Que regarder d'autre ? [LP] (avec Brise Argentée) - end

« Que comptes-tu faire Crocs Nacrés ? Je t’écoute ou je te regarde. » ronronna la guerrière grise, plus provocatrice que jamais.

La réaction du jeune guerrier fut évidente, et Crocs Nacrés comprit sans problème ce qu'il avait à faire, même si, en s'y prenant, il s'étonna-lui même de son manque de retenue comme de beaucoup d'autres choses. Il avait, quelques secondes durant, cessé de s'inquiéter à propos de ses possibles maladresses, et si ça le changeait beaucoup, ça ne semblait arriver que dans les situations où d'avantage de jugeote n'aurait pas été de trop. Quand il en eut fini, extrêmement peu de temps après, le guerrier tigré, bouleversé et étrangement heureux, n'osait plus dire un mot, comme s'il redoutait qu'en parlant, il briserait davantage qu'un simple silence. Il ne voulait en fait pas se poser de questions sur la suite, peut-être déjà inconsciemment inquiet. Mais il sentait bien que peu à peu, il s'apaisait, devenait tout à fait immobile.

Tranquillement, et avec une douceur qu'il ne se connaissait pas, Crocs Nacrés se remit tout à fait debout avant de s'étendre presque paresseusement sur le ventre, contre la guerrière grise. Un peu après, il cherchait ses yeux, vaguement inquiet. Il aurait donné cher pour savoir ce que Brise Argentée pouvait bien avoir en tête. Pensait-elle à leur mission de surveillance ? A une prochaine fois ? Rien qu'à lui ? Probablement pas. Elle était bien trop... fantastique, à sa manière.

Il la regardait encore, un peu paumé, lorsqu'il sentit réellement à quel point leurs odeurs s'entremêlaient. Tout le Clan du Vent comprendrait assez vite qu'ils rentreraient changés. D'ici, Crocs Nacrés entendait son frère jumeau réagir, surpris, sans doute plutôt enthousiaste. Son grand-père Bond du Lièvre s'inquiéter, à raison comme toujours. Sa mère Tache d'If s'assurer qu'il ne s'inquiète pas trop, en vain. Que penserait Éclat d'Argent ? C'était déjà un problème beaucoup moins évident.

Même dans le silence, les réalités de la vie revenaient, une à une. Le jeune guerrier se demanda si de son côté, Brise Argentée ne faisait pas le même constat.

Brise Argentée se leva, imperturbable, scandaleusement supérieure. Il ne put s'empêcher de soupirer. Leur volupté venait de prendre tout à fait fin, de devenir un simple souvenir. Mais en même temps, il avait l'impression d'avoir toujours soif. Le temps passait, et cette page-là serait difficile à tourner. Il resterait à tout jamais, il le sentait, plus lié à Brise Argentée qu'il ne l'avait jamais été auparavant avec quelqu'un d'autre. Même Nuée d'Alcidés, même son propre frère, il partageait étroitement leurs intimités, et pourtant, c'était très différent.

Le plus bizarre était sans doute qu'il ne connaissait qu'à peine la guerrière grise. Il ne savait même pas si elle avait de la famille. Crocs Nacrés sentait qu'il faudrait remédier à ça rapidement.

« Nous ferions mieux de finir cette « patrouille » tu ne crois pas ? » fit la guerrière, délicieuse dans son ironie. Mais plus sérieuse, peut-être.

Il eut l'espoir naïf qu'elle se posait des questions tout à fait comparables. Mais elle ne s'exprima pas davantage, et tourna même les talons. La surveillance des Hautes Pierres passerait après la chasse. Ce n'était sans doute pas si sérieux, mais...

Après la chasse, il y avait la cérémonie du partage !

C'était mu par l'envie de toiletter la guerrière et de se faire toiletter par elle qu'il se leva et la suivit. Il était d'humeur à faire tout et n'importe quoi, si ça pouvait lui valoir cet honneur. Et Brise Argentée, simplement par sa démarche pleine d'élégance, semblait presque se moquer de sa niaiserie.

Il ne la suivait pas moins aussi fidèlement qu'un toutou suivait son maître lorsque personne ne le distrayait.

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