L'Heure de Bosser ▬ Nuage Gris.-end

■ Guérisseur

Hier avait été une belle journée. Mon nouvel apprenti m’avait été attribué, il s’agit de Nuage Gris, fils de Matin Embrasé un ex-vétéran du Clan. Je me lève et m’étire à l’aube, bien déterminé à montrer au jeune que la vie d’apprenti est très différente de celle de chaton. Je sors de ma tanière et passe mon museau à l’entrée de la tanière des apprentis là où le petit est assoupi. Je l’appelle alors :
« Nuage Gris ! Dépêche toi, on va faire le tour du territoire. »
Je ressors sans attendre de réponse de l’apprenti - sans doute impatient - et je l’attends à l’entrée du camp en espérant qu’il ne se fasse pas désirer dès le premier jour de son apprentissage. La ponctualité faisait parti du respect et le respect est la plus belle valeur du Clan de la Rivière.

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L'Heure de Bosser ▬ Nuage Gris.-end Kphb

Spoiler:

Invité

Le jeune Nuage Gris n'était pas du tout à l'aise, dans cette tanière nouvelle, remplie de grands, dans laquelle il n'avait plus ni maman ni Eau Turquoise. La seule pensée de se séparer de Nuage du Renard lui hérissait, de frayeur, tous les poils du dos. L'aube scintillait à peine lorsqu'il frémit en entendant son nom, appelé depuis l'entrée de la tanière.

« Nuage Gris ! Dépêche toi, on va faire le tour du territoire. »

Il s'obstina, dans sa frousse, à garder les yeux fermés. Comme si à cette heure là, il pouvait toujours prétexter n'avoir pas entendu l'appel parce qu'il dormait. Patte de Loutre n'avait pas besoin de lui pour faire le tour du territoire, après tout ! Et puis, et puis, pourquoi si tôt ?

Tous les prétextes étaient bons pour qu'il ne cède pas. Mais tous les prétextes trouvèrent malheureusement leur réponse. Une oreille du Renard qui remuait. Une tension très légère de ses muscles qui laissait deviner l'ombre de sourire qui naissait chez le rouquin. S'il restait ici, ce serait vite le petit gloussement amusé.

- Alors, Nuage Gris, maman te manque ?

- Pff, ça, jamais.

Cette discussion fantôme lui permit de retrouver un brin de fierté qui l'inquiéta un peu. Il détestait se sentir tout seul, et encore plus lorsqu'on attendait de lui quelque chose.

" Pff, t'as gagné. " grommela pour lui-même le chaton mécontent qu'il était encore. Et il quitta son frère, qui n'était en fait absolument pas réveillé. C'était injuste. Nuage du Renard dormait, et lui, il devait partir il ne savait où pour faire il ne savait quoi, alors qu'il ne s'était jamais autant senti l'envie de ne rien faire, pour se rassurer.

" Toi, Griffe de Roc va pas te louper. " chuchota-t-il ensuite, comme un avertissement amusé, à l'oreille du Renard pour l'affoler, avant de fuir la tanière des apprentis et le petit chaos qu'il y avait ainsi semé.

Et un petit sourire espiègle dissimulait sa terreur alors qu'il s'aventurait dans l'inconnu. Son mentor l'avait appelé, mais lui avait-il dit où ils devraient se trouver ?

Zut. Il se sentait déjà perdu. Il est où, Patte de Loutre ? Il est vraiment parti sans moi ? Il faut que je le rattrape ?

L'aube se levait alors qu'il faisait les cent pas, devant la tanière des apprentis, à chercher une solution. Plusieurs autres mentors vinrent réveiller d'autres apprentis, et tous passèrent à côté de Nuage Gris, qui se sentait idiot. Comment pouvait-il faire pour savoir où son mentor se trouvait, à cette heure ?

Il n'osait même pas poser la question à tous ces grands inconnus qu'il ne connaissait pas.

Sa chance s'appela Pluie Battante. Il passa lui aussi près de la tanière des apprentis et put, fort heureusement, lui expliquer où Patte de Loutre l'attendait sûrement.

" Mmm... Merci... " bafouilla-t-il, éperdu de reconnaissance, osant croire qu'enfin, il n'était plus perdu.

Mais s'il suivit les instructions de Pluie Battante, il ne trouva nulle part Patte de Loutre. Il était dans la bordure du camp. Un endroit qu'il ne connaissait pas tellement, beaucoup moins agité que l'intérieur. Autour de lui, tout était soudain silencieux.

Mais où était Patte de Loutre ? s'horrifiait l'apprenti, qui l'imaginait écumant de colère, tout seul, parti faire sa ronde sans l'attendre d'avantage. Son mentor allait sans doute, en rentrant, se mettre très en colère contre lui et son incapacité. Peut-être allait-il même en parler à Étoile d'Or. Peut-être que tout cela se finirait par une punition.

Bile de souris... resurgit dans son esprit le nom d'un ignoble supplice tout autant sorti de son imagination que des histoires abracadabrantes de certains apprentis.

Si jamais son mentor le cherchait, il reviendrait sans doute le récupérer dans la tanière des apprentis, non ? Le mieux ne serait-ce pas d'y rentrer et de se tapir, au chaud, contre Nuage du Renard qui s'était peut-être rendormi ?

Au moment où Nuage Gris se retourna pour faire demi-tour vers le camp, il aperçut une silhouette, sur sa droite. Une silhouette qu'il n'avait pas remarquée quelques instants auparavant, mais qui se situait pourtant tout près de l'endroit que Pluie Battante lui avait indiqué.

Je suis vraiment trop bête... songea-t-il en se dandinant jusqu'à son mentor.

" Je t'avais pas vu ! " lança-t-il, avec un sourire assez brave. Comme si tout ceci n'était qu'un incident ridicule, quelque chose de tellement insignifiant qu'on ne pouvait qu'en rire quelques secondes et oublier ça pour toujours. Ses petits yeux gris semblaient sincèrement amusés. A le voir, on se doutait qu'il était encore plus chaton qu'adulte, mais on n'imaginait pas un instant à quel point il s'était fait peur.

Spoiler:

■ Guérisseur

Patte de Loutre ne présente pas un amour pour les jeunes et les chatons. Il n’est pas mécontent d’être devenu mentor mais uniquement parce que cela va occuper ses journées. Il n’a jamais eu de liens très complice avec ses anciens apprentis, loin de là. Il a tendance à être un matou détaché de toutes personnes ou situations pour éviter de souffrir. Les trahisons lui ont appris à créer une carapace plutôt robuste.

Le guerrier brun ne dit rien mais cela fait quelques temps qu’il attend son apprenti. Il le voit enfin sortir de la tanière, il soupire de soulagement. Cependant, l’apprenti ne vient pas à sa rencontre et commence à aller papoter à gauche, à droite et fait poireauter son mentor. Il soupire puis l’apprenti blanc se pointe comme une fleur et dit :
« Je t'avais pas vu ! »
Patte de Loutre écarquille les yeux et retient un mouvement de recul. L’apprenti ne présente aucune excuse à son mentor qui l’attend depuis quelques longues minutes. Frustré, le mentor dit d’un ton sec :
« Tâche d’être plus ponctuel la prochaine fois. En route. »
Sans attendre de réponse de son apprenti, Patte de Loutre sort du camp et jette un œil pour être sûr que son élève le suit cette fois ci.

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Invité

Il s'y attendait un peu, son mentor n'était pas commode, ni très content. Ça lui faisait froid dans le dos. Il se demandait si son mentor serait vraiment omniprésent dans sa vie d'apprenti, si pour des lunes et des lunes, il était parti pour devoir affronter sans cesse ce même regard importuné.

Mais au moins il l'avait attendu. Patte de Loutre aurait pu le laisser tout seul, ne pas l'attendre, l'ignorer, mais il n'en avait rien fait. Peut-être au fond voyait-il malgré tout une certaine importance à sa tâche de mentor. Peut-être espérait-il quelque chose. La vie d'apprenti était encore un mystère pour Nuage Gris, et celle des guerriers, davantage. Il se doutait que quelqu'un comme Patte de Loutre ne devait pas jouer souvent à attraper la patte ou la queue de ses frères et sœurs. Il ne devait pas plaisanter beaucoup non plus.

Quelle saveur pouvait bien avoir la vie d'un guerrier ? se demandait Nuage Gris, qui espérait peut-être dégager autant de vivacité que son père autrefois, ou plutôt, qui redoutait l'ennui morne d'une existence silencieuse, solitaire et maniaque.

« Tâche d’être plus ponctuel la prochaine fois. En route. » le lança le brun.

Et derrière lui, intimidé plus que vraiment curieux, Nuage Gris avançait en trottinant, pour ne plus perdre de vue celui qui lui enseignerait tout. Patte de Loutre était beaucoup plus grand que lui, et même lorsqu'il ne faisait que marcher, Nuage Gris le trouvait bien rapide. Mais il n'osait rien dire, rien commenter, convaincu qu'avec quelqu'un comme Patte de Loutre, il n'aurait plus qu'à se faire calme pour éviter de trop déplaire.

Il regardait le guerrier au début, mais comme ce dernier se retournait souvent et comme il plongea une fois sans le vouloir une de ses pattes dans un petit trou rempli d'eau glacée, bien vite, il décida plutôt de faire attention au sol. Le territoire autour de lui en revanche, pas du tout. Il ne se concentrait que sur la piste à suivre, les éventuels obstacles qui s'y trouvaient, et le rythme de ses pas qui ne devait pas trop ralentir.

C'était déjà bien assez d'efforts pour un chaton comme lui qui n'avait jamais vraiment pris l'habitude de se repérer, se reposant ordinairement sur son frère ou n'importe qui d'autre auprès de qui il se déplaçait.

Être tout seul, ce n'était pas dans ses habitudes.

■ Guérisseur

Nuage Gris semble avoir compris le message de son mentor peu aimable. Patte de Loutre n’est pas un grand amoureux des chatons contrairement à certains guerriers. Avoir un apprenti lui permet de passer le temps mais il n’est pas réputé pour établir de vrais liens de complicité avec ses prochains. Lassé de devoir ralentir le pas pour que Nuage Gris puisse le suivre, il décide de s’arrêter un instant. Ça tombe bien, ils viennent d’arriver à la rivière. Le grand s’assied et invite son apprenti à s’avancer près du rivage :
« Ici c’est la Rivière. Je pense que tu l’as remarqué seul. Elle marque la frontière avec le Clan du Tonnerre. De l’autre côté, les gros rochers que tu vois, ce sont les Rochers au Soleil. Ils appartiennent au Clan du Tonnerre et tu ne dois jamais franchir la frontière sous peine d’attirer de gros problème à ton Clan. »
Le brun trouve toujours ce premier entraînement plutôt ennuyant mais il est indispensable. L’apprenti doit bien apprendre les limites du territoire sinon il risque d’attirer des ennuis au Clan de la Rivière et son mentor en serait tenu pour responsable et il n’en avait pas du tout envie.
« Pour le moment, sois prudent. Je t’apprendrai à nager dans un futur entraînement. As-tu compris ce que je viens de t’expliquer ? Tu ne pipes plus un mot. »
L’apprenti a finalement sa langue dans sa poche. Pensant qu’il allait lui casser les pattes, Patte de Loutre l’a peut être vexé.

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Invité

Patte de Loutre ne rassurait Nuage Gris en rien. On fait quoi ? On est où ? Pourquoi y a personne ? Pourquoi on dit rien ? s'inquiétait le chaton qu'il était peut-être encore. Mais il détestait se sentir trouillard. Alors il se taisait, et il avançait, et il essayait de ne pas réfléchir. Sa mâchoire était tendue fermement, et ses pas rapides exigeaient de lui une grande concentration.

Il n'entendit pas son mentor s'arrêter et faillit lui rentrer dans la patte. Bizarrement, cette pensée l'effrayait, lui qui pourtant avait pris l'habitude, chaton, de trainer dans les pattes de chats même plus grands que lui. Patte de Loutre n'était pas n'importe qui. Bref. A quelques centimètre du guerrier, il s'arrêta. D'un geste, le mentor lui propose de s'avancer. Et Nuage Gris s'exécute, non sans un reniflement d'hésitation.

Parce que la rivière, sa mère n'aimait pas qu'il s'en approche. Bref, timidement, il s'approcha de la berge, mais comme il ne comprenait pas vraiment ce que son mentor attendait de lui, il ne tarda pas à se retourner, hésitant toujours.

Nuage Gris n'avait pas du tout envie de s'en approcher beaucoup plus. Même pas de boire. On lui avait raconté que les apprentis était flanqués dans l'eau, et ça ne le rassurait pas du tout.

« Ici c’est la Rivière. Je pense que tu l’as remarqué seul. Elle marque la frontière avec le Clan du Tonnerre. De l’autre côté, les gros rochers que tu vois, ce sont les Rochers au Soleil. Ils appartiennent au Clan du Tonnerre et tu ne dois jamais franchir la frontière sous peine d’attirer de gros problème à ton Clan.
- Ah. » commenta-t-il en se retournant à nouveau vers la Rivière pour voir ce qu'il y avait de l'autre côté. Mais justement, la Rivière les séparait de ces terres, alors franchement... « Eh bah je serai sage. » Il le disait comme une promesse, en se disant que ça lui donnerai l'air plus sympathique que s'il exprimait la répugnance que la pensée d'une traversée lui exprimait.

Ah ça... Même Nuage du Renard aurait du mal à l'y forcer !

« Pour le moment, sois prudent. Je t’apprendrai à nager dans un futur entraînement. As-tu compris ce que je viens de t’expliquer ? Tu ne pipes plus un mot.
- Je quoi ? » il n'avait pas compris. Mais un regard de son mentor l'aida à comprendre ce que ça voulait dire que ne plus piper un mot.

Purée, il n'était vraiment pas rigolo, son mentor. Nuage Gris était tout soulagé que la "nage" ne soit pas prévue pour ce jour-là, mais ça l'inquiétait un peu de penser que ce serait ce guerrier-là qui lui apprendrait à ne pas se noyer. Il se taisait, mais très vite il se demandait : on fait quoi ? on va où ? qu'est-ce qu'il veut ? Et il n'en savait rien. Et il ne savait même pas si Patte de Loutre avait prévu de le faire rentrer au camp. Et il se sentait perdu, à une place où il n'avait pas le droit d'être.

Bien vite ils reprirent leur route silencieuse. Nuage Gris trottinait, bruyant, vif, mais sentait déjà la force de ses petites pattes diminuer un peu. Il n'avait pas du tout envie de savoir ce que ça faisait que d'être très fatigué. Et encore moins de se plaindre à Patte de Loutre.

Silence il y avait, mais la tête du mioche n'en était pas moins lourde.

■ Guérisseur

Nuage Gris regarde son mentor avec ses deux yeux écarquillés ne comprenant pas ce qu’il lui dit. Patte de Loutre en a déjà plein les pattes de cette journée qu’il trouve très longue et barbante alors qu’elle vient à peine de commencer. Il n’aimait pas les chatons mais il était de son devoir de former cette boule de poil blanche comme neige alors il le ferait. Il reprend la marche après que l’apprenti ait compris ce qu’il lui a raconté. Il ralentit le rythme pour permettre une communication plus facile avec le blanc - en vain. L’ambiance est glacial : cet entraînement n’est pas l’entraînement de rêve auquel devait s’attendre Nuage Gris.
« Arrêtons nous ici. Regarde autour de nous, c’est la prairie. On y trouve des rongeurs et c’est ici que les guérisseurs trouvent la plupart de leurs plantes alors on doit faire attention sur où est-ce que l’on met nos pattes. »
Il s’arrête un instant et regarde cet apprenti. Il réalise que Nuage Gris n’a pas demandé à être son apprenti mais c’est plus fort que lui : Patte de Loutre ne ferai pas d’effort avant un moment. Il n’a jamais été réputé pour établir des liens forts avec ses apprentis. Il les forme, c’est tout.
« Regarde devant toi, la “bosse” que tu vois, c’est la colline. Elle nous permet de garder un œil sur les rochers du soleil et donc de voir si le clan ennemi ne franchit pas la frontière. On ira faire notre premier entraînement de combat là bas, une prochaine fois. »
Ne voulant pas faire de faux espoirs à l’apprenti, il insiste sur le fait que cela se déroulera une prochaine fois. Aujourd’hui, ils découvraient le territoire et c’était déjà suffisant, bien suffisant.

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Invité

Ils avancèrent encore, et pour Nuage Gris, cela était si long. Il n'était pas sûr d'avoir jamais passé autant de temps sans oser parler. Sauf quand il avait été puni et cruellement surveillé après sa sieste dans le buisson, autrefois, peut-être. Cet entraînement était sans doute une nouvelle sorte de punition. Lui qui conservait précieusement quelques souvenirs dorés de son père, lui qui avait pour parrain parrain Pluie Battante, il réalisait que tous les guerriers n'étaient aussi formidables que ces deux-là. Peut-être l'amertume de ses parents venait-elle de là.

On ne pouvait pas être l'ami de quelqu'un comme Patte de Loutre. Et des pareils que Patte de Loutre, il devait y'en avoir beaucoup. Alors que Pluie Battante et Matin Embrasé... il était sûr que personne ne leur ressemblait vraiment. Les deux mâles firent une petite pause qui fit du bien aux petites pattes du gamin, mais cette fois-ci, il contint correctement l'expression de son soulagement. Jamais d'ailleurs il ne s'était senti si décent.

« Arrêtons nous ici. Regarde autour de nous, c’est la prairie. On y trouve des rongeurs et c’est ici que les guérisseurs trouvent la plupart de leurs plantes alors on doit faire attention sur où est-ce que l’on met nos pattes. »

Patte de Loutre était expéditif. Nuage Gris ne comprit même pas l'importance de ce qu'il lui racontait, et en retint moins encore l'essence. Il disait ça comme s'il s'agissait de les mettre d'accord. Aussi Nuage Gris hocha-t-il la tête, en faisant semblant d'avoir tout compris. Mais c'était beaucoup plus facile de jouer à l'imbécile que de faire semblant de ne pas l'être.

« Regarde devant toi, la “bosse” que tu vois, c’est la colline. Elle nous permet de garder un œil sur les rochers du soleil et donc de voir si le clan ennemi ne franchit pas la frontière. On ira faire notre premier entraînement de combat là bas, une prochaine fois. »

Allez savoir pourquoi, Nuage Gris réfléchit pendant quelques secondes sur ce que son mentor venait de lui dire. Une bosse. Pourquoi une bosse ? Où ça une bosse ? Sa mémoire finalement lui fit revenir en tête la colline.

« Ah ! Ben... Oui ! La colline ! » répondit-il en évaluant du regard cette pente qu'il n'avait pas du tout envie de devoir franchir. Pourquoi parlait-on de cette colline, il n'en savait rien. Il ne se demandait toujours pas ce que son mentor essayait de faire, en fait. Pourquoi s'arrêter pour repartir avant de s'être un peu détendu les pattes ? Pourquoi aller jusqu'ici où l'herbe était si tendre pour finalement aller ailleurs ? Le sens de l'orientation de Nuage Gris était assez médiocre, mais il visualisait plus ou moins que leur trajectoire n'avait rien d'une ligne droite.

« On va où ? » osa-t-il demander en voyant que le guerrier s'apprêtait à reprendre la marche. C'était à la fois une bonne question pour lui et une bonne raison pour ne pas interrompre trop vite sa petite pause.

La tête un peu penchée, il imagina un instant que le guerrier reprendrait son petit bout de chemin en ignorant parfaitement cette interruption.

■ Guérisseur

Patte de Loutre se demande si son apprenti est attentif où s’il se contente bêtement de le suivre sans mémoriser ce qu’il y a autour d’eux. Il soupire espérant que tout ceci n’est pas vain. Le mentor regarde son élève, attendant une quelconque réaction de sa part. Celle-ci n’arrive que très tardivement, le blanc miaule :
« Ah ! Ben ... Oui ! La colline ! On va où ? »
Le guerrier n’est pas naïf. Il voit bien que l’apprenti gratte une pause ou essaye de faire durer celle ci. Il hésite entre deux possibilités : ignorer l’apprenti et continuer son chemin ou bien tout simplement lui répondre, reste ici un petit peu et reprendre après. Décidé à ne pas enterrer définitivement sa relation avec son élève, Patte de Loutre lui répond :
« Nous allons nous approcher de l’endroit le plus dangereux de notre territoire : les chutes. Ne chahute pas, suis moi calmement et nous repartons ! »
Le mentor essaye de montrer plus d’entrain pour motiver son apprenti. Son air est faux et il espère que le jeune ne s’en rendra pas compte. Il recommence à marcher - s’assurant que le petit le suit - et se dirige vers les chutes.

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Invité

Il n'aurait pas misé gros sur l'arrêt du guerrier, mais ce dernier prit le temps de lui répondre. Nuage Gris cette fois-ci l'écouta attentivement pour remercier son mentor de ce qui devait être pour lui un véritable effort. Mais en même temps, il étirait ses pattes arrières en un geste sommaire, parce que c'était beaucoup plus difficile de le faire quand on marchait.

Le môme se rendait également compte qu'avec tous ces bouleversements qu'impliquaient son apprentissage, il n'avait toujours pas mangé. Alors qu'avant, dans la pouponnière, la nourriture était systématiquement la première chose à laquelle on lui faisait penser au lever.

« Nous allons nous approcher de l’endroit le plus dangereux de notre territoire : les chutes.
- C'est dangereux ?!
- Ne chahute pas, suis moi calmement et nous repartons ! »

Patte de Loutre cherchait à être rassurant, à inspirer dans sa démarche un minimum de bonne humeur, mais Nuage Gris n'était pas certain qu'il soit beaucoup plus rassuré que lui. Tout cela n'était que de la comédie. Ne chahute pas, reste calme, tais-toi, n'essaye rien de comprendre parce que de toute façon tu es trop bête et ça ne sert à rien de parler, mais au moins, si tu pouvais te taire gentiment et me ficher la paix, ce serait pas mal.

Sa mère l'avait un peu habitué à penser le monde de cette façon. Mais sa mère, il avait vu qu'on pouvait quand même l'embêter un peu. Il avait plus ou moins trouvé chez elle un petit quelque chose d'amusant et d'incohérent dont il pouvait malgré tout se moquer. Alors que Patte de Loutre semblait, lui, tout à fait carré, et donc autrement plus effrayant.

Cela suffisait à faire taire Nuage Gris, qui trottina à sa suite le moins lourdement possible pour ne pas faire trop de bruit : sa patte se posait, le plus délicatement possible sur des pierres ou des racines lorsqu'il y en avait. Mais à peu près au moment où le bruit sourd de la cascade commençait à se faire entendre au loin, l'une de ces pierres s'avéra être quelque peu mal formée.

FRRRRRRR. Sa patte au lieu de s'y appuyer, glissait sur le côté, et la peau du jeune apprenti se frotta contre le caillou, ce qui suscitait une douleur très localisée, mais assez désagréable. Nuage Gris avait commencé à trébucher mais retrouva néanmoins son équilibre. Rapidement il lécha sa patte : elle ne saignait pas mais le frottement rendait la peau plus sensible, c'était comme une sorte de brûlure. Rien de bien méchant, mais on n'avait pas l'habitude de ces petits bobos, lorsqu'on sortait de six lunes de tendres bagarres de chatons au beau milieu d'un tapis de mousse.

Tant pis. Il reprit son chemin sans perdre trop de temps à cause de cet incident, soucieux de ne pas trop décevoir son mentor. Il ne s'était ralenti que quelques secondes, mais pour les rattraper, il lui fallu courir un peu.

« Et donc c'est ça les chutes ? » s'écria le chaton, assez fort parce que le vacarme des flots couvrait sa petite voix d'enfant. « Et c'est quoi qui est dangereux ? Y'a des gros renards par ici ? »

Il se doutait que l'endroit précis d'où retentissait tout ce vacarme n'inspirerait pas confiance au plus téméraire de tous les imbéciles de ce drôle de monde, mais mille autres dangers se cachaient peut-être non loin de ce trop fascinant mur liquide.

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