Les pattes velues | Petite Araignée

Les feuilles, petites et vertes, donnait aux parois du buis une texture bien particulière que Petite Pie tenait en horreur. L'intérieur était pire, comme dénudé, comme des entrailles, l'on voyait les veines de bois grimper partout autours d'eux et le sol nu, marron, enlaidissait le tout. Pie aimait les belles choses, comme les pommiers, les fleurs ou les papillons - mais pas de trop près, leurs yeux étaient d'un immonde...

Mais ce que Petite Pie tenait le plus en horreur, bien sûr, c'était les Araignée. Elles étaient petites, faibles, mais réellement laides.
Alors, lorsqu'elle en vit une entre les bras cadavériques de l'intérieur du buis, elle poussa un piaulement paniqué. Puis, son sursaut passé, reculant vers la sortie de leur abris, elle se rendit compte de la présence d'une autre petite bête velue.

Celle là était aussi grande qu'elle et n'avait, en plus de n'avoir rien de dangereux, que quatre misérables pattes.
Alors, une idée vint dans la tête de Petite Pie et elle laissa un sourire apparaître sur sa face mesquine. Elle se redressa, oubliant la bête et elle s'approcha dans le dos de sa soeur.

Discrète, elle mima ce qu'elle pensait être une position de chasse. Accroupie- Mais pas trop bas ! Elle n'aimait pas salir son ventre - elle s'avança et, quand elle fut assez proche de son dos rayé, elle se redressa, pliant ses pattes arrières et se tenant droite sur les avant.

« BOUH !! » Hurla-t-elle de toutes les forces que sa petite voix cristalline lui permettait d'atteindre.

La queue battante, elle se laissa tomber sur l'arrière train pour éclater de rire. Même si Petite Araignée ne prenait pas, elle rirait : cela lui donnait l'avantage.

Ca avait été encore plus satisfaisant que prévu. Non seulement Petite Araignée avait fait un bon mémorable, mais en plus, elle s'tait réceptionnée sur la truffe ! Et Petite Pie ne pouvait plus s'arrêter de rire. Tu parlais d'un chat ! Maman disait toujours qu'ils retombaient sur leurs pattes, eh bien, sa petite soeur devait tenir plus de l'araignée que du félin.

Et puis, voilà qu'elle se mit à chouiner. Ca agaçait toujours Petite Pie, quand elle faisait ça. Elle ne comprenait pas, il n'y avait rien de grave et si elle s'était fait mal, ce n'était que de la faute à sa maladresse. Alors, elle cessa de rire et se contenta d'un sourire mauvais.

« Pour...Pourqu...Pourquoi tu .....fais...çà ?
- Ca quoi ? » Elle se dressa sur ses quatre pattes, la queue droite dans une caricature ridicule de fierté. Elle se prenait souvent pour plus grande qu'elle ne l'était et n'avait certainement pas la maturité d'une adulte, comme elle aimait à le croire.

Elle s'approcha de sa sœur et redressa le poitrail, pleine d'arrogance.

« Te faire peur ? Voyons, Araignée- Je comprends pas pourquoi tu le prends autant à cœur ! » Et, du bout de la patte, elle frappa la poitrine de sa sœur, à l'emplacement supposé du cœur. Elle gloussa, toujours aussi mauvaise et passa à côté d'elle, collant son flanc au sien dans une étreinte qui avait tout de sardonique.
Et, dos à elle, elle se rassit en soupirant.

« C'était une blague ! Tu aurais dû voir ta tête ! » Et elle roula des yeux, inspectant vaguement ses griffes.

Y'avait du mouvement près de là où ils dormaient la nuit. Du mouvement, et des voix. Lune, qui se faisait les dents sur une branche, non-loin, la lâcha aussitôt qu'elle vit le bout du nez d'Araignée se pointer dehors.

Suivie d'Araignée toute entière.

Sa fourrure était grosse parce-qu'elle était gonflée parce-qu'elle avait peur.

Lune ne croyait pas avoir déjà vu Araignée sans ses yeux aussi ronds que son dos.

Lune ne croyait pas avoir jamais vu Araignée sortir de la tanière avec eux.

— Hé ! lança Araignée, avec quelque chose de différent dans la voix (ou ptêt que c'est juste parce-qu'elle était dehors). Elle s'adressa à Petite Pie. Regarde Petite Pie ! Je suis sortie !

Encouragée par la proximité de ses soeurs, Lune délaissa sa branche, feutrant ses pas comme elle avait vu maman le faire, une fois, profitant qu'Araignée s'adressait à Pie bouffie de fierté et puis...

— BOUH ENCORE !

Chose faite, elle se pencha, offrant un sourire gros comme le monde à l'intention de Petite Pie.

— Ghéhéhé, j'l'ai bien eue! ♫

« Hé ! Regarde Petit Pie ! Je suis sortie ! T'as vu comme t'es trop forte ? » S"écria alors sa soeur, sans prendre en compte une seule seconde le discours de la Pie. Cela la vexa, à dire vrai, de ne pas être écouter, autant que la réaction précieuse de sa soeur l'irrita. Elle était tellement délicate qu'on la croirait fait de-.. De quelque chose de fragile !

Et Petite Pie avait sur le coin de ses lèvres grimaçante d'agacement une réplique bien cinglante à lui cracher. Quelque chose qui mettrait en évidence la faiblesse de l'exploit d'être sortie. Oh, elle pourrait s'en réjouir, de voir Araignée enfin sortir le museau dehors- Mais voilà, Petite Pie ne pensait qu'à elle.

Et elle allait les cracher, ses méchancetés, mais quand elle ouvrit la gueule, une autre voix s'éleva :

« BOUH ENCORE ! »

Sous le coup de la surprise, la gueule ouverte, Petit Pie sentit son pelage se hérisser. Mais contrairement à Araignée, elle se maîtrisait suffisamment pour retenir un sursaut de stupeur et se contenta d'ouvrir deux yeux ronds comme des billes sur l'autrice de ce bruit trop fort.

Quand elle reconnu Lune, sa bouille ronde aux airs trop bêtes, elle afficha un sourire ravit, les yeux toujours grands ouverts sur ses pupilles étrécies en deux fentes.

« Ghéhéhé, j'l'ai bien eue! ♫ » Et, face à son sourire, Petite Pie se sentit complice. Alors, elle bondit vers ses sœurs grises, plissant les paupières avec méchanceté. Elle glissa près de Petite Araignée, se frotta à elle dans un geste faussement affectueux et elle ondula aux côtés de Lune, derrière Araignée.

« C'est pas un exploit, Lune, elle est trop peureuse ! Tu aurais même put le faire sous son nez qu'elle aurait sauter au plafond... Comme une araignée ! » Et elle gloussa, mauvaise, donnant un coup de patte complice, mais délicat, à sa brute de soeur.

Puis, son regard se porta de nouveau à la petite chose tremblante et blanche.

« T'es trop nulle, Araignée. Sortir de la pouponnière, c'est vraiment trop normal. Moi, je suis déjà sortie du camp, même ! »

Même que Petite Pie bondit de joie pour venir la voir et la féliciter. Elle se frotta la joue et l'épaule contre Petite Araignée qui s'était assise bizarrement dans la poussière et l'herbe.

— C'est pas un exploit, Lune, elle est trop peureuse ! Tu aurais même pu le faire sous son nez qu'elle aurait sauté au plafond... Comme une araignée !
— Hahaha!

Comme une Araignée! C'était drôlement amusant à imaginer! Moins pour Araignée, mais c'était un peu de sa faute, d'abord, d'avoir si peur de tout. D'aussi loin que Lune était capable de se rappeler, ce qu'elles faisaient c'était rien que des trucs normal entre soeurs!

— T'es trop nulle, Araignée. Sortir de la pouponnière, c'est vraiment trop normal.

C'est ce que Lune avait dit!

Enfin, pensé.

Mais genre fort.

— Moi, je suis déjà sortie du camp, même ! ajouta Petite Pie, pas peu bouffie de fierté, ce qui arracha un autre gloussement à Lune qui changea le destinataire de son énorme sourire pour plutôt le dédier tout entier à Araignée.

Mais Araignée ne sourit pas, se tassant sur elle-même pour ouvrir grande sa toute petite bouche, pour geindre:

— Maman ! Tata ! Elles ont recommencé ! À l'aide !

Lune fronça des arcades, gonflant les joues, s'avouant un peu confuse de cette réaction pour le moins dispor- ... dix-proporssionnelle à ce qui s'était passé.

— Ben? Elle se tourna vers Petite Pie. Son savoir d'au-delà de leur Tribu faisait d'elle la mieux qualifiée pour comprendre à peu près tout n'importe quand tout le temps. Qu'est-ce qui lui prend?

« Maman ! Tata ! Elles ont recommencé ! A l'aide ! » Petite Pie sursauta et se tourna vers celle qu'elle considérait comme sa plus jeune soeur. Surprise par ce cri strident, horrible, elle n'en comprit pas la raison et ses pupilles fendirent ses yeux.
Elle se sentit soudainement agressée par ce cri, cette panique qui n'avait pas de raison d'être. Ce qu'elle ne saisissait pas, au fond, lui faisait peur et elle sentit, malgré elle, son poil se gonfler alors qu'elle fixait la gamine rayée comme si cette dernière venait d'insulter sa famille sur des générations.

« Ben ? Qu'est-ce qui lui prend ? » La voix de grosse Lune la sortie de ses pensées. Elle cligna des yeux et ses pupilles redevinrent de jolies losanges adaptés à une telle luminosité. Elle se leva sur ses pattes, grimaçant d'un certain dégoût alors qu'elle observa plus attentivement sa soeur.

Et c'est à ce moment là qu'elle remarqua son pelage humide et crasseux.

Oh.

« Hin ! » Ricanna-t-elle. Voilà la raison d'un tel hurlement. Elle s'approcha un peu de Lune et lui tapa l'épaule du bout de sa patte délicate, puis elle lui indiqua le postérieur de sa soeur. Elle lui offrit un regard complice, mesquin, avant de s'approcher un peu d'Araignée.

« Tu hurle parce que tu sais pas te retenir de faire pipi ? T'es un bébé ou quoi ? T'as vu, Lune ? Elle s'est fait pipi dessus pour rien ! » Et elle rit un peu avant de reculer. Toujours souriante, elle fronça le museau, comme si elle fut révulsée par sa soeur, par l'odeur, puisqu'elle glissa sa patte sur son nez. « Oh ! Tu sens si fort le pipi ! C'est horrible ! » Et elle gloussa encore.

Mauvaise.