Un chasseur sachant chasser sans son chkate (avec Rusty, puis Queue de Serpent) abandon

Spoiler:

L'odeur de la tanière des guerriers dégoûtait Feuille de Houx. Il prenait soin de faire sa toilette impeccablement, et malgré tout, on le forçait à cohabiter avec des dégoûtants qui risquaient, s'ils ne l'étouffaient pas par leur odeur marécageuse, de faire pleuvoir sur lui tous les parasites dont leurs pelages étaient nécessairement infestés. C'était invraisemblable. In-vrai-sem-blable. Et le pire était sans doute qu'ils ne s'en rendaient même pas compte ! A croire que leurs mères étaient déjà aussi sales qu'eux tous !

Quelle chance avait eu Feuille de Houx d'être élevé par Chant des Coquelicots, tout de même ! Rares étaient aujourd'hui les reines aussi attentionnées quant à l'hygiène !

Le mâle gris sauvait donc son précieux confort. Et en même temps, il se rendait utile. Pour ne pas que ces malpropres l'accusent d'être paresseux. Il fallait qu'il chasse. Et comme il était énervé et qu'il n'avait envie de voir personne, il chassa un peu plus loin que d'ordinaire, à un endroit où normalement, il ne devrait croiser personne : le bord du chemin du tonnerre.

Oh jamais il ne s'en rapprochait, de ce chemin du tonnerre qui l'effrayait tant, mais cette frontière était en général un peu fuie par les guerriers du Clan qui, comme lui d'ailleurs, ne souhaitaient pas se retrouver face-à-face avec un grand méchant monstre.

Bref, il longeait la frontière, de son pas qu'il avait toujours très calme, très silencieux, très attentif. Le but était de ne jamais se laisser surprendre par les mouvements environnants, mais au contraire, de les comprendre, et d'y réagir.

Et sauf le ciel, tout était calme. Une vilaine pluie s'annonçait, et même si la nuit ne tomberait pas avant une heure, les nuages étaient lourds de menaces et assombrissaient les lieux si formidablement qu'il était difficile de croire que le soleil se trouvait bien là, dans le ciel, en face.

Feuille de Houx, qui détestait peut-être plus encore être mouillé qu'il ne détestait se trouver au milieu de guerriers sales, était en train d'envisager un demi-tour lorsqu'un bruit l'interpella, du côté du Chemin du Tonnerre. Prudent, car les monstres étaient sournois, il s'avança pour en découvrir l'origine. C'était un chat qui marchait. Un chat maigre, un chat fatigué, un chat qui ne semblait pas chasser puisque justement, on l'entendait marcher. Un chat dont il sentit l'odeur.

Rusty. Un petit pincement au cœur. Avant de foncer à sa rencontre, il garda l'oreille levée, quelques secondes, de crainte peut-être d'être surpris. Puis il se précipita pour gratifier l'abyssin d'un drôle de :

" Salut, toi ! "

Feuille de Houx était agréablement surpris de revoir ce solitaire qui renfermait en lui toute la bonté que les Étoiles cherchaient. Mais en même temps, comme à chaque fois qu'il le voyait, il ne pouvait s'empêcher de ressentir un curieux pincement au cœur. Ce qu'il semblait maigre !

" T'essayes pas de chasser chez nous, hein ? " lança gaiement Feuille de Houx. Ce n'était pas vraiment une question, mais plutôt une boutade, il se doutait bien que l'abyssin ne restait près du chemin du tonnerre que parce que justement, il n'avait pas tellement le droit de s'en éloigner pour chasser. Les Clans surveillaient jalousement leurs frontières. C'était admirable au fond, de le voir respecter de telles règles qui le contraignaient à ne rester qu'en des lieux plutôt très dangereux.

Les détails de leur dernière rencontre revinrent progressivement en tête à Feuille de Houx, qui se rapprocha un peu plus de l'abyssin, sans hésiter pour cela à traverser un fossé, puis le chemin du Tonnerre.
" Tu tombes bien, j'avais vraiment envie de te parler... " fit-il, tout bas.

A propos de ce vaurien de Feulement Nuageux, de leur amitié qu'il ne pouvait risquer de dévoiler au Clan tout entier, à propos du temps qu'il avait à consacrer à Nuage Sombre, aussi. Et il avait tant envie de mieux connaître, de mieux comprendre cet être pur qui aurait fait son possible pour sauver une ancienne guérisseuse à qui de nombreux camarades avaient tourné le dos sans hésitation pendant des lunes et des lunes.

Son erreur, la dernière fois, avait été de venir ici avec Ollie. Il faisait beaucoup de bruit sur la chaussée - sans son humain pour huiler ses roues il rouillait (heheh) et l'air froid ne l'aidait en rien. C'est pourquoi il était descendu pattes nues cette fois-ci, observant avec quelque tristesse le ciel s'assombrir. Dire qu'avant il faisait tout pour rentrer avant le coucher du soleil...

Il était en train de "scanner le sol à la recherche de la trace d'une proie" (c'est comme ça, n'est-ce pas? Que le font les claniques?) qu'il fut interpellé d'une voix.

— « Salut, toi !

Les deux oreilles de l'abyssin se redressèrent sur sa tête à ce genre de salutation qui se raréfiaient dans sa vie, relevant le nez, tournant la tête, et reconnaissant Monsieur Houx et ses Long poils accourir vers lui du côté du Bourbier. Son visage se réchauffa comme un soleil en été mais pas un son, qu'un misérable petit soupir lui sortit de la bouche.

— Monsieur Houx...
— T'essayes pas de chasser chez nous, hein ?

Rusty prit mouche en fronçant un peu ses sourcils, concédant à le prendre en plaisanterie - une habitude qu'il avait prise, avant la--

— Bien sûr que non, vous savez bien que c'est interdit!

Monsieur Houx traversa le fossé, puis sans un regard à droite ou à gauche - Rusty s'empressa de le faire à sa place - traversa l'autoroute pour le rejoindre. Encore heureux qu'aucune voiture n'aurait passé, décidément, ce guerrier le ferait courir à sa perte avec sa spontanéité! Il poussa un soupir qui s'étira en un long ronron ravi de voir son ami, et s'efforça de ne pas se laisser distraire par les bruissements qui auraient pu trahir la position d'une proie.

— « Tu tombes bien, j'avais vraiment envie de te parler...

Transparent comme de l'eau de pluie dans une source ses deux oreilles se dressèrent sur sa tête dans une expression de surprise.

— « À moi, Monsieur Houx? Vite Rusty baissa les yeux et lut l'air à la recherche d'une explication avant d'être pris d'un serrement à la poitrine et esquisser un mouvement de recul:
— « --Oh non ! Il retentit, les yeux ronds. Est-ce que j'ai mal fait ?!

C'est à cause de Feulement? Ou alors quand j'ai haussé la voix? Je sais qu'Ollie vous a fait peur mais il a peut-être fait fuir votre proie et-- maintenant il était premier marqué sur leur liste de Vendetta car--

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" À moi, Monsieur Houx ? " s'étrangla l'abyssin qui baissa vite la tête. Feuille de Houx se demanda, brusquement très inquiet, s'il ne venait pas de le vexer ou de le mettre en colère. Après tout, Feuille de Houx n'avait jamais vraiment demandé pardon à Feulement Nuageux, et pourtant, l'abyssin avait visiblement attaché un vif intérêt à tout ceci. Se sentait-il trahi à cause de ça ?

Feuille de Houx espérait bien que non, mais d'ailleurs, c'était ça qui l'avait hanté pendant tout ce temps où ils ne s'étaient pas vus.

La réalité comme toujours le prit au dépourvu, car Rusty n'était pas furieux mais plutôt angoissé :

" Oh non ! Est-ce que j'ai mal fait ?! C'est à cause de Feulement? Ou alors quand j'ai haussé la voix? Je sais qu'Ollie vous a fait peur mais il a peut-être fait fuir votre proie et...
- Non, non, non... " le coupa gentiment Feuille de Houx avec un ronron pour mieux détendre son pauvre ami.

" Je voulais juste te demander pardon... Parce que bon... J'ai pas été très très gentil avec toi, l'autre fois, mais, tu comprends, Feulement Nuageux était là et.... Je préfère autant qu'il ne puisse pas nous causer d'ennuis... C'est un pauvre gosse mais pour l'instant je ne lui fais pas du tout confiance... C'est triste à dire, mais la plupart des membres du Clan ne sont pas aussi honnêtes ni aussi gentils que toi... Il faut être prudent, avec eux... "

Après tout, qui avait tué son père ? Son cher et pauvre père qui avait toujours été si bon avec eux... des membres du Clan qui n'avaient fait qu'obéir aux caprices d'un mauvais chef, autrefois ! Les chats honnêtes ne faisaient pas forcément long feu au milieu de tels camarades, et il était indispensable de savoir être assez distant avec eux pour ne pas se faire trahir.

Mais Rusty, c'était tellement différent... Pas étonnant qu'il l'ait rencontré le jour où Envol des Fées s'éteignait... Pas étonnant, même, qu'il n'ait d'abord pas voulu croire à sa limpide sincérité... Rusty était si différent de tous ces guerriers sournois, crasseux, égoïstes et lèches-bottes que lorsqu'on avait passé presque trente lunes parmi ces derniers, on peinait presque à imaginer que quelqu'un comme Rusty puisse seulement exister.

Mais il était là, et il fallait qu'il reste, qu'il ne parte pas.

" Enfin voilà, j'y ai repensé tout le temps... " conclut-il, en un marmonnement mi-gêné mi-émerveillé. Parce qu'au fond, il n'y avait bien qu'avec Rusty qu'il pouvait être si sincère.
" Et toi, j'espère que tu vas bien ? Tu as un coin chaud pour dormir, cet hiver ? "

Car l'hiver venait, et définitivement, Rusty ne lui semblait pas si bien portant que ça... Feuille de Houx s'était souvent inquiété à l'idée que l'abyssin ait eu besoin d'Envol des Fées jusqu'à présent pour lutter contre quelque terrible maladie.

Spoiler:

— « Non, non, non...

Rusty sentit s'abaisser sa tête à chaque "non", et lentement la remonter à la vibration du ronron. Ses oreilles consentirent à pointer moins - à se relaxer - et enfin à descendre, au repos, tandis qu'il jetait un regard timide au guerrier qui s'expliquait:

— Je voulais juste te demander pardon...

L'abyssin était tout ouïe mais il ne comprenait pas vraiment de quel écart il devait le pardonner.

Parce que bon... J'ai pas été très très gentil avec toi, l'autre fois, mais, tu comprends, Feulement Nuageux était là et.... Je préfère autant qu'il ne puisse pas nous causer d'ennuis...

Rusty retrouva son sourire sans tout son éclat mais l'effort y était. Peu à peu, il comprenait.

— Oh-- Monsieur Houx, ne vous en faites pas pour ça...
— C'est un pauvre gosse mais pour l'instant je ne lui fais pas du tout confiance... C'est triste à dire, mais la plupart des membres du Clan ne sont pas aussi honnêtes ni aussi gentils que toi... Il faut être prudent, avec eux...

L'abyssin secoua sa tête avec douceur, et ce fut à son tour de ronronner pour rassurer son ami.

— Monsieur Houx, je connais la susceptibilité des Claniques, ne vous en faites pas ah-ha. Il eut un sourire ennuyé, tordant une oreille vers l'arrière, comme embarrassé, en rassemblant ses pattes ensemble. « Pour être honnête, je n'avais pas prévu qu'Ollie vous effraie, vous et Monsieur Feulement. (Et vite il mit la patte à terre, rondissant à nouveau les yeux.) Ah-- mais Monsieur Feulement m'a fait peur aussi! Il a surgi des fourrés avec son corbeau et il m'a tellement stupéfait que je n'arrivais plus à les dissocier!

Un soupir.

Tout ce que je voulais, c'était qu'il rentre les griffes, vous comprenez? Il ramena sa patte vers lui et baissa le nez, son regard suivant les sillons dans sa chair. ... Je voulais juste éviter que tout se répète. Je reconnais les signes, je sais les anticiper, j'ai été entraîné à le faire, non?... »

... ...

— « Enfin voilà, j'y ai repensé tout le temps...
— Monsieur Houx...
— Et toi, j'espère que tu vas bien ? Tu as un coin chaud pour dormir, cet hiver ?
Rusty hocha la tête pour acquiescer.
— Bien sûr! Trash m'a offert une place, au Verger, dans la Lande. Comprenant ce qu'il était en train de dire il s'empressa de se corriger: --Euh mais je vous rassure, nous ne sommes pas dans "LA" Lande, celle du Vent et de leurs patrouilles qui vident le sang mais bien AU DELÀ des limites de leurs terres!!     Nous avons le droit d'être là!

Il tourna sa tête d'un tic pour se rendre compte que son poil s'était levé aussi il s'assied pour se le lisser à deux trois coups de langue, embarrassé de réagir autant devant son ami. Il se tordit, prodigieux signe d'agilité et de flexibilité, puis se redressa sur ses quatre pattes en abaissant un peu ses hautes oreilles, mais en consentant de lever un peu sa queue en guise d'indice de bonne humeur.

— Comme Ollie ne peut ni rouler dans l'herbe, ni dans la neige, ni dans la boue, je ne l'ai pas sorti aujourd'hui. J-je dois avouer que le chemin entre ici et le Verger était plus long que je le croyais...

Il regarda ailleurs et se pinça les muqueuses des dents, inspirant son air, cumulant son courage.

— « Mgnm... J-je peux vous avouer quelque chose d'autre, Monsieur Houx?

HRP:

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« Monsieur Houx, je connais la susceptibilité des Claniques, ne vous en faites pas ah-ha. » répondit l'abyssin, qui essayait à son tour de le rassurer. Mais il 'inquiétait au contraire. Susceptibilité ? Avait-il énervé quelqu'un ? Lui qui était si bon, s'était-il fait des ennemis ? Rusty reprit : « Pour être honnête, je n'avais pas prévu qu'Ollie vous effraie, vous et Monsieur Feulement. Ah, mais Monsieur Feulement m'a fait peur aussi ! Il a surgi des fourrés avec son corbeau et il m'a tellement stupéfait que je n'arrivais plus à les dissocier ! »

Satané Feulement Nuageux... songea-t-il en se retenant de grommeler. Mais en même temps, ce que racontait Rusty signifiait qu'il avait encore du mal à distinguer l'odeur des proies. Il n'était pas un chasseur. Mais comment, alors, avait-il survécu jusque là ? Vivait-il toujours avec sa mère ? Feuille de Houx le reniflait pourtant souvent, et se doutait toujours que non.

« Tout ce que je voulais, c'était qu'il rentre les griffes, vous comprenez ? ... Je voulais juste éviter que tout se répète. Je reconnais les signes, je sais les anticiper, j'ai été entraîné à le faire, non ?...
- Tu as eu raison de ne pas te laisser faire. » assura le guerrier gris qui regardait désormais, sans un mot, les cicatrices de l'abyssin.

Elles n'étaient plus si fraîches, mais... Mais qui avait osé ?

[...]

Si innocent, le solitaire répondit :
« Bien sûr! Trash m'a offert une place, au Verger, dans la Lande.
- La Lande ?! Mais...
- Euh mais je vous rassure, nous ne sommes pas dans "LA" Lande, celle du Vent et de leurs patrouilles qui vident le sang mais bien AU DELÀ des limites de leurs terres !! Nous avons le droit d'être là !
- Ah... J'aime mieux ça... »

Feuille de Houx se détendit en riant doucement tandis que Rusty raplatissait sommairement son pelage. Il n'était pas tout à fait un enfant, car même si l'on devinait aisément sa remarquable honnêteté, il n'était pas pour autant ignorant de beaucoup des dangers du monde.

Souplement, l'abyssin qui n'avait que la peau sur les os se releva et reprit :

« Comme Ollie ne peut ni rouler dans l'herbe, ni dans la neige, ni dans la boue, je ne l'ai pas sorti aujourd'hui. J-je dois avouer que le chemin entre ici et le Verger était plus long que je le croyais... »

Houx acquiesça silencieusement. Son pauvre ami avait marché longtemps. Il était fatigué. comprit-il même, en se doutant qu'il risquait fort de ne plus rencontrer l'abyssin très souvent dans cet endroit. Quelle chance, donc, qu'ils se rencontrent précisément maintenant pour pouvoir se parler, se prévenir... Houx essaya de situer le verger, et de visualiser un endroit où tous deux pourraient se rejoindre sans marcher trop. Rusty semblait si faible qu'il préférait autant ne pas l'épuiser... Qu'il garde ses forces pour affronter l'hiver... C'était anormal d'être si maigre avant même le début de la mauvaise saison. Ses calculs furent interrompus :

« Mgnm... J-je peux vous avouer quelque chose d'autre, Monsieur Houx ?
- Bien sûr ! » se hâta-t-il de ronronner, avec un petit sourire confus.

N'aie pas peur de moi, mon ami, je te promet que je ferai mon possible pour que tu puisses cesser d'être aussi inquiet, en permanence. Tu es un trésor, oui, un trésor, et... Les Étoiles veillent sur toi.

« Bien sûr ! »

Même si Monsieur Houx avait acquiescé à sa requête, l'embarras de l'abyssin était palpable. Il parut même encore plus tendu- et ce n'était pas le froid de l'air qui l'avait ainsi immobilisé. Sa queue déversa un peu de sa nervosité, derrière, et allant et venant dans les brins d'herbe. Bien sûr, il lui avait dit. Sans la moindre hésitation. Sans la moindre seconde de réflexion pour se demander si ce qu'il allait lui avouer dépassait les limites de la bonhomie.

Un autre soupir.

Bon, c'est parti...

— « ... Trash est mon -- pote, vous savez Monsieur Houx? Je l'aime beaucoup.

Il eut comme un sourire, incapable de regarder son ami dans les yeux. Trash était son pote - le seul qui pouvait vraiment le comprendre, pas vraiment clanique, pas vraiment domestique, qui comprenait la ville et ses voitures et qui avait vu le fantôme de sa maison - l'avant/après de rien qu'un petit chat qui n'avait rien demandé à la vie mais à qui on avait tout enlevé ; Monsieur Houx en revanche, avait vu son amour sincère pour la vieille Aînée, et c'est pourquoi il s'en sentait proche, c'est pourquoi ils étaient de bons amis, pour Rusty, même si parfois le fossé linguistique les empêchait de se comprendre parfaitement - passons. Trash était son pote mais il y avait un mais:

— Trash n'est pas un clanique, ni un domestique, il vagabonde un peu partout et il chasse les poubelles en ville - c'est à dire les "restes" que les humains "enterrent".
Son oreille eut un tic et il abaissa brusquement la tête.

— C'est absolument infect!! Je ne sais pas comment il fait pour être aussi large que Monsieur Feulement alors qu'il n'y a aucun nutriments dedans! Mes super-croquettes me manquent, Monsieur Houx! Je ne suis pas fait pour la vie sauvage - sans vouloir vous offenser!!

Et il détourna la tête, glissant son regard dans les herbes doucement ballotées par le vent, poussant à nouveau un lourd soupir de résignation.

— Huffff, alors, je viens ici, je courbe la tête, j'essaie de chasser...
Il maugréa:
« Monsieur Houx le corbeau de Monsieur Feulement était si gros... S-si vous n'aviez pas été là, -- »

Il se tut, se mordit les muqueuses et abaissa ses grandes oreilles de chaque côté de sa tête, couvert de honte. Il avait honte d'avoir pensé ne serais-ce qu'une seconde à voler sa proie à un clanique, mais la gymnastique mentale qu'il s'était faite à ce moment l'avait convaincu que puisque Feulement Nuageux avait attrapé son corbeau non pas dans le Bourbier mais en terres Libres, il aurait eu le droit-- mais il ne se donna pas le droit de penser plus loin, accablé. La faim rendait fou et il le voyait bien.

Vraiment, c'était à lui de lui demander pardon.

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Feuille de Houx voyait bien que ce qu'il avait à lui dire était quelque chose d'important et de... de déchirant. De grave. Mon pauvre Rusty... songeait-il. Ne sois pas malade. Ne me dis pas que tu es malade. Ne me dis pas que toi aussi tu vas rejoindre les Étoiles. Pour laisser facilement parler l'abyssin, il arrêta de le regarder lui, sa tête d'ange tourmenté, pour s'assoir tout à fait à côté de lui. Côte à côte. Ils ne s'affrontaient pas, ils regardaient ensemble, dans la même direction. Le Chemin du Tonnerre était laid, et au-dessus de lui, les nuages, menaçants, mais malgré tout, il y avait quelque chose d'encourageant dans le fait de se sentir à côté de quelqu'un comme Rusty. Quelque chose de si encourageant que ça rendait presque cette vue agréable. Cette très faible lumière qui traversait encore tout le ciel pour se refléter sur les aiguilles des pins et sur les petites flaques d'eau qui parcouraient le chemin était même, finalement, d'une beauté rare.

« Trash est mon pote, vous savez Monsieur Houx? Je l'aime beaucoup. »

L'abyssin lui avait déjà parlé de ce Trash, aux côté de qui il vivait. Feuille de Houx n'avait à ce jour pas encore remarqué que Rusty faisait partie de ces chats qui ne pouvaient pas concevoir de chatons, aussi se demandait-il en silence si ce "pote" était bien un autre mâle ou si Rusty ne s'apprêtait pas à lui parler de problèmes de cœur ou de famille.

" Trash ", c'était un nom un peu comme " Rusty " ou " Toucan ". Un nom qu'on peinait à croire qu'il s'agisse réellement d'un nom. Et derrière, un chat de chair et de sang qui réchauffait les nuits de l'abyssin, mais qui peut-être, le faisait souffrir.

Feuille de Houx n'interrompit pas son ami, se contentant d'imaginer.

« Trash n'est pas un clanique, ni un domestique, il vagabonde un peu partout et il chasse les poubelles en ville - c'est à dire les "restes" que les humains "enterrent". »

En voilà une drôle d'idée. Feuille de Houx, qui imaginait les bipèdes comme des prédateurs de chats, aurait bien du mal à toucher à ce qu'il laissaient derrière eux. Ce Trash n'était sans doute pas quelqu'un de très malin. Qui savait si tôt ou tard, il ne finirait pas par se faire manger à son tour. Et si cela devait arriver, qu'adviendrait-il de Rusty ? En voilà, un inconscient qui devait prendre bien des risques inutiles sans se soucier des conséquences... pensait le guerrier gris. Mais il continuait de regarder les reflets de la lumière sur les petites flaques d'eau. Et les nuages, qui devenaient une forme massive et compacte.

« C'est absolument infect !! Je ne sais pas comment il fait pour être aussi large que Monsieur Feulement alors qu'il n'y a aucun nutriments dedans ! Mes super-croquettes me manquent, Monsieur Houx ! Je ne suis pas fait pour la vie sauvage - sans vouloir vous offenser !!
- De... ? » s'étouffa Feuille de Houx, mais il se retint à temps.

Des "croquettes" ! Rusty avait donc été un domestique, autrefois. C'était sans doute pour cette raison, qu'il parlait si bizarrement ! Le guerrier trouvait ça très étonnant d'entendre son ami parler de vie sauvage, mais bien entendu, s'il avait appris le monde ainsi... Il ne pouvait pas comprendre ni même soupçonner la formidable Histoire qui se cachait derrière chaque Clan, les guerres du passé, le sang qui avait si souvent coulé, les différents monstres qui avaient été renversés ou remplacés par de pires encore, toutes ces choses qui se transmettaient de génération en génération, le Clan des Étoiles...

Le Clan des Étoiles ! L'abyssin était si naturellement bon qu'il n'avait même pas besoin de connaître le Clan des Étoiles pour faire preuve d'une générosité incroyable.

Feuille de Houx écarquillait les yeux, mais sans un mot.

« Huffff, alors, je viens ici, je courbe la tête, j'essaie de chasser... Monsieur Houx le corbeau de Monsieur Feulement était si gros... S-si vous n'aviez pas été là...
- Ça aurait pu faire un superbe casse-croûte pour toi et pour Trash, hein ! » pouffa-t-il pour finir la phrase que l'abyssin laissait en suspens. A vrai dire, lui-même avait plusieurs fois été tenté de s'accaparer la chasse de ce corbeau que le misérable avait eu tant de mal à rentrer au camp.

« Et puis ça aurait enseigné à Feulement Nuageux à ne pas trop s'amuser avec la nourriture... Mais bon, il y a plus simple ! » reprit Feuille de Houx, un peu plus sérieux, mais aussi un rien de tendresse dans le regard.

Toujours assis à côté de l'abyssin, il regardait toujours devant, mais désormais, son visage était heureux, car Houx se sentait heureux de pouvoir aider cet infortuné solitaire qui avait bon cœur, heureux de pouvoir être utile au Clan des Etoiles.

Et il était sûr qu'Envol des Fées, que Croc de Brume, que Croc d’Ébène et que Nuage Nerveux partageaient eux aussi cette joie étrange.

« Pour ça, suffit de chasser ! Tu sais, chasser, c'est ce que je fais presque toute la journée. Surtout quand c'est l'hiver, parce qu'il y a des reines à nourrir et des anciens et des guérisseurs qui ne savent pas chasser. En ce moment ma sœur surveille trois chatons mignons comme tout, mais du coup, je lui apporte tous les jours quelque chose à manger. Enfin, j'essaye. »

Feuille de Houx en effet était une sorte de chasseur de métier. Mais cela ne faisait pas de lui un bon chasseur. Comme tous les autres, il lui arrivait parfois de rentrer bredouille. Malgré tout, chasser restait ce qu'il faisait le mieux. Il n'avait pas peur de chasser.

« On n'a qu'à chasser ensemble ! On peut faire une patrouille de chasse, en terres neutres ! Ce que tu chasses, tu le rentres, et ce que je chasse, je le rentre. »

Ça semblait si simple, dit comme ça ! Feuille de Houx débordait d'enthousiasme, tout à coup. Il se remit debout sur ses quatre pattes et s'avança légèrement sur le Chemin du Tonnerre pour mieux faire face à Rusty, afin de mieux lui transmettre son emballement.

« Je pars chasser tous les jours, tu sais ! On pourrait se voir souvent, pour chasser ! Et comme ça tu te feras tes provisions pour l'hiver ! » Cette dernière phrase était une petite boutade, parce que l'abyssin n'était pas gros.

Feuille de Houx aimait ce plan parce qu'il lui permettrait de s'assurer que Rusty se débrouillerait bien pendant cet hiver qui s'annonçait. Il le trouvait trop maigre, trop fatigué, trop inquiet. Il ne voulait pas le perdre de vue.

« Je suis sûr que si on s'y met aujourd'hui, on n'aura aucun mal à te trouver quelque chose de bien meilleur que le corbeau de Feulement ! » s'éclairait-il encore. Et il essaya de motiver Rusty à petits coups de museau sur la joue :
« Allez allez ! Faisons ça ! »

Et ensuite, cessant de taquiner l'abyssin, il se reculait un peu plus sur le Chemin du Tonnerre, comme pour attendre sa réponse.

— « Ça aurait pu faire un superbe casse-croûte pour toi et pour Trash, hein !

Rusty prit la plaisanterie comme une sentence, rajoutant un poids à sa position déjà bien basse pour s'achever à demi-couché par-terre, n'osant plus trop relever la tête. Mais il le dut, faisant briller d'yeux coupables sur le guerrier en opinant faiblement du chef.

— Et puis ça aurait enseigné à Feulement Nuageux à ne pas trop s'amuser avec la nourriture... Mais bon, il y a plus simple !

Lentement l'une de ses grandes oreilles se leva à son tour, se faisant à nouveau tout ouïe à son ami.

« Pour ça, suffit de chasser ! » Et Rusty le savait, ça, il avait été entraîné à chasser des "bâtons-pointeurs" et des friandises mais on ne lui avait jamais appris à...-- Ses griffes sortirent de leurs fourreaux pour gratter nerveusement la terre et l'herbe moite dessous de cette soirée qui se couvrait.
— « Tu sais, chasser, c'est ce que je fais presque toute la journée. Surtout quand c'est l'hiver, parce qu'il y a des reines à nourrir et des anciens et des guérisseurs qui ne savent pas chasser.

Rusty redressa l'autre oreille cette fois, écoutant plus attentivement ce que Monsieur Houx lui disait.

— En ce moment ma sœur surveille trois chatons mignons comme tout, mais du coup, je lui apporte tous les jours quelque chose à manger. Enfin, j'essaye.
— Vous êtes très fort, Monsieur Houx, lui répondit Rusty en retrouvant un peu de sa bonne humeur, recourbant sa queue à ses pattes en se redressant dans sa misérable position pour faire meilleure figure face à son ami Monsieur Feuille de Houx le Chasseur.

— « On n'a qu'à chasser ensemble !
— !

" On a qu'à vivre ensemble! "

— On peut faire une patrouille de chasse, en terres neutres ! Ce que tu chasses, tu le rentres, et ce que je chasse, je le rentre.
Rusty se laissa charmer par la proposition. Surtout puisque Monsieur Houx s'agissait, selon ses dires, d'un chasseur hors pair sur qui le Clan comptait.

— Monsieur Houx, ahha, vous rayonnez!
— Je pars chasser tous les jours, tu sais ! On pourrait se voir souvent, pour chasser ! Et comme ça tu te feras tes provisions pour l'hiver !
— C'est d'accord ! ♪ »

Pas besoin d'un soleil dans le ciel avec ces deux-là, Rusty sentant comme une grande vague de chaleur de gratitude lui monter depuis la poitrine - depuis bien au delà des griffures superficielles sur sa peau. Mais quelque chose capta l'attention de Rusty qui remonta sur ses pattes en même temps que Monsieur Houx et ses longs poils s'éloignèrent de lui pour marcher l'autoroute.

— « Je suis sûr que si on s'y met aujourd'hui, on n'aura aucun mal à te trouver quelque chose de bien meilleur que le corbeau de Feulement !
— Vous pensez ?? »

Rusty clôt un oeil aux petits coups de museau en étouffant un gloussement, secoué de gros bouillons de ronrons. Il dégageait tellement de chaleur, vibromoteur, qu'il en oubliait sa faim.

— « Allez allez ! Faisons ça !

Rusty emboîta son pas mais pour superbement marcher dans les siens et le faire se pivoter de nouveau vers la bande de l'autoroute comme un chien ses moutons. Il se distança d'un élégant mouvement des avants et de la queue, secouant doucement sa tête sur un sourire de boutade:
— Ah-ha, seulement si vous me promettez de rester sur le bord, monsieur Houx! »

HRP:

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Spoiler:

C'était si chouette de sentir un Rusty tout tranquille, amusé, joyeux. L'abyssin n'était pas fait pour être triste ! « Ah-ha, seulement si vous me promettez de rester sur le bord, monsieur Houx ! » le reprit-il, radieux mais intraitable sur ce point.

Pour le guerrier gris, bord ou pas bord, cela n'avait pas trop de sens, alors il hocha la tête. Il n'avait pas peur d'être coopératif. Après tout, personne ne viendrait lui reprocher d'obéir à un solitaire, puisqu'ils n'étaient que tous les deux ! Il se rangea dans le fossé, en songeant à un plan d'action et commença à déclarer d'un air très fanfaron :

« Et bien et bien... Soldat... » mais il s'interrompit. « Ça veut dire quoi, " Rusty " ? Pourquoi tu t'appelles comme ça ? »

Le guerrier ferma les siens quelques secondes pour réfléchir. Sa mère à lui l'avait nommé Petit Houx parce qu'ils avaient dû naître près d'un houx, lui et ses sœurs. Mais si la mère de Rusty l'avait appelé Rusty... Que penser ? Que comprendre ?

« Tu comprends, il faut te trouver un vrai nom de guerrier ! Quelque chose qui montre ta force, ton talent, ou bien quelque chose qui décrit ton pelage... ou tes yeux... »

C'était essentiel pour que leur patrouille soit crédible. « Hmmm... » réfléchissait-il, avant de reporter ce problème délicat à plus tard. « On trouvera bien quelque chose ! Je disais donc ! On n'a qu'à remonter le chemin du Tonnerre par ici. » Sa queue montra la direction d'où Rusty était venu. Hors de question de l'éloigner davantage de son chez-lui, s'il était si fatigué... « Chacun d'un côté comme ça on ne se gênera pas ! »

Et assez vite les deux matous se séparèrent. Feuille de Houx était du côté du Chemin du Tonnerre le plus éloigné des terres du Clan de l'Ombre, et son ami, de l'autre côté. Chacun dans un fossé.

« Allez on se lance ! » lança-t-il, plus doucement, pour indiquer que la chasse commençait. Et qu'il fallait donc faire silence.

Et ils avancèrent, chacun dans son fossé. Le guerrier gris ne tarda pas à remarquer tout le bruit que faisait l'abyssin en se déplaçant. Essayait-il d'effrayer les proies pour les forcer à se dévoiler ? se demandait-il, sûr que Rusty ne pouvait pas vraiment ne pas savoir chasser. Un peu curieux de voir comment son ami s'y prenait, il s'arrangeait pour avancer exactement au même rythme que lui, et pour l'écouter, et pour le regarder.

L'abyssin n'était, il s'en rendit vite compte, pas assez vigilant pour faire un chasseur crédible. Ni silencieux, ni vigilant. Peut-être qu'en fait, il n'avait jamais tout à fait appris à chasser.

Feuille de Houx réalisait pour la première fois que tous les chats n'étaient pas chasseurs. Mais après tout... Pas de mentor... Une vie de domestique... Il avait mangé des croquettes. Et désormais, il dépérissait... C'était logique. Logique et cruel. Il devait aider Rusty à passer l'hiver. Le guerrier gris dressa l'oreille. Un bruit. Mais pas une proie.

Un monstre approchait. Feuille de Houx fut tenté de traverser la route pour cacher Rusty, mais le souvenir de l'assurance de l'abyssin lui revint. Et de sa fermeté. Et surtout, il avait l'impression que le monstre fonçait surtout vers lui. Alors il se baissa et se roula en boule au fond du fossé, tout tremblant à l'idée que le monstre ait changé d'avis et s'en soit pris à son ami.

Lorsque le bruit s'estompa, et seulement à ce moment-là, il pointa la tête hors de son trou, où Rusty se tenait toujours, nullement perturbé.

« Dis... » lança-t-il, interrompant cette "chasse" qui n'était en fait qu'une drôle de marche pour son ami. « Les falaises, c'est très riche en gibier, et un peu moins dangereux qu'ici. C'est loin de chez toi ? »

Si ce pauvre Rusty était fatigué de marcher, Houx songea qu'il devrait marcher pour lui. Et venir souvent le voir sur un endroit plus propice à la chasse que ce satané Chemin du Tonnerre infesté de monstres.

Monsieur Houx était peut-être têtu, il n'était pas susceptible (ou devait être le clanique qui l'était le moins!), et son avertissement de bonne foi fut superbement reçu. Rusty était soulagé. Monsieur Houx et ses longs poils allèrent se ranger près du fossé et Rusty put se sentir plus calme à l'idée qu'aucune voiture ne le happerait.

— « Et bien et bien... Soldat...
Rusty bomba le torse et sortit son plus beau sourire pour répondre au surnom, même s'il ne... soldatait pas, ni ne guerroyait vraiment...
— Ça veut dire quoi, " Rusty " ? Lui demanda Monsieur Houx. Pourquoi tu t'appelles comme ça ?
— C'est mon humain, euh...bipède, qui m'a nommé comme ça! C'est un nom-mage je crois, parce-qu'il le disait comme s'il en avait déjà l'habitude... Pour lui, j'étais un peu son "Deuxième" Rusty. »

Il entendit la voix de Waffle et ses moqueries entre les oreilles de ses pensées, aussi il fouetta vite l'air à l'aide des oreilles de son corps pour les chasser comme on chasse un insecte. Il n'était pas « mal tombé », il avait été FIER d'être son Deuxième Rusty.

— « Tu comprends, il faut te trouver un vrai nom de guerrier !
— U-un... Malgré l'obscurité et le mauvais temps, les yeux de Rusty brillaient.
— Quelque chose qui montre ta force, ton talent, ou bien quelque chose qui décrit ton pelage... ou tes yeux...
— ... »

Rusty en oubliait complètement leur plan de chasse. Un nom de guerrier! Un nom de guerrier!! Monsieur Houx était un clanique qui l'acceptait et qui voulait même lui donner un nom de guerrier -- mais quel honneur ! Il baissa les yeux sur ses pattes pour contenir l'élan de joie qui l'aurait vraisemblablement précipité à celles de Monsieur Houx, mais il ne contint en rien son ronron comme un gazouillis.

— « On trouvera bien quelque chose ! Je disais donc ! On n'a qu'à remonter le chemin du Tonnerre par ici.

Encore une fois les longs poils de Monsieur Houx se mouvèrent avec le tour de sa queue qu'il utilisa en guise de bâton-pointeur. Rusty l'imita, pointant la direction du Chemin du Tonnerre à l'opposé d'où il se trouvait, c'est pourquoi ce serait à lui de le traverser. Mais mieux valait ça que Monsieur Houx, pardi !

— Chacun d'un côté comme ça on ne se gênera pas !
— C'est compris!
— Allez on se lance ! »

Rusty s'éloigna de la bande de l'autoroute, se pencha pour jeter un regard à gauche - au loin, vers la ferme - et un regard à droite - vers la ville cette fois - avant de hocher la tête et se presser d'un amble furtif, signalant sa position de sa queue bien en évidence au-dessus de sa croupe. En arrivant du côté du côté qui longeait le Bourbier, il mit le nez à terre et renifla à la manière d'un chien : il trottina sans feutrer ses pas, agitant sa queue et se laissant guider par tous les sons que lui dictaient ses grandes oreilles. Rusty était tellement absorbé par les petits brins d'herbe sous son nez qu'il ne s'était même pas rendu compte qu'on l'observait depuis l'autre côté. Soudain il redressa vivement la tête et se tourna, les yeux ronds, constatant l'ombre de Monsieur Houx du côté de la Lande. Rusty le salua d'un très grand sourire plein d'herbe qu'il mâchait tout en montant très haute sa queue d'un tout aussi fort ronron.

Son oreille se pivota, il entendit une voiture dans la voie de droite vrombir vers lui et si elle l'éclaira momentanément de ses phares (l'abyssin en flagrant délit, de l'herbe en gueule les oreilles hautes et à peine dissimulé dans les fourrés) elle partit tout aussi vite et il put continuer son chemin. Cette fois sa technique se fit en levant très hautes les pattes - mais cette fois Monsieur Houx en eut assez. Une fois la voiture au loin, éclairant l'horizon d'une lueur diffuse, Monsieur Houx sortit de sa cachette pour l'interpeller depuis son côté de l'autoroute.

— « Dis... Les falaises, c'est très riche en gibier, et un peu moins dangereux qu'ici. C'est loin de chez toi ?
— Je ne sais pas...?
Ses grandes oreilles s'abaissèrent en même temps que son sourire qui s'était déconfit.
— Héhé ... Euh... Que sont des "falaises", Monsieur Houx?

C'est alors que quelques chose jaillit des fourrés en bruissant dedans et les yeux de Rusty basculèrent du bleu-turquoise au noir et il tendit sa patte et étira son corps pour abattre ses coussinets sur sa cible en la clouant au sol.

Il sortit de sa transe, ses oreilles s'agitèrent et se pivotèrent de confusion car sous sa patte, il sentait une souris s'agiter.

— « E-euuuuh--

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