Acide Citrique et Phéromones | prio Fauve - end

Avec son air princier et ses manières de maître de maison, Petit Fauve choisit donc de quitter le campement. Ça tombe bien, on manquait de remèdes, j'ai de la cueillette à faire. Et oui kiddo, ça crache dans mon dos parce que je sais pas bien me battre, mais qui fait tourner le Clan qu'on les beaux grands forts guerriers se pètent les genoux ? C'est pour ma gueule.

Ok kiddo, tu viens avec moi, on va chercher des plantes. Avoue que ça te fait rêver.

Avec le gamin royal à mes côtés, je sors du Campement, et me dirige vers l'intérieur de nos terres. Si les Étoiles me sont favorables, je trouverai bien un peu de pavot. Le Clan en a bien besoin en ces temps de blessures et meurtrissures.

Comme un signe néfaste, malgré mes pérégrinations, je n'en trouve pas, et décide de me rabattre sur une belle pousse de tige d'or. Toujours utile. Je l'arrache de mes crocs, avec délicatesse, et me retourne vers le chaton.

Ça te dit d'essayer de trouver un remède ? Cette plante, la tige d'or, sers au traitement des plaies profondes. Elle est utile, mais courante. Si les Étoiles le veulent, nous trouverons un peu de lavande, qui calme les fièvres, ou bien de la digitale, pour parer les insuffisances cardiaques. Enfin, ça doit être bien compliqué pour toi, Asticot Vif.

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« Ok kiddo, tu viens avec moi, on va chercher des plantes. Avoue que ça te fait rêver. » finit alors par répondre le guérisseur aux multiples cicatrices.

Ainsi les deux mâles se dirigèrent vers la sortie du Campement. Et lorsque le chaton héritier passa non-loin du garde de jour, il prit grand soin de se redresser fièrement. Comme il était jouissif d’enfin pouvoir braver la surveillance des guerriers ! Et comme il était satisfaisant de quitter ce maigre bout de terres pour enfin explorer le territoire qui serait bientôt le sien, et uniquement le sien, lui, le futur Roi, le prince de l’Ombre, l’empereur de ces dames et le tueur d’intrus.

Pendant que l’adulte aux odeurs de plantes était en pleine labeur, le jeune félin tigré gambadait autour de lui. Il flairait ça et là, zieutait les marais, mordait parfois discrètement dans les plantes comme s’il s’agissait de la chair de ses ennemis, et battait des pattes, et bondissait sur le moindre bout de bois ressemblant de près ou de très très loin à quelque chose de vivant. Il s’acharnait d’ailleurs sur un bâton lorsqu’Esprit Soucieux se tourna en sa direction.

« Ça te dit d'essayer de trouver un remède ? Cette plante, la tige d'or, sers au traitement des plaies profondes. Elle est utile, mais courante. Si les Étoiles le veulent, nous trouverons un peu de lavande, qui calme les fièvres, ou bien de la digitale, pour parer les insuffisances cardiaques. Enfin, ça doit être bien compliqué pour toi, Asticot Vif.
- Je m'appelle Petit Fauve, d'abord. Puis j'm'en fiche moi j'veux devenir un guerrier ! »

Il bondit alors, comme surexcité à la seule idée de recevoir le titre. Il courut et poursuivit son jeu, s'acharnant sur la végétation. Lorsqu'il tomba truffe à truffe avec une plante verte aux feuilles édentées, il s'écria :

« Regarde ! Une plante avec des dents, c'est super bizarre ! »

Il s'agissait ni plus ni moins d'aloe vera, dont le jus est utile à la désinfection des plaies. Sans crier gare, le chaton noir débuta le massacre d'une des nombreuses feuilles en grommelant de rage lorsque les petits piquants de la plante s'enfoncèrent dans sa langue. Elle avait du culot, cette plante, pour penser pouvoir résister au grand Petit Fauve !

Il veut devenir guerrier, qu'il me dit. Évidemment. Ils veulent tous être guerriers, courir dans le vent, sentir la morsure de la bourrasque sur leur pelage, chasser, toujours plus loin, se battre et se blesser, trip sadomasochiste, et surtout, surtout, baiser baiser baiser avoir des gamins et les laisser aux bons soins du guérisseur. Tout pour ne pas se retrouver entre les quatre murs du Clan, de sa famille, de ses responsabilités. Y aura toujours le guérisseur s'ils sont malades, s'ils ont mal, s'ils toussent, si le kiddo vomit. Toujours le guérisseur. Et jamais un guerrier.

Puis le petit prince en goguettes commence un combat épique avec une pousse d'aloe vera. Ah, la fougue de la jeunesse. Et sa connerie. Voilà, là Petit Fauve tirait la gueule car les fins piquants de la plante venaient de se ficher dans sa petite langue rapeuse. Les enfants. Un plaisir.

Crache kiddo, crache. Et puis on saute pas sur tout ce qui bouge putain ! T'imagine si ça avait été empoisonné ? T'imagine putain ? Et après c'est moi qui paye les pots cassés... C'est pour ça qu'il faut pas vous laisser sortir, merde.

Je lui lèche avec vigueur le crâne, pour le réconforter, à ma manière.

Je sais que ça pique va, j'ai fait la bourde avant toi. Coupe en une tige, au point où tu en es.

« Crache kiddo, crache. Et puis on saute pas sur tout ce qui bouge putain ! T'imagine si ça avait été empoisonné ? T'imagine putain ? Et après c'est moi qui paye les pots cassés... C'est pour ça qu'il faut pas vous laisser sortir, merde. » avait alors miaulé l'adulte devant la scène.

Petit Fauve obéit sans surprise, crachant avec dégoût et rage les quelques bouts filamenteux qui étaient restés dans sa gueule. Bientôt, il sentit la langue râpeuse du guérisseur sur son front, et il tenta de se soustraire au geste tendre alors qu'il crachait encore. Les sourcils fermement froncés, les babines retroussées et les yeux lançant des éclairs, le chaton tigré n'avait pas fière allure !

« Je sais que ça pique va, j'ai fait la bourde avant toi. Coupe en une tige, au point où tu en es. »

Petit Fauve ne se priva pas de libérer un long soupir devant les ordres du félin gris, exposant alors son agacement. Mais le sombre chaton s'exécuta malgré sa rage, planta férocement ses petits crocs dans la chair de la plante. Secouant la tête comme un petit roquet des villes, il finit par arracher une tige, au prix de grands efforts et de nombreux grognements insatisfaits. Une fois sa besogne terminée, le capricieux jeta littéralement la plante aux pattes d'Esprit Soucieux sans mot dire. Sa langue le brûlait de douleur. Heureusement pour lui, les piquants de l'aloe vera n'étaient pas énormes, et il ne saignait qu'à cause de quelques petites plaies superficielles. Autant dire qu'en voyant la tête du gamin, on comprenait immédiatement qu'il était en colère. D'un ton accusateur, il gémit à son aîné :

« C'est ta faute si je me suis fais mal ! C'est toi qui m'a fait sortir et qui m'a pas surveillé ! »

Puis il afficha une moue boudeuse. Il avait honte de paraître soudain si faible, si sensible à la douleur et aux émotions qu'elle réveille. Et un félin fier et honteux n'a aucun remord à dévoiler son courroux, en tous cas pas Petit Fauve.

HRP:

Des soupirs-coups de poings plein la gueule, il plie néanmoins, roseau d'acier dans le vent sombre et chaud. Il arrache la plante, lentement, avec une certaine haine envers le règne végétal, du ressentiment ; il est vexé de s'être fait prendre au piège par une plante mordante et s'en veut d'avoir mal. il doit sans doute retenir de petites larmes d'enfant boudeur, qui va siffler avec les vipères son mal-être juvénile.

C'est ta faute si je me suis fais mal ! C'est toi qui m'a fait sortir et qui m'a pas surveillé !
Ma faute ? Laisse moi rire, j'entends encore ta petite voix geignarde me supplier, non, pire, m'ordonner, de te balader un peu hors du Camp ! Ca se prétends adulte et ça n'assume pas ses erreurs ? Bravo Petit Asticot, ton père serait fier de toi.

Comme une mère-valkyrie, je le saisis au jeté de cou, d'un geste rapide, et prend le chemin du Camp, son corps me cognant dans les pattes, fardeau de chair balancé au rythme de mes tours mouvantes de chat haut perché. J'entasse la tige d'or et les plans d'aloe vera coupés, je viendrais les prendre plus tard. A mi-chemin, exténué, je le lâche, crachant des poils comme on crache son angoisse de bateau dans la tempête.

Maintenant tu vas pouvoir visiter mon antre. Tu voulais goûter des remèdes, non ? C'est ta chance. Tu vas les bouffer, dans le calme, sans un mot, sans un pleur. Pour les Etoiles. Pour ton père. Pour devenir adulte.

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Mais l'adulte lui répondit sans mal. Quel genre de matou aurait du mal à tenir tête à un vulgaire chaton trop gâté, de toute façon ?

« Ma faute ? Laisse moi rire, j'entends encore ta petite voix geignarde me supplier, non, pire, m'ordonner, de te balader un peu hors du Camp ! Ca se prétends adulte et ça n'assume pas ses erreurs ? Bravo Petit Asticot, ton père serait fier de toi. »

Remise en place. Son petit cœur s'emballe, plein de courroux et de honte. Et lui prend alors l'envie de partir en courant, de crier fort, très fort à quel point cela l'agace de n'être qu'un Petit chat. Son père, c'était son monde. Il était baigné dans la gloire depuis sa naissance, et les étoiles elle-mêmes le berçaient une fois la nuit tombée. Sous la langue maternelle de Douce Ancolie, il devenait un dieu, un futur empereur, le prince héritier d'un royaume marécageux mais plein de puissance. Et alors, sur la place aux aiguilles il entreprenait déjà de diriger son propre monde, dont il était bien évidemment le centre. Mais tout ce beau portrait n'était qu'un héritage qu'il volerait à son géniteur une fois ce dernier à terre. Il n'avait rien de plus que Petit Scorpion, ou même Petite Hermine. Et ça le tuait à chaque fois qu'il s'en rendait compte, si bien qu'il masquait le crime derrière de nouveaux caprices.

« Je m'appelle Petit Fauve, cervelle de moineau. » marmonna-t-il lorsque, vif, Esprit Soucieux le saisit.

La scène avait d'ailleurs un aspect comique. Le chaton capricieux et boudeur subissait l'humiliation ultime, ainsi transporté telle une proie par le guérisseur du Clan. Le petit mâle tigré fulminait. A mi-chemin, il retrouva enfin le confort du sol.

« Maintenant tu vas pouvoir visiter mon antre. Tu voulais goûter des remèdes, non ? C'est ta chance. Tu vas les bouffer, dans le calme, sans un mot, sans un pleur. Pour les Etoiles. Pour ton père. Pour devenir adulte.
- Si j'étais adulte, y a bien longtemps que tu t'étoufferais avec tes remèdes de vieux schnock ! »

Et parce qu'il n'était pas du genre à faire les choses à moitié, Petit Fauve déballa sa petite langue rosée avec hargne face à son opposant. Qu'il était agaçant, cet esclave-ci !

Puis, telle la diva suprême du Clan, il poursuivit le chemin d'un pas lourd, tête et queue relevées bien haut, les paupières mi-closes. Hautain. Méprisant. Féroce. Petit Fauve.

HRP:

Quand je le pose, je relâche une petite tornade, une diva de qualité, un gamin pourri-gâté. Ancolie, je sais que tu aimes tes enfants, mais leur coller des petites tapes derrière la tête, parfois, cela leur ferait du bien. Je le regarde. Je tente de décrypter les émotions qui l'animent : rose passion, noir sombre et froid, éclat de jaune méprisant, je suis peintre fauviste et il est fauve en cage. Petit, si petit encore. Attendrissant d'une certaine manière, avec ses velléités de grand seigneur et ses moues enfantines.

Je te souhaite de mourir d'infection alors, tiens. Tu rigoleras moins quand Papa t'auras charcuté le coussinet.

Oups. Un peu méchant peut être. Qu'importe, que le petit prince apprenne la vie, mieux vaut ma langue acerbe que les coups d'un ennemi.

Ou pire.
D'un homo.

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« Je te souhaite de mourir d'infection alors, tiens. Tu rigoleras moins quand Papa t'auras charcuté le coussinet. »

Petite crise. Le chaton serra les crocs de frustration, de rage, de lassitude... Que répondre face à un guérisseur à la répartie plus grande que la liste des plantes qu'il a appris ? Sac à caca ? Pipi de rat mort ? Ces idées immatures traversèrent l'esprit du matou noir tigré mais son menton se mit à trembler. Marre, marre, marre, il en avait marre qu'Esprit Soucieux gagne toujours ! Ses yeux s'embuèrent d'une fine couche larmoyante mais Petit Fauve se reprit. Le prince héritier ne pouvait pas pleurer. Le prince héritier ne pleurait jamais. A la place, ses griffes juvéniles se mirent littéralement à labourer le sol meuble avant que l'animal sombre ne réplique :

« Fffffffumier... Tu rigoleras moins quand Étoile de Serpentaire te f'ras la misère parce que tu soignes même pas son héritier ! » Il fulmina avant de balancer : « Bah puisque c'est comme ça, j'vais mourir là maintenant. Juste là ! » en allant se placer dans un coin de la tanière du guérisseur.

Puis, comme convaincu qu'en refusant d'être soigné, il périrait, Petit Fauve se mit à remuer la gueule, cachant et dévoilant ses crocs à l'aide de ses babines. Il se justifia enfin.

« C'est pour que ça s'infecte plus vite. »

Rapidement, il tourna le dos au guérisseur, dissimulant du mieux qu'il le pouvait la douleur qu'il éprouvait. Puis soudain songeant que personne ne l'aiderait, mourant là, il se mit à pleurer silencieusement. Alors il se dit qu'il n'était peut-être pas le prince héritier et il éclata en sanglot, comme tout à coup lassé de cette mascarade.