//TW flirt// Bonjour très cher~ | ft Fifou - end

Bonjour très cher~(6)


Sur une énième phrase cynique de ma part, le chat arboricole pointa de la griffe mes paroles acides. Encore ce ton. Il faut dire qu'avec ce qui arrivait dernièrement, je le sortais de plus en plus, très amer sur les politiques des derniers chefs. L'hypocrisie prenait le dessus à l’honnêteté, et j'imaginais que le clown en moi forçait les remarques sarcastiques. Quand on le remarquait, les chats se mettaient souvent en rogne. Mais Coup de Foudre fut le premier à se demander pourquoi j'étais en rogne. J'allais répondre "Oui, mon ton ?" mais le guerrier avait dispar-

La branche se secoua violemment, mes griffes s'ancrèrent rapidement à mon support, par peur de chuter à nouveau. Qu'est - ce que.. Qui ? Quoi ? Je retournais ma tête, encore marqué par la secousse. Le Bengal était désormais derrière moi. C'était lui qui m'avait fichu une telle frousse ! Je galérais tant bien que mal à lui refaire face, c'était la moindre des choses quand on était poli, et le voilà qui s'avançait subitement vers moi. Mince, plus le temps de faire demi tour pour changer de branche et jouer à chat. Il en profita pour énumérer ses observations. Il avait donc croisés quatre mâles du Vent, qui n'avaient pas joué les insensibles, et qui avaient une dent contre les collègues claniques. Je lui aurais témoigné beaucoup plus d'intérêt si je n'étais pas coincé entre lui et le tronc, la chute me guettant si je bougeais plus mes pattes en arrière.

Ses coussinets contre mon torse m'imposèrent de m'asseoir, ce que je fis sagement, conscient que l'expert des arbres entre lui et moi, c'était le charcoal. Il précisa que mon clan avait été malpoli. " Je m'en excuse si quelqu'un vous a blessé~ " Le félin sombre continua son "exposé" sur les mâles fuyant le clan. Sur moi, précisément. Qu'on m'avait fait quelque chose. Je relevai un sourcil, un sourire impressionné face à sa compréhension. Je ricanai un peu lorsqu'il me nomma Bourrasque. C'était plus classe que Moineau, je fus flatté. Et si je leur en voulais. Mon ricanement fut emporté par le ronronnement gras de mon interlocuteur. Plus légèrement cependant. Mais quand il me sorti des noms comme "Petit Serpent" et "Lapin", je ne pus m'empêcher de m'esclaffer de rire.

" Pouahahaha ! Tu me dis des noms, mais qui me disent absolument rien-hinhinhin ! "

Je me posai plus sereinement sur mon bout de branche lorsqu'il se recula un peu, mon corps encore secoué de petits rires. J'inspirai un grand coup.

" En effet, on m'a fait quelque chose. Je ne sais pas ce que Petit Serpent et Lapin t'ont raconté, mais tout le clan n'est pas haïssable. Des chats ont encore leur tête sur les épaules et l'esprit ouvert. D'autres.. sont aussi fermés que.. que nos frontières tiens, aha ! "

Je passais ma langue sur ma Marque.

" Tu l'as vue, qui ne la verrait pas ? Nos chefs ont décidé que parler aux étrangers étaient une trahison punissable. " Je tournai la tête pour montrer la croix. " Et ceci est la fameuse punition. La Marque. Etoile Tropicale m'a jugé trop bavard. Ehehe, ça ne m'a pas fermé le bec, comme tu peux remarquer ! "

Je secouais la tête, toujours déçu par des méthodes aussi barbares pour un fait aussi peu grave. Parler quoi, à d'autres chats, interdit ! Depuis combien de lunes en plus ? Vingt ? Trente ? Je repensais à la conversation, ce que je pourrai y rajouter d'intéressants et... EH !

" EHOH, t'es un malin toi ! " dis - je souriant, plus plaisantin qu'agressif. " T'as totalement évité ma question de base ! Coquin !! "

Je m'avançais et fis voler une patte dans les poils de son poitrail.

" C'est aussi interdit de savoir pourquoi l'odeur du Tonnerre est devenue un peu aquatique ? "

Je m'assis, ronronnant, comme un chaton à qui les anciens allaient raconter une histoire.

" Ça m'intéresse fortement après tout ! "

— Pouahahaha ! Tu me dis des noms, mais qui me disent absolument rien-hinhinhin !

Là haut sur la branche de leur orme, Coup de Foudre décocha un coup d'oeil en biais au chat du Vent, passant une longue lapée sur la patte qu'il avait levée près de sa bouche en couvrant sa "Marque" à lui. « Si personne ne me donne son nom... » il se tut sans terminer, feignant l'insouciance en fermant les paupières et en levant très haut ses sourcils.

— En effet, on m'a fait quelque chose. Je ne sais pas ce que Petit Serpent et Lapin t'ont raconté, mais tout le clan n'est pas haïssable.
Coup de Foudre n'entrouvrit qu'un seul oeil, pesant sur Bourrasque un air incrédule.

— Des chats ont encore leur tête sur les épaules et l'esprit ouvert. D'autres.. sont aussi fermés que.. que nos frontières tiens, aha !

Coup de Foudre termina sa lapée en le joignant dans son rire, tout bas, sous cape, à peine audible pour ne pas que des oreilles indiscrètes en contrebas ne puissent les prendre en flagrant délit. Ah - mais rien que d'y penser lui envoya la décharge d'un frisson illicite, et les braises de plus tôt rougeoyèrent à nouveau sous ses pattes. Il... s'amusait. Il s'amusait, et avec quelqu'un qui s'amusait autant que lui. C'était familier, c'était,

— Tu l'as vue, dit Bourrasque en se pourléchant la babine, attirant ses yeux sur la cicatrice, qui ne la verrait pas ? Nos chefs ont décidé que parler aux étrangers étaient une trahison punissable.

Alors il ne s'était pas trompé: ce n'était pas un vestige de guerre ou de bataille, c'était une Marque, délibérément creusée dans la chair de ce pauvre chat moucheté afin de faire de lui un exemple. Ledit pauvre chat moucheté tourna la tête, offrant à Coup de Foudre son plus joli profil:

— Et ceci est la fameuse punition. La Marque. Bingo. Etoile Tropicale m'a jugé trop bavard. Ehehe, ça ne m'a pas fermé le bec, comme tu peux remarquer !
— Hmm... D'abord l'apprentie kidnappée, puis des "marques de traitres", réfléchit à voix-haute le Lieutenant, veillant à faire lui-même une Marque dans son esprit afin de ne rien oublier de ces révélations.

Vous me diriez: et si Bourrasque lui mentait? Mais c'était impossible. Il n'inventait pas le ressentiment qu'il avait envers son Clan et ce ton, qui lui échappait parfois, était porteur d'une profonde souffrance. Non- d'une profonde... insatisfaction, ce qui était une pensée qui lui revenait souvent en s'adressant à des chats du Clan du Vent.

— « --EHOH, t'es un malin toi ! On sortit Coup de Foudre de ses pensées et il rondit les yeux de stupeur. T'as totalement évité ma question de base ! Coquin !!
— Je ne vois pas de quoi tu parles ~ Un sourire lui prit aux babines, et le pépiement d'un rire lui échappa lorsque son interlocuteur le repoussa d'une patte. -- Eh! Ha hah hah hah! Coup de Foudre lui renvoya le coup de l'autre, rénergisé par le contact.

— « C'est aussi interdit de savoir pourquoi l'odeur du Tonnerre est devenue un peu aquatique ?

Bourrasque s'assied mais Coup de Foudre n'en avait pas fini, lui renvoyant un autre coup de patte en visant plus haut, en cherchant à se décaler par le côté, son ronronnement s'entrecoupant dans ses mouvements.

— Ça m'intéresse fortement après tout !
— Ce serait trop facile de tout te donner dans le (piqué par le jeu, il envoya ses deux antérieurs au poitrail duveteux de son interlocuteur) bec, non? ♡ et l'accota au tronc de l'arbre.

Sa queue trahit son amusement derrière lui, ses griffes firent mine de sortir de leurs fourreaux mais juste pour gratter superficiellement la peau. Il ne se souciait de plus rien d'autre que le chat, ses rayures, la marque à ses babines et ses mots:

Je te retourne la question : qu'est-ce que TOI, tu soupçonnes?

Bonjour très cher~(6)


Quand je lui la mis sous le yeux, son regard tomba de façon plus insistante sur ma Marque. D'habitude cela me démangeait, car les chats la regardaient avec ces yeux qui disaient "Ah quel traitre". Mais ses yeux à lui parlaient plutôt.. d'intérêt, de curiosité. Je ne pus m'empêcher de faire le beau devant ce regard dévorant. Il répéta les informations que je lui avais donné et- quoique, l'apprentie kidnappée ? On lui avait parlé de Soleil ? Cela devait faire un moment alors, que des chats du Vent se languissaient de rencontres diverses aux Quatre Chênes. Si Coup de Foudre répétait à haute voix ce qu'il ne voulait pas oublier, je gravais mes découvertes dans un coin de ma tête. J'étais sûr qu'elles allaient bientôt me servir.

Ensuite, quand je l'accusai de détourner mes questions, il fit les yeux ronds, innocent. Je fronçais mes sourcils, joueur. Les rires naquirent avec les jeux de pattes, petits contacts qui étaient le début d'une entente plus tactile à l'avenir. D'ailleurs, je reçu un autre coup de patte sur l'épaule. Puis deux pattes dans le poitrail, me donnant un frisson dans toute la colonne. Me voilà poussé contre le tronc, je lâchai un bref ronron d'agréable surprise. Là, j'étais sûr de ne plus tomber~ Il rebondit sur mon bec. Je pouffai en crescendo.

" C'est dommage, il est grand ouvert pourtant ! "

Les queues s'agitaient sous la branche, la mienne chassant joyeusement de gauche à droite comme un canidé. Je laissais mon poids un peu plus allez en avant pour renforcer l'appui de ses pattes contre mon torse. La situation amusante et stimulante devait faire taper mon coeur contre ses coussinets. Ce que je soupçonne ? Je tendis mon cou pour rapprocher nos museaux.

" Tu triches encoore ! Moi je t'ai directement expliqué ma Marque, non ?~ "

Je soufflai sur sa truffe en guise de punition. J'osais risquer d'amoindrir ma zone d'équilibre en levant une patte à mon menton coiffé en pointe, penseur.

" Mais je vais jouer le jeu. Alors hum je soupçonne.. Même, j'espère que deux des quatre Clans ont enfin eu de la jugeote et ont décidé de s'entraider ! ♪ "

— « Tu triches encoore !
— Qui, moi? ♡
— Moi je t'ai directement expliqué ma Marque, non ?~

Oui, et tout à fait, même, mais Coup de Foudre n'avait pas l'intention de jouer fair-play, répondant à la (légitime) accusation en renvoyant au chat gris son plus beau sourire; Bourrasque lui souffla dessus. Immédiatement le bengal recula sa tête, étouffant un rire en éternuant de côté, perdant l'appui de l'une de ses pattes en la repliant momentanément avec la traction vers l'arrière. Suivant cet intermède il poussa davantage l'autre chat dans l'écorce, roulant ses épaules, étirant le jarret d'un postérieur pour solidifier son fox-trot, nouant les muscles de son grasset.

— Mais je vais jouer le jeu. Pas comme s'il avait d'autre choix. Alors hum je soupçonne...

Bourrasque monta sa patte à son menton, jouant avec les poils d'un début de barbiche. Le bengal dut se faire violence pour ne pas se laisser distraire - la barbiche, les joues, la Marque, tout était à portée de bouche et son sourire n'en finissait plus de s'aiguiser tandis que derrière lui sa queue s'impatientait, trahissant cette froide désinvolture de plus tôt, cette simili-contenance qu'il s'était donné pour désarmer son interlocuteur.

— Même, j'espère que deux des quatre Clans ont enfin eu de la jugeote et ont décidé de s'entraider ! ♪

C'était... bizarre, à quel point toutes les réponses du chat gris à rayures étaient différentes de ce à quoi Coup de Foudre s'était attendu. Son oreille guérie tiqua, agitant les poils dedans, faisant passer l'air dans les tout petits trous qui avaient été poinçonnés à l'extérieur.

« Ohoh, gagner, perdre... Il faut être en compétition pour cela ! Je pensais plus à... de l'entraide. »

Est-ce qu'il lui mentait? Est-ce que des chats s'étaient passés le mot? Est-ce qu'une escouade suivait le moindre de ses mouvements depuis son ascencion au rang de lieutenant pour cueillir au mot-près ce qui sortait de sa bouche? Coup de Foudre sentit comme une vague de calme le prendre en scrutant le fond des yeux bleus de cet intrus du Clan du Vent. S'il avait menti il l'aurait su... non? Était-il encore en train de le miroiter, ou s'était-il fait prendre à s'observer dans le miroir? Il n'en avait aucune idée.

Il n'en avait aucune idée.

— ...

Tu es comme moi, il entendit "Petit Serpent" lui siffler dans l'oreille, mais là où Petit Serpent n'avait vu de Coup de Foudre qu'une ambition née du désespoir du chaos politique dans le Clan, Bourrasque, lui... Et Coup de Foudre sentit ses yeux s'ouvrir un peu plus et sa garde descendre, et son excitation se calmer, et sa poigne se radoucir.

— "Jugeote", hein... »

Il finit par lâcher, lâchant derechef Bourrasque à se rasseoir sur la branche sans ne plus être accroché au tronc.

— « La canicule a frappé tous les Clans, tu sais?  À un mot près, qu'est-ce que ces propos étaient nostalgiques. Quelqu'un t'as dit que la Rivière s'est asséchée?

Bonjour très cher~(lune 66)


Les sourires étirés se miroitaient tant, que si nous nous connaissions plus, j'étais sûr qu'ils se seraient déjà mélangés. Sa réaction plus insistante quand je l'avais légèrement repoussé avec mon souffle, j'avais cru au début d'un crescendo. J'avais cru que notre amusement -cela faisait longtemps, je ne voulais pas qu'il cesse- commençait son ascension vers son apogée mais... Quelque chose lui déplu dans mes paroles ? Le voilà refroidit, ses babines reprenant leur place initiale, tout comme ses pattes, ce qui me laissa retomber un peu gauchement sur mes antérieures. Sursaut d'une oreille, deux yeux ronds et jaunes qui reprenaient calmement la conversation.. Et moi, assis comme un con sur une branche, le cœur encore excité d'avoir été pressé, voir fusionné avec le tronc. Le sourire resta aussi, mais de joueur, il devient confus. On... ne se cherchait plus ? Il avait lâché "jugeote" avant de me lâcher, mais d'un ton détaché. Il ne se pensait pas doté de jugeote ? Pourtant, notre discussion était la plus élevée que j'avais eue depuis des lunes ! Seules celles sérieuses avec le serpent pouvaient rivaliser avec ! Et encore, il n'y avait pas, ou plus, dorénavant qu'il était concentré à devenir chef, cette ambiance de simple plaisir.

Mais si la soudaine disparition du bon temps me déboussola, la détresse infime qu'avait laissé échappé le bengal me frappa en plein dans mon altruisme. Il était vrai que dès que je l'avais vu, je m'étais dit "Oh, quel chance ! Le Coup de Foudre ! Selon ce que je sais sur lui, on va bien s'amuser." Et ce fut vrai, un instant ! Or, comme je le répétais souvent à ceux qui me cassaient les pattes... un chat est un chat. Et aucun chat n'était tout blanc ou tout noir. Toujours un petit poil qui vient changer de couleur ! Avais - je touché ce poil chez Coup de Foudre, me laissait - il voir toutes ses couleurs ? Tout comme trouver la source d'un arc-en-ciel était compliqué, trouver la source de ses couleurs et de ses réponses n'était pas de tout repos. Mais quand un chat me plaisait, je le prenais -sans pensée sale- tout entier. Tout ou rien avec moi !Comme Coeur de Marbre ! Un gros râleur ! Et je l'adorais comme cela. Donc si je devais aller ou bout de l'énigme. J'y irais.

Puis résoudre le mystère sur lequel il m'emmenait, c'était une autre façon de s'amuser, non ?

Décider à avoir le fin mot de ma réponse, je m'assis plus de lui, formant une bulle privée de réflexion à nous deux. Quelqu'un m'a dit que la Rivière était asséchée ? Cela coulait de source oui ! Enfin, ne coulait plus de source. J'agitais mes moustaches.

" Peu me l'ont dit mais c'était une chose logique à deviner avec ces chaleurs. L'eau disparaît. Et toi, quelqu'un t'a dit que les terres du Vent avaient pris feu ? "

Petit sourire quand je lui avais renvoyé la balle de mousse. Renvoyé une question qui était en soit, un peu une réponse.


..

Aah, si les chats du vent savaient que je racontais tout ce qu'ils cachaient depuis des lunes, ils s'arracheraient ma fourrure.~

Les jeux s'étaient dissipés, du moins à moitié. Il y avait encore cette espièglerie dans les yeux bleus de l'autre mâle mais Coup de Foudre se retenait de l'amorcer à nouveau - il y avait plus important. Et autant il se fit sincère, avec sa question, Bourrasque lui rendit la pareille, bien qu'il retint quelque plaisanterie derrière un petit remuement des moustaches.

— « Peu me l'ont dit mais c'était une chose logique à deviner avec ces chaleurs. L'eau disparaît. Et toi, quelqu'un t'a dit que les terres du Vent avaient pris feu ?

Les deux oreilles du bengal allèrent se tirer vers l'arrière, mais devant, il ne grimaçait pas, ne sachant trop comment digérer l'information. Il tiqua de la langue:

— Tsk ...Vous aussi?

Le feu de broussailles près des Rochers des Serpents, Braise, la fumée, le chat puant la Suie... Le Bengal tiqua de son oreille saine - gouvernail au bateau de sa raison, fixant sans ciller son informateur volontaire. Sa queue chassa l'air d'un côté comme il chassa peine, regrets, remords, et tout le deuil qu'il avait été forcé à vivre depuis qu'ils avaient subis la canicule de l'été dernier.

— Revenons en à ta question: trop de chaleur, plus de Rivière.

Pas de Rivière, pas de poissons, pas de poissons, ...?

Il n'y avait, en tout et partout, aucune façon de savoir si l'autre chat lui mentait, car Coup de Foudre n'avait rencontré aucun chat du Clan du Vent aussi enclin à vendre si vite leurs secrets. Il n'avait pas de témoignages à comparer. Il manquait d'informations - son intuition était aiguisée, certes, mais elle avait ses limites, quand bien même il était capable d'en voir beaucoup, il n'était pas capable de tout voir. Aussi plutôt que de gaspiller sa matière grise avec tout ces "et-si", le bengal s'arrêta aux pires conclusions: tout d'abord, que la "malpolitesse" du Clan du Vent signifiait qu'ils planifiaient bel et bien quelque chose. Ensuite, que Bourrasque était réellement un espion qu'on avait envoyé l'amadouer - qui sait si l'histoire de la marque n'était pas fausse, elle aussi?

Qu'il se trompe ou non sur son compte ne changeait rien. Qu'il soit sincère ou non, Coup de Foudre n'avait rien à craindre: au mieux l'autre se ratait et dévoilait son jeu, au pire il se laissait amadouer et le statut quo changeait pour lui. Deux victoires - gagnant-gagnant. Entre temps, il apprécierait sincèrement ces faux-semblants, si ils en étaient. Sinon, et si se permettre de se relâcher avec cet informateur lui coûtait la mort, eh bien, tant pis.

Il gagnait là aussi.

Bonjour très cher~(lune 66)


Lors de l'annonce des terres brûlées du vent, les oreilles du guerrier se couchèrent. Mais il garda un parfait contrôle de son visage. Seule sa bouche s'articula pour prononcer : Vous aussi. Plus expressif, je levai un sourcil et mes oreilles se redressèrent par surprise.

" Vous aussi ?"

Je le répétais aussi pour souligner ma surprise que pour confirmer ce que j'avais entendu. Le Tonnerre avait aussi eu des problèmes avec le feu du soleil. Nous ignorons tant des voisins opposés, sans aucune frontière pour discuter et échanger. Heureusement qu'il y avait les arbres au final, seul lui de rencontre pour un chat du Vent et un chat du Tonnerre. Cependant, nous ne nous étalâmes pas sur les incendies et il eut la gentillesse de revenir à nos poissons. Car il me tendit la perche que, s'il n'y avait plus de rivière, il n'y avait plus de poissons, et pour la suite...

"Pas de poissons, pas de nourriture. "

Malgré moi, la maigre pile de gibier qui a suivit la canicule ou le blizzard revint dans mes yeux. Les corps aussi maigres que cette dernière suivirent rapidement.

" Pas de nourriture, pas de bonne santé. "

Et les chats étaient si faibles au vent, dire que personne ne voulait me croire quand je disais que notre sang était malade... Malade.

" Pas de bonne santé, la maladie s'installe et c'est le plus coriace des combattants. "

Ma queue cessa de chasser derrière moi. Si je n'aimais pas beaucoup d'esprits étroits dans mon clan, je m'inquiétais tout de même pour eux. Des personnes importantes s'y trouvaient, et je ne souhaitais la mort de personne. Un jour, des chats m'écouteront et on pourra se bouger pour sauver un peu notre sang, sauver ces chats. Et l'isolation ne nous apportait rien de bien. Preuve juste ici, quand on comparait comment la Rivière s'en sortait et nous.

" Au moins ils ont de gentils voisins pour les aider ! " miaulais - je avec une pointe de tristesse. Je fis couler mon regard du Bengal au sol. " Ou ils ont au moins eu la modestie d'accepter de l'aide extérieure quand il en fallait. "

Car là, la fierté du Vent, fierté débile, nous perdra.

— Pas de poissons, pas de nourriture. Inutile de le relancer, Bourrasque avait vite compris le jeu. Chaque déduction l'avançait un peu plus vers la réponse à sa question. Pas de nourriture, pas de bonne santé. Chaque déduction faisait aussi ralentir peu à peu le mouvement de sa queue. Pas de bonne santé, la maladie s'installe et c'est le plus coriace des combattants. »

La réalisation tomba comme une sentence. Elle refroidit ses ardeurs, et s'il avait réchauffé celles de Coup de Foudre, plus tôt, désormais ils étaient tout deux sur la même longueur d'ondes. Le bengal opina du chef, quoique sobrement, pour confirmer son soupçon au chat du Clan du Vent: comme eux, ils avaient souffert d'un incendie. Comme eux, ils avaient soufferts du manque d'eau, de la maladie - mais la Rivière en avait souffert davantage, car elle avait été privée d'un de ses plus essentiels besoins. Il jugea prudent de ne rien dire au sujet des vies de leur meneuse - l'état dans lequel il l'avait surpris, sur la Rivière glacée, le jour de leur entente avec son nouveau Lieutenant Brasier Glacial, l'avait tellement frappé qu'il n'avait pas été capable de se retenir d'en faire le commentaire. Mais Bourrasque pouvait se faire ses propres idées.

— « Au moins ils ont de gentils voisins pour les aider ! Il voulut se faire enthousiaste mais la tristesse de la réalité le rattrapa aussitôt. Il baissa les yeux. Ils ne se regardaient plus.

— Ou ils ont au moins eu la modestie d'accepter de l'aide extérieure quand il en fallait. »

Une juste déduction, se retint de le féliciter le bengal. Au lieu de quoi il sourit, tenant là sa réponse de plus tôt. Il n'était pas comme Vent, ou "Lapin", ou "Petit Serpent" - Bourrasque était différent, et cette remarque fit s'alléger un poids de méfiance des épaules du charcoal. Il se permit de tiquer de la langue, retrouvant juste un peu de chaleur sous ses pattes:

— « Nt-- Si tu savais.  ...Étoile d'Or est tellement têtue, il lâcha avec ce petit ton d'amusement dans la voix. Mais, les faits sont ce qu'ils sont; la canicule a bien du faucher le tiers des chats au Tonnerre, et peut-être davantage à la Rivière. Avant qu'on le sache, on s'est retrouvés avec un surplus de proies, et des voisins non seulement malades, mais affamés.

Le reste coule de source.

Allégé, il se permit de pencher la tête et de verser son poids dans un antérieur pour se gratter l'oreille d'un postérieur, nonchalant.

— ...Ou, enfin, coulerait, car aucun côté n'est, disons, enchanté d'ouvrir les Frontières de la sorte.  Ça devient lassant à la fin.

Bonjour très cher~(lune 66)


La conversation était bien moins excitante qu’il y a quelques instants, mais on était arrivé à la réponse que je cherchais. Que se passait-il entre le Tonnerre et la Rivière. J’aurais du m’en douter après tout, que la bonne nouvelle des ouvertures des deux clans devait provenir d’un malheur de l’un ou l’autre. Après tout, si je ne cherchais pas secrètement -pour ne pas me reprendre une marque- à guérir le sang du clan, me serais-je intéressé à l’idée de mélanger les clans, ou en tout cas d’échanger sans jugement ? C’était sûr que l’on ne pensait pas à cela quand on se croyait plus fort que tout le reste, fermant les yeux sur nos problèmes pourtant réels.

Enfin soit. Étoile Tropicale était aussi, voir plus têtu que moi et ne voudrait rien entendre de plus de ma part. Le bengal me parla qu’Etoile d’Or aussi était têtue. Je lâchai un rire unique, n’imaginant pas la belle rousse faire une crise comme Nuage Gelé. Une vraie mule elle aussi. Mais le chef et le lieutenant -d’autres rumeurs dans mes oreilles me soufflèrent que c’était Coup de Foudre le lieutenant, mais je lui avais déjà posé beaucoup de questions- ont réussi à soit bien lui parler, soit lui graisser la patte. Peu importe la manière, seul le résultat comptait. Des chats en sécurité.

La branche se secoua à nouveau quand le charcoal se gratta l’oreille. Mes griffes sortirent pour me fixer une énième fois à l’écorce et ma fourrure s’ébouriffa. La chute me guettait. Et selon mon interlocuteur, les chats guettaient aussi. Ils guettaient ces « intrus » chez eux, ils guettaient avec impatience un signe de leur chef, ordonnant qu’on referme les frontières. Ouvrir cette marque invisible, c’était aussi douloureux pour eux que d’ouvrir une plaie. Trop soudain, cette observation m’a rappela une phrase d’un lieutenant noir et blanc qui tentait de calmer les ardeurs de mes idées

" Il faut faire les choses petit à petit, sinon les chats se braquent dans ce qu’ils connaissent depuis leur naissance. J’imagine qu’un tel changement doit beaucoup bouleversé les plus .. sensibles à cela. "

Je retrouvais mon sourire. Oui, petit à petit, s’il y avait des chats motivés dans chaque clan, des solutions seront trouvées. J’inspirais avec calme, profitant de ce moment d’espoir. Je vis le soleil et constatait qu’il avait fort avancé dans sa trajectoire. Si je ne voulais pas ravoir des problèmes, je devrais me mettre en route. Rah on dirait un chaton qui devait rentrer à la pouponnière ! C’était affligeant. Je me levai doucement.

" Eh bien, merci beaucoup de ton temps. C’est pas souvent qu’un chat veut bien me répondre ou me parler sans feuler. Ça fait plaisir. "

Je me dirigeai vers le tronc avant de voir la distance qui me séparait du sol.

" Eeuuuuh et je compte abuser de ton amabilité une dernière fois. Tu pourrais m’aider à descendre sans trop de casse, s’il te plaît ?~ "

Et je lui fis mon plus beau sourire, la queue haute, un peu recourbée. Une pose pour me mettre en valeur et sous entendre que ce serait triste d’abîmer tout ça~

Ça devient lassant, lorsque les seuls chats capables de comprendre ses intentions se comptaient à peine sur les griffes d'une pattes. Patte, qui, au fil des cycles, se mutilait d'un doigt à chaque fois ; d'abord Tournesol, puis Museau Bleu, Firmament, et--

— Il faut faire les choses petit à petit, sinon les chats se braquent dans ce qu’ils connaissent depuis leur naissance.

La branche cessa de se secouer et lentement, le bengal reposa son postérieur dessus, versant sa tête en se penchant exagérément devant son interlocuteur. Ses oreilles s'agitaient, ses pupilles s'étaient dilatées dans ses yeux, il en oubliait sa méfiance et son jeu d'apparences et s'il cligna, c'était pour immortaliser le pelage de cet autre chat. J’imagine qu’un tel changement doit beaucoup bouleverser les plus .. sensibles à cela.

Bourrasque sourit, Coup de Foudre cligna des paupières par trois fois - une fois pour s'assurer que c'était réel, une autre pour se rendre compte que oui, et une troisième pour internaliser le message.

Ses griffes grattèrent l'écorce de la branche, en ressentant le chatouillement d'un doigt fantôme y pousser. Faire les choses "petit à petit", hein? C'est vrai. Il n'avait pas cessé de rogner son ancien lui jusqu'à ce qu'il ne reste plus que cette peau neuve, mais il ne s'était pas refait en une nuit. Le "Clan" devait-il être traité de la même façon qu'un autre chat? Avec ses propres moeurs, ses propres pensées, ses propres préjugés, ses lacunes, ses peurs...? Non plus comme une collectivité née des maux des individus la constituant? Pendant qu'il y réfléchissait, son interlocuteur s'était levé sur ses quatre pattes:

— « Eh bien, merci beaucoup de ton temps. C’est pas souvent qu’un chat veut bien me répondre ou me parler sans feuler. Ça fait plaisir.
— Ah-

Bourrasque s'en allait. Il avait la décence de s'en aller après avoir obtenu ce qu'il voulait - ça aussi, ça coulait de source. Mais après lui avoir fait dos (prudemment, pour se diriger vers le tronc), il se campa en baissant le nez pour fixer le contrebas. C'était haut, il devait penser. Il n'avait sans doute pas du y penser lorsqu'il s'était préoccupé à grimper.

— Eeuuuuh et je compte abuser de ton amabilité une dernière fois. Tu pourrais m’aider à descendre sans trop de casse, s’il te plaît ?~

Bourrasque lui sourit de toutes ses dents, canines pointues, se remettant en valeur en remontant sa queue d'une courbe agréable mais Coup de Foudre ne suivit pas le mouvement. En fait, il n'avait pas lâché ses yeux. Il ne s'était pas levé de sa position, non plus, calmement assit, sa queue à lui pendant de la branche en oscillant à la brise. Un ange passa et il pencha sa tête:

— Oh- toutes mes excuses!

Ha hah, croyais-tu que j'avais l'intention de te laisser redescendre?

Son ronron reprit et il s'arracha de tout, du précédent sérieux, de l'espièglerie de plus tôt, couvrant ses yeux d'un superbe qui lui avait presque manqué en miroitant au joli mâle son si joli sourire:

— Je ne t'ai pas entendu te plaindre, lorsque je t'ai collé à ce tronc ♡