[INONDATION] Entre les griffes, s'accrochent des promesses [avec Tempête de Suie]

Voilà que plusieurs jours avaient passés depuis l’accident de Nuage de Feuille. Et si Tempête de Suie avait plusieurs fois demandé de ses nouvelles à la guérisseuse, il n’était jamais passé la voir. Il avait trop de questions à poser à l’apprentie et sans doute qu’elle n’était pas en état d’y répondre, c’est ce qu’il se disait. Mais quand même, il aurait bien aimé savoir ce qu’elle fabriquait dehors seule en pleine nuit.

Il aurait du la réprimandée, de ne pas avoir suivit son conseil, que le repos, c’est aussi important que l’entraînement. Mais pourtant, il n’en avait pas le cœur. Après son terrible accident, la novice aurait put y laisser la vie. Il ne savait pas si la mort de Cœur Sauvage l’avait rendu plus sensible ou s’il s’était attaché plus qu’il ne voulait bien se l’avouer à la jeune chatte. Mais, il avait vraiment été inquiet pour son état de santé.

Et aujourd’hui, alors que Jolie Rafflésie sortait de son entre pour se rendre à la pouponnière, il alla la voir pour s’enquérir de la santé de son apprentie. Mais la guérisseuse lui répondit de demander directement à l’intéressée, qu’elle était maintenant pleinement réveillée et qu’un peu de compagnie lui ferait du bien. En soupirant, le mâle gris finit par sa résigner.

Il n’aurait jamais pu échapper totalement à cette conversation, aussi désagréable puisse-t-elle être.

Alors il se dirigea vers la tanière pour y voir la novice. Hormis le soir de l’incident, il ne l’avait pas revue et sembla au premier abord choquée par son état. Elle avait de sacré cicatrices à en juger par son bandage. Et quand Nuage de Feuille bondit presque sur son nid, il sortit de sa légère torpeur.

- Reste allongée, ne fait pas d’effort inutile. Comment vas-tu ? Puis après un silence qu’il trouvait lui-même gênant, il décida finalement de mettre les pieds dans le plat. Il faut qu’on parle. De ton accident.

Une simple question. Il lui avait posé une simple question et voilà que la novice était partie dans un flot de mots et de supplications. Elle lui affirmait qu’elle allait bien, elle insistait étrangement dessus. Et le vétéran ne pouvait que l’écouter sans l’interrompre. Il ne pouvait pas en placer une, de toute façon. Alors il s’assit, en attendant et quand enfin il put parler.

- C’est bon ? T’as fini ?

Il n’attendait pas de réponse, il attendait son attention. Et quand enfin il l’eût, Tempête de Suie laissa régner le silence. Il avait tant de questions à lui poser qu’il ne savait pas par où commencer. Enfin, il devrait bien se lancer à un moment où un autre, donc autant en finir.

- Je n’ai pas parlé d’arrêter l’entraînement, tu es convalescente. Si Jolie Rafflésie ou Serre de Chouette ne t’estiment pas prête à reprendre, tu ne reprendras pas l’entraînement, un point c’est tout. Par ailleurs, respecte un peu plus Jolie Rafflésie, tu lui dois la vie.

En fait, le matou n’arrivait pas à garder sa contenance. Sa colère et sa frustration, ou sa peur il ne sait pas lui-même, explosèrent au visage de l’apprentie quand il se mit à lui crier dessus.

- Je sais même pas si tu te rends compte que t’as faillit MOURIR ? Pour l’amour du Clan des Etoiles, que faisait tu dehors seule à une heure où tu aurais dût être dans ton nid en train de dormir ? Que faisais-tu dehors ? J’ai besoin de savoir ! Pourquoi te mettre bêtement en danger ? C'était idiot de ta part d'avoir fait ça ! Tu n'avais rien à faire dehors ! Je ne vais pas poser une question agréable, mais est-ce que t’as une relation hors du Clan ? Amoureuse, j’entends.

Il n’était pas du genre à cause gratuitement de traitrise, sauf certains qu’il n’aimait vraiment pas, mais, là, pour lui, la question était légitime. Il avait réfléchit à toutes les situations qui auraient pu pousser l’apprentie dehors et rien ne lui avait parût plus sensée que cette situation, finalement.

En réponse à sa question, Nuage de Feuille rit. Elle rit aux éclats devant l’absurdité de la question de son mentor. Et lui, ça l’agace en premier lieu. Encore une fois, Tempête de Suie lui hurle dessus, lui ordonnant d’arrêter de rire.

Mais quand il prend le temps d’y réfléchir, finalement, sa réaction le rassure. La question paraissait absurde. Ce genre de chose se voit, s’entends. Des rumeurs circulent, qu’elles soient fondées ou pas, par ailleurs. Et il n’avait rien entendu de tel sur Nuage de Feuille. Il s’avait d’avance sa question absurde. Et la réaction de la novice le prouvait. C’était tellement impensable qu’elle en avait un fou-rire. Et il en vint à se dire qu’à son âge, il aurait sans doute eût la même réaction en premier lieu. Après, il aurait passé son mentor à tabac pour l’affront. Suie soupira un coup pour se calmer et reposa le regard sur Nuage de Feuille.

- Bon, très bien, ma question est conne, je l’admets. Mais ça ne me dit pas ce que tu faisais dehors en pleine nuit. Que cherchais-tu à faire ? J’ai besoin de comprendre.

Tempête de Suie insiste. Il veut savoir ce qu’elle faisait dehors. Nuage de Feuille souffle, ça le fait froncer des sourcils. Comment osait-elle ? Il retroussa légèrement les babines, prêt à lui faire un rappel à l’ordre. Puis, elle lâche l’info. Elle était partit s’entraîner. Seule. En pleine nuit. Puis il l’avait attrappé.

Et maintenant, le silence était roi dans la tanière. Il y avait tant chose à dire qu’il ne savait par où commencer. Et cette colère qui l’avait gagné presque instantanément. Le vétéran ne sut dire ce qu’il aurait préféré entendre comme raison. Mais la raison que lui avait donnée la femelle, il aurait préféré ne pas l’entendre. Ça lui paraissait… insensé. Et plus il y pensait, plus il s’énervait. Alors, le matou laissa éclater sa colère.

- … ESPÈCE D’ABRUTIE ! PUTAIN ! C’est pas vrai ! Qui m’a collé une débile pareille dans les pattes ?

Il souffla longuement, pour évacuer sa colère. Avant de souffler encore un coup bref par le nez. C’était un peu mieux, mais pas suffisant. Il se redressa, toisant la novice de toute sa hauteur, la colère brillant toujours dans ses yeux dorés.

- Ne t’ai-je donc rien appris ? Je ne t’ai jamais appris que la forêt la nuit, c’est dangereux quand on est seul ? Qu’est-ce qu’il t’a pris de sortir seule ? Tu voulais aller rejoindre tes ancêtres ? Pourquoi t’es pas venu me chercher ? Est-ce que ça t’a au moins effleurer l’esprit ? Non, je suis sûr que non ! T’es débile, putain ! Spèce d’abrutie ! Bon sang ! Qu’est-ce que j’vais faire de toi ? T’es pire qu’une épine dans la patte ! On peut pas te laisser seule trente secondes ! Purée ! Abrutie infinie ! ABRUTIE ! T’es la pire des abruties qui vivent dans cette forêt. Putain. J’AI MÊME PAS LES MOTS, PUTAIN DE BORDEL DE MERDE !

Alors qu’il la dispute, Nuage de Feuille se permet une bassesse. L’une des pires qui soit. Parce que même si il n’avait pas toujours été tendre ou gentil avec elle, il ne lui avait jamais vraiment voulu de mal. Et surtout, c’était sa camarade. Elle l’avait vexé. Ses yeux dorés se transformèrent en deux fentes et un grondement sorti de sa gorge.

- HEY ! Être blessée ne te permet pas de me manquer de respect, gaffe à ce que tu dis !

Il s’avance vers la jeune femelle, continuant de la surplomber de toute sa hauteur. Il avait les griffes de sorties et les crocs découverts, comme s’il allait l’attaquer. Il n’en ferait évidemment rien. Mais, elle l’avait vexé.

- Ecoute-moi bien, petit tête. Il semble que la guérisseuse t’as donné trop de pavot et te fais un peu trop planer. Tu n’es certes pas mon amie, mais tu es ma camarade, mon apprentie qui plus est. C’est une raison suffisante pour s’inquiéter.

Il souffle du nez. Il avait envie de la secouer pour lui remettre un peu de plomb dans la cervelle. Elle le méritait. Il le ferait pas, mais c’était pas l’envie qui lui manquait.

- La prochaine fois, viens me chercher, au lieu de sortir seule.