Ils feraient éclore l'espoir ~ ft Feulement - abandon

Un instant, le silence avait repris ses droits dans la petite clairière où les apprentis, opposés par l'attitude mais aux yeux semblables, au moins par la couleur, aux pelisses sombres, silhouettes contrastées, se tenaient prêts à reprendre l'entraînement; un instant, tout n'était plus que pause, au milieu d'une mélodie emplie d'espérance, et ils s'observaient, en un jeu aussi étrange que prudent, empli de douceur, de tendresse, d'amitié, peut-être d'un peu de méfiance au début, mais aussi, désormais, de bonne volonté, par delà la réserve. Feulement Nuageux avait perdu son agressivité de tous les instants, ne répondait plus par un mot unique ou un signe de tête, et le bouton de rose de son cœur semblait s'ouvrir, juste un peu, là, au milieu des fleurs qu'affectionnait Mimosa - à sa place, la novice, jolie fleur d'or, souriait, écho aux Passiflores. Elle se tenait là, droite, face à lui, et il la jaugeait; finalement, il lâcha simplement:

« C'moins efficace. »

Elle esquissa un demi-sourire; ok, elle lui accordait ça.
Mais ce n'était pas si important, pas un vrai combat.
Ils s'entraînaient, mais aussi s'amusaient.
Et les seules choses à briser, c'étaient certaines barrières.
Elle se contenta de ce sourire. Et il ajouta, dans un murmure:

« Mais plus agréable... »

Le sourire de l'apprentie s'élargit, tandis qu'il bondissait sur elle, la faisant rouler au sol jusqu'à se retrouver au-dessus d'elle; concentrée, elle devait trouver une nouvelle manière de gagner ce qui n'était pour l'heure qu'un nouveau jeu - mais sa plus belle victoire sur son camarade ce jour-là, c'était la lueur un peu adoucie dans ses yeux. Ils avaient changé de sujet, en reprenant ce petit combat, mais la gangue de glace et de ténèbres autour du cœur et de l'esprit du jeune chat semblaient avoir un peu fondu, s'être un peu éclaircie, et elle souriait. Nuage du Mimosa y croyait encore - ce qu'il appelait une erreur, une faiblesse, elle l'appelait émotion, elle l'appelait espoir. Toujours plaquée au sol, elle l'entendit souffler:

« T'es chelou. »

Une étincelle d'amusement brillait dans les prunelles d'or de la fillette.
Les mots n'étaient pas gentils, le ton se voulait sans doute méchant, mais...
Il n'y avait aucune agressivité, pas même de mépris; ça sonnait gentil.
Peut-être qu'il essayait de la repousser, mais ça sonnait compliment.
Elle se contenta de souffler, avec un clin d'œil espiègle:

« Merci, t'es plutôt particulier aussi. »

Fauchant les pattes qui la plaquaient au sol, elle roula agilement sur elle-même, le laissant tomber à la place qu'elle occupait une fraction de seconde auparavant, et, pétillante, attendit qu'il se relève, avec un petit rire. Pourtant, sa voix mélodieuse et modulée était parfaitement sérieuse quand elle miaula, souriante:

« Et c'est loin d'être une mauvaise chose. »

Il la contemplait encore, peut-être avec perplexité ?
Et elle, paisible, heureuse, soutenait son regard.
Un nouveau sourire éclot sur son visage comme petit soleil.
L'espoir existait encore, et ce moment fragile était précieux.

« Merci d'avoir accepté, Feulement. »

Puis, pour ne pas parler d'émotions:

« On continue ? Ou tu veux faire autre chose ?
On peut s'entraîner à l'embuscade, chasser... »

Avant d'ajouter, comme pour elle-même:

« Et faudra que j'aille chercher des plantes, aussi. »

Et elle lui sourit. Ils allaient à son rythme...
À lui de décider. C'était peu, sacrifié, pour un nouvel ami.
Parce que oui, Mimosa y croyait - une nouvelle amitié fleurirait.

" Merci, t'es plutôt particulier aussi. "

Miaula t-elle en accompagnant ses paroles d'un petit sourire espiègle. Feulement Nuageux plissa légèrement les yeux en se demandant comment il devait prendre ce que venait de lui dire Mimosa mais cette seconde d'inattention lui suffit à se retrouver au sol. Elle était réactive il devait lui accorder ça.

" Et c'est loin d'être une mauvaise chose. "

Alors qu'il se relevait leurs regards d'or se croisèrent à nouveau. L'un perplexe et durcis par les désastres de la guerre l'autre doux, bon, innocent. Ils se firent face à nouveau, mais cette fois-ci pas dans l'optique de se jeter l'un sur l'autre. Du moins c'était ce que la position de l'apprentie en face de lui lui faisait comprendre. Mais l'aspirant sombre restait toujours légèrement tendu, sur ses gardes. Après tout ce n'était pas des mois de traumatisme qui allaient s'envoler avec une petite séance de tête-à-tête au milieu des passiflores, aussi romantique et douce la rencontre soit-elle.

" Merci d'avoir accepté, Feulement. On continue ? Ou tu veux faire autre chose ? On peut s'entraîner à l'embuscade, chasser... Et faudra que j'aille chercher des plantes, aussi. "

La queue du chat, déjà légèrement moins hérissée, ondula lentement. Partagé entre garder le silence et laisser parler sa curiosité grandissante quand à la jolie féline brune.

"Plus je reste loin du camp mieux c'est."

Répondit-il dans un premier temps. Les guerriers et leurs insultes, leurs regards méprisants, les autres apprentis et leur rancœur, leur faiblesse, très peu pour lui. Il préférait largement s'isoler de son propre gré que par les autres. Alors il sortait souvent. Passait au quartier général le temps d'un battement de cils. Pour manger, dormir, peu-être écouter ce qu'on avait à lui dire si on le demandait. Le strict minimum.

"Pourquoi est-ce que tu cherches des plantes? t'es pas guérisseuse nan?"

Cette fois-ci sa curiosité prit le dessus et il la laissa s'exprimer.

Plus le temps passait, moins l'attitude de Feulement Nuageux envers Nuage du Mimosa se faisait hostile, même si on lisait encore clairement, dans sa posture et ses yeux d'ambre, de la méfiance, qui le maintenait encore sur ses gardes; quelque part, les deux novices avaient en eux un peu de réserve - simplement pas la même. Lui, il s'attendait au pire de la part des autres; elle, elle était simplement timide. Mais une des caractéristiques de la jeune fille, petite princesse des fleurs, c'était qu'elle ferait le premier pas, pas pour elle, pour les autres - elle se fichait bien d'elle, mais pas des autres. Altruiste, la gamine voulait apporter la lumière, dissiper les ténèbres, ramener le bonheur. Elle y croyait... Et si l'amitié pouvait éclore, sur le chemin... Alors elle l'arroserait de tendresse, lui offrirait le soleil de sa joie; elle se serait éteinte pour illuminer une seconde le ciel pour tous ceux qu'elle aimait; elle se serait consumée, juste pour les réchauffer. La toute petite fille était déterminée... Alors la réponse de son camarade d'ombres à ses remerciements la fit doucement sourire. Elle allait réussir.

« Plus je reste loin du camp mieux c'est. »

En observant le comportement des autres avec lui, c'était compréhensible.
Mais à cet instant, Mimosa n'avait pas envie d'être triste; elle voulait être heureuse.
Alors elle choisit de considérer l'instant comme une simple occasion qu'il reste plus longtemps.
Personne ne pouvait le leur reprocher, s'ils rapportaient des plantes ou des proies, ensemble.
D'autant plus qu'ils s'étaient entraînés; et Mimosa souriait, parce qu'elle y croyait.
Que les guerriers s'inquiètent; la jolie jeune fille ne cueillait que les petits bonheurs.

« Pourquoi est-ce que tu cherches des plantes? t'es pas guérisseuse nan? »

Pas de mépris.
Pas de colère.
Pas de soucis.
Pas d'éclairs.
Pas de menace.
Pas de distance.
Pas de glace.
Pas de méfiance.
De la curiosité.
Juste ça.
Un précieux bourgeon
Pour une jolie fleur
Au milieu des Passiflores
Et la joie de Mimosa.

« Je suis pas guérisseuse, non. » répondit-elle, avec un petit rire.
Rire clochette. Rire merveille. Rire paillette. Rire soleil.
« Mais j'aime les plantes, tout simplement. Et j'en connais certaines.
Nuage du Corbeau m'a nommée aide guérisseuse... Et j'aime ça.
C'est mon ami, alors je l'aide. C'est fait pour ça, les amis. S'entraider. »

Elle inspira alors profondément et souffla, un peu timide
Une phrase qui, après les précédentes, prenait tout son sens.

« Alors, tu m'aides ? »

" Je suis pas guérisseuse, non. "

Lui répondit-elle en premier lieu en accompagnant ses mots d'un petit rire tout aussi harmonieux que sa voix. Dur à comprendre pour l'apprenti. Alors si elle n'était pas une guérisseuse pourquoi-

" Mais j'aime les plantes, tout simplement. Et j'en connais certaines. Nuage du Corbeau m'a nommée aide guérisseuse ... Et j'aime ça. C'est mon ami, alors je l'aide. C'est fait pour ça, les amis. S'entraider. "

Là voilà, sa réponse. Il comprenait un peu mieux, il supposait. Bien qu'il ne voyait pas l'utilité d'avoir un guerrier-guérisseur dans ses rangs en plus d'avoir deux médecins au sein de son clan. Quoi que, en soit, maintenant qu'il y pensait, si tout le monde savait un minimum se soigner ce serait peu-être mieux comme cela.

" Alors, tu m'aides ? "

Le mâle ne répondit pas de suite, hésitant. Maintenant le voilà curieux et puis chercher de l'herbe médicinale était une bonne excuse pour rester à distance des autres chats de l'ombre.

" Si tu veux, "

Mais là n'était pas vraiment le soucis. Le truc c'est qu'en soit ... Enfin,

" Mais j'y connais rien, moi, des plantes. "

Lui miaula t-il en posant doucement sa queue au niveau du sol. Tout ce qu'il savait, c'est que parfois Esprit Soucieux lui donnait des trucs à manger, pas bon, mais soulageant.