Un brin de furie pour un combat en folie , ft Nuage Poivré - Abandon

L’herbe la cachait presque totalement, alors qu’elle courrait en direction des pâturages. Elle aurait déjà dû être rendue à son lieu de rendez-vous avec Nuage Poivré pour revoir les techniques de combat. Et elle voulait aussi développer sur les nécessités d’un bon duel, comment les éviter et tout le tralala qu’ils n’avaient toujours pas évoqué. Le temps filait à la vitesse de l’éclair, et bientôt ils deviendraient collègues, et non pas entraîneur et élève. Elle attendait avec impatience de le voir débarquer dans la tanière des guerriers, trouver une place parmi tous ces chats qui avaient fait de fabuleux exploits. Il marquerait de son odeur leur dortoir, et serait enfin accepté à part entière. Il partirait de ces adolescents prépubères qui passaient leur vie à lui pourrir l’existence du mieux qu’ils le pouvaient. Des lâches qui faisaient les lèches-bottes devant les grands, et qui agressaient les plus petits. La loi du plus fort fonctionnait à merveille, et cela la dépassait. Son père ne voyait donc rien ? Il avait pourtant tout le pouvoir dans ses quatre pattes pour révolutionner le monde du Vent !

Eclat de Crépuscule accéléra encore, sentant ses muscles commencer à la tirer. Un léger sourire était vissé sur le coin de ses lèvres, un peu rêveur. Elle avait rencontré un chat de la Rivière aux frontières, alors qu’elle faisait juste un tour pour se balader avant leur entraînement. Ils avaient échangé seulement quelques mots, mais sentir un inconnu à côté d’elle, à quatre ou cinq queues, séparés d’une invisible frontière, lui donnait des frissons. Oh, elle donnerait tout pour devenir transparente, et voyager dans les différents camps des autres Clans. Découvrir leurs façons de vivre, de parler entre eux. L’ambiance était-elle plutôt paisible, ou bien électrique ?

L’inconnu, un beau mâle, avait dû couper court à la conversation quand une patrouille était arrivée non loin de lui. Elle avait perçu son regret, le même que le sien. Jamais donc ils ne pourraient discuter en paix, sans être interrompus par des xénophobes haïssant le moindre contact avec les autres ? Terrible vie. La rouquine ne savait même pas son nom, et s’en voulait de ne pas lui avoir demandé plus tôt. Ainsi était la vie. Peut-être le reverrait-elle plus tard, lors d’une Assemblée, par exemple ? Elle l’espérait fortement. Tant de félins mélangés, aux goûts et aux idéaux totalement inverses, parfois, l’emplissait de joie.

Le pâturage faisait son approche, et les moutons aussi. Semblables à des nuages, ils broutaient toute la verdure. La silhouette du gris se dessinant dans l’horizon, elle perdit tout intérêt pour le reste et lui lança un sourire éclatant … Avant de rentrer en collision dans un de ces broutards, à l’odeur fort désagréable. Leur pelage doux d’apparence était en réalité rêche et puant. Une tête immaculée pleine de poussières et de saletés non identifiables se tourna vers elle, et lui bêla de mécontentement à la tête. Elle recula instantanément, mimique de dégoût non feinte sur son visage tout en finesse. La guerrière frissonna, et repartit de plus belle, sans manquer de s’ébrouer. Elle renifla et dut admettre que malgré tout, l’odeur de la Rivière persistait. Et merde. Bah, ce n’était pas grave. Nuage Poivré ne lui dirait rien. Elle n’avait rien à se reprocher.

Elle grimpa là où il s’était posté, en l’attendant, en haut d’une butte. « COUCOU ! », s’écria-t-elle joyeusement, prête à en découdre pour un entraînement au combat. La chasse, même s’il en avait besoin, avait tendance à la lasser, et changer un peu de la routine était plus qu’agréable. Eclat de Crépuscule se rapprocha de lui, et s’assit lourdement, fatiguée de sa longue course. Elle venait à peine de se rendre compte qu’elle était essoufflée et que ses muscles n’en pouvaient plus. Mais les venteux étaient endurants, et sa force reviendrait bien vite, elle le savait.

Il ne lui paraissait pas dans son assiette, c’était étrange. Elle était survoltée, d’une bonne humeur flagrante, bien rare en cette période où elle était rongée par l’inquiétude que son apprenti ne serait pas près à temps. Ne serait pas près pour passer guerrier. Et les entraînements, au lieu de la réconforter, la stressaient davantage. Il faisait encore des erreurs de débutant, qu’il n’aurait pas dû faire depuis bien longtemps. Alors le temps commençait à presser. Le baptême n’arriverait pas tout de suite, mais il arriverait bien trop tôt. Il fallait se préparer.
« Alors, cet après-midi, mon petit gars, on va s’entraîner au combat. Donc un réel combat, où je ne ferai pas que me défendre. Pas de griffes quand même, abime pas ta Crépule adorée, hein, mais ça va y aller un peu. Et après, on analysera et je te parlerai des techniques pour éviter le combat même si la parole ne marche pas et tout. Enfin bref, ça te plaît ? »

Ses iris ambrées étincelèrent joyeusement.

Spoiler:

Nuage Poivré n'avait jamais été quelqu'un de patient. Et plus il grandissait, moins il supportait de passer son temps à attendre. Il avait l'impression de n'avoir fait que ça. Attendre d'être assez grand pour pouvoir forcer un minimum de respect, attendre d'être assez vieux pour pouvoir commencer à apprendre à devenir guerrier, et surtout, commencer à attendre encore qu'on veuille bien lui faire faire quelque chose. Attendre aussi que le démesurément grand stock de venin de ses camarades soit épuisé pour pouvoir commencer à être tranquille. Attendre encore que ses aînés deviennent des guerriers, que son amie se souvienne de son existence. Attendre, attendre, attendre, attendre.

Il bouillonnait intérieurement. Crispé, le pelage hérissé, les griffes sorties, le regard hargneux, il restait là où on lui avait donné rendez-vous, à se demander si Éclat de Crépuscule n'avait pas simplement eu envie de lui faire une mauvaise blague, ou si elle ne l'avait pas tout simplement oublié. Attendre, attendre, attendre, attendre... JE N'EN PEUX PLUS, D'ATTENDRE !

Il avait envie de hurler, de passer sa mauvaise humeur sur quelqu'un ou sur quelque chose. Les brins d'herbe, sous ses pattes, avaient d'ailleurs pas mal dégusté de son impatience. Inutile de dire que les passants n'avaient nullement envie de lui adresser la parole lorsqu'il faisait cette tête-là, ce qui ne faisait qu'accentuer son impatience. Les autres avaient des choses à faire, et il, il était là, tout le monde le voyait, et il fallait qu'il ATTENDE.

Initialement, il s'était mis sur la butte dans l'espoir de voir arriver son mentor assez vite, et donc, d'attendre moins, mais il avait trop attendu désormais, et n'essayait plus de regarder tout autour de lui pour voir si la rouquine approchait. Il restait simplement énervé, tapi sur la butte, à mutiler la terre et les herbes lorsqu'il ne pouvait plus rester immobile.

« COUCOU ! » fit une voix insupportablement gaie. Il redressa l'oreille, tourna ses yeux dans la bonne direction, et même si son agacement ne se dissipa pas immédiatement, il fut instantanément calmé, attendri, par la vision de la rouquine.

« Salut. » répondit-il, sec et acide. Et il se redressa lentement sur ses quatre pattes, très lentement, comme si faire attendre son amie lui permettrait de se venger d'avoir attendu. Un peu rancunier, il décida qu'il ne parlerait pas ni ne sourirait tant qu'il n'aurait pas eu des excuses propres et sincères. Et puis d'abord, qu'avait bien pu faire Éclat de Crépuscule pour être en retard comme ça ? Il ne supportait pas vraiment de penser qu'elle ait pu l'oublier.

« Alors, cet après-midi, mon petit gars, on va s’entraîner au combat. Donc un réel combat, où je ne ferai pas que me défendre. Pas de griffes quand même, abime pas ta Crépule adorée, hein, mais ça va y aller un peu. Et après, on analysera et je te parlerai des techniques pour éviter le combat même si la parole ne marche pas et tout. Enfin bref, ça te plaît ?
- Mmh. » répondit-il, en s'efforçant d'avoir l'air le plus indifférent possible à ce qu'elle venait de lui dire.

D'un petit signe de tête un peu cassant, il lui fit comprendre qu'il la suivait.

C'était facile, de bouder.

Il lui lâcha un sec bonjour, qui lui permit de bien savoir qu'il n'était pas dans son assiette. Or, elle n'était nullement au courant de la raison de sa bouderie, même s'il pouvait en avoir des centaines. Des apprentis l'avaient peut-être encore cherché, ou bien c'était lui qui avait cherché des noises aux plus jeunes. Elle eu ouïe qu'il eu une petite remontrance dans la tanière du chef, son cher popa parce qu'il avait remis en place un petit con, mais ça, elle n'était pas vraiment sensée le savoir, et elle ne l'avait pas félicité de cette remise en question. Cyclone pouvait être un bel idiot, cet accrochage pouvait aussi signifier, si on poussait le bouchon un peu plus loin, qu'elle n'était pas capable d'avoir un apprenti qui sache se tenir. Et déjà qu'Etoile Tropicale doutait encore, elle le pensait, de sa loyauté, cet incident ne l'avait pas fait grimper en flèche dans l'estime du meneur. Bien qu'elle soit sa fille.

Nuage Poivré paraissait avoir compris l'exercice, et elle se recula. Un tas de terre mélangée à des pousses d'herbes étrangement arrachées l'inquiéta. Il était d'une humeur exécrable, et il n'était pas, comme elle l'aurait espéré, joyeux à l'idée d'un petit combat, bon-enfant mais pas trop. Ses muscles s'étaient dessinés, il était dans une excellente forme physique, mais pourtant il ne s'en servait pas bien. En combat, il se débrouillait quand même bien mieux qu'à la chasse, et pouvait faire d'excellentes attaques. Seulement, il pouvait aussi bien s'affaler sur lui-même après une tentative mal commencée, cause d'une chute ou d'un emmêlage de pattes. C'était d'ailleurs là qu'elle voulait appuyer, pour qu'il travaille son agilité. De plus, elle était une excellente maître en la matière, douée avec son corps et capable de prouesses acrobatiques qu'un écureuil pourrait lui envier.

Ils se faisaient face, l'ombre et la lumière, deux êtres si différents et pourtant si proches, prêts à s'attaquer, à s'envoyer mutuellement des coups dans l'espoir de ne pas être le premier à vaciller. Eux qui étaient si amis allaient pouvoir se faire valdinguer dans l'herbe, au signal. Qu'elle donna, d'une voix toujours enjouée :
"C'est parti !"

La rouquine trépignait d'impatience, et avait fléchi ses pattes pour être moins voyante dans les hautes herbes. Sa silhouette rousse se reflétait dans les rayons du soleil, et elle était par cette raison semblable à une boule de feu prête à incendier les prairies. Mais elle se sentait plus en sécurité, dans l'esprit guerrier, tapie dans les fourrés. Son instinct lui hurlait de bondir la première, même si elle aurait préféré qu'il fasse l'offensive numéro une. Le gris préférait peut-être attendre, pour être sûr de parer l'attaque, et de réenchérir là où il était le plus doué par la suite, à savoir la force.

Elle inspira doucement, se concentrant, ses iris crépusculaires réduites à deux fentes. Sa queue fendait l'air, aplatissant les hautes herbes qui se couchaient au passage de son fouet. Puis inévitablement se redressaient, pour se faire balayer de nouveau par le bâton de feu. Elle compta silencieusement, puis se redressa, et parcourut en quelques foulées souples, plus puissantes encore, grâce à l'adrénaline, la petite distance qui les séparait. Elle aurait pu les parcourir pour aller rejoindre son ami, et pour discuter ensemble de choses et d'autres, mais non. Elle s'élançait vers son apprenti, qui aurait tout aussi bien pu être un ennemi. Seule différence, elle n'userait pas de ses griffes. Trois balafres sur sa tête lui suffisaient déjà bien assez pour le moment, et leur histoire était déjà bien lourde à porter.

Dans un bond calculé, la petite féline survola les quelques queues qui les séparaient, et s'arrêta un infime instant à côté de lui. Moment intime qui ne dura pas, puisqu'elle avait à peine posé les quatre pattes au sol qu'elle lui faucha les siennes, pour tester ses aptitudes. Et son mouvement fut parfaitement réalisé, et il chuta lourdement sur le sol, dans un mouvement sourd qui résorba le sourire vainqueur vissé sur sa tête ravie. Le noiraud était tombé dans le panneau, mais elle n'avait pas vraiment maîtrisé son geste. Au moins, ça le forgeait. Elle se pencha vers lui, et lui susurra à l'oreille, narquoise, dans l'espoir de réveiller en lui le tigre qui dormait, et la détermination qu'il avait tendance à perdre à la moindre difficulté :
"Et bah alors, coco ? On a du mal ? C'est bête, j'aurai pensé que tu aurais opposé une quelconque résistance. T'as la tête ailleurs ? Dans les étoiles, peut-être, vu la beauté de mon coup ?"

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'Attaque Clan' :

Il n'avait pas quitté son masque de nonchalance lorsqu'ils arrivèrent aux pâturages où Éclat du Crépuscule lui fit savoir que leur entraînement au combat aurait lieu. Difficile de l'empêcher de bouder si c'était son caprice : même avec celle qui était la mieux placée au monde pour le faire sourire, Nuage Poivré restait particulièrement têtu. Il conserva son air le plus buté tandis qu'ils se défiaient du regard. L'heure du combat venait.

Bizarrement, il songea que sa bouderie l'aiderait peut-être à ne pas se laisser gagner pendant l'affrontement par quelque chose de trop déplacé. Il avait quelque chose à faire rentrer dans la tête de la guerrière, pour une fois, et c'était quelque chose qu'un combat pouvait l'aider à communiquer.

" C'est parti ! " lança-t-elle en se baissant. Lui, il craignait qu'elle fasse quelque chose de fourbe, et instinctivement, se redressa bien pour ne pas la perdre de vue trop vite.

L'air était pesant. Nuage Poivré guettait la rouquine, il essayait de deviner ce qu'elle allait faire, et s'attendait à une attaque rapide, mais elle fut plus maligne que ça, et se déplaça doucement jusqu'à se trouver entre le soleil et lui. Un léger grondement l'envahit lorsqu'il comprit qu'il ne pourrait pas s'éviter un éblouissement, et il dut fermer les yeux le temps de contourner férocement, par le côté, la rouquine, qui, bien entendu, s'était déplacée elle aussi pendant ce temps. Il fallait la retrouver, désormais. Il avait anticipé tout ça, et s'était mis face au vent, là où il pourrait le mieux sentir. Mais elle était discrète et silencieuse, quelque part dans des buissons. Il avança prudemment, tous ses sens étaient attentifs à la moindre vibration. Elle le voyait probablement, elle allait l'attaquer. C'était ce qu'il prévoyait. Mais il ne pouvait pas prévoir quand, ni comment. Il faudrait la forcer à se montrer, puis prendre l'avantage en réagissant vite et bien.

Soudain, il sentit approcher la rouquine. Son odeur était bizarre. Pire, même : inquiétante, dangereuse. Pourquoi ? s'étrangla-t-il, en s'interrompant tout à fait.

Une seconde plus tard, il était au sol, et la guerrière commençait à chuchoter :

" Et bah alors, coco ? On a du mal ? C'est bête, j'aurai pensé que tu aurais opposé une quelconque résistance. T'as la tête ailleurs ? Dans les étoiles, peut-être, vu la beauté de mon coup ? "

Juste au-dessus de sa tête...

Il se redressa immédiatement, pour cogner la mâchoire de la rouquine avec son épaule. Un coup brutal qui dut la désorienter quelque peu. Il n'eut pas besoin de réfléchir pour enchaîner, et faucha les deux pattes arrière de la belle en se relevant.

C'était elle, désormais, qui avait perdu l'équilibre. Et lui, il était debout, il pouvait se jeter sur elle, mordre, griffer.

Mais elle aurait pu le faire, elle aussi, et elle avait préféré faire la maligne.

Pffff... ce serait pas très fair-play... décida-t-il, le regard un peu maussade.

" Et beh... T'aurais dû me prévenir que t'avais pas l'intention de dormir pendant la NUIT, j'aurais pas attendu autant. " ricana-t-il sans l'habituelle joie qui le faisait battre d'ordinaire lorsqu'il la taquinait. On entendait bien qu'il se forçait, qu'au fond de lui, il trouvait ça agaçant.

Elle me fait poireauter, d'accord, mais qu'en plus elle soit pas fichue de me laisser me battre sérieusement...

Et cette odeur... C'était quoi ?

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'Parade Clan' :

Elle l'observait, les yeux grands ouverts, lui, qui ne réagissait pas à ses propos. Sans cesse, elle se demandait si c'était de sa faute à elle, s'il avait tant changé. Le chaton inscouciant était bien loin désormais, et s'il était normal qu'il mûrisse, elle préférait le voir niais et candide plus que sec et tristounet. Mais elle se taisait, attendant un mot, un rire, peut-être, qui réchaufferait son cœur brûlant d'amitié pour lui, ou même une attaque. Qui ne se fit point prier.

Un coup d'épaule percuta sa mâchoire, et la rouquine tomba net, comme une mouche. Il avait profité de sa situation désavantageuse, finalement. Elle avait baissé la garde par inadvertance, et il fallait avouer qu'il avait été plutôt rapide, et très intelligent. Même si elle s'était mordue la langue et qu'elle laissa échapper un petit gémissement de douleur, la soif de vengeance la prenait. Eclat de Crépuscule restait étonnée de la violence du coup, et elle ne s'en remit qu'à moitié, couchée sur le sol, prise entre les pattes de son apprenti. Qui l'avait fauchée avec une haine déconcertante, qu'elle n'aurait jamais crue capable chez lui. Ou du moins, qu'il lui fasse ça à elle. Comme quoi, tout était permis. Ses iris l'observaient sombrement, pendant qu'il se moquait, sans grande conviction :
" Et beh... T'aurais dû me prévenir que t'avais pas l'intention de dormir pendant la NUIT, j'aurais pas attendu autant. "

Elle se tut, ne tenta pas même de rire, parce qu'elle était trop occupée à s'inquiéter. Elle tenta d'ignorer cette odeur épicée qui caractérisait son ami, qui se mêlait aux relents poissonneux de ceux du guerrier de la Rivière. Elle espérait tellement qu'il ne remarque rien, mais leur proximité ne laissait aucun doute. Il découvrirait la raison de son retard, et sûrement qu'il s'énerverait. Elle n'était pas sûre qu'il soit au courant de leur relation avec Etoile Tropicale, et les raisons de la marque, à laquelle il avait été spectateur. Elle ne lui avait pas expliqué pourquoi ces trois griffures, parce que ce sujet restait l'un des seuls tabous de sa vie. Peut-être un jour sa langue se délierait à propos de la marque, peut-être.

Il était énervé. Il était d'humeur exécrable parce qu'elle était arrivée un peu en retard. Mais il était encore en train d'exagérer, comme si le soleil avait pu atteindre son zénith et redescendre le temps qu'elle arrive. La petite féline prit une grande inspiration, agacée que le gris se croit toujours au centre du monde. Elle se calma, et réfléchit. La situation était presque désespérée. Il était plus imposant qu'elle, et elle ne disposait d'aucune issue pour se libérer. Elle essaya de se dépêtrer, se trémoussant dans tous les sens, gigotant à en secouer toutes les tiques de Nuage Poivré, pour finalement abandonner. Ses coups de patte atteignant à peine ses genoux n'avaient aucun effet sur le matou, et elle lâcha l'affaire. Puis siffla, une once de bonne humeur dans la voix :
"Il me semble que je suis bloquée. Tu as bien géré. Laisse-moi sortir et attaque-moi, puis on analysera tout ça. Il y a des bonnes choses. Deux secondes."

Elle attendit qu'il se pousse, et se releva, sans grande dignité, mais étincelant de mille feux encore et toujours. Elle se reposta un peu plus loin, et la rouquine hocha la tête. Elle était prête.

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'Attaque Clan' :

Comme la rouquine traînait à se remettre sur pattes, il songea qu'elle voulait sûrement le voir poursuivre son assaut. Les crocs serrés par l'artificialité ridicule de cet attente, il hésita un instant à répéter, à lui dire de se relever. Puis il lui jeta un coup d’œil, et se souvint qu'il s'était mis en tête de la bouder. Autant qu'il se taise, en ce cas. Et s'il se taisait, il était tout de même inutile de perdre du temps.

Il se relança donc, et se positionna rapidement sur la guerrière, pour la plaquer au sol comme on avait fini par le lui apprendre. Nuage Poivré n'était pas doué d'une force extraordinaire, mais était capable de concentrer ses efforts afin de faire preuve d'une violence explosive. Ici, il s'agissait, sans griffer, sans mordre, de bloquer très fermement les articulations importantes de la rouquine à l'aide de tout son poids et de l'appui qu'il pouvait exercer, lui qui se trouvait au-dessus d'Éclat de Crépuscule.

Dans cette position, impossible de voir le ciel. Il faisait en quelque sorte de l'ombre à son soleil, à la belle qui essayait de se faufiler hors de ses pattes. Quelle imposture, trembla-t-il. Mais malgré cette frustration qui le crispait, Nuage Poivré ne pouvait s'empêcher de se laisser captiver par son odeur.

Elle sentait l'étranger. Le poisson. réalisa-t-il tout à fait.

Il aurait tant aimé retrouver son odeur à elle, celle qu'il aimait. La revoir briller, l'entendre rire à nouveau. Être celui qu'elle n'oubliait jamais. Il a dû se passer quelque chose. voulut-il croire. L'idée lui venait seulement là. Elle ne m'a pas oublié, c'est quelque chose qui l'a retenue. Elle s'est faite attaquer, peut-être.

" Il me semble que je suis bloquée. Tu as bien géré. Laisse-moi sortir et attaque-moi, puis on analysera tout ça. Il y a des bonnes choses. Deux secondes. " miaula-t-elle, lointaine, mais douce malgré tout.

Je suis un idiot, à lui faire la tête alors que si ça se trouve, elle a besoin de moi plus qu'à n'importe quel autre moment. Elle est malheureuse, inquiète, peut-être, et elle s'efforce de tout cacher juste parce que je ne suis pas capable d'attendre un peu.

Il s'en rendait compte, c'était déjà ça. Mais il ne parvenait pas pour autant à trouver la force de changer tout à fait de visage. Brusque, sans délicatesse, il fit un bond et s'éloigna de la guerrière un peu plus que d'ordinaire. Il gardait un regard trop froid, trop sévère, trop mécontent. Nuage Poivré doutait bel et bien, mais il ne parvenait pas à se rassurer tout seul, à se convaincre que tout était pour le mieux, qu'il s'était trompé sur toute la ligne. Cette situation était insupportable, il se décida à parler :

" Tu t'es faite attaquer, tout à l'heure, c'est ça ? Tu sens pas comme d'habitude. " lança-t-il, en tâchant de paraître plus impassible qu'un bloc de pierre. Ni soupçonneux, ni vraiment tendre, mais dans un équilibre très délicat qui annonçait un basculement prochain.

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'Attaque Clan' :