[LP] Terre d’Écureuil ~ Patte Noire -end

Aujourd’hui c’était chasse ! Je ne partais pas avec Busard Cendré mon mentor, mais avec un autre guerrier, assez expérimenté aussi, Patte Noire. Il avait jugé que se serait enrichissant pour moi d’observer les techniques des autres. Peut-être qu’il m’entrainera à combattre un peu ? Oh que se serait cool ! Mais je ne vais pas lui demander quand même, c’est pas lui qui est chargé de me former. Après… voir les techniques des autres c’est bien aussi même en combats non ? Busard Cendré ne m’en voudra pas. J’étais encore un peu inquiète pour Maman. Les vilains Lunar n’ont pas su la protéger et elle est beaucoup blessée ! Enfin, je devais me concentrer sur mon entrainement sinon elle ne serait pas contente si j’avais rien fais aujourd’hui, et puis de toute manière je viens la voir tous les jours alors ça va.

La queue haute, avec des pas sautillants, je me dirige vers le félin blanc aux pattes noires qui s’appelle… Patte Noire. Je n’ai jamais vu un guerrier aussi bien porter son prénom !

« Salut Patte Noire ! On doit aller en chasse ensemble tu te souviens ? Busard Cendré m’a dit que je devais observer tes techniques aujourd’hui pour en voir le plus possible, même si c’est la même pour tout le monde… Mais il pense que tu peux toujours m’apprendre des trucs ! Il faut aller au Grand Sycomore. »

J’étais si contente de sortir de nouveau dehors que je n’attendai pas la réponse du félin. Je fonçais directement vers l’entrée. Probablement trop enjouée. Est-ce que j’épuisais les autres parfois ? Je me le demande… Mais personne ne me la dit alors ça veut dire que non ? Je m’adressais au matou avant de poser une patte dehors.

« J’aime trop la chasse ! En plus c’est bien pour tout le monde, il faut bien nourrir le clan. »

J’aimais mieux chasser qu’apprendre à me battre. Je n’avais pas peur des combats, enfin pas trop, mais je ne comprenais pas qu’on ait tous à se battre. Nous pourrions vivre tous en paix, mais pour les autres ça semblait trop compliquer avec les histoires de territoires et je ne sais quoi encore… Enfin, je ne connaissais pas beaucoup le guerrier, mais je suis sûre qu’il pouvait m’apprendre un tas de chose !

[LP] Terre d'Écureuil

PV. Nuageuse Pénombre

Roulé en boule dans le fin fond de sa litière, Patte Noire rêvassait paisiblement. De la journée de la veille, il n’en gardait qu’un las souvenir. Pour ne pas changer grand-chose aux habitudes, il avait suivi une patrouille durant la journée, était parti chassé dès qu’il en avait eu l’occasion et avait, mine de rien, été contraint de suivre l’un des entraînements mis en place par Étoile de Suie. Encore une de ses directives stupides qu’elle avait mise en place au moment de passer au pouvoir. Un exercice auquel la meneuse ronde, ne s’adonnait pas forcément. D’ailleurs, ces derniers temps, tous les regards et toutes les attentions, ou presque, semblaient se porter sur le sort de Vent du Désert. Ramenée bien amoché par deux chats des Lunar Pod avec lesquels Étoile de Suie avait fait alliance, elle n’avait pour le moment pas encore quitté la tanière de cette dernière. Tout portait à croire que son cas était notablement plus complexe que ce qu’il en avait l’air. Patte Noire, en toute honnêteté, ne s’y était pas plus intéressé que cela. Prenant sur son côté un poil fouineur, il avait mis de côté son envie de radoter sur tout et sur tout le monde, pour laisser un peu de quoi souffler à la femelle. Si les dires des deux affreux s’avéraient exacts, elle serait tombée toute seule de cette falaise et des rochers auraient, malencontreusement, accompagnés sa chute, se logeant pile sur ses pattes arrières. Il fallait vraiment vouloir y croire pour penser à un tel concours de circonstances. Non ? Et pour gagner un peu plus en splendeur, les deux n’avaient pas non plus hésité à se vanter de l’avoir sauvé d’une mort certaine, se créant du tort en déplaçant les caillasses et se mettant en danger eux-mêmes. Ce qu’il ne fallait pas entendre, avait gardé pour lui le Guerrier lorsqu’il avait eu vent de tout cela. Enfin, il ne s’était pas spécialement attardé sur le cas de la Guerrière, préférant laisser ceux réellement proche d’elle le faire pour elle. Il veillait simplement, de loin, à ce qu’elle ne manque de rien, en bon camarade, en allant notamment chasser pour garnir le tas de gibier.

Morphée relâcha finalement son emprise peu de temps après l’apparition des premiers rayons du soleil. Libérant le matou de l’étreinte qu’était le sommeil, il le laissa entrouvrir les paupières. Formatant rapidement ses paupières à la luminosité ambiante de la tanière, le matou au pelage blanc se laissa quelques secondes de répits avant d’esquisser le moindre geste. Le reste s’enchaîna selon un rituel très précis. D’abord un brin de toilette rapide, retirant le gros des brindilles figées dans son poil et le surplus de poussière, ensuite une brève série d’étirements afin de remettre chaque muscle en état de fonctionnement, ou presque, et enfin, une sortie toute en agilité et en souplesse pour ne pas réveiller ou gêner ses camarades encore endormis. S’il pouvait bien en taquiner certain, notamment ceux dont les origines n’étaient pas idylliques ou bien ceux ayant clairement des lacunes quelque part, il ne se permettait pas pour autant une bassesse de ce niveau-là. Priver un de ses camarades de sommeil nuirait au Clan et il était avant tout loyal à ce dernier. Du moins, c’est l’idée qu’il s’en faisait jusqu’à ce qu’Étoile de Suie prenne le pouvoir et bouleverse un peu tout. Encore, quand elle se contentait de veiller sur ses camarades, leur imposant tout de même une certaine rigueur d’entraînement, il n’y voyait pas grand-chose. Mais depuis qu’elle avait passé ce pacte indélicat avec les autres cinglés de la lune et qu’elle avait, pour ainsi dire, cracher sur le Clan des Étoiles, il n’y comprenait décemment plus rien. Elle non plus, probablement. Quel affront que de renier ceux qui se sont battus pour qu’elle puisse naître, grandir et perdurer dans cette forêt. Enfin, chacun en pensait ce qu’il voulait. Lui, il n’avait pas franchement l’audace de se dresser devant la folie de la meneuse, il avait toujours été ainsi. Il pouvait bien en penser ce qu’il voulait, il lui manquait ce petit truc pour réellement réagir derrière.

Retrouvant rapidement l’extérieur, le matou laissa les premiers rayons du soleil venir donner une teinte dorée à sa fourrure. Aujourd’hui, il avait une mission bien particulière. Un de ses camarades avait décidé de lui confier sa novice. Il n’avait pas franchement compris le pourquoi du comment, mais il n’avait pu refuser de tenter quelque chose. Après tout, il finirait probablement par avoir un Apprenti, lui aussi, un jour. Alors autant essayer avant, histoire de ne pas se rater le jour j. S’il était rarement de bons conseils, c’est qu’il n’avait pas, pour ainsi dire, l’habitude d’en donner franchement. Ce n’est que lorsqu’il vit la petite boule de nerfs débarquer juste sous ses iris ambrés, qu’il réalisé dans quel pétrin est-ce qu’il s’était fourré. En l’espace d’une seconde, elle déblatéra un tas d’informations que le Guerrier fut bien contraint de capter et d’enregistrer. Rien de bien nouveau, un lieu de chasse prédéfini venait simplement de s’ajouter aux souhaits de Busard Cendré, si ce n’est que ça. Ne perdant pas une miette du manège de la jeune, Patte Noire se rendit compte à quel point, il avait perdu cette fougue de jeunesse et à quel point il devait paraître lent et mou aux yeux d’une si jeune génération. Ne se laissant pour autant pas décontenancé par la tâche qui l’attendait, prenant même à bras-le-corps cette dernière, il se releva pour partir à la suite de la novice qui s’engouffrait déjà dans le tunnel de ronce. Un sourire de circonstance sur les babines, le matou blanc fit onduler sa queue comme pour intimer le silence, une seconde au moins, de la minette, histoire d’en placer une. Sa voix se fit rapidement entendre avant de s’éteindre alors qu’il s’élança au pas de course vers le Grand Sycomore :

« Du calme, Petite. Tu vas finir par faire fuir toutes les proies de la forêt en montrant tant d’entrain. On se détend, on essaye de tenir quelques secondes de silence et on y va. La chasse c’est aussi une question de maîtrise de soi. »

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HRP:

Souriant Patte Noire me dit avant de détaler au loin :

« Du calme, Petite. Tu vas finir par faire fuir toutes les proies de la forêt en montrant tant d’entrain. On se détend, on essaye de tenir quelques secondes de silence et on y va. La chasse c’est aussi une question de maîtrise de soi. »

J’opine énergiquement de la tête avant de me lancer à sa suite. Wouaaaa ! Il a l’air trop cool ce guerrier, ça va être une super journée ! J’essayais de courir le plus silencieusement possible, sautant par-dessus des roches, esquivant des ronces et des arbres. J’adorais plus que tout ma forêt, avec le soleil qui perçait à travers les feuilles vertes de la belle saison, ces couleurs si éclatantes, avec le chant des oiseaux, la légère brise qui effleure nos pelages. J’étais si heureuse, mais en même temps, j’avais un certain vide en moi. Je sais qu’Aubépine aurait adoré cette sensation. J’ai décidé de vivre les choses pour elle, en espérant qu’elle ne m’en veuille pas d’avoir cette chance. Peut-être que Moumouche vivait les choses pour son frère lui ? En tout cas, à chaque repas, chaque soir, je pense à mon frère et mes sœurs qui ont disparus. Je les aimerais toujours.

Nous venions d’arriver au Grand Sycomore. Je restais toujours bouche-bé face à cet arbre si majestueux. Busard Cendré ne m’avait pas encore appris à grimper aux arbres. Je me disais bien que c’était quelque chose d’instinctif, mais j’avais trop peur d’essayer sans avoir les conseils d’un guerrier expérimenté. Cependant j’adopte la position du chasseur et approche de Patte Noire en silence. Une fois à ses côtés, je lui chuchote à l’oreille :

« Tu commences ? Ou c’est moi ? Oh et au fait, Busard Cendré ne m’a pas encore appris à grimper aux arbres. »

J’essayais de ne pas trop parler pour ne pas l’agacer. Il avait l’air gentil et je n’avais pas envie qu’il me déteste si je suis trop curieuse. Je fixe le guerrier de mes grands yeux bleus, attendant une réponse.

Le guerrier aux pattes noires me souris. Il ne savait probablement pas quoi me dire, mais il voulait peut-être que je me taise en fait… Soit ! Je ne dirais plus rien. Le matou se mit en position de chasseur et se prépare à chasser une grive. Il me fit signe de ne plus faire un bruit et de ne pas bouger. Statue ! Mes pattes étaient plantées dans le sol, je n’osais presque plus respirer pour ne pas le déranger. Seules mes paupières bougeaient. Je fixais le chat du regard observant le moindre de ses gestes. Il avance en douceur, totalement fléchit. Puis d’un coup il bondit sur l’oiseau et il l’attrape ! Mes yeux s’agrandirent face au coup de maître de Patte Noire. Wouaa ! C’était impressionnant. J’espère que je réussirais à faire la même chose. C’était à mon tour maintenant. Je fais comme Busard Cendré m’avait appris, sentir toutes les odeurs présentes dans les bois, et tendre l’oreille. Un petit mouvement dans les fougères, au pied de l’arbre attira mon attention. Sans hésiter un instant, j’imite la position du guerrier. Mon corps frôlait à peine le sol, je faisais attention à ce que ma queue ne bouge pas, et qu’elle se faufile entre la végétation sans faire un mouvement brusque. En douceur, sans me précipiter, je traquais le petit animal qui était un écureuil. Je suis sûre qu’il va monter dans l’arbre et je n’arriverais jamais à l’avoir… Alors que j’avançais vers lui, mon regard focalisé sur lui, je marchai sans faire attention sur une brindille. *Crac*. Alerté, le rongeur fonce en vitesse se réfugier dans le Grand Sycomore. Décidée à ne pas le laisser s’enfuir, je me lance à sa poursuite. Mais il est bien plus rapide que moi et monte dans le majestueux végétal. Je le voyais grimper tout en haut, il semblait presque me narguer du style "Bam ! tu m’as pas eu stupide chat !". Saleté d’écureuil.

Je reviens vers le guerrier, penaude. Cette fois je ne dis mot. Je savais d’avance que je n’aurais pas réussie. Je suis vraiment trop nulle et je le resterais toujours ! C’est dans mes rêves que je serais la meilleure guerrière, jamais dans la réalité. Je pestais contre moi-même, en silence pour ne pas déranger Patte Noire.

Résignée, j’attendais que le guerrier qui était avec moi chasse à son tour pour qu’il me montre de nouveau ou qu’il m’incendie parce que j’ai fais une bête erreur. Mais rien. Mon regard avait changé d’éclat par cette perte de confiance. Cet écureuil que j’ai raté m’a ramené à la réalité. Ce raté total me vexe ? Oui, c’est vrai, je l’avoue. Je suis même totalement vexée, et déçue de moi-même. Je voulais montrer une bonne image à Patte Noire, pour qu’il voit qu’il ne traine pas un boulet mais finalement, mon échec n’a fait que refléter ce que je suis.

« Hey, tu ne vas pas renoncer aussi vite. Je doute que Busard Cendré t’ait enseigné de lâcher si vite le morceau. Tu sais, on a tous déjà laissé filé une proie, voir bien plus pour certains. On va essayer autre chose, tu veux ? On reviendra à la partie chasse juste après. »

Puis là, d’un coup, un éclat nouveau brille dans mon regard. Fini de se lamenter pour rien, il venait de piquer ma curiosité, plus forte encore que ma déception. J’avais un peu honte d’avoir désespéré si vite. C’est vrai, Busard Cendré m’avait dit que par moment la chasse tout irait bien, d’autres pas du tout. Je me tiens droite, la queue haute, face au guerrier blanc et noir. Comme une enfant, je passais de la déception à la joie de découvrir quelque chose de nouveau, c’était ainsi que je fonctionnais. Curieuse je suis.

« Oh, tu veux me montrer quoi ? Je t’écoute ! »

Je regardais Patte Noir de mes grands yeux bleus. Qui saurait résister à tant d’innocence ?

HRP: