Vieille douleur [avec Jolie Rafflésie]

Réveillée depuis l’aube, j’ai observé le soleil se lever, je me sens sereine, un peu. Je laisse Grande Digitale dormir et je trie les remèdes. Quand ma mentor se réveille, je lui demande si ça ne la dérange pas d’aller en cueillette à ma place. Il a du pleuvoir durant la nuit, mais l’air humide me fait mal, aujourd’hui.

Je souhaite bonne chance à ma mentor avant de me retourner vers le reste de la réserve. Je crois qu’il est temps d’aller rendre visiter à la pouponnière, les chatons doivent être levés. Je n’y passe pas beaucoup de temps, il n’y a plus beaucoup de chatons, en ce moment. Je remarque, en ressortant que quelqu’un se dirige vers la tanière. À la couleur du pelage, je crois reconnaître Luciole des Bois. Tant pis, les anciens attendront.

Je retourne dans mon antre, m’annonçant derrière la guerrière.

- Je suis là, Luciole des Bois. Qu’y a-t-il ? C’est ta blessure qui te fais souffrir ?

Je renifle la guerrière en passant à côté d’elle, elle n’a pas l’air en souffrance. Ce doit être autre chose alors.

Luciole des Bois explique sa venue : sa blessure lui fait mal, mais il y a autre chose, également. Des rêves la hantent. Les Prophètes qui leur ont fait du mal. Je n’avais jamais cru à leur salade, mais ça n’avait pas été le cas de tous, comme la sœur de Luciole des Bois, c’était quoi son nom, déjà ? Je ne sais plus. C’est que ça commençait à remonter tout ça. J’étais encore valide à l’époque. Enfin, ça ne sert à rien de penser à ça maintenant.

- Prends place, je vais regarder ta blessure. Elle est cicatrisée, mais on ne sait jamais. Il a plu, pendant la nuit, et les douleurs articulaires se font parfois ressentir plus violemment que d’habitude. Je vais m’assurer qu’il n’y ait pas de gonflement, juste au cas où.

D’un geste de la queue, j’invite la guerrière à s’assoir tandis que je commence à farfouiller entre les poils à la base de sa queue. Dans le même temps, je réfléchis à ce que je pourrais faire d’autre. Elle m’a dit que la douleur était plus forte lorsqu’elle rêvait de sa sœur. Et siiii ? Huuuum… Peut-être. Je finis par trouver sa vieille cicatrice est tout est normal, pas d’inflammation.

- Tu n’as rien, c’est pas gonflé. Il valait mieux vérifier, finalement. Mais du coup, je ne te donnerais pas de remèdes contre la douleur, le pavot ne ferais que t’assommer. Tu m’as dit que la douleur était plus forte lorsque tu rêvais de ta sœur, c’est bien ça ? Et, c’est juste une suggestion de ma part, mais du coup, peut-être, je dis bien peut-être, que la douleur est uniquement dans ta tête.

Je marque une pause, pour laisser à la guerrière le temps de digérer un petit peu l’info. Dans le même temps, je réfléchis à quelle solution je pourrais lui proposer. Il faut dire que, tout ce qui concerne la psychologie, ce n’est pas mon domaine de compétence. On ne gère pas ce genre de chose, d’habitude.

- Je n’ai pas la prétention de pouvoir affirmer ce que tu ressens, mais peut-être qu’il y a eût pour toi un événement traumatisant, ou dont tu te sens coupable, lié à ta blessure ? Ça expliquerait la douleur. Du coup, je ne peux que te conseiller d’en parler à une personne de confiance pour t’aider à surmonter ça ? Grande Digitale et moi-même sommes là pour t’écouter si tu veux, ou si tu préfère, tu peux en parler avec un ami proche. Huuum… Mouron Délicat, par exemple ? Je te laisse y réfléchir ? Je vais soigner les anciens vite fait et je reviens.

Je prends des remèdes et je sors de la tanière, lui laissant un peu d’intimité pour réfléchir sur elle-même. Je claudique vers la tanière des anciens, je vais me faire tirer les moustaches parce que je suis pas venue plus tôt. On les connais, ces ronchons, là.

Mes plantes en gueule, je vais vers la tanière des anciens pour faire leur soin quotidien. Bien évidemment, je me fais gronder parce que je suis en retard, qu’ils ont des rhumatismes, qu’ils ont mal. Oui. Moi aussi. Je râle pas pour autant.

Je prends bien mon temps pour appliquer leur soin et changer leur tanière. Je traine exprès, pour laisser à Luciole des Bois le temps de réfléchir calmement et tranquillement. Puis, je ressors de la tanière et je me dirige vers le tas de gibier pour prendre une proie dessus. Puis, je rentre à ma tanière.

Je dépose le gibier aux pattes de la guerrière que je regarde d’un air compatissant. Par reflexe, je fouille dans la réserve de plante, mais je le savais. Je n’ai rien qui soigne les mauvais souvenirs ou qui permette de les effacer. Malheureusement.

- Je t’ai apporté ce gibier car je me dis que tu dois avoir un peu faim. Sinon, tu en fais ce que tu veux. Est-ce que tu te sens un peu mieux ?