Premier Cours de Drague! [feat. Oeil du Tigre] - end

Une autre touche, car sa question suscita une nouvelle réflexion dans laquelle se plongea Oeil du Tigre, en fermant les yeux. C'était énervant pour un Bengal qui brûlait d'être stimulé mais c'était fascinant de le voir aussi serein, aussi apaisé. Est-ce que ça lui venait directement de son entraînement singulier? Ou alors son renfermement s'expliquait par des nombreuses émotions refoulées, tellement qu'il ne savait plus comment y répondre.

Pour Coup de Foudre ses émotions étaient encore présentes, juste ténues, émoussées, car le fil conducteur qui était sensé alimenter sa réponse émotionnelle était endomagé sans espoir d'être réparé. Depuis de longues années il se cachait derrière un masque afin d'être agréable et intéressant aux yeux des autres, afin de s'attirer leur réceptivité. Pour Tigre c'était tout le contraire - il était emmuré dans ses émotions sans donner l'envie de vouloir s'ouvrir au reste de la communauté ou de toute la société qu'étaient leurs Quatre Clans.

Et au premier abord, c'était ennuyant, mais après relecture...

— « Il est vrai que tu n'étais pas né à cette époque, ou à peine un gamin... Lorsqu'on bourre le crâne d'un chaton en lui infligeant des entrainements en infraction au Code du Guerrier, on peut en faire ce que l'on veut.
— Tout dépendant quelles étaient ces infractions, maugréa le bengal avant de laisser Oeil du Tigre continuer :

— Je n'ai seulement été que le projet d'un guerrier pour retourner la politique à son avantage, je n'ai jamais vraiment conversé avec d'autres félins du Clan mis à part ma sœur à cette époque. Et puis..

"Des entraînements en infraction au Code du Guerrier","Tourner la politique à son avantage", pour l'instant ces deux idées correspondaient aux siennes. Il voulait apprendre à tous comment se lier d'amitié avec des chats de partout et en créant une toile de liens dans tous les Clans aideraient tout le monde à voir que les raisons derrière leurs hostilitées étaient purement et catégoriquement Obsolètes.

Oeil du Tigre leva sa patte, la retourna d'une supination et posa ses coussinets sur son oeil laiteux pour recouvrir la marque des griffes qui le striaient. Coup de Foudre sursauta - il n'allait pas lui dire que-

— Il n'était pas stupide, il a très vite compris que je ne pourrais jamais convenir à ses idéaux futiles. » Non, non non « Le fait est, qu'un novice face à son père n'a pas grand chose à faire. C'est ironique non ?... Un frisson saisit le bengal depuis sa poitrine avant d'électriser son poil qui se leva d'un arc de dégoût.

De se retrouver avec la trace de son père sur soi, au final il va bien me suivre toute ma vie ce carnassier, voila pourquoi il n'y a rien d'extraordinaire à cette blessure. Ce n'est pas un trésor de guerre, juste un fardeau familial. J'me demande bien ce qu'il devient, ce vieux banni...

Le bengal se tendit, s'asseyant droitement, les épaules raides, inclinant juste un peu sa tête vers le bas pour regarder Oeil du Tigre et ses cicatrices d'un nouvel oeil. L'entendre rire, même s'il avait s'agit d'un des défis qu'il s'était donné, ne le soulagea en rien. Il se rappelait d'un mot que Raton Laveur employait à son sujet, par le passé. "Ordure". Le père de Tigre était une "ordure".

— Mais je ne suis pas venu ici pour discuter en tant que confident, cette discussion n'est pas la raison de ma venue donc, revenons à notre sujet tu-veux ?

Le bengal sursauta et c'est lui qui eut l'air pris de court. Il baissa les yeux à son tour, et sa mâchoire se mouva en dessous car il se préoccupait à tourner sa langue sept fois dans sa bouche. Il la dénoua en l'ouvrant d'un à-coup, révélant une seconde ses canines une seconde sur une expression féroce qui se tempéra derechef:

— --Bordel.  Ses oreilles s'étaient tellement raidies vers l'extérieur qu'elles faisaient ressortir toute la rondeur de sa face. Et sa face s'était crispée - un tic souleva sa babine, sans plus.  Je savais pas - j'en savais rien, il secoua sa tête avant de la redresser.  ...Je comprends mieux pourquoi tu détestes ces (et ses babines se distordirent sur un sourire rageur) "valeureuses blessures de guerre".

Il poussa un soupir et sa queue s'agita. Son manque le démangeait encore mais était-il réellement mieux que l'ordure qui s'agissait du père d'Oeil du Tigre en le maintenant dans cette discussion contre son gré? Pire - était-il le seul à s'amuser?

Cette réflexion lui rampa dessus et le fit se tendre davantage.

— J-je crois que c'est pas vraiment le passé de quelque chose qui le rend beau, mais de ce qu'on en fait. Il hocha la tête, plus pour se convaincre lui que Tigre, double-parlant de lui-même à la fois. Tu es juste et honnête, tu sais marcher la tête haute malgré le bagage qui hante tes souvenirs. C'est ça qui est admirable, je trouve. »

Il tiqua de l'oreille et détourna la tête, faisant la moue.

— « M'enfin je trouve aussi que tu as vraiment besoin d'apprendre à accepter les compliments qu'on te fait, ça te rendrait moins inapprochable, déjà.

— « En tant que bon élève je devrais te remercier de m'avoir dit que j'étais admirable en ce cas ?..
— Hmph, pour le coup Coup de Foudre retrouva l'ombre de son sourire, renvoyant un regard en biais pour souligner la perspicacité de son élève.

— D'une façon ou d'une autre, poursuivit ce-dernier, accepter un compliment c'est une façon de se montrer arrogant mais ne pas le faire c'est se montrer impoli.
— --... Quoi?
— Crois moi j'ai quelques difficultés à comprendre lorsque l'un ou l'autre sont utilisés, je ne veux pas montrer une image mauvaise de moi sous prétexte que j'apprécie un commentaire.

... Tigre croyait vraiment qu'accepter un compliment était un signe d'arrogance? Ce n'était plus seulement une question d'enseignement, il y avait maintenant tout un baggage erroné à lui faire désapprendre. À-- à l'aider à désapprendre - s'il le voulait bien sûr! S'il--,

— Tout comme le fait que je déteste être la cible de l’apitoiement des autres sur mon passé, comme tu l'as dis toi-même, ce sont des événements qui se sont déjà déroulés et recevoir de la compassion vis-à-vis de ceux-ci n'y changera rien de toute façon.

Coup de Foudre haussa les sourcils, hochant la tête d'un mouvement entendu.

— Très bien, il dit, et il ne mit aucune saveur à ses mots. Je ne peux pas offrir de compassion sans mentir, mais je ne ferai pas l'effort de le faire si tu le juges inutile.

Au moins ils étaient sur la même longueur d'ondes - s'appitoyer sur les choses du passé sans ne jamais considérer le futur était à ses yeux un véritable gaspillage d'énergie, même si ceux qui ressentaient avaient souvent besoin d'adresser la nature d'une situation avant d'accepter de la relâcher. ... Et il arrivait parfois qu'ils ne savaient même pas qu'ils la retenaient en premier lieu. -- Attends, lui et Tigre étaient sur la même longueur d'ondes? C'était intéressant, et d'une secousse le bengal se débarrassa de toute trace de malaise. Il recourba sa queue sur la gauche pour manifester une marche-arrière:

— Revenons à ce que tu as dit, tu veux?

Tu crois vraiment qu'accepter un compliment est un trait d'arrogance? Être arrogant entend de blesser les autres par la hauteur de sa fierté. En quoi accepter un compliment, une façon de mettre en valeur quelqu'un, est blessant?

Car il lui arrivait de jouer sur l'arrogance - de se faire volontairement blessant - de tester les limites des autres par piques malignes et par de la condescendance qu'il choisissait de déguiser ou non, mais il n'avait jamais vu Tigre le faire. ... Bon, il ne s'intéressait à Tigre que depuis qu'il l'avait vu s'adresser à Douces Caresses et connaissait de lui genre, absolument rien du tout, donc qui sait si sa, ah, taciturnité n'était pas la conséquence d'une ancienne arrogance qu'il avait tassée par après.

— « À trop recevoir de compliments, j'ai vu des félins devenir arrogant et ne plus voir seulement que le bout de leur museau, lui expliqua Oeil du Tigre. Et Coup de Foudre était attentif à ce qu'il disait - attentif à la formulation de ses phrases et au choix de ses mots, respectivement:

Moi-même si je suis froid avec mes novices c'est pour leur faire comprendre que seul les qualités ne suffisent pas, il faut apprendre à accepter ses propres faiblesses même venant des paroles d'un autre. Je ne comprend pas le simple fait de recevoir un compliment si c'est pour gonfler l'égo de certains, surtout si c'est pour le faire sur le physique.
— Hm.

Coup de Foudre trouvait qu'il faisait fausse piste, qu'il antagonisait la haute estime de certains, qu'il ne trouvait aucune satisfaction à être complimenté sur une apparence que parfois certains faisaient des pattes et des pattes (des pieds et des mains) pour atteindre un certain standart. Sa queue se recourba à cette réflexion, pour une évidente raison.

— Si je te dis que tu as un magnifique regard, c'est un compliment mais est-ce que pour autant tu crois que je le fais par franchise ou seulement pour paraitre agréable parce que tu peux m'aider ?

Et si Coup de Foudre lui disait que s'il s'occupait de son cas avec autant d'attention c'était parce-qu'il s'ennuyait, était en manque de vigoureux contacts et qu'il était curieux d'explorer son psyché, qu'est-ce qu'il dirait? Tout de même, Tigre se méritait quelques points pour soulever la nature opportuniste de la flatterie derrière les compliments.

— « De plus tu as très bien vu que complimenter mes cicatrices comme une preuve de ma force pouvait devenir blessant, dans tous les cas complimenter quelqu'un est quelque chose de compliqué je dois dire.
— Mais ça n'a pas à l'être. »

Coup de Foudre haussa les épaules.

— « Mon regard est magnifique. Je passe les matinés à lisser et lustrer mon poil, rondir mes joues, raidir mes vibrisses, peigner mes oreilles et leurs poils. Mais tu n'as pas besoin de le savoir, tu vois? Comme pour tes cicatrices - certains chats et chattes pensent que les cicatrices sont une marque de valeur au combat mais,

Il pencha la tête, leva sa patte pour se désigner l'oreille guérie et les deux trous dans le pavillon : sexe.
Puis s'accroupit pour désigner d'autres marques de dents dans sa nuque « sexe », se rassied en étirant au long sa cuisse marquée de griffes en plissant légèrement les paupières « seeeexe? » le nez sur son poitrail, sur la cicatrice en impact de balle « accident - de sexe », et se tordit comme un cobra pour toucher son dos du bout de son nez, les oreilles dans le cran, s'étirant du mieux qu'il le put quitte à déformer ses muqueuses en une grimace désagréable.

— Lune rouge.

Il se dénoua et s'ébroua de long en large, retrouvant une position assise plus "correcte", hissant une patte près de sa bouche pour la lécher, révélant la cicatrice qui marquait l'articulation du poignet avec un air las.

— ...Idem. »

Ironiquement placée au même endroit que celle d'Étoile de Suie, à l'époque. Il avait vu cette plaie s'infecter et s'empirer et monter les tissus de sa patte jusqu'au coude jusqu'à ce qu'elle ne puisse plus du tout marcher dessus. L'image d'Étoile de Suie et sa patte nécrosée se juxtaposa à celle de sa dépouille inerte percée d'une farandole d'asticots et il détourna sa tête d'un tic, se fermant les yeux à ce souvenir. Passons:

— « --Ton oeil a beau t'avoir été griffé par un salaud, il est blanc comme l'est la lune dans un ciel dégagé. Sur ton visage sombre, tu dois quand même admettre que c'est une caractéristique qui pique l'intérêt!

Flirter, c'est pareil. C'est vouloir découvrir l'autre et vouloir que l'autre nous découvre.

Il pencha la tête:

Bon, ya aussi que voir un beau corps bien formé donne envie de se blottir dedans et mesurer sa force à la sienne, ou de le recouvrir sous le sien et vice-versa, mais !

Et il eut un rire léger. Ha hah, les compliments servent aussi à montrer aux autres qu'ils existent et qu'on les voit. Entre parfaits inconnus, pour se montrer de l'intérêt à en apprendre plus sur l'autre. Entre proches? Pour se soutenir. Tes pensées et ton corps ne sont pas complètement dissociés, tu sais?

'Me méprend pas, je respecte la profondeur de tes réflexions, surtout que je t'ai pris pour un guerrier impulsif à la base, mais tu devrais sortir de ta tête, un peu!

— « Alors comment faire la différence entre excès et compliments ? Je ne vois pas comment reconnaitre quelqu'un qui se force à te complimenter et quelqu'un de sincère. Les sentiments sont une choses bien compliqués à comprendre.. »

À qui le dis-tu, aurait répondu Coup de Foudre, qui se contenta plutôt de le faire en bourdonnant d'assentiment, se distrayant d'un ou deux coup de langue à sa patte pour se la passer du front jusqu'au museau, montrant indirectement à Tigre ce qu'il entendait par "soigner son apparence". Il fit plutôt comme lui, s'homologuant à ses réflexions, car vraiment, qu'est-ce qui différenciait un compliment sincère d'une flatterie? Ses coussinets poussèrent ses babines, et il sortit les griffes pour se gratter la racine des moustaches, puis les lisser d'un pincement, laissant l'espace à Oeil du Tigre de parler.

— Enfin je voudrais dire que c'est quelque chose très particulier, je voyais ça plus... instinctif. En réalité tu me faisais plus penser à une bête de sexe plutôt qu'à quelqu'un de réfléchit Coup de Foudre.

Il termina son mouvement au bout de ses moustaches, les relâchant, et elles rebondirent avant de s'adroitir après quoi, regrouppées en longues tiges en v. Il posa sa patte dans le sable et envoya un regard en coin à son comparse, amusé:

— Je ne peux pas être les deux ? ♡ »

Il eut un petit rire pour lui même, s'occupant des moustaches de l'autre côté, terminant sa toilette en s'asseyant à demi pour gratter à rebrousse-poil son poitrail et faire se relever une touffe en épi, qu'il moula entre les deux pattes, centrant les pointes.

— « C'est l'intention. Il retomba ses deux pattes par terre, prenant un moment pour reculer la tête et dresser hautes ses oreilles en admirant sa somptueuse apparence. Il cilla, et retourna ses yeux jaune électrique sur Oeil du Tigre, sans le lâcher:

La différence entre l'excès et le compliment. Tout dépend de l'intention derrière, je pense.

HRP:

— « En conclusion, un compliment ne l'est seulement si la personne possède une intention particulière derrière ?

Coup de Foudre hocha de la tête, car c'est du moins ce qu'il pensait. Il avait passé plusieurs lunes à observer le comportement d'autrui et à se construire une personnalité dans le Clan, et il la développait davantage à chaque nouvelle interaction. Certains traits faisaient plus mouche que d'autres ; certains compliments aussi. Et pour être efficace,...

— En ce cas tu ne dois pas voir beaucoup de personnes attentionnées aguicheur que tu es.
Ce n'était pas faux, et le bengal haussa ses épaules, le sourire désaffecté devant la griffe de son élève qui le pointait d'une vérité à tout le moins tranchante.
— Mm, mais ça m'est égal. Si c'est mon intention que les autres me voient comme une bête de sexe, et que la leur est de me flatter à leur partager mon corps, où est le problème? »

Ce n'était pas d'un manque d'estime de soi dont souffrait Oeil du Tigre, c'était d'un manque d'estime envers les autres. Il avait si peu confiance aux autres qu'il s'entêtait à vouloir tout déterrer ce qu'ils cachaient, cherchant la vérité honnête dessous leurs propos comme un gourmand les restes d'un repas laissé derrière. Ce n'était pas tous les chats qui partageaient sa droiture d'esprit. Des restes et des secrets n'étaient parfois rien de plus que ça, des restes et des secrets, et les deterrer dépouillait les chats du décorum superficiel dont ils se paraient pour avoir l'air intéressants, pour grapiller un peu d'attention, un peu d'amour (?) chez autrui.

Tigre pesa son Oeil unique sur le bengal, les striures naturelles dans son visage se joignant à la sévérité qu'il prit en sourcillant, chassant sable et neige d'un vif mouvement de la queue:

— « Le rapport avec Douces Oreilles ne doit pas être très loin si je me fie à ta grande aptitude sur le sujet.

À l'entente du lapsus, le bengal rebondit de la tête des moustaches et des poils d'oreilles, avant d'entrouvrir ses babines sur un vilain méchant rictus en étirant le cou pour miroiter son impatience à son élève:

— Ahh, alors ce sont ses oreilles qui t'intéressent?

Lui-même qui coiffait les siennes eut un petit mouvement vers l'arrière, feignant la pudité, ramenant une patte près de sa gueule:

— Ha hah, je ne te croyais pas comme ça! ♡

La moquerie dans sa voix lui fit fredonner une note mais la fleur qu'observait Tigre n'était belle seulement car elle se dissimulait derrières les pétales des autres. Elle n'avait aucun parfum, juste l'intelligence de savoir comment vêtir sa tête et son corps pour se faire intriguant. C'est ce qu'il lui avait dit, non? Quelqu'un de réfléchi. Mais est-ce que Douces Caresses l'était autant? Est-ce que Douces Caresses avait d'aussi belles intentions à l'égard de Tigre que Tigre en avait au sien? Même sans réciprocité, rien n'empêchait Tigre de jouer le jeu de Caresses et d'apprendre à le connaître - de corps ou d'esprit. Les intentions changeaient, après tout - mêmes les siennes.

HRP: