LP | Les épines des roses - end

Un vent de printemps soufflait sur le camp, remuant à intervalles réguliers les feuilles des branches protectrices de la pouponnière. Entre deux siestes, Patte Venteuse était restée là à les regarder, calme pour une fois. En réalité, elle réfléchissait.
Pourquoi maman ne les aimait pas?
Bien sûr, ce n'était là que l'idée qu'elle s'en faisait. Un peu trop exagérée et aggravée. Patte Venteuse était tout simplement déstabilisée par le manque d'attention que leur apportait leur mère. Ainsi, trop peu familière avec les vrais problèmes de la vie, elle s'était mise en tête que si Brise Argentée était comme ça, c'est parce qu'elle les détestait.
Cependant, il devait bien y avoir une raison à cette histoire, et elle était bien décidé à en avoir le fin mot.

Difficile de mener une investigation de qualité quand le sommeil et la faim vous emportaient toutes les trente minutes, en revanche. Quand soudain, Patte Venteuse eut une idée.
À trois, c'était quand même plus rapide que tout seul non?

Réveillant - si elles dormaient - ses deux soeurs ou les bousculant dans tout les cas à coup de pattes pas vraiment délicats pour les faire réagir, elle les invita à la suivre. Rampant par moments, trottinant maladroitement lorsque ses pattes étaient décidées à supporter le temps d'un instant le poids de son petit corps, elle se dirigea vers le fond de la pouponnière.
La fratrie du vent était à peine à deux longueurs de queue des adultes, mais de leur point de vue, elles étaient infiniment loin sans aucun risque de se faire repérer.
Empruntant un air grave - ou du moins, ce qui était supposé l'être - elle posa ses prunelles bleu-gris de chaton dans celles de Petit Foehn.
Après une longue réflexion de deux petites minutes, la réponse s'était imposée à elle comme une illumination. Le soucis, c'était sa soeur. L'amour était une rose, elle en était l'épine.

- Pourquoi t'es pas comme nous? T'es adoptée?

Des pattes me chatouillaient. Je grognai, mécontente d'être ainsi réveillée de mon doux et profond sommeil, et j'entrouvai les yeux. Une silhouette ronde et grisâtre se dessina dans mon champ de vision, avec deux grands ronds l'un ambre l'un bleu. Le nom de ma sœur retentit dans ma tête, et je lâchai un bâillement sonore. Patte Venteuse nous faisait-signe à moi et à Petit Alizé, réveillée elle-aussi avec autant de délicatesse. Je levai les yeux au ciel, en jetant un coup d'œil entendu à mon autre sœur puis me mit en route. Qu'est-ce-que Patte Venteuse nous préparait aujourd'hui?
Une fois au fin fond de la pouponnière bien à l'abri des regards et yeux indiscrets, nous nous mîmes en cercle, tels des chats sectaires qui complotaient en secret. Sauf que le chuchotement n'était pas forcément très bien acquis par notre âge, et notre voix qui venait tout juste de se former était encore bien capricieuse.  Je jetai des coups d'œil autour de nous, vérifiant bien que l'autre fratrie de cinglés était loin de nous.

Soudain, Patte Venteuse plongea son regard dans le mien. Intense, je fus parcourue de frissons. L'heure semblait grave, très grave.

- Pourquoi t'es pas comme nous? T'es adoptée?

Cette remarque allait se révéler être la première d'une longue suite sans fin, qui transpercerait mon cœur de long en large et en travers, tel un objet enserré de ronces acérées, le rendant encore plus sensible et fragile que jamais. Ces quelques mots innocents, les regards insistants, ce mélange finirait très vite par me mettre mal à l'aise, très mal à l'aise, jusqu'à ne plus me sentir à ma place. Jusqu'à en venir à en douter moi-même.
Pour l'heure, je n'avais guère acquis la maturité nécessaire pour réfléchir à tout ça. L'absurdité des paroles de Patte Venteuse était telle à mes yeux, que j'éclatai d'un grand rire. Rire aigüe et insupportable des tout petits chatons.

"Mais qu'est-ce-que tu racontes toi ! Regarde, Patte Lunaire et Patte Tordu ne se ressemblent pas et pourtant ils sont frère et sœur non?"

Je secouai la tête, pliée en deux par cette bêtise.

"Nan. "

Une idée plutôt originale me traversa l'esprit.

"Et si c'était parce que notre maison était vraiment moche que maman part tout le temps?? On pourrait rassembler des boules de mousse et et heuuuuuu"

Je regardai de partout, lançant des coups de tête énergique de tous les côtés pour trouver une inspiration.

Tirée du sommeil par de sympathiques coups de pattes venant de Ventoutou, Petit Alizé se leva, encore un peu endormie. Ses yeux luttaient pour rester ouvert et ses pattes peinaient à rester debout, elle regarda Fofo et suivit ses deux sœurs dans le fond de la pouponnière. Là, elles n'étaient que toutes les trois, seules, comme enveloppées d'une bulle qui les séparait des autres. La petite aux yeux vairons prit un visage étrange et regarda celles aux iris bleus. Cette mine lui faisait penser aux adultes quand ils réfléchissaient.

- Pourquoi t'es pas comme nous? T'es adoptée?

Quelle question étrange! Les trois étaient chatonnes étaient sœurs, cette demande n'avait pas lieu d'être. Mais Ventoutou avait raison, la bleutée ne ressemblaient pas du tout aux deux autres. C'était ça qu'elle voulait dire? Alors qu'Alizé regrette que Petit Foehn se vexe ou le prenne mal, celle-ci éclata de rire. La tigrée ronronna suite à ce son. Le rire était vraiment le meilleur bruit du monde, et parmi eux, certains se démarquaient. Celui de ses sœurs qu'elle adorait. Elle était sure que celui de sa mère était également magnifique, mais elle ne l'avait jamais entendu.

Fofo parla de Patte Lunaire et Patte Tordue pour appuyer sa réponse qui était "non", bien évidemment.

"Et si c'était parce que notre maison était vraiment moche que maman part tout le temps?? On pourrait rassembler des boules de mousse et et heuuuuuu"

Oh rendre maman heureuse! C'était une très bonne idée. Son esprit mobilisée pour cette tâche, elle raconta, d'une petite voix -elle avait un peu peur qu'elle soit stupide- son, ou plutôt ses idées:

"On pourrait faire des nouveaux lits, il parait qu'on est plus heureux si on dort mieux. Ou alors accrocher des boules de mousses pour que ce soit plus zolie! Enfin c'est comme vous voulez..."

Ses soeurs la suivirent tout aussi maladroitement comme de bon petits soldats. Bien. Pour autant, Patte Venteuse en fut bien déstabilisée lorsque, à sa question plus que sérieuse, Petit Foehn se mit à rire aux éclats. La petite aux pattes noires bougea une oreille d'incompréhension.

- Mais qu'est-ce-que tu racontes toi ! Regarde, Patte Lunaire et Patte Tordu ne se ressemblent pas et pourtant ils sont frère et sœur non?

Hochant la tête d'un air pseudo-serieux en guise de réponse, Patte Venteuse se mit à chercher les deux chatons du regard. On racontait que leur mère était folle... Enfin, parfois, elle écoutait les conversations des grands. Et c'est ce qu'elle en avait retenu. Mais en effet, ils ne se ressemblaient pas vraiment. Patte Lunaire ressemblait comme deux gouttes d'eau à sa mère, Coeur Givré. Patte Tordue, lui, ressemblait davantage à... à qui, d'ailleurs? Son père peut-être? Elle ne savait même pas qui c'était. Ce n'était même pas leur mère qui les gardait et les nourrissait, mais Accroche Coeur, une reine assez... spéciale du point de vue de Patte Venteuse.
Mais bref. De toute manière, si Petit Foehn affirmait qu'elle était bien leur soeur, alors elle était leur soeur. Patte Venteuse lui faisait éperdument confiance, et se contenta très bien de cette réponse.

- Nan. Elle marqua une pause avant de reprendre. Et si c'était parce que notre maison était vraiment moche que maman part tout le temps?? On pourrait rassembler des boules de mousse et et heuuuuuu...

Il était vrai que la pouponnière n'était pas ce qu'il y avait de plus beau. En fait, ce n'était pas tellement sa fonction, d'être esthétique.

- On pourrait faire des nouveaux lits, ajouta leur soeur, Petit Alizé. Il parait qu'on est plus heureux si on dort mieux. Ou alors accrocher des boules de mousses pour que ce soit plus zolie! Enfin c'est comme vous voulez..."

Patte Venteuse se mit à parcourir la pouponnière du regard. Une idée, trouver une idée... Ses soeurs ayant toutes les deux la même idée, elle s'en tiendrait à celle-ci: re-décorer la pouponnière. Si avec ça leur mère ne les aimait toujours pas plus, alors il y avait un sérieux problème.

- Regardez les filles! Il y a des jolis cailloux là bas!

Elle se déplaça clopin clopant vers ce qu'elle venait de découvrir: une petite dizaine de cailloux gris clairs enfoncés dans la terre et la poussière. Ni une ni deux, elle tenta de les déloger à petits coups de pattes et de griffes. Ce n'était clairement pas évident, et bien qu'elle ne parvint pas à les récupérer tous, elle en obtint une bonne majorité.

- On peut les mettre dans le nid de maman? Ça brille un peu. Ça fera un nid plus joli.

"Regardez les filles! Il y a des jolis cailloux là bas!"

Patte Venteuse se dirigea vers sa découverte, une dizaine de petites pierres grises, enfoncés dans la terre. A l'aide de ses griffes, elle en dégagea une bonne partie.

- On peut les mettre dans le nid de maman? Ça brille un peu. Ça fera un nid plus joli.

En effet, à présent que les cailloux n'étaient plus ternis par la poussière, on leur découvrait une légère brillance, un éclat causé par la lumière luisant sur leur surface. Ils pourraient faire office de paillettes dans le lit de leur mère, le rendant bien plus beau, comme le disait sa sœur.

"Bonne idée!"

Elle alla rejoindre Patte Venteuse pour amener les petites pierres dans la couchette de Brise Argentée. Cependant, elle ne remarqua pas le petit morceau gris sur son chemin et marcha dessus.

"Aie!"

Une douleur vive traversa son coussinet, qui la fit pousser ce cri de douleur. Par réflexe, des larmes vinrent se coincer dans les coins de ses yeux et elle secoua sa patte, délogeant ainsi un caillou dont la pointe était teintée de rouge ainsi que quelques gouttes de la même couleur. Elle reproduit la même mouvement avec sa tête pour enlever les traces de ses sanglots. Aujourd'hui était destiné à la décoration de la pouponnière, pour rendre leur mère heureuse, elle ne devait en aucun cas le gâcher.

S'efforçant d'ignorer la douleur, elle leva son regard sur son ainée avant de déclarer, dans le but de rassurer ses deux sœurs:

"C'est bon. Tout va bien!"

Petit Alizé s'écria :

"On pourrait faire des nouveaux lits, il parait qu'on est plus heureux si on dort mieux. Ou alors accrocher des boules de mousses pour que ce soit plus zolie! Enfin c'est comme vous voulez..."

J'hochai vivement la tête, excitée à cette perspective. Toutes trois nous nous mettons à zieuter les alentours, à la recherche du plus beau produit à offrir à notre maman adorée. Et ce fut Patte Venteuse qui s'écria la première :

"Regardez les filles! Il y a des jolis cailloux là bas!"

Elle s'élança de sa démarche maladroite, très vite suivie par les deux compères. Patte Venteuse était déjà absorbée par sa tâche, et se démenait pour enlever un à un tous les cailloux de leur lit de terre. J'étais presque arrivée à sa hauteur lorsque le hurlement de Petit Alizé me glaça d'horreur. Je me retournais en vitesse, affolée, et m'élançai vers ma soeur, les yeux exorbités par la peur. Et si elle s'était fait mal? Et si elle s'était tellement blessée qu'elle ne pourrait plus jamais marcher? Et si et si????

"Petit Alizé!!!"

La voilà qui pleurait. A peine avais-je eu le temps de la rejoindre qu'elle secoua la tête et entreprit de nous rassurer :

"C'est bon. Tout va bien!"

Je fis la moue, peu convaincue, et lui attrapai le coussinet pour observer.

"Mais tu saignes!!"

Je me mis à lui lécher vigoureusement le bout de la patte. Pourquoi faisais-je cela, je n'en avais aucune idée, mais j'avais vu un noble guerrier se soigner d'une blessure d'un coup de langue alors... la salive avait surement des propriétés magiques données par le clan des étoiles pour guérir! Triomphante, je regardai le coussinet qui ne saignait plus :

"Et voilààààà"

Et posai un regard empli d'amour sur ma sœur bien aimée.

L’idée de Patte Venteuse sembla plaire à ses soeurs, ce qui la rendit particulièrement fière. Le menton levé, le poitrail gonflé, elle souffla bruyamment de satisfaction lorsque Petit Alizé approuva l’idée.

- Bonne idée! s’exclama-t-elle.



Sa soeur s’en alla la rejoindre, toute enjouée et bien contente. Patte Venteuse s’occupa de dénicher quelques autres cailloux en attendant, mais s’arrêta net lorsqu’un cri lui arracha un sursaut.


- Aie!



C’était Petit Alizé, qui venait de se planter un caillou pointu dans un coussinet. Des larmes commençaient à perler en même temps que quelques ridicules gouttes de sang de sa patte.

Que faire? Patte Venteuse n’avait jamais fait face à ça! Paniquée, elle fit passer son regard de Petit Fohen à Petit Alizé, encore et encore, cherchant une direction à prendre. Littéralement. Elle était debout, se dandinant de droite à gauche, totalement confuse et incapable de chercher une solution.



- Euh…. euh…….. hmmm….



Par chance, elle n’était pas seule. La fratrie du vent était composée de trois petites, et chacune avait son importance et son rôle à jouer.

Alors que la petite grise tigré tenta de calmer ses larmes et de rassurer ses soeurs, Petit Foehn se décida à prendre les choses en main. Après avoir constaté l’étendue des dégâts, elle se mit à lécher frénétiquement la patte de Petit Alizé.

Confuse, Patte Venteuse leva un sourcil avant de s’approcher d’elles. Est-ce que ça allait vraiment marcher?



- Et voilààààà



Patte Venteuse se pencha vers la patte de Petit Alizé. Et effectivement, ça ne saignait plus. Petit Foehn avait réussi à agir sans difficulté là où elle-même avait été perdue…
Empruntant une mine concernée, emprunte de jalousie envers sa soeur, elle se décevait elle-même. Elle aurait du être capable de faire quelque chose… ce n’était pas juste



- Woaaaaw Petit Foehn! s’écria-t-elle malgré tout. Tu serais une guérisseuse trop forte! Tu devrais demander à Nuage Silencieux si tu peux être son apprentie!


En effet, il fallait un certain « talent » pour être capable de stopper aussi vite les larmes de leur soeur, Petit Alizé.

En un instant, Petit Foehn se trouva près de sa sœur -après avoir crié son nom- , toujours les larmoyants et tentant d'empêcher les pleurs de franchir la barrière de ses paupières. Je vais bien. Je vais bien. Je vais bien.

"Mais tu saignes!!"

Alors le truc rouge qui sortait de sa patte s'appelait du sang? Elle avait vraiment ça dans tout le corps? C'était... étrange comme pensée. Pendant ce temps, sa benjamine avait attrapé son coussinet avant de le lécher vigoureusement. La cadette la regarda faire, un peu perdue, ne sachant pas pourquoi Fofo lui faisait la toilette à ce moment là. Mais il se révéla que le but n'était pas de la rendre propre, mais bel et bien de la soigner.

"Et voilààààà"

Les yeux de la grise rayée s'ouvrirent en grand, en remarquant qu'il n'y avait plus de rouge, mais surtout, qu'il ne coulait plus. Toute heureuse et emplie de gratitude envers sa sœur pour lui permettre de faire plaisir à sa mère sans mettre du sang partout, elle s'écria:

"Ooooh t'es géniale, Fofo! Merci!"

Elle laissa échapper un ronron, et frotta sa tête contre le cou de Petit Foehn, déjà un peu plus grande qu'elle.

"Woaaaaw Petit Foehn! Tu serais une guérisseuse trop forte! Tu devrais demander à Nuage Silencieux si tu peux être son apprentie!"


Acquiesçant vivement les mots de l’aînée de la tête, elle proposa, pour compléter:

"Ouais, on pourrait y aller après, si tu veux!"

Elle alla vers les petites pierres dénichées par Patte Venteuse, en vérifiant bien de ne pas marcher sur l'une d'elle, ne voulant reproduire la même stupide erreur. Voulant remettre en marche ce qu'elle avait interrompu, elle les pointa du museau et dit:

"Mais d'abord, faut décorer avec les supers beaux cailloux qu'à trouver Ventoutou!"

HRP:

J'irradiai de bonheur. J'avais réussiiii! Le liquide tout poisseux tout rouge avait disparu. Il ne restait qu'un minuscule point carmin, si petit qu'il fallait se concentrer un bon moment avant de le voir. Un grand sourire étira mes lèvres, et je ronronnai à mon tour lorsque Petit Alizé me remercia d'un calin.

"Woaaaaw Petit Foehn! Tu serais une guérisseuse trop forte! Tu devrais demander à Nuage Silencieux si tu peux être son apprentie!"

Je rigolai à l'idée. Guérisseuse moi? Même pas en rêve!

"Ouais, on pourrait y aller après, si tu veux!"

Je secouai la tête vivement, amusée :

"Mais jveux défendre le camp moi pas être guérisseuse!!"

Petit Alizé ajouta :

"Mais d'abord, faut décorer avec les supers beaux cailloux qu'à trouver Ventoutou!"

Et c'est parti! Les trois fripouilles se remirent bien vite au travail. Je mettais tout mon coeur à la tâche, tout mon amour. Je voulais rendre maman fière de nous !! Jamais plus elle ne repartira après ça, ça non!

"jvais chercher aussi des boules de mousse pendant que vous mettez les beaux cailloux!"

Aussitôt dit aussitôt fait! Et je me mis à courir de partout à la recherche des précieuses denrées, qui ajouteront un peu de magie et d'amour dans notre havre de paix.

Spoiler:

Si Petit Alizé approuva l'idée de Patte Venteuse quant à une possible vocation de guérisseuse chez Petit Foehn, la principale concernée en rigola bien. Cela frustra un peu Patte Venteuse, mais qui mis bien vite de côté cet affreux sentiment pour en rire avec elle.
Bien sûr, en tant qu'ainée de quelques minutes à peine, mais ainée quand même, elle devait être la plus forte et protéger ses soeurs. Il serait donc mal venu qu'elle soit surpassée par Petit Foehn et à vrai dire, ça ne lui plairait pas trop. Elle en était un peu jalouse, mais considérer sa propre soeur comme une rivale était stupide. Il fallait qu'elle soit contente pour sa soeur, même si c'était quand même un peu dur, il fallait l'avouer.
L'envoyer sur le chemin du guérisseur aurait été une aubaine, supprimant définitivement toute potentielle jalousie lorsque Patte Venteuse serait guerrière, les deux voies étaient toutes deux très différentes. Mais si elles devenaient toutes les trois guerrières, alors elles pourraient combattre ensemble. Et à trois, elles seraient imbattables. Elle le savait et en était certaine.
Ce qu'elle avait hâte de devenir apprentie et de porter le nom de Nuage avec Petit Foehn et Petit Alizé!

De toute façon, l'heure n'était pas aux vocations, mais bien à la préparation du plus beau nid du monde pour leur mère, ce que se hâta vite de rappeler Petit Alizé.

- Mais d'abord, faut décorer avec les supers beaux cailloux qu'à trouver Ventoutou!

Patte Venteuse acquiesça d'un hochement de tête. Il fallait vite se dépêcher avant que Brise Argentée ne rentre! Enfin, si elle rentrait un jour... il fallait dire qu'elle était bien peu souvent avec ses filles. Au final, inutile de se brusquer... Mais plus vite ce serait fait, plus vite elles pourraient retourner jouer!

- J'vais chercher aussi des boules de mousse pendant que vous mettez les beaux cailloux!

À peine eut-elle fini de parler que Petit Foehn se précipita à la recherche de sa mousse. Patte Venteuse rassembla les cailloux à l'aide d'une de ses pattes afin que Petit Alizé ne se blesse pas à nouveau. S'ils étaient tous rassemblés, ils étaient plus visibles. Si avec ça elle se faisait mal...

- Alors, tu me dis comment on les pose et à quel endroit, et moi je les place, d'accord? proposa-t-elle à Petit Alizé.

Il ne faisait aucun doute que la plus frêle de toutes avaient une fibre artistique plus développée que celle de sa soeur - ce n'était pas tellement difficile à vrai dire - donc mieux valait lui laisser la tâche de la disposition. Pour ce qui était du placement, Patte Venteuse s'en chargerait. Elle n'était pas encore très adroite, mais se faire mal ne lui faisait pas bien peur et elle épargnait ce risque à Petit Alizé.
Tout le monde était gagnant, non?
Après, il ne manquerait plus que les boules de mousse de Petit Foehn. Et pourquoi pas des fleurs?