Time to play ! | ft. Nuage du Renard - abandon

Constatant avec joie que mon camarade avait pris part à ma petite partie de jeu, je lui souris en le rejoignant. Un coup d’œil rapide en bas, et je pouvais voir tout le bric-à-brac qu'on avait pris un certain plaisir à causer. Mais maintenant, l'odeur se faisait de plus en plus fétide, comme si le fait de déranger « l'ordre paisible » du lieu l'avait ravivée. Je pouvais clairement sentir la moisissure et la décomposition de là... Les avaient-ils juste abandonnés ou les bipèdes aimaient définitivement tout ce qui était immangeable ?

Alors que je m'amusais plus à examiner le fouillis de sous nos pattes, le rouquin lui, était occupé à trouver une issue. Ç'a n'avait pas dû être très compliqué puisqu'il lui fallut peu de temps pour me signaler de le suivre, dans un mouvement de queue. Eh, ça c'est à nous ! Je sais bien qu'ils l'utilisent tous ici, mais un peu de respect, l'ondulation doit être plus fluide et doit aller plus vers l'avant ! De toute façon, on restera les meilleurs aux clans de l'Ombre... Mais je n'ai pas le temps de le corriger puisqu'il s'en va aussitôt sur le niveau au dessus de nos têtes. Je le rejoins, et c'est alors que j’aperçois la sortie en question. En se rapprochant après un autre bond pour rejoindre la planche d'en face, je vis qu'elle était à peine assez large pour moi. Mais vu comment c'est fragile...

- On peut passer par là. Enfin, je pense que je vais avoir un petit peu de mal mais si j'arrive à agrandir un peu l'ouverture, ça devrait aller. Tu veux sortir en premier ?

Bien sûr que je vais passer en premier, je vais l'élargir moi même ! Je passe ma tête d'abord, puis regarde en bas pour savoir si je vais me casser les pattes ou non. Et même si c'est haut, ça n'en devient pas dangereux. T'façon qu'est-ce que je m'en fous ! Alors je passe le reste de mon corps en essayant de prendre de l'impulsion sur mes pattes arrières, et je sens le bois s’effiler contre mon pelage ras. J'ai beau atterrir sans réelles difficultés, je suis maintenant fourré d'échardes et un tour chez le guérisseur va s'imposer ! Je jette un œil à l'ouverture, qui s'est bien agrandie avec mon passage.

- Eh c'est bon, y'a rien à craindre ! Indiquai-je à mon « ami », pour me détourner et regarder de quel côté on était arrivé.

En y repensant, c'est vraiment trop cool de visiter les nids de bipèdes. J'aurais aimé faire ça plus souvent, à mes heures perdues, mais ce n'était pas très loyal... Le clan pensera sûrement que je les trahis pour la mauvaise bouffe des chats domestiques. C'est sûr que ça serait mon genre... En attendant que mon camarade saute à son tour, je réfléchis à ce qu'on pourrait bien faire ensuite. Les épines attendront.

Une idée géniale me vint alors : et si je le mettais à l'épreuve ? Une sorte de compétition, comme autrefois, avec mes sœurs. Même s'il était guerrier et pas moi, je savais que mon baptême n'allait pas trop tarder, et puis ce serait une bonne occasion de se tester entre « rivaux » . Il ne partirait pas de sitôt, n'est-ce pas ? Amusé, j'attendis que le guerrier me rejoigne, et une fois assuré qu'il n'avait pas eu de problème lui non-plus, je lui lançai, d'une voix enjouée :

- Je te propose de m'affronter... Que dirais tu d'un concours, histoire de savoir qui est le meilleur, uh ? En trois manches : la chasse, la rapidité, et l'escalade. Alors ?

Je n'étais pas bien sûr de mon idée, puisque je n'étais pas vraiment doué à l'escalade. Enfin, je n'avais que rarement essayé sur des petits arbres. Mais j'étais là pour m'amuser, alors j'affichais mon ton joueur mais hautain à la fois. Alors, qu'en dis-tu, poisseux ? ♪

S'il y a bien un inconvénient à être bâti comme Renard Rusé, c'est qu'il est bien difficile de se faufiler de partout. Généralement, nous disons que "quand la tête passe, le reste aussi" mais ce n'est pas toujours vrai. Il faut se tortiller comme un ver et allonger son corps au maximum pour valider cet adage. Or dans certaines situations, comme celle-ci, c'est impossible. C'est le vide qui l'attend en contrebas et bien que ça ne soit pas si haut que ça, une mauvaise chute peut tourner au cauchemar. Si Renard Rusé veut être certain de passer, il faut agrandir ce trou. Le bois étant vieux et fin, ça ne devrait pas être bien difficile. D'ailleurs, le seul passage de Nuage de Pin suffit à élargir l'ouverture. Quelques petits coups de griffes supplémentaires devraient lui garantir le passage. Néanmoins, il jette d'abord un regard en contrebas. Le matou noir et blanc semble avoir atterri sain et sauf. Renard Rusé n'a plus qu'à le rejoindre.

Quelques légers coups de patte suffisent à agrandir un peu plus le trou, permettant au rouquin de passer ses épaules sans mal. Si les bords de l'issue lui griffent les flancs et le dos, le jeune guerrier ignore la douleur avant de bondir de toute ses forces, comptant sur sa queue pour gérer son équilibre et le faire atterrir sur ses pattes. Ces dernières rencontrèrent la terre ferme un peu brutalement mais le rouquin est indemne - si on omet les quelques échardes prit dans ses poils. Nuage de Pin ne semble d'ailleurs pas mieux loti. Renard Rusé prend néanmoins le temps de s'ébrouer, se débarrassant de quelques épines histoire de se donner meilleure allure. Cependant, ni Nuage de Pin ni lui ne semblent bien vaillants, les échardes prises dans leurs pelages leur donnant de faux airs de hérissons. Une bonne toilette s'impose, c'est certain. Pourtant Nuage de Pin semble avoir une meilleure idée en tête :

Je te propose de m'affronter... Que dirais tu d'un concours, histoire de savoir qui est le meilleur, uh ? En trois manches : la chasse, la rapidité, et l'escalade. Alors ?

Renard Rusé semble hésiter. Il ne brille dans aucune de ces disciplines. Son corps large est plus lourd que la plupart des autres chats de la forêt, ne faisant pas de lui un chat rapide et encore moins vraiment habile. Quant à la chasse … il est bien meilleur pêcheur, mais il n'y a aucun point d'eau dans les environs pour mettre ce talent en pratique. Cependant, il ne veut pas que Nuage de Pin pense qu'il se dégonfle devant un apprenti ! Qui sait, le Clan des Étoiles sera peut-être de son côté. Et son adversaire aussi maladroit que lui … même s'il a un peu de mal à y croire.

Pourquoi pas. Rien de tout cela n'est une spécialité du Clan de la Rivière mais je ne perds rien à essayer, pas vrai ?

Au pire, le matou de l'Ombre s'amusera à le charrier. Mais oeil pour oeil, dent pour dent et Renard Rusé ne se laissera pas faire sans réagir. Même s'ils ne sont pas ennemis en ces territoires neutres, Nuage de Pin demeure un rival. Et le rouquin n'ignore jamais les défis qu'on lui lance : c'est sa façon à lui de prouver - et de se prouver - ce qu'il vaut. Même si, généralement, ce genre de chose est à double-tranchant.

Commençons par la chasse alors. À celui qui ramène la plus grosse proie ? Ou le plus rapide ?

Le verger regorgeant de souris, ça ne devrait pas être bien dur. Reste à ne pas être trop sûr de soi.

Le guerrier finalement, sembla hésiter. Il a peur de quelque chose, comme par exemple... l'échec ? C'est vrai que les Riviereux pêchaient plus qu'ils ne chassaient, d'après les dires, mais roh... ça ne leur fera pas de mal de s'entraîner ~ Enfin, hors de question de lui montrer des techniques de mon clan, à la chasse comme à l'escalade, qu'il se débrouille avec les siennes ! Je ne veux pas avoir d'ennuis quels qu'ils soient, les rumeurs se propagent vite, et si on apprenait ça, j'suis mal. Et pourtant, le rouquin ne se dégonfla pas, puisqu'il finit par accepter :

- Pourquoi pas. Rien de tout cela n'est une spécialité du Clan de la Rivière mais je ne perds rien à essayer, pas vrai ?

Peut être parce qu'il pensait qu'on s'entraînait beaucoup à grimper aux arbres par chez nous ? Non, nous sommes loin d'être les écureuils arrogants du Tonnerre, mais on se débrouille. Alors qu'il en fasse de même... Et puis, j'aurais honte à sa place si je refusais les défis d'un apprenti !

- Ouais, p'têtre, mais y'a pas de point d'eau par ici. Et puis... c'est juste pour s'amuser donc au pire, ça changera rien. Enfin, sauf si je gagne et là tu vas m'entendre... ~ Rajoutai-je, plus bas. Le guerrier déclara à son tour : - Commençons par la chasse alors. À celui qui ramène la plus grosse proie ? Ou le plus rapide ? Je réfléchis, pas bien longtemps puisque la réponse me parut évidente : - La plus grosse proie. On f'ra l'épreuve de rapidité juste après. Bonne chance ! Lançai-je, en me détournant, pour partir dans un coin un peu plus reculé, où il y avait de quoi se cacher, ne serait-ce que quelques hautes herbes.

Une fois un peu plus avancé dans la végétation, je me servis de mon nez pour essayer de dénicher une quelconque proie. Le lieu grouillait de rongeur en tous genres, d'après sa réputation, et c'est ce qu'il sembla se confirmer puisqu'un fumet de souris si facile à reconnaître me parvint. Je suivis simplement sa piste pour qu'entre deux herbes d'une hauteur moyenne m’apparaisse une souris bien dodue, de quoi satisfaire le clan à mon retour. Malheureusement, le vent ne m'était pas très favorable. Un léger courant d'air vint derrière moi, alors je n'eus pas le temps de réfléchir, étant obligé de m'élancer aussitôt si je voulais avoir mes chances. Un bond et... la souris me vit venir, et elle disparut alors, filant avec ses petites pattes. Pensant encore pouvoir me ressaisir, j'essayai de la rattraper dans un second saut, mais trop rapide elle s'en alla pour de bon. Peste ! , pensai-je, honteux d'avoir rater une proie si délicieuse et facile à attraper d'habitude. Peut-être que, plus vif et plus reposé, j'aurais pu l'avoir...

Je traînais donc mes lourdes pattes jusqu'au lieu de rendez-vous avec le guerrier, enfin je présumai qu'on se retrouverait là puisqu'on s'y était quitté. Ce n'était pas bien loin, et j'étais le premier à arriver, pas bien étonnant vu le temps qu'il m'a fallu pour faire fuir le gibier convoité. Mes oreilles me brûlaient de honte, mais il me fallait me reprendre. J'espérais que le riviereux, dans un environnement différent échouerait, lui. Quel genre d'ombreux suis-je, moi, pour le laisser m'humilier ? Il fallait me reprendre, ce qui motivait à me dépasser pour l'étape suivante. J'étais plus fin et donc plus léger que lui, alors j'avais un avantage. Il ne me restait plus qu'à en user... Pas comme cette fois.

Plus loin, je vis que le guerrier revenait à son tour. Avec quelque chose dans la gueule, ou pas, je ne voulais pas le voir. Je détournais le regard, et murmurai, à son arrivée :

- Ce n'est pas bien compliqué de trouver plus gros, hein ?

Soyons d'accord d'entrée de jeu, Renard Rusé ne compte pas perdre contre un apprenti. Certes, ils ont sensiblement le même âge – une histoire de deux lunes d'écart, tout au plus – mais le jeune guerrier a une certaine fierté. Quoi qu'on en dise, il a un égo à contenter et il risque de tomber de haut si un chat plus jeune que lui lui met la pâtée. Alors le rouquin est prêt à donner le meilleur de lui-même. Nuage de Pin a beau considéré tout cela comme un jeu, Renard Rusé sait pertinemment qu'il va prendre leur petit concours au sérieux, et ce sera de même pour lui. Ils n'ont rien à gagner, mais un égo à perdre, c'est une certitude. En tout cas, ce n'est pas là une raison pour se défiler. Ce n'est pas comme s'ils avaient à se rendre des comptes. Ils appartiennent, certes, à des Clans rivaux mais à l'instant T, dans le verger, ils ne sont que deux chats bien loin de leurs territoires et de leurs règles. Alors autant laisser s'effondrer quelques barrières et profiter du moment présent. D'autant plus que le rouquin commence à avoir un petit creux. Une occasion rêvée pour chasser.

Les deux matous se séparent finalement afin de débuter la première épreuve. Le gagnant sera celui qui rapportera la plus grosse proie. Renard Rusé retourne aussitôt aux abords du nid de bipèdes qu'ils ont saccagé, se souvenant de la forte odeur de souris dans les environs. Le museau en l'air, il rempli ses narines de tous les parfums environnants, cherchant à en extraire un seul pour débuter sa traque. C'est alors qu'il reconnaît le fumet particulier d'un corbeau. Il l'aperçoit d'ailleurs rapidement, picorant une pomme tombée au sol, au pied d'un arbre. Voilà un beau morceau ! Ni une ni deux, les conseils de Belle-de-Nuit en tête, le rouquin avance à pas de loup en direction de sa proie, gardant les yeux fixés sur le corbeau. Le vent étant très léger, et dans le bon sens, il ne le trahira pas. Quant à son environnement, il n'y a rien qui puisse vraiment alerter le corbeau. Il lui suffit juste de ne pas marcher sur les fruits éclatés au sol. Lorsque le guerrier est suffisamment proche du corbeau, il bande les muscles et lui bondit sur le dos. Aussitôt, l'oiseau noir commence à se débattre mais le rouquin appuie tout son poids sur ses ailes, l'empêchant de quitter le sol. Ainsi immobilisé, l'animal emplumé rend son dernier soupir après un coup de crocs bien placé dans la nuque.

Fier comme un paon, Renard Rusé attrape son corbeau par une aile et rejoint le point de rendez-vous en le tirant derrière lui. Il aperçoit alors Nuage de Pin et, pendant une demi-seconde, il craint qu'il soit déjà revenu avec une belle pièce de gibier. Néanmoins, force est de constater que le novice n'a pas eu autant de chance que lui.

Ce n'est pas bien compliqué de trouver plus gros, hein ?
En effet, j'aurai pu rapporter un mulot que ça aurait suffit !

Et il remue les moustaches, amusé, en relâchant sa prise entre lui et l'apprenti. Comme quoi, on ne peut pas avoir de la chance à tous les coups. Lui-même n'est pas le meilleur des chasseurs en règle générale, il s'estime donc heureux d'avoir mit la patte sur ce corbeau. Il est tellement dodu qu'il pourrait nourrir au moins deux ou trois chats. Alors que son estomac gronde de nouveau, Renard Rusé s'assoit devant sa proie, le regard rieur.

Je suis bon prince, je veux bien partager avec toi. Enfin … après l'épreuve de vitesse. On risque d'être aussi lents que des escargots si on mange avant !

Un estomac lourd ne permet pas une performance optimale si Nuage de Pin désire faire la course ou quoi que ce soit d'autre. De toute façon, le corbeau ne risque plus de s'envoler ! Si le jeune guerrier le recouvre de quelques feuilles, c'est surtout pour qu'il ne reste pas à vue d'autres oiseaux à tendance cannibales qui prendraient un malin plaisir à picorer dans sa proie. Une fois cela fait, il se tourne de nouveau vers son camarade du jour. Puisqu'il a l'air décidé à diriger les hostilités, le rouquin se demande bien ce qu'il peut avoir en tête concernant cette fameuse « épreuve de vitesse ». Si Renard Rusé s'imagine déjà en ressortir perdant, il s'accorde néanmoins le bénéfice du doute. Après tout, il est parvenu à attraper un corbeau. Ce jour est peut-être chanceux pour lui !

Contrarié de ne pas avoir pu ramener quoi que ce soit, je le suis encore plus en voyant le guerrier revenir avec un énorme corbeau dans la gueule. Et fier de lui, en plus ! Il y avait de quoi en effet, mais ça ne m'amusait pas beaucoup. Pas du tout. Je déteste perdre, c'est une chose, mais que le gagnant me nargue, hors de question de se laisser faire ! Enfin, le gagnant... celui de cette épreuve puisque je serai le prochain ~ Au final, échouer cette fois-ci, ce n'est que me donner plus de motivation pour la prochaine. Oubliant vite ma défaite, le rouquin ne se cache pas de me la rappeler en s’asseyant devant son trophée :

- Je suis bon prince, je veux bien partager avec toi. Enfin … après l'épreuve de vitesse. On risque d'être aussi lents que des escargots si on mange avant !

Hmm ? Alors, on a faim, comme ça ? Le clan de la Rivière ne donne pas à manger à ses guerriers ? Enfin, je ne peux rien dire, je commence à avoir un petit creux moi aussi. Même si j'étais d'accord avec lui, je n'étais pas fan de partager pour autant... Je manque déjà à mes devoirs en venant ici, alors en mangeant sans m'être assuré que les autres le soient déjà, en plus grâce à un guerrier qui est censé être mon « ennemi »... Je crains de ne pas être bien accueilli à mon retour. Je puerai déjà le poisseux, je ne veux pas avoir d'ennuis. Mais on ne peut pas gaspiller une si belle pièce non plus... A contre cœur, puisque je ne devrais normalement pas laisser ça à nos voisins « rivaux », je refuse :

- Je crois qu'il ne vaut mieux pas pour moi. J'ai pas très faim, en plus. Tu penses trouver un moyen de le ramener à ton camp ? Gêné et ne souhaitant attirer les soupçons, je repris aussitôt : - Je vais guetter une piste, bouges pas !

Je me mis aussitôt à la tache mais tout d'abord, je m'assurai que le corbeau de mon camarade était bien en sûreté, qu'on ne nous la vole pas pendant un moment d’inattention. Le guerrier était prévoyant, il avait déjà recouvert sa proie, je me redressai alors, puis observai le terrain. Non-loin, se dressaient deux arbres solitaires alors que les autres étaient parfaitement alignés. A quelques pas, il y avait le nid de bipèdes abandonné, puis encore après, un buisson qui se démarquait clairement des autres, étant le plus touffu du coin. Voilà une piste parfaite pour l'épreuve de vitesse !

- Je pense que ces deux arbres feraient une bonne ligne de départ. On fait le tour du nid, et le buisson là-bas, ce serait l'arrivée.

Je me dirigeai vers les deux arbres en question, ne voyant d'autres parcours appropriés à l'épreuve. C'était juste à côté, donc pas besoin de courir et de se fatiguer pour rien. Il me fallait réussir, pour mon honneur, peu importe si je prenais ça trop à cœur. Ça faisait longtemps que je n'avais pas eu une source de distraction aussi... innocente, je dirais, mais je savais que trop vite j'allais devoir revenir au camp et supporter ce que je n'avais pas envie de supporter. Enfin... Je vins me placer pile entre les deux arbres, observai le parcours, et me motivai une bonne fois pour toute. Je repris, souhaitant mettre au clair les règles, mais surtout pour lancer le départ. Organiser ce genre de chose était plus plaisant que je ne le pensais.

- A trois, on y va. Il me paraît évident qu'il est interdit de tricher ou de bousculer l'autre, mais bon, t'as pas l'air d'être de c'genre. Bonne chance ! Je pris une grande inspiration, et ... Un.... Deux.... Trois !

Je détalai aussitôt, sans regarder derrière moi ni faire attention au guerrier. Je ne me concentrai que sur mes foulées, qui se devaient d'être calculées, et sur mon souffle. La piste n'étant pas bien longue, je me permettais de courir le plus vite possible, jusqu'au nid de bipèdes où il nous fallait tourner autour. Je fis de mon mieux pour ne pas perdre l'équilibre dans le virage, mais vu la vitesse, j'ai une ou deux fois failli m'emmêler les pattes, ce qui me ralentissait un peu plus. Il ne me restait plus que la ligne droite et... Alors que l'arrivée se rapprochait, les épines décidèrent soudainement de se manifester et me firent grimacer. Essayant d'ignorer la douleur, je bondis jusqu'au buisson, essoufflé. Mais les épines comme mon souffle ne m'intéressaient guère maintenant, je regardai plutôt mon adversaire que j'avais ignoré tout le long de la course afin de savoir si j'étais bel et bien arrivé premier.

Pour être tout à fait honnête, pendant un court instant, Renard Rusé a tout simplement oublié qu'il avait affaire à un soi-disant ennemi. Ça lui a paru tout naturel de lui proposer de partager sa proie, comme il l'aurait fait à un camarade. Maintenant, il réalise la bêtise qu'il a failli commettre et se sent bien bête. S'il était revenu au camp en sentant les marais et la viande, ses camarades se seraient posé des questions, et à juste titre. Finalement, ça l'arrange bien que Nuage de Pin décline son offre. Ce corbeau justifiera parfaitement son absence de l'après-midi. Quant à l'odeur de l'apprenti … une petite baignade et le tour sera joué. Le Clan n'y verra que du feu. Et puis, après tout, pour quelle raison se serait-il battu avec Nuage de Pin ? Aucun d'eux n'a tenté de s'infiltrer en terres ennemies. Mais va expliquer cela aux membres du Clan … Pour certains, le simple fait d'échanger des salutations cordiales à la frontière est déjà un acte de traîtrise. Alors s'ils apprenaient que le rouquin avait passé sa journée loin de leur territoire à papoter avec un membre du Clan de l'Ombre, il ne donne pas cher de sa peau ! Mais bon, ce n'est pas comme si Renard Rusé n'avait qu'un tour dans son sac. On ne lui a pas donné ce nom pour rien, après tout.

Enfin, revenons à la suite des épreuves, celle de vitesse plus précisément. Renard Rusé sait parfaitement que ce n'est pas là son domaine de prédilection. Il n'est pas bâti pour la vitesse, un simple coup d'oeil à sa large charpente suffit à s'en rendre compte. Mais ce n'est pas une raison pour se défiler. Après tout, il a brillé à l'épreuve de chasse alors même si Nuage de Pin remporte ce duel, tout ne sera pas perdu pour lui. L'apprenti a d'ailleurs repéré la piste idéale et le rouquin valide sa proposition d'un hochement de la tête. Ils rejoignent donc la ligne de départ avec une certaine impatience et Renard Rusé prend le temps de bien analyser le terrain du regard, repérant ce qui pourrait le gêner. Son principal souci sera de faire le tour du nid de bipèdes rapidement mais sans s'emmêler les pattes, ce qui risque d'être compliqué. Mais ça ne le démotive pas pour autant ! Au contraire, il a bien hâte de commencer.

Nuage de Pin se charge du décompte et à la fin de ce dernier, les deux matous filent comme des flèches. L'apprenti prend une légère avance mais le guerrier le talonne de près. S'il tente d'organiser ses foulées, tous ses efforts partent en fumée au premier virage. Ses pattes partent dans tous les sens et c'est une miracle s'il parvient à rester debout. Néanmoins, la crainte d'une chute le force à ralentir, voire même à s'arrêter quelques secondes pour se redresser. Il a beau donner tout ce qu'il a dans la ligne droite, Nuage de Pin atteint le gros buisson touffu avant lui. C'est le souffle court et le cœur dansant un tango endiablé dans sa poitrine que le guerrier s'arrête devant son cadet, sentant son pouls battre furieusement dans ses oreilles.

Bien joué ! J'ai bien cru que je finirai les quatre pattes en l'air dans les virages. Je ne suis vraiment pas fait pour la course.

Le rouquin s'assoit lourdement, respirant profondément pour calmer son rythme cardiaque. Nuage de Pin a également l'air en nage, les deux matous ont tout donné dans cette course ! Il y a encore l'épreuve d'escalade mais, avant ça, un petit instant de répit ne serait pas de refus. Cela n'empêche néanmoins pas Renard Rusé d'observer les alentours afin de repérer les arbres parfaits pour la dernière épreuve. Et les deux choisis pour former la ligne de départ pour leur course lui paraissent parfaitement adaptés ! De la même hauteur et de la même variété, afin que personne n'ait un avantage sur l'autre. Même si Renard Rusé doute sincèrement être un bon grimpeur - il n'y a pas suffisamment d'arbres sur le territoire du Clan de la Rivière pour qu'apprendre l'escalade leur soit vraiment nécessaire.

Retournons aux deux arbres là-bas pour l'escalade ! Afin, après une petite pause si tu n'y vois pas d'inconvénients.