[INNONDATION] Mieux vaut tard que jamais | Etoile Foudroyante

L'air était chaud, tellement chaud que l'on pouvait être en droit de se demander ce que toute cette eau faisait ici. Nuage de Tempête n'avait connu qu'un été, trop jeune, il s'en rappelait peu. Une chose était sûr, il préférait le Printemps. Plus doux, surtout.

Son corps entier lui semblait plus léger et la fraîcheur qui s'insufflait entre ses poils, contre sa peau, lui faisait le plus grand bien. Il battait des pattes, maladroit empoté. Ses yeux étaient grands ouverts, il voyait flou, mais suffisamment pour savoir où se diriger. Le soleil plongeait avec lui, dansait autours de lui, ondulait comme sa queue, ses moustaches. Dans une poussée brutale, il sortit la tête de l'eau qu'il perça du museau.
Il reprit son souffle.

Nuage de Tempête ne se serait jamais douter qu'il aimerait autant ça. Maman lui avait montré et parce qu'il voulait lui faire plaisir, il s'y était essayé. C'était plus facile que de grimper aux arbres, mais plus douloureux quand, le lendemain, les muscles grognaient.

La berge était une pente douce. Après tout, l'eau avait tellement monté que la Combe n'était plus qu'une sorte d'étang un peu sale.
Tempête s'ébroua, s'échant son pelage qu'à demi. L'eau s'écrasa en gouttelettes sur les minuscules talus de boue que ses pattes avaient créer en se hissant hors du creux.
La pluie, en brève accalmie, s'était stoppée et alors qu'il se croyait seul, l'apprenti lécha son pelage, accroupi près de l'eau.

Il était secret, le félin, ne nageait jamais devant personne, si bien que seul maman était au courant de son petit secret.

Maman... et son grand-père. Ce-dernier était couché du haut de sa branche, soit une longue protusion d'un de ces rares bouleau jaunes surplombant la combe désormais innondée. Sa branche, souple, balançait au rebond à chaque fois qu'il se penchait pour prendre une bouchée de sa proie, transformant son observation du jour en véritable dîner-spectacle.

Bien qu'il ne prenait aucune précaution à se dissimuler dans les ombres ou un feuillage plus foncé, il savait que Nuage de Tempête était beaucoup trop absorbé par l'exercice pour le remarquer. Il lui rappelait tout ces chats colorant ses souvenirs troués. Rivière d'Émeraude au poil de feu (avec des Si on referait le monde), Étoile d'Or et sa robe couleur soir (La haine n'est pas innée; on l'enseigne), Jolie Abeille et son poil blanc et noir (Même le plus malade des chats avait le pouvoir de rendre les autres heureux), et sa fille Source, rayée de blanc (C’est pour ça que je les aime. Parce que je n’oublie pas facilement.)

Et en bas se trouvait son propre petit-fils, son propre apprenti qui nageait dans l'eau comme il avait toujours rêvé de le faire, s'aidant de ses palmes-aux-pattes héritées de la fille qu'il avait adoptée de feu son ami qui était (illégalement) tombé amoureux d'une chatte de leur berge voisine. Il avait adopté Source afin de punir Raton-Laveur d'avoir été choisi lieutenant à sa place; il ne s'était jamais attendu un jour d'être appelé père (par Coeur Brisé, qui l'avait tant haï) ou même grand-père (sauf par les petits de Bec Croisé), et encore moins par un hybride de toute cette portée lourde de sang-mêlé.

C'était plus fort que lui: il s'en attendrit. S'il avait pu refaire le monde avec des Si, il aurait marié Jolie Abeille à Raton-Laveur. Il aurait fait de leur union un évènement public et il l'aurait célébré, et haut-les-coeurs. Une feuille se décrocha de sa branche, dansant dans l'air, se posant dans l'eau. Elle troubla la surface de son rêve et de la boue recouvrant la combe.

M'enfin.

— C'est du joli!

Étoile Foudroyante se révéla à l'apprenti-guerrier en le lançant du menton, redirigeant son attention vers quelque banalité de leur situation.

— T'as vu des poissons enlisés dans la boue? J'ai pensé que ça nous ferait des proies faciles.

Il se percha au-dessus du pigeon qu'il avait éventré, épiant d'en haut la berge détrempée et moite qu'avait autrefois été ce bac à sable où ils s'entraînaient au combat. Quelques remouds à la surface attiraient son attention, mais, manque de pot, la vase était beaucoup trop opaque pour y voir à travers.

Une onde troubla le calme. La feuille ne fit aucun bruit, mais l'oreille de Tempête s'agita et il leva le museau vers l'étang improvisé, arquant le dos et dressant la tête. Ce n'est pas elle qu'il aurait dû regarder, mais sa branche.

« C'est du joli ! » Il tourna vivement la tête, le coeur battant, prit sur le fait. « T'as vu des poissons enlisés dans la boue? J'ai pensé que ça nous ferait des proies faciles. » Là, dans les branches.

Nuage de Tempête ne hérissa pas son poil, mais la colère l'envahit. Il était vexé d'avoir été prit sur le fait. Vexé qu'on l'ait vu. C'était son secret, son grand-père n'avait rien à faire ici.
Il fronça à peine les sourcils, passa un coup de langue sur son poitrail pour se détendre. En grandissant, il devenait moins doué pour masquer son agacement. Peut-être parce qu'il en prenait de plus en plus conscience et qu'ainsi, comme instinctivement, il prenait plus le temps d'en peindre la couleur.

Il s'avança un peu, à peine, vers l'arbre, m'manœuvrant dans la boue. Ses doigts s'écartaient, ses palmes l'aidaient à ne pas s'enfoncer de trop. Quel héritage !

« On ne voit presque rien, là dessous, surtout pas quand je-... Quand ça bouge, en fait. » Dit-il d'un ton faussement calme car terriblement sec. Il avait envie de lui feuler qu'il n'avait qu'à aller voir lui-même, et toc !

« Je... Je ne crois pas que nous soyons en m'sure d'attraper des poissons, en plus. » Un peu troublé par la réflexion, son regard se hasarda vers cette rivière en crue. Oh, le soleil séchait déjà son poil.

Étoile Foudroyante versa sa tête sur le côté, ne se gênant pas de se rincer l'oeil quant à l'aisance de son apprenti qui se déplaçait juste sous la tension de la surface de l'eau.

— On ne voit presque rien, là dessous, ce-dernier lui dit comme si de rien n'était, comme si la boue n'aurait pas collé à ses pattes et ne l'aurait pas retenu sous les eaux là où Tempête pataugeait avec élégance, surtout pas quand je-... Quand ça bouge, en fait.

Étoile Foudroyante plissa ses yeux rieurs qui se teignirent d'une toute petite touche de moquerie.

— Ah, c'est parce-que ça bouge?

Mais enfin, qui croyait-il berner? Depuis le temps, Nuage de Tempête avait bien appris que ce n'était pas de son sourire, qu'il fallait se méfier.

— Je... Je ne crois pas que nous soyons en m'sure d'attraper des poissons, en plus, se hasarda Nuage de Tempête, sans toutefois retirer les yeux des eaux, comme si un poisson s'apprêtait à fendre la surface d'un bond pour lui faire ravaler ses mots.

Étoile Foudroyante n'haussa qu'une épaule. Mm, dommage. Il en doutait. Il était même sûr que son apprenti se dépatouillerait plutôt bien contre tout nageur sur lequel il jeterait son soûl.

— 'Faut dire que ce que nous ramène Bécasse n'est pas toujours... Étoile Foudroyante laissa son regard se couler en direction de la rivière, puis de la berge, remontant la côte, où le sol était, certes, humide, mais plus sec, et où il risquerait moins de se tacher si jamais il lui prenait envie de descendre ... Savoureux, acheva-t-il, le sourire hermétique et la bonne humeur figée dans sa face, trahi par une oreille qui s'était complètement couchée sur le côté.

Oui, car, le débordement de la Rivière dans son lit n'avait pas seulement submergé leurs rochers chauffants ou leur terrain d'entraînement ou le territoire où s'agglutinaient les serpents, les transformant tous en simili-marécages: quand l'eau avait couru sur leurs terres, avait foncé sur le chemin du Tonnerre, avait déferlé dans le Tunnel du Clan de l'Ombre, elle avait aussi emporté avec elle toutes sortes de babioles de grisgris et de rebuts de la ville en les éparpillant dans leurs buissons au pied des troncs jusqu'aux ronces de leurs palissade. Et Bécasse, très chère Bécasse, qu'il connaissait de nom désormais, surtout grâce à sa nouvelle réputation, avait adopté la vilaine nouvelle habitude de ramasser tout ce qui lui tombait sous le nez et de le rapporter au campement, la bouche en coeur.

Étoile Foudroyante s'efforçait bien de trouver quelques... point positifs à ce nouveau problème (comme quoi il n'avait plus besoin d'aller jusqu'aux Rochers du Soleil pour trouver son reflet et se faire une beauté tous les matins; il n'avait qu'à sortir de leur campement et trouver n'importe quelle flaque qui trouait leur belle forêt), le poids de tout ces nouveaux points négatifs allait sans doute bientôt lui blanchir le poil.

« 'Faut dire que ce que nous ramène Bécasse n'est pas toujours...


... Savoureux.»

Oh oui.

Sa sœur n'avait jamais été la griffe la plus aiguisée du fourreau. Il se retint de le signaler, observant simplement l'expression de son mentor et maître à penser. Il reconnaissait cette oreille, là, mais il avait encore du mal à comprendre c qu'elle voulait dire. Tempête n'était pas bon pour lire les visages.

Il ne s'approcha pas d'avantage de l'arbre, se contentant bien de la boue qui enlisait ses pattes. Il ne se rendait même pas compte de l'aisance dont il pouvait faire preuve, songeant à ses propres difficultés pour avancer sur un tel sol. Difficultés moindres en comparaison des autres félins.

« Elle... Elle n'a pas beaucoup grandit. Dans l'intérieur de sa tête. » Puis, comme s'il voulait protéger sa sœur du jugement asserré de Foudre, il reprit, plus vite : « C'est une bonne petite. Elle fera une bonne guerrière. »

Il avait prit cette habitude, depuis toujours, de parler comme s'il était grand frère de plusieurs lunes. Même Nuit qui était pourtant sa sœur la plus proche, il la traitait comme sa cadette. Nuage de Tempête avait prit cette responsabilité, de s'estimer l'aîné, et il avait toujours eu cette façon d'agir et de parler comme s'il eut été dors et déjà un adulte, tout en maîtrisant ses émotions aussi bien qu'un nouveau-né.

Evoquer ce possible passage de rang pour sa jeune sœur souleva, comme sa patte plus tôt avait soulever sous l'eau un nuage trouble, une légère forme d'amertume. Elle se rependit partout dans son poitrail et une grimace lui tordit la face.

Pourquoi Etoile de Foudre se plaignait-il, au fond ? Son pigeon avait l'air délicieux. Oh, oui. Trouvons un prétexte pour accrocher encore un peu de cette colère là où il ne fallait pas. Là où elle n'avait rien à faire.

Ce pigeon, surtout, ne lui venait pas de leur forêt. Étoile Foudroyante avait profité du reflux pour étirer sa patrouille bien au delà du rebord du Chemin du Tonnerre et où les par-terres de la ville foisonnaient de fleurs d'été. Il avait voulu quadriller le périmètre afin de voir jusqu'où s'étendaient vraiment les dommage de leur foutue Rivière. Il avait eu une pensée pour le Clan de l'Ombre et leur bourbier, qui devait déborder, désormais. Il eut une pensée pour leur chef, normalement impassible, se demandant si la longueur de son poil ne lui rendait pas la vie plus dure avec l'air humide. Lui, par ses origines bengales, était naturellement et génétiquement hydrophile, même s'il n'avait jamais appris à nager.

— Elle... Elle n'a pas beaucoup grandit. Dans l'intérieur de sa tête, acquiesça Nuage de Tempête, avant de se reprendre comme s'il craignait que ses mots soient retournés contre lui. C'est une bonne petite, s'empressa-t-il d'ajouter. Elle fera une bonne guerrière.

Étoile Foudroyante croqua l'aile de son volatile, l'étirant afin de la déployer grande ouverte, ses plumes et sa poussière de protection étincellant comme des perles au soleil.

— Ah oui. Une "bonne" guerrière, vraiment.

Un effroyable craquement: des dents, d'une tension du dos et de la nuque, il arracha à sa carcasse son aile, et la poussa en bas de sa branche à l'intention de son apprenti, qu'il se nourrise un peu après l'exercice.

— Une bonne guerrière, sachant se défendre, se battre, faire preuve de férocité contre les prédateurs de notre forêt? C'est bien ce que tu vois?

En se penchant, la mine de rien, il croqua sans merci dans son pigeon, tirant les entrailles d'une ondulation amusée de la queue.

— Et pour toi?

À vingt-et-une lunes, Nuage de Tempête se sentait-il plus confiant malgré les particularités atypiques de son corps? Se connaissait-il mieux malgré la mèche courte de sa colère? Voyait-il au travers des reflets qu'il se faisait sans cesse de ceux qu'il aimait, à commencer par celui de son propre mentor? Étoile Foudroyante versa sa tête de l'autre côté.

Il demandait bien à voir.

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« Ah oui. Une "bonne" guerrière, vraiment. »

Le bruit agita la petite oreille de Tempête.

« Une bonne guerrière, sachant se défendre, se battre, faire preuve de férocité contre les prédateurs de notre forêt ? C'est bien ce que tu vois ? » Pour l'heure, son regard voyait surtout une aile souillée par un peu de boue. Foudre l'avait jeté du haut de sa branche, là, devant les pattes de son apprenti.

Il était vexé, alors, il n'avait pas faim. Il envoya un regard électrique à son mentor, mais il s'avança finalement d'un pas léger pour venir se saisir de l'aile. De là, il entreprit de rejoindre les racines de l'arbre, là où la boue serait moins... Eh bien, boueuse.

« Et pour toi ? » La question l'interpella.

Il aurait répondu, pour ce qui est de Bécasse, que ce qu'il voyait importait peu. Elle était sa sœur et, de fait, elle serait toujours un chaton hyperactif à protéger à ses yeux. Bien sûr, au delà de cette vision qu'il avait d'elle, il ne la pensait pas prête à devenir une guerrière. Il la trouvait trop naïve, il lui manquait la méfiance. Elle serait surprise, choquée, au premier coup de griffe-

Mais revenons à lui.

Il sentit que le feu qui s'insinuait en lui avait été nourrit par les paroles de son mentor. Il en déduit donc que c'est là que le bas blessait. Comme à son habitude, il ne fronça que les sourcils, toujours aussi calme. D'un coup de dent, il entreprit de d'arracher les plumes de cette aile.

Tiens, il ne connaissait pas cet oiseau là. Du moins, pas exactement.

D'un air faussement indifférent, concentré sur sa tâche, il se contenta d'une réponse qui n'en était pas une, aux accents parfaitement lisses de neutralité :

« Hm. C'est toi le chef, en fait. Alors, toi, vois-tu un guerrier en moi ? »

Malgré lui, et malgré tout l'orgueil dans lequel il pouvait se renfrogner, son apprenti accepta l'offrande ne serait-ce que pour s'aiguiser les dents sur ses longues plumes irisées.

Il imita sa mine de rien:
— Hm. C'est toi le chef, en fait. Alors, toi, vois-tu un guerrier en moi ?

Quel petit enfoiré, ne put s'empêcher de penser Étoile Foudroyante avec affection. Il se prit au jeu, levant le menton.

— Non.

Sa queue ondula, et il reprit une bouchée de son pigeon, lorgnant d'un oeil amusé l'apprenti-guerrier s'étant rapproché du tronc de l'arbre où il s'était perché. Comptait-il le grimper et l'y rejoindre? Un rire sous cape lui remua les épaules: comptait-il l'y faire tomber? ♡

— Tu es beaucoup trop impulsif. Et imprudent! Je sais que tu sors du territoire pour aller épier celui des autres et collectionner toutes sortes de nouveaux noms et de nouvelles expériences...

Et ça lui rappelait qui, hmm?

Étoile Foudroyante s'observa la patte; ses griffes cliquetèrent en bondissant de leurs fourreaux. Il les fit briller au soleil, s'assurant leur tranchant adéquat.

— Si tu veux mon avis, ça n'est pas le panache d'un guerrier... Nuage de Tempête devait être trop loin pour l'entendre ronronner. ... C'est plutôt celui d'un chanteur. ♡

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« Non. »

La réponse tomba, implacable, jugement impitoyable.
Tempête cru s'étouffer avec une plume. Il la sentit dans sa gorge, se coincer, figer son visage. Pourtant, il n'avait encore rien avalé.

Son regard, furibond, se posa rageusement sur son mentor. Il s'abstint pour l'heure de lui répondre.
Voilà, tiens, ce qu'il venait d'avaler : sa fierté.

« Tu es beaucoup trop impulsif. Et imprudent! Je sais que tu sors du territoire pour aller épier celui des autres et collectionner toutes sortes de nouveaux noms et de nouvelles expériences... » Foudre était injuste. Il était injuste. Il le jugeait sur peu de chose et Tempête se dressa sur ses pattes, mauvais perdant. Fermé, il avait l'air calme. Il n'y avait que le bout de sa très longue queue qui s'agitait furieusement de droite à gauche.

« Si tu veux mon avis, ça n'est pas le panache d'un guerrier... C'est plutôt celui d'un chanteur. ♡ »

Un quoi ?

Du bout de la patte, le jeune félin écarta l'aile de sa piste. Il y reviendra plus tard. Il n'avait plus faim, plutôt, il avait une conversation à mener. Et il refusait de la mener en se brisant les cervicales.
D'un bond, les lèvres pincées de frustration, il s'agrippa au tronc, enfonçant ses griffes dans l'écorce. Ses muscles nouvellement dessinés se contractèrent, obéissant à ses ordres et le propulsèrent dans un nouveau bond un peu plus haut. Il souffla, sa queue lui servit de gouvernail et il n'eut qu'un petit effort de plus à faire pour atteindre la première branche.

Etoile Foudroyante était encore un peu plus haut.

« Je vois. » Dit-il, haletant, dans un souffle qui se voulu ferme. Il déglutit, leva les yeux. « Je vois mais je... Je n'ai pas fait ça. Pas si souvent que ça. C'était il y a longtemps. Ce n'est pas-... Je ne suis pas impulsif. » Il perdait ses mots, ce n'était pas bon.

Il s'avança sur sa branche, la faisant tanguer légèrement.

« Je ne suis pas un chanteur, je suis un guerrier. Je ne chante pas, moi ! Je-... Je me suis entraîné et battu. J'ai fait la paix avec Nuage de Feuille, j'ai chassé pour le clan. De quel droit estime-tu que je suis trop impulsif, Le Foudroyé ?! » Il avait finalement haussé légèrement le ton.

Son cou s'était allongé, il avait abaissé la tête au même niveau que ses épaules, penchant légèrement cette dernière pour continuer d'épier son mentor. Ses sourcils étaient froncés dans un expression de colère retenue. Il en avait oublié le plus élémentaire des respects.

Mais peut-être que cela inciterait Foudre à retrouver le sien ?

Oh.

La nouvelle n'eut pas l'effet escompté...

Nuage de Tempête put voir la stupeur transparaître dans le regard de son mentor quant à sa vivacité à grimper l'arbre - déjà si habile! - et débuter l'ascencion pour le rejoindre en haut.

— Je vois.

Voyait-il vraiment, ou bien...?

— Je vois mais je... Je n'ai pas fait ça, se défendit Nuage de Tempête, le ton égal et sans le moindre tremblement dedans. Pas si souvent que ça. C'était il y a longtemps. Ce n'est pas-... Je ne suis pas impulsif.

Mais malgré s'être enseigné à contenir et à écouter sa colère, elle brouillait tout de même ses pensées, et lui faisait échapper ses mots. Comme sa proie, sur laquelle il s'était étouffé. En baissant les yeux sur cette dernière, perplexe, Étoile Foudroyante ne vit pas l'apprenti-guerrier s'approcher. Son nez ne se releva que lorsque sa branche de bouleau rebondit sous son corps, et qu'il dut aplatir patte et griffes sur sa carcasse de pigeon pour éviter que celle-ci ne lui échappe comme un ressort.

— Je ne suis pas un chanteur, je suis un guerrier. Je ne chante pas, moi ! Je-... Je me suis entraîné et battu. J'ai fait la paix avec Nuage de Feuille, j'ai chassé pour le clan. De quel droit estimes-tu que je suis trop impulsif, Le Foudroyé ?!

C'était une... mise en scène, comme il en faisait avec Source?

Le Foudroyé le relança du menton en guise de réponse à sa question. Quel autre caractéristique donner à un chat qui comprenait si mal ses intentions qu'il se hâtait de grimper un arbre et le menaçait de lui casser sa branche que quelqu'un d'impulsif? Il ne souriait plus que par douce réprobation, penchant sa tête.

— ....... Nonobstant complètement que tu viens tout juste de me prouver raison, je crois qu'il y a méprise. Je te disais que je te voulais comme diplomate afin de tisser, auprès de moi ou non, des liens solides avec nos voisins.

Battant de l'oreille, le bengal fit la moue, feignant un air embêté.

— Je croyais que ça te ferait plaisir... Il soupira, appuyant mollement sa joue dans sa patte. Je me suis trompé?