the night we met / ft. écaille de maquereau - abandon

◄MAC X VENT►

and this look
your look
changed everything

Les liens de son passé le gardait en place dans l'illusion notoire qu'il ne pourrait s'en sortir qu'une fois débarrassé d'eux. Caprice de son passé, sauvagerie d'un futur qui n'existerait même pas, ils l'entouraient avec une grâce indélébile, serrant ses pattes glacées par le présent. Il ne pouvait plus se mouvoir. Les remords l'empêchaient de faire quelconque enjambé, sentant le gel tétanisant du fluide qui n'attendait point pour enfoncer ses crocs dans son corps embrouillé. Depuis combien de temps se trouvait-il là, penché devant le miroir qui lui renvoyait sa propre histoire, laissant les larmes de sel courir sur ses joues enflammées ? Brûlant sa surface laiteuse sans aucune imperfection, pourléchant la clarté de ce masque de porcelaine, elles ne trouvaient aucun accroc pour ravager la perfection, chutant comme les larmes qu'elles étaient dans le brunâtre de la flaque. Les ondulations de la souffrance se répercutaient comme un souffle de vent sur l'étendue cristalline, l'hypnotisant malgré la douleur qui s'élançait dans son corps mutilé de songes. Comme des danseurs enroulés de satin, ils bondissaient tels les fauves de ses songes enfantins, rugissant au rythme du plic-ploc incessant. Tournoyant, valsant avec le gré des idées, les formes spectrales lui montraient avec une grâce touchante tout ce qu'il manquerait en se laissant emporter par les idées défendues, essayait de lui enlever cette pomme d'Adam si chère à son intérieur.

Nuage du Vent courrait. Les bourrasques froides de la noirceur fouettaient son visage crispé alors qu'il accélérait sa fuite, brûlant son corps d'une envie urgente de détaler. Ses muscles, à force des longues foulées qu'il dressait, incendiaient l'intérieur de son esprit et de sa carcasse, mais la douleur l'encombrant ne l'importunait point trop. Celle de sa tête était milles fois plus fortes, l'envie d'hurler le prenant à la gorge et ne voulant absolument pas le quitter. Sa sœur. Puissant Guépard. Tout ce qu'il ne pouvait dire à personne, tout ce qui était enfouis dans son corps trop petit de seulement dix lunes, son petit corps trop fragile.

Alors il courrait. Il courrait parce qu'il le pouvait, et parce qu'il le devait ; parce que sinon, il ne savait pas quoi faire. Sa carcasse en feu, son esprit de glace, son âme en vent, sa bouche et le goût atroce de terre, le goût amer et mortel qui régnait. Une boule qui prenait de l'ampleur au milieu de son corps, ravageant celui-ci en envoyant ses flammes de son trouble, indétermination oscillant dans le noir. Peur. Regret. Questionnement. Solitude.

Comme il avait couru sans se poser de question, il s'arrêta sans le faire. Dérapant dans un nuage de poussière, sa poitrine ardente s'abaissait et s'élevait en rythme avec sa tête, ses griffes plantées dans la seule chose qui l'empêchait de s'envoler. Pattes écartées, crâne vers le sol, souffle court, seul au milieu des chênes qui se moquaient en silence, il vivait. Il respirait, son cœur battait, il vivait, mais, mais

mais il avait mal
et que pouvaient
les étoiles
contre son mal ?

Il continua donc de s'avancer dans les méandres de son passé, libéré du poids des regrets qui semblaient avoir compris que ce n'était que pour se perdre encore plus qu'il continuait devant. Les acrobates baissèrent la tête en le voyant s'engouffrer dans le bassin de ses songes, ses ébauches positives barbouillant ses pensées comme une faible couche protectrice, aussi fragile qu'une aile de papillon. Nu, proscrit à la lune comme il était venu, il se retrouvait en proie aux émotions intenses, offrant son corps dessiné, à la grâce de fins crayons, au miroir du ciel — ciel qui ne voulait plus rire, ciel, ciel, et ce fut avec avec un lent trémoussement que les bras de la colère vinrent lentement reprendre leurs places sur les pensées de tristesses du petit novice, serrant celles-ci jusqu'à faire apparaître de fines marbrures sur son esprit autrefois, hélas, si délicat. Sa tête, enflammée par cette émotion, puis par le froid inhospitalier des souvenirs, offrit un dernier filet d'air entre les lunes de chaires, puis laissèrent passer un long gémissement plaintif. La lune caressa une dernière fois de ses rayons les pensées dénudées de haine du petit prince des sables, puis se désola de ne plus jamais avoir cette oeuvre d'art devant ses yeux, perdue. Tu es sûre de vouloir renoncer, lui demanda-t-elle ? Mais il était certain, et trop furieux dans ces instants brûlants, pour bien réfléchir à la question. De toute façon, même avec l'aide de cet astre opalin qui userait de sa force d'attraction pour le pousser vers elle, il était trop tard ; les lianes du temps s'étaient encastrés partout sur son corps, et l'opale blanche ne le voyait plus sous toutes ces couches de pénitence.

une vive douleur qui hurlait dans tout son corps

Et une horrible odeur, osant s'incruster dans ses narines, emplissant, jouant de son esprit comme des pantins d'émotions futiles —, de ces émotions, s'engouffrant sans demander permission dans son museau ! Des picotements brutaux sur ses hanches, le chaos qui régnait dans sa tête anormalement dirigé par la colère, un empêtrement de poil qui semblait s'étendre sur lui comme un long drap de la mort ; était-ce celle-ci qui venait la chercher, ayant pitié de son air atroce, priant aux étoiles comme si elles pouvaient résoudre ces crimes ? Cette idée, curieusement, le rassura presque, et il se sentit, pendant une fraction de seconde, prêt à venir gambader à leurs côtés.

- Par le Clan des Etoiles. Je suis navré de vous avoir incommodé si longtemps ! Je n’ai rien commis de fâcheux, au moins ?

Tout, dans son crâne, se mélangeait et brulait sa vue d'une sauvage envie qui ne l'avait jamais incommodé avant. Pacifiste, préférant les mots aux griffes et aux crocs, ce n'était plus cette bonne vieille habitude qui l'hantait, mais une envie pressante de rentrer avec violence ses extrémités pointus dans cet ignoble chat devant lui. Le déchiqueter, comme s'il était la cause de sa douleur, feuler avec une rage si immense que cet horrible chat gris et noir serait obligé de détaler devant sa fureur. Le contrôle était parti.

et il bondit

Avec une puissance bien calculée, comme lui avait montré Crocs Nacrés. Frappant son torse avec vitesse, de front pour le déstabiliser, il planta d'un air rageux ses crocs dans le pelage encombrant de celui qui empestait l'ennemi, rabattant des coups de pattes dans le même tempo. Un son bourdonnait dans ses oreilles. Il bourdonnait si fort, et sa mâchoire se serrait tant la douleur de ses pensées le faisait souffrir.. Tant il était imprégné de ce venin qu'il n'arrivait plus à déloger de son cœur, de ses songes.

et un goût sur sa gueule

Le prince des sables sentit une chaude substance s'écouler sur sa langue, et le bourdonnement s'arrêta, aussi vite qu'il était venu, aussi vite qu'il avait attaqué celui devant lui. Un silence. Balbutiant, hoquetant, il se recula, la rage en lui s'étant évaporé comme un sifflement du vent, comme une bourrasque qui passait et revenait. Et alors qu'il se reculait, trébuchant sur ce qui se trouvait derrière lui, il ne réussit qu'à murmurer quelques mots incompréhensibles et marmonnés.

- J-je.. Désolé.. Vraiment..

il ne se reconnaissait plus
n'était plus un doux courant
de vent, d'amour, d'amitié
mais une bourrasque, forte
brûlante, déchirante, hurlante,
et il avait peur
tellement
peur