Les chiens ne font pas des chats | Brasier Caniculaire - end

Les chiens ne font pas des chats
Feat. ◊ Brasier Caniculaire

Branche Pâle était morte. C'était la terrible découverte que ses enfants avaient fait en sortant de la pouponnière. Le corps inanimé et ensanglanté de leur mère. Et c'était de la faute d'Etoile Feulante. C'était la brute qu'il était qui lui avait ôté la vie. Qui leur avait arraché leur mère. Et Petit Moustique avait fait la promesse de ne jamais l'oublier. Et si feu la reine était loin d'être une mère chaleureuse, sa disparition avait rendu la pouponnière plus glaciale encore.

Mais maintenant que cette dernière était partie, le jeune mâle se devait de prendre sa responsabilité d'aîné de la portée et de veiller sur ses frères. De faire en sorte que tout soit parfait. Qu'ils soient parfaits. Et, à vrai dire, Petit Moustique ne les lâchaient plus. Et ses remarques et reproches s'étaient faits d'autant plus nombreux. Mais qu'importaient les quelques ressentiments que Petit Pigeon ou encore Petit Crapaud pouvaient bien avoir à ce sujet, un jour, ces derniers comprendraient pourquoi il avait fait ça. Et l'importance que cette éducation, qu'il leur imposait toujours plus chaque jour, avait.

Et dernièrement, il avait entendu ses frères parler d'un guerrier du clan. Un imposant matou roux couturé de cicatrices. Des histoires autour d'une langue coupée que Petit Crapaud ne cessait de qualifier de : « Trop cool ! ». Un guerrier qui ressemblait à Etoile Feulante par certains aspects. Et le chaton voyait ce fait comme étant une affreuse insulte. Certainement la pire qu'il pouvait donner à quelqu'un. Alors il avait commencé à mener une sorte d'enquête. Brasier Caniculaire, c'était ainsi qu'il se nommait. Il avait recueilli ces informations sans trop de difficulté auprès de son frère. L'information d'après qu'il avait réussi à obtenir lui apprit que c'était Feulement lui-même qui s'était chargé de l'entraînement dudit rouquin. Voilà qui expliquait certainement beaucoup de choses.

Petit Moustique ne voulait pas que ses frères approchent un chat comme lui. Une brute, certainement avec aussi peu de cervelle que leur meneur. Après tout, il ne serait pas surpris si Etoile Feulante, lui qui ne savait rien faire d'autres que de coller son père - alors même qu'Esprit Soucieux ne l'était même pas réellement - et de répéter ce que ce dernier pouvait penser, avait fait de son ancien novice un tout aussi grand idiot que lui. L'un de ces matous qui ne serait capable de rien d'autre que d'écouter des supérieurs. D'être rien de plus qu'une marionnette tout juste bonne à donner les coups de griffes quand on lui disait de le faire.

« Tu ressembles à Etoile Feulante. » Avait-il simplement lâché d'une voix calme et lente après s'être avancé vers celui qu'il avait étudié ces derniers temps. Il ne se serait certainement jamais intéressé à lui si son jeune frère ne l'avait pas fait. Il l'avait bien sûr déjà vu, mais jamais il ne serait allé lui parler sans une raison valable. La protection de ses frères en était une.

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ft. Petit Moustique

Voilà bien des jours que Branche Pâle avait trouvé la mort; entre temps, Brasier Caniculaire avait eu l'occasion de discuter avec Nuage de Nacre, d'aller toucher deux mots à propos d'Orage d'Or à Etoile Feulante, et grapiller quelques infos au solitaire "Ollie". Il retrouvait vie, en retrouvant son activité et un brin d'énergie. Il s'était réveillé, mais c'était toujours aussi compliqué pour lui de se libérer du passé. Sa discussion avec Nuage de Nacre à propos de Mite Blanche lui avait fait du bien, et lui avait fait comprendre qu'il devait trouver une solution au plus vite pour aller de l'avant. Sinon, en plus de se blesser lui-même, il blesserait ceux autour de lui sans le vouloir.

Aujourd'hui, il avait participé à plusieurs patrouilles de chasse, l'Hiver était toujours présent, le tas de proies commençait à se garnir, mais il ne fallait pas se reposer sur ses lauriers. Au début de l'après-midi, juste après un rapide repas constitué d'une souris maigrichonne, il s'était permit un petit instant de répit; de quoi souffler un coup et se faire une vive toilette bâclée. L'apparence n'était pas quelque chose dont il prenait soin, et s'était bien relâché depuis que Crocs de Ronce n'était plus avec lui. De base, c'était elle qui lui faisait sa toilette, ou du moins le forçait à la faire quand elle ne le pouvait pas.

Il fut interrompu par Petit Moustique. L'un des orphelins de Branche Pâle. Cela faisait un moment que Brasier Caniculaire ne s'était pas intéressé à eux, sa rencontre avec Petit Crapaud ne lui avait pas été déplaisante, mais depuis qu'il avait voté pour la mort de Branche Pâle, il ne se sentait pas légitime de venir voir ceux qui souffraient de cette perte. On l'avait même forcé à enterrer Branche Pâle, pour que les mouflets aient un sanctuaire où pleurer leur défunte mère. Lui, ne s'était jamais rendu sur la tombe de son paternel, il en avait oublié la position. Et en réalité, il ne s'y rendrait jamais, ça ne lui apporterait rien, et ça ne l'intéressait pas.

Le roux n'était pas dupe, il avait bien remarqué les regards insistants de Petit Moustique à chaque fois qu'il le croisait; que ce soit dans un coin du camp, derrière un buisson, depuis le seuil de la pouponnière, les regards avaient été bien plus étouffants ces derniers jours. Enfin le petit prenait son courage à deux pattes pour venir lui adresser la parole. Brasier Caniculaire se demandait bien ce que voulait le marmot.

Pas même un bonjour, pas même une salutation, le petit brun-gris lui lâche juste sa remarque, simple et plate. Il ressemble à Étoile Feulante. Était-ce un reproche? Étoile Feulante était un chef respecté, un modèle pour beaucoup, dont pour Brasier Caniculaire. Mais était-ce le cas pour Petit Moustique? C'était le bourreau de sa mère, l'assassin de cette dernière, celui qui avait clamé et effectué sa sentence. Penchant la tête sur le côté, il planta son regard sur le plus jeune, respirant lentement, agitant ses oreilles.

« - Bonjour P'tit Moustique. » Lui-dit il d'abord en lui faisant un signe de tête. « - C't'a dire? »

Il n'avait pas l'air menaçant, mais son visage ferme laissait paraître une dureté certaine. Pourtant, son regard se voulait agréable au possible, et ses gestes lents et rassurants. Ramenant sa queue autour de ses pattes, il s'installait pour laisser une place au plus jeune, l'invitant à s'asseoir à ses côtés pour partager une discussion avec lui. Il savait que Petit Moustique était sur ses réserves, il n'était clairement pas comme Petit Crapaud qui se lançait sur le premier venu pour le harceler de question. Petit Moustique était plus reclus, calme et, ironiquement, mature que ses deux frères. Il avait prit les responsabilités d'être le parent de substitution, de ce qu'il avait entendu dire. Grenouille et Crocs Féroces faisaient un bon travail, en devenant eux aussi les parents adoptifs des trois mouflets. Bien que cela dérange grandement Brasier Caniculaire que sa petite-cousine traîne avec Crocs Féroces, le fils de Crocs de Ronce et Dents de Sabre. Encore plus qu'ils jouent au papa-maman tout les deux. Mais bon, il n'avait rien à dire, Grenouille était grande. Immature, inconsciente, mais adulte.

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Feat. ◊ Brasier Caniculaire

Son regard ne lâchait plus l'autre chat. Le jaugeant de son air froid habituel. Sa posture droite, le menton légèrement relevé dans une position hautaine. Et ce même s'il devait déjà lever la tête pour observer le guerrier. Ignorant à quel point il devait paraître ridicule du haut de ses pauvres petites lunes face à lui. Pourtant, il refusait de se laisser démonter. Son attitude était sérieuse et sûre. Il ne cilla pas même lorsque le visage défiguré du matou se baissa vers lui. Il avait toujours trouvé les cicatrices infectes. Et il ne comprenait pas ceux et celles qui les portaient comme des trophées. Ces marques ne faisait qu'enlaidir. Elles ne prouvaient pas la force, mais plutôt une faiblesse certaine. Un guerrier émérite n'avait pas besoin de passer des jours dans la tanière des guérisseurs pour pouvoir se battre de nouveau. Et la preuve étant, Branche Pâle n'avait, dans les souvenirs qu'il conservait d'elle, aucune de ces marques immondes.

« Simple constatation. » Le rouquin lui avait fait une place pour s'asseoir. Action que Petit Moustique ignora. Tout comme il avait ignoré sa salutation. Tiquant néanmoins légèrement de l'oreille sur sa manière de raccourcir le début de son nom. Deux syllabes étaient-ce vraiment trop à prononcer ? Petit n'était pourtant pas le mot le plus compliqué. En cela aussi il ressemblant à Etoile Feulante. Economiser les paroles, les mots, les sons. Petit Moustique détestait qu'on abrège son nom. Sa mère l'avait nommé d'une certaine façon, c'était la seule chose qu'elle lui ait réellement donné. Il refusait de voir ce présent écorché.

Il resta de ce fait debout, bien droit et fixe devant le guerrier. Il n'était pas là pour discuter et passer du bon temps avec un camarade du clan. Non. « C'est une sorte de.. modèle après tout, non ? » Son ton avait prit une tournure légèrement teintée d'amertume. Il ne concevait pas qui quiconque puisse souhaiter ressembler à l'étoile de l'ombre. Que ce soit sur le plan physique - comme l'était déjà en grande partie Brasier Caniculaire - que sur le plan mental. Ses yeux s'étaient plissés légèrement. Analysant, observant. Jugeant. Parce qu'il était doué pour ça.

Ses oreilles s'agitèrent légèrement avant qu'il ne reprenne un air plus neutre. « Hmph. Mes frères n'ont pas arrêtés de parler de toi en tout cas. » C'était une exagération. Il avait entendu ses frères parler de lui, mais c'était mentir que de dire qu'ils n'avaient que lui à la bouche. Mais qu'ils en parlent beaucoup ou non revenait de toute manière à la même chose. Au même problème. Il ne voulait voir aucun lien se créer entre ce chat et ce qui restait de sa famille. Entre cet ersatz de Feulement et ses frères.

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ft. Petit Moustique

Le petit ne semblait pas avoir envie de s'asseoir; à vrai dire, il n'avait même pas l'air d'avoir envie de discuter réellement. Brasier Caniculaire lui offrait un regard neutre, avec sa mine froide et son air dur. Il ne comprenait pas vraiment ce que lui voulait le jeune; son frère avait été direct sur ses attentions, et il avait été étonnemment intéressé par le roux et son histoire. Petit Moustique, lui, n'avait pas l'air d'avoir cette envie d'en apprendre sur lui, il venait simplement lui dire des réalités, sûrement.

Quand le mouflet ignora son offre, miaulant que ce n'était qu'une constatation, le roux arqua un sourcil. Il essayait de déchiffrer les attentions du jeune; le tenait-il coupable pour la mort de sa mère, Branche Pâle? Brasier Caniculaire avait été le premier à clamer son avis sur la mise à mort, ayant été complice de cette condamnation. Mais visiblement, ce n'était pas contre lui que le brun en avait, sa voix était teintée d'amertume et de reproches, alors qu'il piaillait qu'Étoile Feulante était une sorte de modèle. Le roux redressa ses oreilles, alors qu'il détachait son regard pour réfléchir.

Un modèle? Pour lui, lors de son apprentissage, il en avait été un. Aujourd'hui encore, Brasier Caniculaire attendait l'approbation de son meneur pour multiples situations. Mais ce n'était pas réellement le modèle qu'il aimerait devenir. Brasier Caniculaire ne voudrait jamais devenir Étoile Feulante, jamais il ne voudrait vivre sa vie. Il était le fils d'un grand tyran, enlevé par les Lunars Pods et maltraité. Il avait vraiment une vie tragique.

« - Hm, peut-être, mais j'voudrai pas être lui. »

Il n'eut pas réellement le temps de développer plus son avis que le petit brun reprenait la parole, soulignant que ses frères parlaient constamment du roux. Cela le fit agiter ses oreilles, dans un léger sourire.

« - Ha! J'pensais pas être aussi intéressant qu'ça. » Il eut un léger rire, qui fit danser ses larges épaules. « - Et qu'est-ce qu'ils racontent d'beau? »

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Feat. ◊ Brasier Caniculaire

La remarque du plus jeune sembla pousser le guerrier à la réflexion. Avait-il été surpris par son ton ? Ou bien était-ce par la qualification de modèle ? Qu'importait. Le fait était que c'était certainement là une différence marquante entre le guerrier et leur meneur. Il semblerait que Brasier Caniculaire soit au moins capable d'un minimum de réflexion. Ce qui n'était de toute évidence pas le cas d'Etoile Feulante. Après tout, le cerveau de l'étoile de l'Ombre n'étant rien d'autre qu'Esprit Soucieux. Ce n'était pas le chef qui parlait. C'était l'ancien guérisseur - et lieutenant. Pas que ce fait suffise à rassurer le plus jeune de la valeur du rouquin. Mais il avait déjà un défaut en moins. Ou partiellement en moins.

Sa réponse à sa remarque lui fit arquer un sourcil, lui donnant un air peu crédule. « Vraiment ? J'aurai pensé. » Sa voix était légèrement plus sifflante. Après tout, le guerrier avait été dans la bonne voie pour suivre les pas du meneur. La nature l'avait doté d'une carrure voisine de ce dernier, il avait le visage décoré à la mode Feulement. Quelque chose d'une brute et d'un manque de liberté d'esprit. Il haussa finalement des épaules avec nonchalance.

Les crocs de l'enfant aurait presque crissé face au sourire et au rire qui secoua l'adulte. Aucun sourire ne vint décorer ses babines, ni même un frétillement de moustaches qui aurait pu trahir un amusement quelconque. Seulement un air ennuyé. « Hum. Moi non plus en fait. Mais faut croire qu'une langue mutilée ça fait parler les bavards. Petit Crapaud est bavard. » Et il ne comprenait pas vraiment ce que cette dite langue coupée pouvait avoir de si incroyable. Et, contrairement à son cadet, il ne rêvait pas de la voir. Nul doute qu'elle était absolument immonde d'ailleurs. Ses frères l'avaient comparée à celle d'un serpent d'ailleurs. La zozotement et les sons plus sifflants du guerrier y jouant certainement un rôle également. Mais ce n'était pas un serpent. Les serpents étaient sournois et malin. E l'image du reptile ne semblait pas vraiment coller à celle que son camarade renvoyait.

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ft. Petit Moustique

Il ne quittait pas le petit des yeux; en réalité, le roux avait énormément de mal à comprendre où il voulait en venir. Est-ce qu'il voulait lui faire dire des choses compromettantes? Était-il sournois au point de vouloir le faire mentir pour le vendre en tant que traître? Il avait confiance en Étoile Feulante, mais c'était le premier à savoir que si un félin faisait trop de vagues, il serait punit. Mais cela ne semblait pas être le cas, car Petit Moustique arqua un sourcil, comme s'il était lui-même étonné de la réponse de Brasier Caniculaire. Oui, Étoile Feulante était un modèle, mais n'importe qui d'un minimum réfléchi saurait qu'il était loin d'être parfait. C'était un bloc, nourrit et éduqué par la violence, qui vivait dans un autre monde. Sa vie était triste, personne ne pouvait rêver de devenir comme lui, de vivre ce qu'il avait vécu. En tout cas, pas le roux.

Petit Moustique siffla sa réponse, demandant si c'était la vérité, parce qu'il aurait cru le contraire. Le guerrier pencha légèrement la tête sur le côté, ne comprenant toujours pas où est-ce qu'il voulait en venir. Mais il n'ajouta pas plus à sa réflexion, haussant les épaules avec lenteur et nonchalance. Seulement, quand le roux lui répondait qu'il était étonné que l'on parle de lui dans un rire, le petit chaton soutenait son regard, avec un air ennuyé et pas du tout amusé. Seigneur, quel plaie, le mouflet avait un putain d'arbre dans le cul ou c'était comment? Sa mère était une peste, mais il ne s'attendait pas à ce que son fils le soit autant, Petit Crapaud n'était pas du tout comme lui, et Petit Pigeon, bien que plus discret, était jovial aussi. Petit Moustique était bien le fils de sa mère. Comme il s'y attendait, à vrai dire. Et ça lui faisait mal de voir qu'il pensait vrai.

Le gamin souligna le sujet de ses deux adelphes; la langue de serpent de Brasier Caniculaire. Le roux fit danser le bout de sa queue, avec un air amusé. Sa langue faisait parler les bavards? Petit Moustique miaula que Petit Crapaud était bavard, par extension à sa première remarque. Le grand guerrier pouffa silencieusement, ne faisant que soulever ses épaules alors qu'il taisait le rire gras dans sa gorge.

« - Tu dois être bavard aussi alors, parce qu'elle t'fait bien parler, cette langue. » Dit-il en redressant la tête, laissant le rire gras s'échapper légèrement de ses babines. « - Tu es venu me voir pour ça? »

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Feat. ◊ Brasier Caniculaire

Les yeux ne quittaient pas l'imposant rouquins. Le jaugeant, le jugeant également quelque part. Ils glissaient le long de ses larges cicatrices qui le défiguraient. Elles étaient immondes. Elles lui déchiraient le visage, lui avaient découpées la langue, elles n'avaient rien de glorieuses. Elles étaient simplement la preuve d'une faiblesse. Définitivement, il ne comprenait pas ce que son jeune frère pouvait leur trouver. Le guerrier était laid, c'était un fait. Tout du moins, aux yeux du gamin, il l'était, définitivement. Tout comme Etoile Feulante l'était. Et cette laideur était loin de cacher l'intelligence qui aurait pu les sauver.

Lui aussi était laid. La preuve était que sa mère l'avait nommé comme les nuisibles du moment. Comme ces moustiques qui l'avait embêté durant ses lunes de grossesses. Comme les moustiques qui l'avaient ennuyés, après lesquels elle avait certainement juré, essayer de chasser. Comme les moustiques qu'elle aurait voulu faire disparaître. Mais, contrairement à Brasier Caniculaire, contrairement à la si incroyable Etoile de l'Ombre, lui avait la décence de vouloir combler ça par autre chose. Et autre chose qu'une force brute également. Il avait la décence de se montrer un minimum intelligent et malin. Ou, tout du moins, il essayait de se développer de la sorte, et il se croyait sans aucun doute être sur la bonne voix.

Face à la réaction du guerrier, face à son rire gras qui montrait le peu de manières que le matou avait, Petit Moustique se para d'un rictus entre dégoût et plein d'un jugement certain. « Pas vraiment en fait. Je trouve ça... dégoûtant. » Son dernier mot avait été lâché avec un dédain et une répulsion évidente. S'il avait la langue d'un serpent, il n'avait ni leur finesse, ni.. rien d'autre en fait. « Ce n'était pas de ta langue que j'étais venu te parler. » Une langue de brute qui ne savait pas réfléchir, plus une langue de serpent. Voilà qui était certain. Le chaton détourna le regard, l'air de rien, comme ennuyé de la situation. Peut-être l'était-il vraiment cela dit. Ennuyé de devoir converser avec quelqu'un comme lui, certainement. « Plutôt te dire de laisser mes frères tranquilles. » Finalement, comme dans une volonté de faire un petit effet, l'enfant replanta ses iris dans celle de Brasier Caniculaire, sans flancher. Prouvant à quel point il était sérieux.

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ft. Petit Moustique

Cette discussion était particulière. Brasier Caniculaire faisait de son mieux pour sembler accessible; bien qu'il soit presque mal à l'aise du regard insistant et dégradant du chaton. Le fixant lui-aussi, il tentait de comprendre ce que voulait le petit brun. Petit Moustique le dévisageait, détaillant ses cicatrices et ses plaies; avec cette lueur méprisante. Le jeune chaton n'était visiblement pas d'humeur agréable, il avait affiché une mine de dégoût alors que le roux finissait son rire gras. Arquant un sourcil, le guerrier écoutait ce que pouvait bien dire le jeune brun. Il trouvait ça.. dégoûtant? Il avait tellement de mépris dans la voix, tellement de dédain, que le roux se demandait bien ce qui pouvait avoir forcer le chaton à devoir grandir si vite. Et pour cause; la mort de leur mère. C'était sûrement pour ça, que Petit Moustique passait à côté de sa jeunesse.

« - Hm. Elle est pas très belle, j'suis l'premier au courant. Mais bon, faut faire avec. C'pas comme si j'avais l'choix. » dit-il en détournant le regard, le visage froid et refermé.

Petit Moustique reprit la parole, toujours plus détaché qu'avant, soulignant qu'il n'était pas venu à sa rencontre pour ça. Le roux planta son regard sur lui, ayant retrouvé un air de marbre et sérieux. Il ne discutait plus avec un chaton, au final, Petit Moustique était bien plus mature que sa fratrie pour qu'il lui parle comme à un gosse. Arquant un sourcil, il écoutait ce que pouvait bien dire le jeune. Il avait l'air ennuyé, plein de mépris, avec cet air de dédain qui lui scied si bien à la peau. Le mouflet abandonna finalement sa remarque; un semblant de mise en garde, vu son air de petit chevalier un peu ridicule. Il demandait au roux de laisser tranquille ses adelphes. Brasier Caniculaire laissa retomber son sourcil arqué, reprenant une mine bien trop sérieuse, bien qu'aussi accessible qu'il le pouvait. Il avait perdu son sourire léger, et arborait un air bien sévère, sans pour autant être menaçant. Redressant la tête, il détacha son regard pour fixer le camp.

« - Qu'est-ce qui peut bien t'faire si peur chez moi? J'ferai rien à tes frères; j'suis pas un traître. S'tu veux savoir; c'est eux qui viennent m'voir, j'fais qu'profiter de leur présence. »

Son regard s'était assombrit; on pouvait y lire la maturité et la fatigue. Mais ses babines s'étaient légèrement relevées dans un très léger sourire, comme s'il était réellement content de repenser aux visites des deux autres chatons. Petit Moustique pourrait rapidement comprendre que Brasier Caniculaire le prenait au sérieux; autant que s'il discutait avec un autre guerrier. C'était une discussion sur un pied d'égalité, ce n'était plus un chaton à ses yeux, mais un grand-frère protecteur et inquiet, qu'il ne pouvait que comprendre. Replantant son regard sur le chaton, sans pour autant détourner la tête vers lui, il lui demande;

« - Tu préfèrerais quoi, toi? Qu'j'les envoie chier la prochaine fois qu'ils viennent m'voir? C'toi qui décide, t'es leur grand-frère, j'pense qu'tu sais c'qu'est l'mieux pour eux. »

En sachant qu'il leur briserait sûrement le cœur, s'il faisait ça. Mais Petit Moustique était leur frère, leur gardien, il devait savoir ce que cela impliquerait, et il était assez mature pour le prendre en compte dans sa décision. Dans tout les cas, Brasier Caniculaire l'écouterait, qu'importe ce qu'il pouvait dire.

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Feat. ◊ Brasier Caniculaire

Brasier Caniculaire avait arrêté de rire. Peut-être avait-il fini par comprendre le sérieux dont faisait preuve l'enfant depuis le début de cette conversation. Ou peut-être ne s'était-il pas attendu à une telle réponse. S'il avait tourné le regard, celui vert de Petit Moustique était braqué sur l'imposant guerrier. Il n'avait cure des ressentiments de ce dernier. Il restait honnête à ce sujet. Les cicatrices étaient dégoûtantes. Elles ne méritaient aucun intérêt. Aucune fierté. Aucune fascination.

Finalement le chaton haussa vaguement les épaules. La question de son immonde cicatrice n'était pas le sujet principal de cette visite. « Tu ne me fais pas peur. » Lâcha-t-il, légèrement vexé, sans attendre la fin de la phrase du rouquin. Il tiqua au terme de traître. Brasier Caniculaire l'avait-il fait exprès ? Probablement. L'image de Branche Pâle flottait et flotterait toujours sur ses enfants. Petit Moustique serra les crocs, ravalant une remarque à ce sujet. Et puis, l'immense matou avait déjà repris. Le considérant avec un sérieux qui surprit presque l'enfant, qui le satisfit également. Il était rare qu'on accepte de le considérer avec le sérieux d'un grand. La plupart ne le voyait que comme ce qu'il était : toujours trop jeune. Tout du moins, lorsqu'ils ne s'arrêtaient pas sur le simple fils de Branche Pâle. Fils de la traitresse. Fils de l'exécutée. Du monstre.

La question que Brasier Caniculaire venait de poser semblait plus sérieuse. Une question que le guerrier semblait poser à la manière d'une question morale. Mais Petit Moustique n'en saisit pas vraiment la difficulté.« Oui. Je veux que tu les laisses tranquille. » Il ne lui avait pas fallut beaucoup de temps pour répondre. Parce qu'il n'y avait eu aucune hésitation. Aucun besoin de pousser la réflexion. Et il ne voyait aucun problème qui pourrait venir avec cette décision. Si Petit Crapaud et Petit Pigeon pourrait être déçus qu'on les envoient balader, qu'importait ? Le tout était qu'ils soient préservés des mauvaises fréquentations et des mauvaises influences. Si c'était ce qui étaient bon pour eux, qu'importe les ressentiments qu'ils pourraient avoir. Il se contentait d'assumer son rôle : les protéger. Les préserver. Les surveiller aussi.

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ft. Petit Moustique

Si Brasier Caniculaire avait été très peu sérieux au début de leur discussion, la façon d'être de Petit Moustique l'avait forcé à ne pas prendre ses paroles comme celle d'un chaton. Le plus jeune semblait bien mature pour son âge, et le roux ne pouvait que voir son reflet en lui; un enfant forcé de grandir trop vite suite aux horreurs qu'il avait vu et vécu. Durant son jeune âge, Brasier Caniculaire n'avait pas fait preuve d'autant de maturité, il avait cherché les ennuies, se battait à chaque occasion, face à son grand némésis Aiguille de Pin. Mais depuis le procès, non, l'exécution de son père, il n'avait plus été le même.

Aujourd'hui, quand il repensait à cette journée fatidique, il pouvait sentir le goût métallique du sang sur sa langue, il pouvait entendre les gargouillis ragoutants de son père agonisant; il pouvait voir son regard apeuré, mais aussi cette note moqueuse et satisfaite, ses yeux se voilant alors que les secondes passaient. Il pouvait sentir la tension de la foule, les murmures teintés de doute et de crainte; mais aussi ce silence, ce calme de la mort. On l'avait jugé pour son acte, on l'avait félicité pour son acte. C'était comme s'il avait été forcé d'ouvrir les yeux.

Alors il comprenait Petit Moustique; il comprenait aussi qu'il ne pouvait pas le comprendre. Si lui avait été le bourreau de son paternel, le gris n'avait été que le témoin. Il avait aimé sa mère, alors que lui avait détesté son père. Comment pourrait-il le comprendre? Lui qui avait été abandonné par sa matrone aux griffes de son géniteur, lancé dans la gueule du loup pour que Fine Terre puisse le martyriser autant que l'envie le lui disait. Mais il pouvait comprendre l'envie de protéger ses adelphes; lui avait essayé avec Cendre Sylvestre, jusqu'à ce qu'elle lui tourne le dos elle aussi, qu'elle force les autres à le repousser, qu'elle entraîne Crocs de Ronce dans ses infidélités. Tant qu'il souffrait; elle, était heureuse. Pourtant, jamais il ne s'était arrêté de vouloir son bien.

Le gris souligna finalement qu'il n'avait pas peur du rouquin, mais le guerrier ne s'était stoppé dans sa phrase, car il savait déjà que Petit Moustique ne le craignait pas; il ne voulait pas être craint. Seulement, il sentait encore ces regards insistants, ces doutes sur ses actions et sur ses origines, lui aussi était un renégat, mais jamais Petit Moustique ne pourrait le comprendre. Il était le fils d'une traîtresse, mais qu'importe, car il était le fils de l'Ombre, avec un sang aussi pur que cristallin. Cet enfant avait eu une cuillère en argent dans la bouche, un destin tout tracé, presque parfait. Sa mère, elle, avait tâchée l'avenir de ses enfants par son égoïsme. Comme Faucon Fugueur.

Petit Moustique finit par rétorqué qu'il souhaitait que le roux se tienne éloigné de ses frères; et il ne pouvait que le comprendre, lui aussi aurait aimé tenir Cendre Sylvestre éloignée de Fine Terre, mais il avait échoué là où Petit Moustique pouvait réussir.

« - Alors j'me tiendrai éloigné. Mais j'les repousserai pas pour autant. C'est à toi, leur grand-frère, d'leur faire comprendre c'que t'essayes d'me faire comprendre. J'doute pas qu'tu trouveras les mots, t'en as la sagesse. »

Le roux s'était redressé, préparant son départ. Il avait gardé son regard sérieux sur le petit, un regard pesant, mais qui prouvait étonnement qu'il voyait son camarade sur un même pied que lui. Il ne pouvait s'empêcher la peine de Petit Moustique, et il ne pouvait que comprendre pourquoi il la transformait en haine, lui aussi. Il espérait simplement qu'il ne suivrait pas le même chemin que sa défunte mère. Agitant son oreille, laissant sa queue pendre derrière lui, son regard se fit plus doux, compréhensif, et peiné.

« - J'sais c'que c'est; même s'tu penses l'contraire. Enfin bref, est-c'que j'peux faire autre chose pour toi; Petit Moustique? »