Direction les étoiles ~ ft. Boule de Roc - end

Tout arrivait si vite ces temps-ci. Le temps défilait sans que je le vois. Il était difficile, même si l’épidémie reculait, je n’avais toujours pas trouve de remède, juste un moyen pour aider mes camarades à mieux supporter la maladie. J’avais commencé mon enseignement auprès de Vent du Nord. J’apprenais très vite et j’avais une bonne mémoire, ça facilitait grandement les choses. Mais la guérisseuse du clan du vent était très sévère. Elle insistait de nombreuses fois sur le fait de ne pas se tromper. Je n’avais pas le droit à l’erreur. En même temps je la comprends, c’est une si grande responsabilité ! Et avec l’épidémie à la rivière, j’avais l’impression de ne pas être qualifié. De ne pas être doué. Mais j’arrivais pourtant à soigner le reste, à accomplir ce que Vent du Nord m’avait appris. L’épidémie me faisait juste très peur. Mas il fallait garder espoir. Au moins pour le clan. Oui, c’est bien ça, pour mes camarades félins qui étaient tout autant terrifiés.

Comme tous les jours depuis ma nomination au rang de guérisseur, Patte de Lionne apportait une petite proie pour qu’on la partage le midi. Elle était finalement la seule à accepter mon nouveau rang, mon changement de vie. Ma mère m’en voulait puisqu’elle se voyait déjà grand-mère avec un milliard de petit chaton de nous trois. En bref, ils ne me parlaient plus vraiment quoi, seule ma sœur était toujours là pour moi. Elle me soutenait et restait la même. En même temps, la réaction du reste de ma famille était prévisible, pour eux, seul le rang de guerrier valait quelque chose, c’était les protecteurs du clan. Enfin bref, juste après le repas, je fis une étreinte à ma sœur, et retournait vers mon antre. Sans faire attention je tapais dans un caillou qui entra dans ma tanière. Grommelant parce que je ressentais une petite douleur à la patte – il était pas si petit ce cailloux, c’était un roc le truc ! – j’entais pour voir où était allé cette pierre si méchante avec mes pauvres coussinets sensibles. Et finalement, je la retrouvais étrangement posée sur une feuille. Mais elle était vraiment droite dessus, comme si elle avait été posée là par attention. Je m’approchais de la roche pour la sentir, elle n’avait pas d’odeur. Même pas celle d’un félin, mais petit à petit se déposait sur elle l’odeur des plantes médicinales. Et comme si c’était une évidence, le nom de Boule de Roc me vient en tête. C’était une jeune chatonne qui était sur le point d’être nommée apprentie. Est-ce que… Est-ce que les étoiles me demandaient de m’occuper d’elle ? Elle avait un problème ? Et pourtant je ne sentais rien d’autre que les plantes…

******

La grotte se présentait devant nous. J’avais discuté de mes doutes à Etoile d’Or, et elle était d’accord avec moi. Et la petite Boule de Roc semblait emballée par l’idée. Je l’avais alors amenée à la Pierre de Lune aussitôt pour procéder à des petites présentations. J’étais très angoissé, tout au long du chemin je l’avais été. Je ne savais pas tout encore et prendre une apprentie si tôt, ça me terrifiait un peu. Vent du Nord m’aidera sinon de toute manière. Mais en ces temps, je dois avouer qu’une petite apprentie serait une aide précieuse. Je regardais la future apprentie au pied de la grotte, il faisait déjà nuit.

« Tu es prête ? Tu me suis bien surtout, et à partir de là, plus un mot ne doit être prononcé. Quand tu seras en face de la pierre, dès qu’elle brillera, tu pourras t’approcher d’elle et la toucher avec ton museau et là, les étoiles te guideront dans leurs songes.»

J’entrais dans l’antre des étoiles. Il n’y avait aucune lumière, seulement l’odeur de l’humidité, ça me rappelait ma première visite dans cet endroit. Je ressentais la même angoisse, mais pas pour la même raison. J’avais peur d’avoir cette responsabilité supplémentaire, et ne pas réussir à faire d’elle une merveilleuse guérisseuse, mais en même temps, j’allais partager plein de choses avec elle. Ce doit être vachement sympa du coup d’avoir un apprenti. Bref, on arrivait dans la caverne, la pierre était juste en face. Et elle brillait déjà de milles feux. C’était l’heure.

Depuis le mort du guérisseur Echo des Ruisseaux, quelque chose avait changé au camp. Je ne saurais pas trop dire ce que c'était. Peut être était-ce tout simplement parce que je grandissais? En tout cas, je ressentais un espèce de malaise général. C'est entre autre ce qui m'a poussé à aller vers la tanière de Feuille de Saule, le nouveau guérisseur. Mais je me suis fait disputée par Brasier Glacial. Je n'aimais pas ça du tout, de me faire disputer. Suivre les instructions, sans comprendre. Parce que je ne comprenais pas le principe d'une épidémie. Quoi qu'il en soit, j'avais obtempéré. Enfin, certes un malaise ambiant mais rien qui ne m'empêchait de jouer avec mon frère, de stalker Nuage de Charbon en me demandant quelle crasse je pourrais bien lui faire, ou d'appeler à la bagarre apprentis ou guerriers qui s'ennuyaient.

Mais cet événement n'avait fait qu'accentuer ma curiosité. C'est pourquoi, lorsque Feuille de Saule m'avait proposé de devenir apprentie guérisseuse, je n'ai pas hésité une seule seconde. C'était un peu comme si c'était une évidence. Je ne me suis pas dit sur le moment que je voulais sauver le monde, que je voulais sauver les autres ou encore guérir mon frère (par ailleurs, je comprendrais plus tard qu'on ne guérissait pas d'handicap congénital). Je n'ai pas réfléchi. J'ai dit oui, spontanément.

Alors bien sûr, après coup, lorsque Feuille de Saule me laissa, mes méninges se sont activés. Un peu.Pas très longtemps à vrai dire, juste le temps de dire à mon frérot que j'allais ptêtre devenir apprentie guéri. "Tu seras pas cheffe alors ? Donc je pourrais pas être ton lieutenant ? Oh tristeuuuuh ... Mais alors c'est Nori qui sera cheffe ?" qu'il avait répondu. J'avais d'abord fait la moue, je n'y avais guère pensé. Puis je me suis dit que ce serait un formidable trio, avec moi comme guérisseuse qui leur prodiguerait de précieux conseils ! Ces quelques mots échangés suffisèrent puisque nous changions déjà de sujet, désireux de jouer.

En réalité, c'est quand il a fallu marcher, encore, et encore, et encore que là, j'ai tout de suite eu moins envie de devenir guérisseuse. Enfin, il s'agissait plus d'une envie très forte de me rouler en boule et de ne plus bouger qu'un véritable questionnement spirituel sur le chemin que prenait ma vie.

En même temps, je n'étais JA-MAIS sortie du camp, et là, non seulement je sortais, mais en plus il fallait traverser nos terres (que j'avais découverte avec excitation et émerveillement. Sentiments que j'avais extériorisés en courant de partout,malgré les dires de Feuille de Saule. Donc, j'étais crevée à un peine un quart du parcours). Cette étape franchie il fallait encore plus gravir des collines soulever des montagnes, aller dans des terres inconnues (une lande bizarre, le clan du vent jcrois) et ce, sans jamais s'arrêter.

Nous sommes arrivés alors que la nuit s'était déjà bien installée. Je m'arrêtai brutalement lorsque je les vis. Les hautes pierres. Mon cœur s'écrasa contre ma poitrine, sous le choc. C'était très impressionnant. Je les observais, béate, avec de gros yeux ronds. Cette immensité me fit oublier fatigue et faim.

Rappelons tout de même les secondes d'avant. Les Hautes Pierres étaient sur une dernière colline à gravir. Alors je peinais, derrière, à poser un pas devant l'autre. Cette pente était affreuse. Ma respiration était sifflante, un sale point de côté comprimait une partie de ma poitrine et la faim quant à elle tordait mes entrailles. J'étais comme un misérable chaton prématuré, sorti trop tôt du ventre de sa mère, et qui suffoquait au dehors. On aurait dit que j'allais m'effondrer à chaque levée de pattes. Et pourtant, j'avais fini par atteindre le haut. (Possiblement avec une aide de Feuille de Saule, mais passons ce détail)

« Tu es prête ? Tu me suis bien surtout, et à partir de là, plus un mot ne doit être prononcé. Quand tu seras en face de la pierre, dès qu’elle brillera, tu pourras t’approcher d’elle et la toucher avec ton museau et là, les étoiles te guideront dans leurs songes.»

J'hochai la tête, décidée. L'ex-combattant entra alors dans la grotte. Il s'agissait d'une toute petite entrée, anxiogène à tous points de vue. Je ne fis pas attention à ce dernier détail, et trottinai pour le rattraper, et m'engouffrer avec lui. Ce qui me frappa en premier, c'était cette absence d'odeur. On ne se rend pas compte mais notre odorat est un organe sensoriel indispensable qui nous aide grandement à nous repérer, et surtout, à comprendre notre environnement! Là, rien, mis à part une forte humidité. La fraîcheur glaçait mon sang. Je dois avouer que je n'en menais pas large. L'angoisse commençait à monter doucement, perfidement. Je me raccrochais comme je pouvais à la fourrure de Feuille de Saule, douceur qui me guidait.
Peut-être plus tard comprendrais-je la signification de cette traversée obscure et terrifiante.

Enfin, de la lumière. Ou devrais-je dire, la source même de la lumière. La pierre était étincelante. Elle semblait habitée de vie. Une vie féérique, qui luisait de milles couleurs. Ma mâchoire se décrocha sous la stupeur, et je ne pouvais que dévorer du regard le spectacle magique qui s'offrait à nous. La pierre était si resplendissante que je me demandais même si nous avions vraiment le droit de la toucher. Je lançais un regard interrogateur à Feuille de Saule. Il s'approcha de la Source, me montrant la voie. Je fis de même, en restant un peu en retrait, intimidée. Je m'allongeais à côté de la pierre, puis, hésitante, approchai doucement mon museau jusqu'à effleurer le rocher de mes moustaches. Ma truffe les suivit, et je plongeais dans un des songes les plus décisifs de ma vie.

Direction les étoiles

Petit Grizzly - membre du Clan des Étoiles

Il n'avait jamais grandi. Où si peu. Mort avant même sa première inspiration, Petit Grizzly avait, au sein du clan des étoiles, l'allure d'un chaton d'une lune. Et il n'avait jamais eu davantage. Et aujourd'hui, c'est à lui qu'on avait confier la lourde charge de prévenir la nouvelle apprentie guérisseuse. Un goût amer emplissait sa gueule d'étoile. Il voyait encore sa siamoise de sœur au cœur si bon faire tant et tant d'erreur sans plus jamais entendre sa voix. Ni la voix des autres. Détourner d'eux mais jamais de son clan. Et elle était finalement morte. Une fin pénible qui pour lui sonnait toujours comme une punition. Il se secoua et avança, pas à pas.

Il la vit bientôt. Elle. Si grise, portant si bien son nom et qui semblait chercher, curieuse, où elle se trouvait. Et le chaton à la pelisse brune constellée de poussière d'étoile vint vers elle en marchant. Sous couvert d'une forêt luxuriante et d'un chêne plus gros encore que les quatre qui unissaient les clans, comme un cœur commun au quatre clans. Pour ne s'arrêter finalement qu'à encore deux bonnes longueurs de queues de renard d'elle. Ses yeux d'or comme cherchant à lire au travers de la nouvelle venue.

- Bienvenue, Roc.

Il n'était qu'un chaton à qui on demander de faire le plus dur. Et il ne souriait pas. Il fixait la jeune chatte - qui paraissait plus vieille qu'il ne le serait jamais - avec un regard pourtant - qui était plus âgés qu'elle ne pourrait jamais l'être elle, de son vivant. Il ne voulait guère la faire attendre, aussi, avant qu'elle n'est pu le questionner, il prit les devants, conscient que déjà, les autres approchaient, pour former comme un croissant de lune.

- Je n'ai jamais été guérisseur. Mon nom est Petit Grizzly et je suis le frère de Secret du Firmament, qui elle a été guérisseuse du Tonnerre. Elle n'est pas là, tu ne la rencontreras jamais dans tes songes. La voie que tu t'apprête à suivre a un code qui lui est propre. Tu te devras de le respecter, toujours. C'est ce qu'elle t'aurait dit. Si tu fait serment de devenir guérisseuse, le code des guérisseurs sera ton guide, il devra être le seul guide que tu suivras. Il sera ta vie et tu lui seras fidèle comme tu devras l'être à tes ancêtres.

Le chaton s'était comme redresser, vieux matou dur et sérieux. Il était minuscule en regard des Étoiles qui étaient arriver pour accueillir Roc. Mais de lui irradiait une gravité que les autres n'avaient pas tout à fait. Peut-être due au fait qu'il était mort avant même de réellement vivre. Où peut-être car il était garant du message de feue Secret du Firmament. Un avertissement sur l'importance du code du guérisseur. Un message lourd finalement pour une Étoile aussi petite qu'il l'était. Et tout ça rendait l'atmosphère comme pus lourde, plus solennelle. Comme pour préparer Roc au serment qu'elle allait devoir donner ici si jamais elle souhaiter réellement suivre la voie des guérisseurs ...

Je me sentais toute bizarre, un peu comateuse. Je regardais autour de moi, sans vraiment comprendre ce qu'il m'entourait, sans comprendre ce que je voyais, ni même ce que je ressentais. Pourquoi mon cœur battait-il si fort? Pourquoi ne voyais-je plus la pierre de lune? Hébétée, je regardais autour de moi, ma tête dodelinant de droite à gauche, comme un peu sonnée.

- Bienvenue, Roc.

Je sursautai légèrement, tout en me tournant vers La voix. Tout ce que je vis n'était qu'un petit bout de chou, un adorable chaton... Je voulus lui demander s'il s'était perdu, s'il avait besoin d'aide, et pourquoi était-il à la pierre de lune... jusqu'à ce que je remarque son pelage constellé d'étoiles. Il était magnifique... mais je ne comprenais pas pourquoi une telle peine envahit mon cœur. J'eus l'impression qu'en un regard, mes épaules venaient de se charger d'un lourd fardeau dont je n'avais même pas idée des implications. Son regard me transperça. J'eus l'impression d'être mise à nu par ce regard qui me sondait, si grave et solennel pour un petit de son âge.
C'est intriguée et soucieuse que je l'écoutais miauler:

- Je n'ai jamais été guérisseur. Mon nom est Petit Grizzly et je suis le frère de Secret du Firmament, (Secret du?) qui elle a été guérisseuse du Tonnerre. (oh) Elle n'est pas là, tu ne la rencontreras jamais dans tes songes. (ah? Je penchais la tête sur le côté, sans trop comprendre.) La voie que tu t'apprête à suivre a un code qui lui est propre. (Je fronçais les sourcils. Pourquoi me disait-on cela?) Tu te devras de le respecter, toujours. (Je sentis alors qu'il fallait que j'hoche la tête, ce que je fis. J'avouerais que j'avais bien du mal à soutenir le regard intense de l'enfant.) C'est ce qu'elle t'aurait dit. Si tu fait serment de devenir guérisseuse, le code des guérisseurs sera ton guide, il devra être le seul guide que tu suivras. Il sera ta vie et tu lui seras fidèle comme tu devras l'être à tes ancêtres.

Je ne savais comment réagir par rapport à ça. Cela faisait beaucoup d'informations, et déjà, d'autres chats s'approchaient. Ma gorge était nouée par le stress. J'étais bien incapable de ne dire ne serait-ce qu'un seul mot... Par conséquent, je me contentais d'hocher la tête, sans cacher mon intimidation face à cette foule qui s'approchait, et venait se poster aux côtés de Petit Grizzly..

Le regroupement en croissant de Lune était bien serré et chaque chat y avait sa place. C'est alors que, derrière eux, une Étoile fila en poussière. Peut-être la vivante ne l'avait pas vue, peut-être qu'Elle n'était que de passage, mais ses yeux jaunes reluisaient de peur et se braquèrent en plein sur Nuage de Roc malgré la distance et les guerriers les séparant. L'Étoile, dont les poils blanc et noir formaient un demi-masque qui s'étendait en cape trouée sur le dos, trépida sur place en voulant se frayer un chemin dans la cérémonie. Il tenta de l'avertir mais aucune voix ne sortit de sa bouche, béante.

C'est car les Étoiles ne permettaient pas à Nuée d'Alcidés de parler.

Sa présence, auprès d'eux, était tolérée, et ce malgré la faute dont il avait été puni par la mort, du temps où il était en vie. Elle était tolérée à condition qu'il ne parle pas, mais une panique sourde s'était emparé de son coeur essoufflé lorsqu'il avait vu Nuage de Roc à la Pierre de Lune. Il l'avait vue d'avance marcher les mêmes pas que lui, s'engager sur la même perte que lui réservait le chemin des apprentis-guérisseurs.

Nuée d'Alcidés leva haute sa courte queue sur sa croupe, la hérrissant, se campant sur ses pattes et un tremblement lui prit sur tout le corps en s'égosillant en silence. Il fallait qu'elle fuie!   Tout de suite!   Avant qu'il ne soit trop tard.

hrp:

J'en menais pas large. Autant j'avais été surexcitée à l'idée de rencontrer le clan des étoiles... autant maintenant, je me rendais compte que ce n'était ni un jeu, ni un moment de joie et de bonheur que d'être parmi eux... Je balayais mon regard sur tous ces chats parsemés d'étoiles. Je me sentis si petite, si minuscule parmi ces grands. Des grands, qui, au premier regard, me semblaient être complètement inconnus... Mon estomac se tordit légèrement, en plus de ma gorge qui s'était asséchée.

Une chatte blanche aux reflets bleutés s'approcha vers moi.. La tension qui raidissait mes muscles s'allégeait au fur et à mesure qu'elle s'approchait. Je me sentis mieux, plus en... sécurité? Son visage avait quelque chose de familier qui m'était rassurant. Cependant, je ne bougeais pas d'un poil alors qu'elle s'approchait.
Sa truffe toucha mon front, et aussitôt, une vague de chaleur me submergea. Elle caressa de sa douce chaleur chaque parcelle de mon corps, de l'extrémité de mes poils jusqu'à l'organe le plus intérieur. J'eus envie de ronronner à ce contact, mais je n'osais pas. La bienveillance qui brillait dans son regard m'émut, et je restais un instant, perdue dans ce regard de tendresse.

- Bienvenue au Clan des Étoiles, Nuage de Roc. Peut-être que l’on t’a parlé de moi, je suis Fleur de l’Aube, la mère de Pluie Battante et de Cœur de Bruine, ainsi que la sœur de Plume Argentée. Je suis contente de te voir ici.

Oh! Mamie?!
Cette fois-ci, je ne retins pas mon ronronnement, qui résonna, fort, dans toute l'assemblée.


- Tu as choisi un chemin compliqué, probablement songé de doutes et d’incertitudes, mais n‘oublie pas de garder toujours les yeux vers les étoiles. Nous serons toujours là pour t’aider et te guider. Alors, n’hésite jamais à nous demander de l’aide. Nous te montrerons toujours le droit chemin.

Quand elle vint se frotter contre moi, lui rendis son câlin, en me plongeant ma tête dans son cou. La solitude et la peur que Petit Grizzly avait semées en moi semblaient avoir disparues... ou du moins, la bienveillance et le soutien de Fleur de l'Aube, et donc du clan des étoiles entier, agissaient comme un baume pour apaiser cette plaie...

Mais cet équilibre était fragile.

Un mouvement attira soudainement mon attention. Je ne pouvais pas le louper. Parmi la masse, deux gros yeux jaunes me fixaient. Ce regard effaça aussitôt toute trace de la bienveillance dont m'avait empli Fleur de l'Aube. J'étais nue devant ce regard, un réceptacle vide qui ne demandait plus qu'à se remplir. Mais ce regard était effrayant. Ce n'était plus d'altruisme dont il était question, mais de terreur, et de désespoir. Je ne ressentais plus que ça. J'eus l'impression d'être clouée au sol, et de ne plus être capable de même frissonner. J'eus l'impression que des lianes s'enroulaient doucement autour de mes pattes pour m'emprisonner, mais que je ne pouvais qu'être la spectatrice passive. de ma propre chute. Ces lianes montaient tels des serpents jusqu'à maintenant atteindre mes épaules, mais elles ne s'arrêtaient pas... Une panique sourde s'empara de moi, avec un besoin irrépressible de fuir, de fuir à tout prix. Les liens qui m'entravaient s'enroulaient à présent autour de mon cou, et soudain, plus aucun air ne rentrait dans ma gorge.

Mes yeux se révulsèrent, et je voulais hurler à l'aide... Mais aucun son ne sortit de ma bouche, en écho à l'Etoile Hurlante.

Une ombre bleutée cacha un instant ce regard. Je pris une énorme goulée d'air frais, haletante, effrayée. Je n'arrivais pas encore à comprendre ce qu'il s'était passé. Je tremblais, sous le choc. Une voix qui me semblait bien lointaine s'éleva:

« Nuée d’Alcidés essaye de te mettre en garde : il s’agit d’un rang difficile mentalement parlant, car tu devras côtoyer la mort, et ne pas écouter la culpabilité qui pourra possiblement te ronger. Il en garde de mauvais souvenirs, mais l’expérience retirée est propre à chacun. Il y a, parmi nous, de nombreux guérisseurs qui n’auraient échangé leur place pour rien au monde. »

Je déglutis, sans être vraiment capable de comprendre ces paroles.

« Pardonne mon impolitesse, je ne me suis pas présentée : je suis Eau Turquoise, la mère de ton ancien guérisseur, Écho des Ruisseaux. »

Le stress descendit d'un cran à ces mots. Eau Turquoise. La mère de l'ancien guérisseur. Elle me sourit, mais je n'étais pour l'heure, incapable de faire de même.

« Voici mon avis : le rang de guérisseur n’est certes pas facile, mais celui de guerrier non plus. Être un guérisseur t’offrira un laisser-passer sur toutes les terres de Cerfblanc pour maintenir la paix entre les quatre clans. Et là où Nuée d’Alcidés parlait de mort, je te parle de vie : tu pourras préserver celles des autres, mais aussi la donner en aidant des reines à mettre au monde leurs petits. Quoi de plus beau que d’aider à la cohésion d’un clan en reformant et créant des familles ? »

Je n'étais pas en état de comprendre chacun des mots un à un. Mais je comprenais le sens général. Être soignant, c'était naviguer entre deux mondes: entre celui des vivants et des étoiles, entre la mort et la vie, entre la douleur et le soulagement.

« Il nous arrive de nous tromper, mais tu sembles avoir les qualités requises pour devenir une grande guérisseuse : dynamique, persévérante et altruiste. Va maintenant. Si tu l’acceptes, ton nouveau nom sera dorénavant Nuage de Roc. Sois forte, les temps sont durs mais nous serons toujours derrière vous pour vous guider et vous soutenir. »

Ces derniers mots soulagèrent un peu mon cœur. J'hochai la tête solennellement. Je n'étais déjà plus Boule de Roc. Avec cette première rencontre, j'étais bel et bien devenue Nuage de Roc.

J'ouvris les paupières. J'étais de retour devant la pierre scintillante, auprès de mon nouveau mentor. Je demeurais silencieuse. J'allais avoir besoin de temps pour digérer tout ça. Je voulus fermer les yeux pour reprendre encore un peu mon souffle qui se faisait encore un peu capricieux, mais à peine mes paupières s'étaient refermées que les deux yeux jaunes apparurent.

Je soufflais. Qu'est-ce-qui allait se passer maintenant?

J’avais accompagné ma possible nouvelle apprentie dans ses songes. J’étais resté en retrait, à seulement regarder la cérémonie comme spectateur. Les ancêtres parlaient à la jeune, la mettant en garde sur les responsabilités de ce rang. Et ils lui accordèrent le rang. Mon angoisse diminua, j’avais bien lu le signe des étoiles. Cependant, je n’étais toujours pas serein puisque je devais déjà apprendre le rang de guérisseur à une jeune alors que… Je n’avais pas terminé ma propre formation. Je ne me sentais pas prêt, c’était… Impensable. Au pire, je la ferais venir avec moi lors de mes leçons avec Vent du Nord ? Avec l’accord de cette dernière bien sûr. Tout cela allait être difficile, il fallait que je prenne confiance mais… Et si je la formais mal ? Si je lui apprenais n’importe quoi et surtout n’importe comment ?

Elle devient Nuage de Roc. Mon apprentie. J’étais tellement honoré de cette confiance que m’accordait les étoiles, et en même temps si terrifié d’avoir à enseigner à quelqu’un alors que je ne me sentais pas prêt. Je pris une grande inspiration et regardait tout de même avec fierté la jeune. C’est sur cette image que je me réveillai dans la caverne sombre. La lumière de la lune avait arrêté de rendre la pierre magique. La jeune minette c’était elle aussi réveillée à côté de moi. Du museau, je lui touchais le haut de la tête pour lui faire comprendre de me suivre en silence. Je la guidais dans les tunnels étroits vers la sortie. Une fois dehors je pris une grande inspiration et regardai les étoiles qui commençaient à disparaitre, laissant place au soleil levant. C’état un magnifique spectacle.

« Et voilà. Tu es apprentie guérisseuse maintenant. »

J’avais brisé le silence.

« Tu ne devras pas parler de ta cérémonie, elle est très sacré. »

Je marquais une autre prose, et tournai la tête vers elle.

« Je ferais toujours de mon mieux pour t’apprendre ce que c’est d’être un guérisseur. Tu verras, c’est une vie difficile parfois, mais… Si au fond de ton cœur tu sens battre cette volonté de venir en aide aux tiens, ta vie ne sera que bonheur. Je n’ai jamais été autant épanouie que maintenant. »

Et je commençai à prendre la route avec un grand sourire.

«Nous pouvons y aller maintenant, et annoncer que tu es choisie par les étoiles.»

Feuille de Saule me lança un regard doux et bienveillant. Il ne dit pas un mot, et s'approcha doucement de moi. Je le voyais sans vraiment le voir, encore bouleversée par la cérémonie. Je le suivis plus par mimétisme que consciemment, plongée dans mes songes. Les paroles des étoiles s'entrechoquaient dans ma tête. Le couloir ramenant à l'extérieur fut une épreuve. Dans le noir, seuls le bruit des pas de mon mentor qui résonnaient me rappelaient vaguement que j'étais sortie du rêve, que j'étais dans la monde des vivants. Je voyais les terribles yeux jaunes de Nuée d'Alcidés de partout, angoissants, criants à mon instinct de m'enfuir sans jamais me retourner. Mais en même temps s'élevait dans ma tête la voix douce d'Eau Turquoise, le contact tendre de Fleur de l'Aube rassurant ces angoisses.

« Et voilà. Tu es apprentie guérisseuse maintenant. »

Je sursautai. C'est vrai. Je n'étais plus Boule de Roc mais Nuage de Roc maintenant. Un sourire se dessina sur mon visage. Je me sentais fière. A ce moment là, je pris conscience du spectacle qui s'offrait à nous. Le soleil se levait, resplendissant, baignant de sa chaude lumière les alentours.

« Tu ne devras pas parler de ta cérémonie, elle est très sacré. »

J'hochai la tête, quoique un peu déçue de ne pas pouvoir en parler à mes parents à Petit Espoir ou à mes sœurs qui avaient elles aussi rencontré les étoiles.

« Je ferais toujours de mon mieux pour t’apprendre ce que c’est d’être un guérisseur. Tu verras, c’est une vie difficile parfois, mais… Si au fond de ton cœur tu sens battre cette volonté de venir en aide aux tiens, ta vie ne sera que bonheur. Je n’ai jamais été autant épanouie que maintenant. »

Je plantais un regard plein de détermination dans le sien. Je savais que je voulais mener cette vie. Je ne pouvais pas encore comprendre toutes les conséquences d'être guérisseur. Mais je savais que c'était ce que je voulais faire.

"Je sens que c'est vraiment ce que je veux faire. Je le sais, je le sens. Je ferai de mon mieux, je te le promets Feuille de Saule."

Je me hâtai de rejoindre mon mentor qui avait commencé à reprendre la route. Je pris soudain les devants, prise d'une vive envie de dévaler la colline à toute allure. Hâte de rentrer à la maison!

THE END