Le Code du Guerrier (avec Feulement Nuageux) - end

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Le petit chaton chétif et maladif était devenu un grand mâle imposant aux larges épaules et à la fourrure lustrée. L'entraînement, les combats et les longues parties de chasses avaient nourri ses muscles et fait de lui un véritable chat. Loin du petit rat maigre et mourant.

Il suivait de son pas lourd la silhouette svelte du chat sombre qu'il avait appris à haïr et à mépriser presque autant que ses ancien ravisseurs, ombre noire glissant sur le sol glacé de la pinède. De gros nuages couvraient l'astre solaire, menaçant de cracher leur première neige de cet hiver. Et de la vie de Feulement Nuageux en général. Le demi-sauvage n'avait jamais vu un tel phénomène météorologique. Il en ignorait l'existence même.

" Il est plus que temps que tu aies complètement en tête le Code du guerrier. J'ai dû en toucher deux mots il y a peu à Nuage de Muguet. "

Silencieux, comme d'habitude, l'apprenti suivait avec bien plus d'aisance qu'autrefois son "mentor". Plus d'aisance ne voulant pas dire plus de discrétion.

" Enfin bref y'a peut-être un espoir que tu finisses par servir à quelque chose si tu te révèles assez intelligent pour intégrer tout à fait ce Code. Et d'ailleurs, je dirais que c'est ton seul espoir, alors, pas de négligence. "

Le fils du serpentaire plissa des yeux lorsque sont regard d'ambre brulant croisa l'émeraude glacé de Feuille de Houx.

" Alors, voyons voir, j'aimerais savoir où tu en es là maintenant. Douces Caresses t'a déjà expliqué tout ça, sans doute. Qu'as-tu retenu ? "

L'odeur, devenant bien trop familière à son gout, du charnier pénétra ses narines de ses effluves infectes. Le prince déchu du retenir une mine dégoutée, de mauvais souvenirs flashant devant ses yeux. A force de voir son visage se faire enfoncer dans l'immondice il commençait à développer une véritable aversion à l'idée de s'en approcher et d'y mettre les pattes. Se rapprochant un peu de son "professeur" sur ce point-là.

Pour lui en avoir parlé, Douces Caresses lui en avait parlé. Le calico semblait accorder une grande importance à ces règles, plus que son apprenti du moins.

" Pas franchir les frontières, défendre le clan, pas manger les proies, les plus faibles en premier, pas de guerre pendant les assemblés, ne pas ignorer les chatons, respecter le chef, ne pas tuer sans raison ... "

Miaula le jeune mâle charcoal.

" Et pas mal d'autres trucs à propos de l'organisation des chefs, des guérisseurs et des lieutenants. "

Une de ses oreilles remua alors qu'il se stoppa au milieu du bourbier, lançant quelques regards autour de lui.

" Si t'es là pour me faire réciter le code Douces Caresses le fait déjà assez. "

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La queue de Feuille de Houx claqua sur le sol, arrachant un grognement au jeune mâle puisque le mouvement soudain le surpris. L'aspirant avait eu l'espoir que le guerrier au poil ébène aurait retenu depuis le temps qu'il détestait ce genre de choses. Mais il supposait qu'il était trop con pour ça. Ou peu-être qu'il prenait un malin plaisir à retourner l'estomac de Feulement Nuageux. Quel encu-

" Et il a bien raison. "

La simple voix de l'adulte l'horripilait. C'était dingue, il n'avait pas réussi à être autant dégouté par une personne depuis son séjour chez les Lunar pods.

" Il y a intérêt que tu sois capable de comprendre ce qu'un guerrier doit faire en toute circonstance. Il y a intérêt pour toi et pour tous tes ... pour tous ceux qui acceptent généreusement de te faire une place dans le Clan. "

La dernière phrase le fit tiquer, le méprit de son professeur encore plus. Si bien que les griffes de l'apprenti plongèrent légèrement dans la boue

" Putain. "

Souffla t-il en frappant brutalement de sa patte dans l'immonde sol sombre du charnier, se stoppant d'un coup sec.

" Tu peux pas arrêter trois secondes de me cracher ton mépris de précieuse à la gueule? J'suis vraiment pas d'humeur là. "

A son tour, sa queue claqua d'agacement. Il fallait croire qu'à force qu'on le traite avec un minimum d'humanité l'orphelin commençait à comprendre que le fait que Feuille de Houx passe sa vie à lui vomir au visage n'avait rien de normal, rendant chaque entraînement un peu plus désagréable. Sans parler du moral du jeune charcoal qui ne cessait de s'écrouler depuis ... Depuis toujours il fallait croire. Mais surtout ces temps-ci. C'était beaucoup pour lui et déjà un exploit que l'orphelin ne se soit pas jeté du haut d'une falaise. Et d'ailleurs, son "mentor" lui donnait particulièrement envie de le faire à l'instant.

" Pauvre chéri. "

Commença Feuille de Houx. Et tout en sa voix donnait envie à l'apprenti de lui arracher la langue et de le pendre avec. D'insupportables frissons de dégout parcouraient son corps alors que l'autre félin osait respirer le même air que lui.

" Parce qu'en plus il faut que tu sois d'humeur, maintenant, pour travailler. Ah quand je pense à ceux qui sont morts pour te sortir de là... Je me demande bien ce que je pourrais dire, moi. "

Le ton sarcastique du mâle au pelage noir donnait l'ordre directe aux muscles de Feulement Nuageux de se contracter et à ses griffes de plonger plus profondément dans la boue.

" D'humeur ou pas, sale petit ingrat, tu vas tout de suite me demander pardon pour m'avoir mal parlé. Tu te rends pas compte de tout ce que je fais pour toi, et tu n'imagines pas non plus à quel point ça me pèse de le faire. Mais si tu commences à me prendre pour ta copine, ça va pas le faire. "

La tension entre les deux chats était étouffante et la colère de l'orphelin ne faisait que grandir. Pour la première fois son outrance n'avait rien d'instinctif. C'était du pure ras-le-bol. Un sentiment d'injustice qui tordait ses entrailles. Ce n'était pas les entraînements violents qui le provoquaient. Pas les agressions physiques. Ces choses, il les jugeait comme naturelles et parfaitement nécessaire pour devenir plus fort. Mais c'était les insultes de Feuille de Houx, son mépris qui réveillait de véritables pulsions meurtrières en lui.

Ce connard finirait par le payer un jour. Et si ce n'était pas maintenant, ce serait une autre fois.

" Je n'ai pas dit que je n'étais pas d'humeur pour travailler. "

Répondit-il d'abord. Lui aussi jugeait qu'il n'y avait pas "d'humeur" pour cela.

" Je suis pas d'humeur pour mater ta sale gueule vomir d'autres insultes aussi dégueulasse que ton putain de mépris de bon à rien. Qu'est-ce que j't'ai fait hein? J'suis le fils de mon père? C'est une raison connard? Si j'étais comme lui j'aurais déjà pris soin de découper ta précieuse famille jusqu'à que tu te noies dans tes putains de larmes. "

Ses crocs se dévoilèrent.

" S'ils pouvaient te voir ils auraient honte. "

" T'es content, bravo gros malin, tu m'as craché dessus, maintenant, tu vas déguster. "

Pour une précieuse qui passait son temps à le baratiner avec ses bonnes manières, Feuille de Houx n'en avait aucunes. Et peu-être qu'il avait le cerveau aussi vide que celui qu'il insultait d'idiot car il semblait incapable de reconnaître ses propres erreurs.

Un coup de griffe s'élança vers le visage de l'apprenti, fendant l'air d'un mouvement rapide. Mais ce dernier eu le temps d'esquiver, du moins partiellement. Le bon côté d'être toujours à l'affut, toujours tendus.

" Et pourtant, je te jure que dans quelques minutes, tu vas t'excuser, fils de pute. "

Il gaspillait sa salive.
L'adolescent contre-attaqua, imitant le geste de son ainé et parvenant , lui, à atteindre le museau. La plaie n'était pas atrocement profonde, mais certainement assez pour faire passer le message.

Et de manière surprenante ... Il ne bondit pas au contacte de son "professeur". Non, contrairement à ce que pouvait penser Feuille de Houx l'apprenti était loin d'être idiot. Il réfléchissait différemment, bien plus encré sur la survie que tout ce qui pouvait lui sembler superficiel. Alors il avait retenu la leçon. Rentrer en contact direct avec le guerrier sombre se résultait toujours en échec. Il garderait ses distances. Muscles prêt à l'utilisation et sur la défensive. Observant et anticipant le prochain mouvement plus qu'il ne cherchait les points faibles à attaquer.

L'adversaire était plus entraîné que lui, l'orphelin l'avait compris. Il mettait donc toutes ses chances de son côté.

" Admets juste que t'es un sacré connard. Ça ira plus vite. "

L'adversaire le sous-estimait grandement et c'était peu-être là son espoir de lui faire avaler sa langue.