vivre ! » gloussa-t-il, oubliant alors ses tracas de tout à l'heure et donc son ancienne solitude aux côtés de Nuage de la Loutre.

Suite à sa plaisanterie, une des trois sœurs encore assoupies avait fini par pester : leur intimant le silence une bonne fois pour toute, ce qui quelque part : leur avait donné une envie supplémentaire de rire. Quoique, ce râle était justifié alors les deux compères avaient fait l'effort de parler plus bas. Nuage de la Loutre chuchota alors l'idée qu'il faudrait essayer cela un beau jour, tout en demandant à ce que son ami s'en charge. Ce qui étonnement : l'indigna.

« Quoi ? » s'étrangla-t-il à voix basse, avant de grimacer... S'imaginant des choses qui l'écœurait quelque part. « Tu m'imagines dompter les poils de cette cervelle de souris ? » puis il vit l'affreuse image d'un Nuage Hirsute toiletté par un félin brun-gris haut sur patte. « Non, c'est mission impossible : on annule toute tentative ! » gloussa-t-il une énième fois, non sans jeter un coup d'œil aux félines assoupies espérant ne pas avoir attisé leur colère... A nouveau.