À la chasse aux grenouilles sous la pluie ! | Feat Nuage Embrasé - abandon

Ce matin, il fait moche. Très moche. Après tous les jours beaux et chauds d'avant, il s'est mis à pleuvoir. Beaucoup pleuvoir. Tellement que, là, tout de suite, je n'ai vraiment pas envie de sortir de la tanière des apprentis. Déjà, je déteste la sensation de l'eau dans mes poils, c'est horrible. Ensuite, que ce soit l'entraînement ou la chasse, ça va pas être de la tarte. Le terrain va être glissant, toutes les odeurs et les sons vont être brouillés, on va voir que dalle avec l'eau dans les yeux...

- Nuage de Ronce ! Prends un apprenti avec toi et allez chasser ! Il n'y a plus de gibier ! crie une voix dont le propriétaire m'est inconnu à travers la pluie.

Oh non... Et forcément, il n'y a plus que moi, donc je ne peux pas refuser... Les autres ont sûrement déjà été embauchés de force pour exécuter sous la pluie toutes les corvées que les guerriers n'ont pas envie de faire... Sauf qu'apparemment, il faut que je prenne quelqu'un avec moi. Mais... il n'y a personne ! En désespoir de cause, je me retourne, depuis l'entrée d'où je regardais à travers la pluie, et vois... Nuage Embrasé. Il est tout seul, au fond.

''Oh, par le Clan des Étoiles...''

Je me souviens encore de notre première vraie rencontre, même si j'ai essayé de toutes mes forces de l'oublier... Parce que je perds tous mes moyens quand je revois son regard et que je repense à...

Je secoue la tête à la décrocher, le cœur battant. Non non non ! On ne pense pas à ça ! Sinon je vais finir par me transformer en souris sans cervelle ! Bon... Il faut aller lui demander de venir. Je ne vais pas chasser toute seule sous la pluie !

Je m'approche, les pattes un peu tremblantes, et miaule :

- Hm, salut... Tu as bien dormi ? Dis, on veut que j'aille chasser avec quelqu'un... Tu veux bien venir avec moi ?

J'ajoute très très vite, je ne veux pas l'obliger :

- Euh, euh, si tu ne veux pas, c'est pas grave ! Je peux y aller seule, hein, ne te forces pas avec ce temps !

Oh la la, je crois que je l'ai réveillé ! J'avais baissé les yeux, mais je les relève quand même, pour voir s'il est n'est pas trop dérangé. Je retiens mon souffle sans m'en rendre compte : il a l'air tellement innocent ! Je m'approche, sans trop savoir pourquoi... Et il ouvre les yeux ! Je me redresse brusquement, le cœur battant, et je me cogne à la voûte, plus basse ici.

- Ouille ! laissé-je involontairement échapper en mettant ma patte sur ma tête pour calmer la douleur qui a fusé dans mon crâne.

Ce qui en fait aggrave les choses. Une apprentie du Vent ne m'a pas ratée et j'ai une belle balafre à la patte avant droite, pas encore cicatrisée et bien douloureuse. Chaque fois que je dois me déplacer, elle me fait souffrir. Mais le guérisseur a dit que je pouvais continuer la chasse, même si je dois quand même y aller doucement et ne pas m'entraîner. Du coup, à défaut de pouvoir bouger la patte le temps que la douleur s'estompe, je la laisse sur ma tête.

Je me confonds en excuses, puis arrête avant d'avoir l'air plus ridicule, pendant qu'il me sourit - sûrement qu'il se moque de moi ! - puis hoche la tête et émet un semblant de bâillement un peu sinistre. Je ne peux pas m'empêcher de suivre des yeux la ligne de sa mâchoire, puis d'admirer sa fourrure couleur flamme et ses mouvements puissants et pourtant gracieux pendant qu'il s'étire, et... Je m'arrête illico et me plonge dans la comtemplation assidue de mes pattes, avant de me mettre à baver, très lamentablement.

Tout à coup, il se lève et me rejoins. Puis il me dépasse, et caresse ma joue du bout de la queue. À ce geste, je repense à notre baiser échangé dans la tanière du guérisseur, ce que je m'étais gardé de faire parce que sinon je perds le fil de tout ce que je fais. J'ai envie de m'enterrer, je ne sais même pas ce que ça veut dire ! Qu'on... S'aime ? À cette pensée, je sens ma tête tourner, et je la secoue pour en chasser l'idée. Si je continue comme ça, je ne pourrai même plus chasser ! Je m'efforce de redevenir sérieuse, puis repose précautionneusement ma patte par terre et le rejoins à l'entrée, hésitant à mettre une patte dehors sous cette pluie.

- On va où ? demande soudain Nuage Embrasé.

Je suis près de lui et nos fourrures se touchent presque, ce qui suffit à me faire tourner la tête. Je répond quand même, en essayant de ne pas laisser ma voix trembler :

- Je ne sais pas... Avec ce temps, il vaut mieux éviter les marais, et la clairière des passiflores va sûrement être inondée... On oublie le charnier, hein, donc ça nous laisse le cèdre calciné... Mais c'est assez loin, alors je pense qu'il vaudrait mieux faire l'aller-retour et chasser en chemin, non ?