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Nuage d'Émeraude avait été surprise d'être convoquée avec tous ses demi-frères et demi-sœurs, frères et sœurs et même neveux et nièces - autrement dit, une bonne partie du Clan - devant l'antre du chef, celle qu'avait autrefois habité son père, celle où elle avait grandi, celle qu'elle évitait soigneusement depuis qu'Étoile de Pierre avait rejoint le Clan des Étoiles, et ce même si c'était sa marraine bien aimée qui l'occupait désormais.
Avec difficulté - elle n'avait vraiment pas envie de pénétrer à nouveau dans cet endroit chargé de souvenirs - elle se présenta face au rideau de lichen et attendit avec nervosité en compagnie des autres chats réunis. Ce fut d'abord à Écho des Ruisseaux et à Jolie Abeille d'être appelée à l'intérieur ; ils en ressortirent, puis entrèrent Nuage de Méduse et Fierté du Blaireau, accompagnés des petits de la première - dont le père était Nuage de Jaspe. Nuage d'Émeraude encouragea son meilleur ami avec un signe des oreilles, préoccupée en le voyant s'engouffrer dans la pénombre. Il en ressortit bientôt, mais elle n'eut pas le temps de lui demander comment il allait ; les frères et sœurs du bicolore entrèrent à leur tour et ce fut bientôt son tour à elle, ainsi qu'à Nuage d'Opale et Nuage de Quartz.

Nuage d'Émeraude inspira profondément et ferma les yeux pour se donner du courage. Elle traversa le rideau de verdure et la sentit lui caresser les flancs. Elle cligna des yeux pour s'habituer à l'obscurité et distingua bientôt Eau Turquoise au centre de la tanière. Elle avait un aspect peu rassurant : il était évident que la maladie la rongeait et qu'elle n'avait pas réuni ses enfants pour leur faire causette sans conséquence.
Avec un pincement au cœur et en déglutissant, Nuage d'Émeraude s'avança vers sa mère de lait. Elle ressentit soudainement une vague culpabilité : celle de ne pas être venue la voir plus souvent, de ne pas avoir pris soin d'elle, de ne pas lui avoir rendu le quart de ce que la reine lui avait offert. En effet, depuis qu'elle était Nuage, elle n'était pas souvent retournée dans la pouponnière, et encore moins depuis la naissance de la portée qu'elle avait eue avec Étoile de Pierre. Elle avait eu du mal à accepter ces petits ; elle avait vécu leur existence comme une trahison à sa mère, et les ignoraient totalement, préférant nier leur existence que de les voir être heureux alors qu'ils étaient le fruit d'un amour éphémère qui n'aurait jamais existé si Aigue-Marine n'était pas morte. Et si, et si, et si... Mais à présent, cette rancune semblait dérisoire à la rouquine, contrairement à sa culpabilité et à la tendresse inconditionnelle qu'elle avait pour Eau Turquoise.

Mes petites pierres précieuses... commença-t-elle avec la voix douce qu'ils lui connaissaient tous ; quoiqu'un peu éraillée. Soyez fiers de ce que vous êtes devenus, et de ce que vous deviendrez. Aussi fiers que je le suis, aussi fiers que le sont votre mère et votre père, là-haut.. Même si Nuage d'Émeraude n'avait pas encore les outils pour réaliser qui elle était et en être fière, elle ne resta pas insensible à la mention que fit sa mère adoptive à son père et à sa vraie mère. Tous deux couraient désormais avec leurs ancêtres et Nuage d'Émeraude les regrettait énormément. Le simple fait que leur titre soit mentionné suffit à faire tressaillir la rouquine, qui sentit ses yeux se baigner de larmes ; quelques-unes ne tardèrent pas à déborder et à humidifier le poil de ses joues.
Elle n'avait jamais pleuré la mort de sa mère ; c'était comme ça qu'elle avait toujours vécu. Quand à celle de son père, elle avait eu du mal à l'exprimer, à la pleurer. Mais ce soir, alors que le seul parent hormis Écaille d'Or qui lui restait s'en allait, la perte de ses deux géniteurs lui écrasa les épaules, et la peine de voir Eau Turquoise bientôt disparaître l'enfonça davantage. Vivez sans craintes… vous trouverez chacun la voie qui vous convient, laissez le temps faire... protégez vous les uns les autres..
Nuage d'Émeraude acquiesça, mais ne dit mot. Les dernières recommandations d'Eau Turquoise ne l'aidaient pas à surpasser sa peine. Aucun mot ne pouvait exprimer le gouffre qui était sur le point de s'agrandir. La rouquine ignorait comment y faire face, comment prendre son élan et le franchir sans s'y précipiter. Elle ressortir de l'antre la tête basse, la queue lasse. Les yeux encore embrumés, elle ne chercha même pas le réconfort de Fierté du Blaireau. Elle s'assit, penaude, face à la tanière, attendant qu'Eau Turquoise les rappelle tous pour un dernier adieu.
Les derniers-nés de la reine entrèrent à leur tour et, après quelques minutes, le signal fut donné. Ils entrèrent tous à la queue leu leu, têtes et oreilles basses, grande file se dirigeant vers une fin annoncée et inévitable. Lorsqu'ils furent tous entrés, l'antre du chef n'était plus qu'un amas de corps tristes et las, dont seule la chaleur de la vie réchauffait la froideur de la mort qui approchait. Tous se pressèrent contre Eau Turquoise ; les ronrons étaient tristes, les lèches étaient amères, les pleurs inconsolables. Blottie contre la reine, ce contact chaud lui rappelant ses premières semaines de vie, lorsqu'elle pressait ce flanc pour en sortir du lait, sentant le contact tiède mais triste de Fierté du Blaireau près d'elle, Nuage d'Émeraude ferma les yeux et profita une dernière fois de la présence de sa mère dans ce monde.

Édelweiss Sauvage circulait tel un fantôme dans le campement, une boule d'amertume dans la gorge, quand elle fut appelée par un guerrier à ce rendre dans la tanière de leur chef. Ce lieu était particulier, pour elle. Il représentait les lunes de bonheur et d'insouciance, quand elle dormait avec sa fratrie au complet, tous serrés contre Eau Turquoise, avec les cailloux et Étoile de Pierre. Il s'agissait du souvenir le plus ancien qu'elle gardait de sa vie, plein de tendresse et d'amour. Elle se souvenait aussi de son agacement face à cette foison de chatons qui l'empêchait de recevoir l'amour dont elle avait besoin de la part d'Eau Turquoise.

À bien y réfléchir, elle avait toujours été entourée. Pourtant, sa vie avait toujours eut quelque chose de tragique aussi ; elle subissait les disparitions, les morts et les traumatismes de ses proches, restant plus ou moins debout. Elle était un rocher perdu au milieu de l'océan déchaîné.

Tout le monde était présent devant cette tanière qui signifiait tant. Ses aînés, sa fratrie, ses cadets, les cailloux. Même les enfants de Méduse.

Les premiers à pénétrer dans l'antre furent Jolie Abeille, la meilleure grande sœur possible, et Écho des Ruisseaux, leur génial guérisseur. Édelweiss ferma les yeux, fort, très fort.

Les seconds appelés furent Nuage de Méduse et Fierté du Blaireau. Pourquoi eux-deux ? La tacheté ne comprenait pas, mais son esprit embrumé ne chercha pas tellement de réponse. Elle ouvrit les yeux et se leva, en même temps que ses deux sœurs restantes ; Belle-de-Nuit et Nuage de Hyène.

•••

Eau Turquoise était maigre à en faire peur. À ses côtés, Hyène se crispa, sans doute autant qu'elle-même. La faible chatte qu'elle avait devant les yeux ne collait pas avec l'image qu'elle avait de sa mère. Elle s'avança jusqu'à elle, presque en ce forçant.

- Vous êtes en colère… en colère parce que je n’ai pas été assez présente pour vous, ces dernières lunes… pardonnez moi... Elle avait les larmes aux yeux et la voie tremblante. Édelweiss aurait aimé lui dire qu'elle n'était pas en colère, mais sa bouche refusait de s'ouvrir. Vous ne vous en rendiez peut-être pas compte, mais pendant tout ce temps là, je vous ai toujours suivie et encouragées.

Ça ne lui suffisait pas. Nuage d'Édelweiss le savait, que sa mère les aimaient et les soutenaient à distance. Mais elle, elle avait besoin de câlins et de mots doux. Que pour une fois, on écoute ses malheurs plutôt que l'inverse. Mais elle ne parvenait pas à parler, pas à bouger. Alors, elle resta silencieuse tout du long, écoutant attentivement les paroles et conseils de sa mère. Puis, alors que ses sœurs retournaient devant l'antre, elle vit l'occasion, juste une dernière fois, de confier ses lourds sentiments à sa mère.

- J'ai l'impression que tout mon monde se fait la malle, maman. Même si je fais tout pour pas qu'il parte trop loin... Il se barre quand même.

•••

Les cailloux passèrent ensuite, puis enfin ses cadets. Édelweiss gardait la tête résolument baissé, signe qu'elle ne voulait parler à personne. De toute façon, un silence de mort régnait dans toute l'enceinte du campement. Et la guerrière songea à Pelage de Crème, sans doute en pleine chasse, sans trop savoir pourquoi lui précisément.

Ils furent appelés tous en même temps. Une dernière fois, un ultime câlin de famille nombreuse. C'était la figure maternelle la plus importante du clan qui s'eteignait petit à petit. Édelweiss Sauvage s'allongea à proximité de la tête de sa mère, donnant de doux coups langues à celle-ci, un jeune entre les pattes.

Ce fut le câlin le plus doux de sa vie. Un câlin doux-amère.

La nuit ne m'avait apporté aucun repos. Cela faisait déjà plusieurs jours que je ne dormais plus. Je ne pouvais pas. La fatigue courbait mes épaules, sans que je n'y fasse rien. Le comble pour un Guérisseur de ne pas prendre le repos qu'il devrait. Surtout que je n'avais pas encore d'Apprenti, ce n'était pas responsable, pas du tout, mais je ne pouvais simplement pas. je passais mes journées entre les cueillettes et la demeure de ma mère. Je me sentais si impuissant, comme revenu à mes débuts, lors de la naissance des cailloux. Et puis le moment arriva. Je devais être celui le mieux préparé, et pourtant la boule d'angoisse ne cessait de grandir. Nous étions tous réunis face à l'Antre d'Etoile d'Or qui avait prêté une dernière fois sa demeure à Eau Turquoise. Nous étions nombreux. Il y avait bien sûr Jolie Abeille, ma tendre jumelle. L'immense portée que je n'avais su prédire, les cailloux, enfants de notre défunt chef qu'elle avait pris sous son aile, sa dernière portée avec ce dernier ainsi que Nuage Gris. J'avais mal au cœur, l'attente était dure et insupportable. Est-ce que les autres savaient? Est-ce qu'ils avaient devinés? Je posai les yeux sur les plus jeunes, la portée de Nuage de Méduse et Nuage de Jaspe en me demandant si on leur avait expliqué. Ce serait dure, si dure... Puis ça commença. Jolie Abeille entra, moi à sa suite. Mes yeux s'habituèrent doucement à la pénombre de l'antre et mon expression devint plus triste. Pourtant Eau Turquoise avait l'air sereine, comme si cela ne lui faisait rien, voire qu'elle le voulait. Enfin je ne pense pas qu'elle ait abandonné, même si le Clan était dur avec elle à mon plus grand agacement. Non, c'était juste le moment. Je m'avançai doucement vers la Reine, toujours aussi belle que dans mes souvenirs. Elle avait toujours été là, toujours présente pour nous, malgré les nombreux petits qu'elle avait eu en charge. Elle nous avait toujours soutenus dans nos choix. La perdre aujourd'hui était un coup bien dur de la vie.

« Mes enfants... Je vais rejoindre les Étoiles aujourd’hui. Écho des Ruisseaux, je sais que tu l’as senti, toi aussi... »

Mon cœur se serra à sa voix éraillée. Je ne pouvais sortir un mot et me contenta d'hocher la tête, plein de regrets. En effet je l'avais deviné, mes remèdes, peu importe la sorte, peu importe le nombre n'étaient pas suffisant pour guérir le mal dont elle souffrait et d'ailleurs n'arrivaient même plus à calmer la douleur. Que ce soit maintenant ou dans plusieurs jours rien n'aurait pu éviter sa mort. Et égoïstement je préférai que ce soit tôt, qu'elle ne souffre pas en vain. Au cas où j'avais emmené de la valériane, mais elle ne semblait pas en avoir besoin. Un sourire s'afficha alors sur la reine bleue et blanche m'amenant les larmes aux yeux.

« Jolie Abeille... Oh comme tu portes bien ton nom, ma belle enfant… Je suis admirative de ce que tu es devenue : un modèle de douceur et de tolérance pour tous. Garde-la, cette âme pure, toujours. Garde-la même si on veut te l’enlever pour faire de toi une guerrière au cœur de pierre. C’est une chance qui n’est pas donnée à tous... »

J'étais bien d'accord avec elle, ma sœur était devenue une Guerrière accomplie, pas que j'en ai douté un seul instant. L'une des pattes de Maman vint toucher celle de Jolie Abeille, l'autre se posant sur la mienne. Je me forçai un peu à ronronner. J'appréciai le contact, mais la suite rendait difficile la joie en cet instant.

« Mon fils… je suis si fière : tu as su réaliser tes rêves et tu es devenu, maintenant, un grand guérisseur. Cœur de Neige doit être si fière, là-haut. Ton père aussi, quoi qu'il en dise mon fils. Sois fier toi aussi, de ce que tu es devenu, du chemin que tu as parcouru. Ce n’était pas facile, mais tu l’as fait. Bravo... »

Je m'efforçai de ronronner de plus belle en chuchotant un merci. Bien que je doutai sincèrement de la fierté d'Etoile du Corbeau à mon égard, mais je ne détrompai pas la Reine. Avant de partir, je plongeai encore une fois mes yeux dans ceux de ma mère, ils étaient si semblables aux miens. On nous avait souvent dit que je ressemblai bien plus à Eau Turquoise et j'en étais fier. Il est vrai que le motif de nos pelages étaient semblables j'étais juste plus foncé qu'elle. Comme si la noirceur de Père avait déteint dans mon pelage de la pureté de la Reine. J'inscrivais chacun de ses traits, de son odeur dans mon esprit avant de m'approcher d'elle pour un dernier je t'aime. Puis je sortis, pour laisser les suivants entrer.

Ce fut d'abord Blaireau et Méduse avec ses chatons, puis Edelweiss, Hyène et Nuit, ensuite les cailloux et enfin sa dernière portée si critiquée, celle qu'elle avait eu avec feu Etoile de Pierre. De mon côté, je ne reprocherai jamais cette relation qu'elle avait eu. Etoile du Corbeau l'avait détruite, les morts successives l'avaient épuisée. Alors si Etoile de Pierre avait pu lui apporter ne serait-ce qu'une infime part de bonheur et de joie, alors je ne pouvais que l'en remercier. Puis quand les derniers eurent finis, nous pûmes tous entrer. L'Antre semblait si petit avec nous tous à l'intérieur. Et pourtant nos cœurs se vidaient en voyant la Reine dépérir. Tous se blottirent contre la Guerrière, tellement qu'il n'y avait que peu de place. Je préférai leur laisser le peu d'espace qu'il y avait, me contentant de poser brièvement mon museau sur son front lui soufflant un dernier ronronnement, une dernière léchouille. Je retourna ensuite m'asseoir à côté de Fierté du Blaireau. Je ne savais pas pourquoi il n'avait pas rejoint les autres mais si c'était sa façon de faire face, je n'avais rien à dire. Dans mon cas, c'était différent. J'étais Guérisseur. Un vent de culpabilité soufflait sur mon cœur. Moi, je pourrais la revoir, moi j'aurais de nouveau l'occasion de la voir. Lointaine et différente, certes, mais tout de même. J'étais différent car entre nos deux mondes. Pour moi ce n'était pas un adieu, mais juste un au revoir, sans prendre en compte que nous tous ici présents la rejoindraient tôt ou tard, le plus tard je l'espère. Moi il se pouvait que je la revois à la prochaine demi-lune. Je passai mon regard sur chacun des enfants biologiques ou non d'Eau Turquoise. Désormais elle ne serait plus là physiquement pour tous nous soutenir. Mon regard se posa longuement sur ma jumelle. Nous étions les aînés, ceux de tous ces chats présents. Il sera de notre devoir de les soutenir et de les protéger tous. Puis le moment tant redouté s'approcha. Je pouvais presque sentir le souffle des étoiles s'intensifier et je frissonnai. Ils étaient là. Là pour l'accueillir, là pour la chercher et la guider.

Elle avait mal. Si mal. Ils étaient tous là. Devant la tanière d'Etoile d'Or, leur nouvelle cheffe, si jeune et déjà au pouvoir. Elle ne doutait pas de ces capacités, loin de là. Mais aujourd'hui, ce n'était pas la question. Aujourd'hui une partie de son monde s'effondrait. Echo des Ruisseaux, nouvellement nommé, son frère dont elle était si fière, et toute sa fratrie, si nombreuse, dont elle portait chaque membre dans son cœur. Et aujourd'hui, la figure maternelle, celle sur qui tout reposait, s'effondrait. Eau Turquoise allait mourir. C'était une fatalité du destin, que personne ne pourrait arrêter. Sa mère, sa tendre mère allait quitter leur monde, pour rejoindre celui des étoiles. Sa gorge était serrée, ses larmes enfermées dans ses yeux. Elle ne voulait pas. Elle voulait crier, hurler, supplier leurs ancêtres, le monde entier de l'épargner, de la laisser en vie encore un peu. Qu'elle ait le temps de voir sa famille grandir, de voir tous ses enfants obtenir leurs noms finaux.

Elle fut appelée, en même temps que sa moitié, son partenaire de toujours.

« Mes enfants...Je vais rejoindre les Étoiles aujourd’hui. Écho des Ruisseaux, je sais que tu l’as senti, toi aussi... »

Sa voix était douce, comme elle l'avait toujours été. Oh, elle l'avait tellement aidée. Quand les doutes s'emparaient de Jolie Abeille, de sa plus tendre enfance à aujourd'hui, elle avait toujours été là. Elle était celle qui l'avait mise au monde, la première à l'aimer, elle était la première personne qu'elle avait vu, qu'elle avait senti. La première à voir ses pleurs, ses sourires, à entendre ses rires. Quand tout semblait s'écrouler sous ses pattes, c'est vers elle qu'elle se tournait. Sentir cette odeur, écouter cette voix, sentir son étreinte, il n'y avait rien de plus réconfortant. Pas besoin de mot, juste sa présence suffisait. Et aujourd'hui, elle ne serait plus là... Elle leur offrit un sourire,radieux, et l'un de ses derniers.

« Jolie Abeille... Oh comme tu portes bien ton nom, ma belle enfant… Je suis admirative de ce que tu es devenue : un modèle de douceur et de tolérance pour tous. Garde-la, cette âme pure, toujours. Garde-la même si on veut te l’enlever pour faire de toi une guerrière au cœur de pierre. C’est une chance qui n’est pas donnée à tous... »

Elle ne put les retenir plus longtemps. Quelques larmes coulèrent de ses yeux, humidifièrent les poils de son visage avant de s'écraser sur le sol. Elle avait rendu sa mère fière, et c'était tout ce qu'il comptait sur le moment. Une personne avait toujours cru en elle, et cette personne, c'était Eau Turquoise. Sa patte vint se poser sur celle de sa fille, qui savoura ce simple contact.

Leur mère émit ses félicitations et sa fierté pour son fils, et elle ne put qu'approuver. l était un être accompli et admirable.

Jolie Abeille voulait lui dire tellement. Mettre des mots sur ses sentiments, lui exprimer sa reconnaissance éternelle, lui décrire son amour, le déchirement de la perdre. Mais elle ne savait le dire, tout restait dans sa gorge. Elle se força à dire quelques paroles pour celle qui l'avait mise au monde. Sa voix était saccadée, imprégnée de sa tristesse mais aussi de sa gratitude.

"Oh Maman... Je t'aime tellement, tellement! Tu as fais tant pour moi et pour tous tes enfants, de cœur ou de sang. Merci pour tout, fais belle route vers les Etoiles, tu le mérites plus que quiconque."

Et elle partit, pour laisser la place aux autres.

Ils défilèrent tous dans l'antre avant que tous soient appelés.

Ils se pressèrent tous contre, lui murmurant leurs derniers mots, lui faisant entre leurs ronronnements, lui donnant une dernière léchouille. La bicolore fit de même. Elle sécha ses larmes et regarda ensuite le guérisseur. Ils étaient les aînés. Ce seraient à eux de les réconforter. Tous.

Maman, j'espère que tu seras heureuse, là haut dans le ciel. Veille bien sur nous, comme tu l'as toujours si bien fait.

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