Ma Maman m'a dit que c'était plus de l'inconscience, mais de la bêtise. [PV Papillon Blanc]

Papillon Blanc pêchait paresseusement dans la rivière. Comme elle n'avait été assignée à aucune tâche aujourd'hui, elle avait décidé de s'adonner à un de ses passe-temps favoris, bien que la rivière soit désormais une bien triste vision pour elle. La guerrière revoyait le petit corps immobile de Nuage de Pluie, alors qu'elle était stupéfiée à quelques longueurs de lui, à le croire mort, mort à tout jamais, et elle revoyait tous ces guerriers lui dire que c'était sa faute, sa faute à elle et uniquement à elle, et, et, ...

« PAPILLON BLANC !!!! Tu es là ! Tu vas pouvoir m’aider, hein dis ? »

La blanche ouvrit des yeux ronds devant l'apprenti. Ses muscles se tendaient et se détendaient, elle était à la fois comblée et contrariée de le voir ici. Il n'avait rien à faire à côté de la rivière. Elle refusait qu'il s'en approche, ne serait-ce que de trois longueurs de queues. Elle se tétanise en le voyant arriver près d'elle. Pauvre fou ! Tu vas encore tomber ici et manquer de te noyer, et cette fois-ci, ce sera vraiment ma faute, je ne pourrai rien faire et je vais ...

« Papillon blanc ! On m’a demandé de chasser près de la rivière ce matin, mais j’ai trop peur de m’en approcher. Tu veux bien m’aider, dis, s’il te plaît ?
- Non. »

Elle l’observait d’un air stoïque, et se radoucit instantanément en se rendant compte de la dureté de son ton.

« Enfin … enfin si ! Si, bien sûr, je peux t’aider pour tout ce que tu veux Nuage de Pluie, je t’aiderai toujours, mais c’est normal d’avoir peur de la rivière, après ce qu’il t’est arrivé, tu es sûr que tu veux t’en approcher ? La rivière, c’est dangereux, tu pourrais te faire mal, je ne veux pas que tu fasses mal, reste bien près de moi, tu veux bien ? »

La femelle posa nerveusement sa queue sur son épaule, avec un sourire un peu tordu. Elle ne savait pas s’il avait idée de pourquoi elle lui offrait tant d’affection et de soutien, mais au-delà de son affection originelle pour l’apprenti, elle se sentait coupable. Coupable d’un crime qu’elle n’avait pas commis, certes, mais coupable quand même. Et pour cela, elle devait se racheter, quoiqu’il lui en coûte, pour que cette culpabilité s’ôte enfin de ses épaules.

« Non, je veux pas m’en approcher ! Mais Aigue-Marine et Étoile de Pierre veulent évaluer mes capacités et m’ont envoyé chasser ici, mais j’ai peur de l’approcher la rivière. Qu’est-ce qu’il se passera si je tombe dedans ? »

Papillon Blanc se dandine d'une manière gênée. Bien sûr qu'il a peur ! Qu'il s'en souvienne ou pas, cet événement a dû le traumatiser et doit l'empêcher d'agir selon son bon vouloir. Le cœur de la blanche se serre, comme à chaque fois qu'on fait référence de près ou de loin à l'accident de Nuage de Pluie. La culpabilité la submerge, et elle se noie, elle se noie dans ses pensées trop noires.

« Heureusement que t’es là, sinon, je serais perdu sans toi. »

Nouveau petit pincement au cœur. Nuage de Pluie a l'âme belle et les mots doux, c'est sans doute pour cela que Papillon blanc l'a autant apprécié en tant qu'apprenti. Loin de la prendre pour une femelle stupide, comme quelques-uns de ses compatriotes, il la traite comme son égale et semble même la respecter. Pour cela, et pour tant d'autres raisons, la guerrière l'adore bien plus qu'elle n'aimerait ses propres enfants. Enfin, pour avoir des enfants, encore faut-il avoir un compagnon ...

L'apprenti lui demande si elle veut bien observer sa position pendant qu'il chasse. Elle n'a pas le temps de refuser d'un air gêné, tout en argumentant qu'ils n'ont plus aucun lien d'apprentissage, qu'il part déjà effectivement chasser. Malgré elle, la guerrière observe attentivement ses moindres mouvements, comme au temps où elle passait ses journées à corriger, corriger et corriger encore les petites imperfections de positions de chasse, de pêche ou de nage.

« Ma position était pas bonne, c’est ça ? Sinon, je l’aurais attrapée, non ?
- Ton approche était bonne, tu as bien fait attention à ne pas laisser la souris te sentir approcher, mais ton saut a été trop court, tu n'as pas bien calculé la distance entre elle et toi. »

En s'expliquant, Papillon Blanc s'était approchée de l'apprenti, touchant les parties de son corps pour les positionner correctement, histoire d'illustrer ce qu'elle expliquait.

« Ça s'apprend, tu apprendras la distance exacte au fur et à mesure des chasses. Ta queue aurait pu être un poil plus haute, n'hésite pas à aller lentement sur les gestes mais à faire de grandes enjambées, tu n'as pas dix lunes pour arriver jusqu'à ta proie, non plus. »

Elle mima une le geste avec ses pattes, puis sembla se rendre compte de quelque chose, et son visage sérieux et enthousiaste se transforma en rictus désolé.

« Ah ... mais tu sais- ... Je ne suis plus ton mentor. Ce n'est pas à moi de te dire tout ça. Mais tu gardes ce réflexe de me demander ce que je pense de ce que tu fais ... Tu- ... Tu as vraiment oublié tout ce qu'on a vécu ? »

Papillon Blanc n'arrivait plus à cacher son trouble et sa tristesse, et elle frotta brièvement de sa patte ses yeux qui devenaient humides. Ah ! C'était bien la peine d'avoir fait tous ces efforts si c'était pour fondre en larmes devant lui ! Elle se racla la gorge, se redressa, et tourna le regard ailleurs, pour faire comme si de rien n'était.

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« Je me rappelle de rien du tout, ce que je sais, c’est ce qu’on a bien voulu me dire… Dis ? J’étais comment avant ? J’étais fort ? Je travaillais bien ? Tu étais fière de moi ? J’aimerais bien me souvenir…»

Elle le couva du regard le plus doux qu'elle ait jamais eu. Fort, elle ne savait plus trop, mais il travaillait bien, si bien ! Ils étaient si bien ensemble, mentor et apprenti, elle se sentait si grande à ses côtés, lui qui l'écoutait avec la patience d'un ancien, redoublait d'efforts comme un vétéran au combat, et fière … Combien elle avait été et était encore fière de lui !

« Dis, selon Nuage de Bruine, c’est toi qui m’a poussé dans la rivière pour provoquer mon accident. Il dit que c’est parce que t’en avais marre de moi. Mais c’est faux, hein ? Tu ferais jamais un truc pareil ! T’es trop gentille pour ça, hein ? »

Les yeux bleus de Papillon Blanc s'écarquillèrent. Pourquoi Nuage de Bruine dirait-il une chose pareille ? Avait-il lui-même entendu cela de quelqu'un d'autre ? Toujours est-il que la guerrière, totalement paniquée par ces propos, s'empressa de répondre :

« Non, bien sûr que non ! Comment aurais-je pu te faire ça ? Tu es une des personnes les plus précieuses de mon existence … Je … Je ne sais pas si je suis gentille, mais je n'en aurais jamais marre de toi. »

Elle tremblottait, secouée par l'émotion qu'avait provoquée en elle l'idée que Nuage de Pluie puisse lui en vouloir. La blanche se passa fébrilement une patte derrière l'oreille, dans l'espoir de se redonner contenance.

« Tu étais un très bon apprenti … Tu écoutais bien, tu n'étais pas le plus fort ni le plus agile, mais moi, j'étais fière d'être ton mentor. Tu veux que je te raconte des choses ? Des choses de ton passé ? »

Si tu savais comme j'aimerais tant que nous soyons à nouveau réunis … Elle soupira en l'observant à nouveau. Au moins, elle pouvait encore lui apprendre des choses, même si ce n'était plus comme avant.

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A night like this, Caro Emerald

« Han ! tu ferais ça pour moi ? Je veux bien alors ! Merci Papillon Blanc ! »

Elle partit d'un grand sourire solaire : sa proposition avait fait mouche ! Il s'assit sagement, et attendit que Papillon Blanc début son récit. Habituellement, cette situation où elle était au centre de l'attention l'aurait simplement mise extrêmement mal à l'aise, mais elle se sentait enthousiaste à l'idée d'apprendre à nouveau des choses à Nuage de Pluie. Elle fit donc fi de ses angoisses, et commença ainsi :

« Vous étiez deux têtes de mule ... Toujours à vous entrer en compétition l'un avec l'autre ! Une fois, vous avez décidé de vous battre en vous servant uniquement de votre tête. Vous aviez de drôles d'airs après ça, mais tu avais apparemment gagné, tu avais l'air si fier ! J'ai tellement ri, ce jour-là ! »

Elle rit à nouveau, revoyant son apprenti se pâmer de sa réussite. Les jeux d'enfants étaient parfois idiots, mais il avait l'air tellement satisfait que Papillon Blanc ne s'était clairement pas senti l'âme de le disputer.

« Oh, ça me rappelle aussi ! Vous aviez cette drôle d'habitude, Nuage de Bruine et toi, de compter des points de celui qui « réussissait le mieux son entraînement » ... Je ne savais pas trop ce que vous vouliez dire par mieux réussir un entraînement, mais tu demandais toujours à repasser sur les points que tu avais « perdus » face à Nuage de Bruine, tu étais toujours si déterminé ! Avant ton accident, tu avais deux points d'avance sur ton frère ... »

Elle ne savait plus trop où en étaient les comptes, maintenant, ou même si Nuage de Bruine les tenait toujours. Peut-être pourraient-ils recommencer leur petit jeu, maintenant que Papillon Blanc avait rafraîchi la mémoire de l'apprenti ? Elle se dit qu'elle commençait à noyer l'apprenti sous les informations, mais ne put s'empêcher d'ajouter une dernière anecdote :

« Je ne sais pas si tu te souviens ... Un jour, tu t'étais mis en tête d'aller nager dans les gorges qui bordent la frontière avec le Clan du Vent. On a dû s'y mettre à deux, Nuage de Bruine et moi, pour te faire changer d'avis ! »

Elle baissa un regard mélancolique vers l'apprenti. Mais ça n'a pas suffit, hein ? Elle espérait tant que tous ces fragments de souvenirs fassent remonter à la surface tout ce qu'il avait été avant ...

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